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Chambres des représentants de Belgique
Séance du lundi 14 novembre 1853

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1853-1854)

(Présidence de M. Delfosse.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 13) M. Dumon procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.

M. Maertens lit le procès-verbal de la séance de vendredi dernier ; la rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. Dumon présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la chambre.

« Le sieur Delcuze, parmacien à Laroche, demande une loi qui interdise aux médecins de fournir des médicaments. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Hutereau, officier pensionné, demande à jouir du cinquième en sus de la pension attachée à son dernier grade. »

- Même disposition.


« Le sieur Deschryver, sous-lieutenant des douanes pensionné, demande que les douaniers, organisés en compagnies par le directeur des contributions de la Flandre occidentale, qui ont fait volontairement la campagne de 1831, soient considérés, pour la liquidation de leur pension, comme s'ils avaient été organisés par les ordres du ministre des finances. »

- Même disposition.


« Le sieur Dejosez, sous-lieutenant des douanes pensionné, demande que la campagne de 1831 qu'il a faite volontairement, lui compte dans la liquidation de sa pension. »

- Même disposition.


« Le sieur Denis, soldat au 2ème régiment de chasseurs à pied, réclame l'intervention de la chambre pour que le département de la guerre donne suite à sa demande tendant à être traduit devant un conseil de guerre. »

- Même disposition.


« Le bourgmestre, des conseillers communaux, des industriels et autres habitants de Sleenkerque, demandent que la ligne de fer partant de Braine pour aboutir à Enghien, soit construite suivant la tracé proposé par l'ingénieur Tarte. »

- Même disposition.


« Le sieur Hendrix, brigadier commandant la gendarmerie nationale à Hechtel, prie la chambre de statuer sur sa demande de naturalisation. »

- Renvoi à la commission des naturalisations.


« Le sieur de Blende, ancien commis surnuméraire à la maison de force à Gand, prie la chambre de lui faire obtenir la gratification pour laquelle il a été proposé en 1848. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Pasque demande que la pension des blessés de septembre, décorés de la croix de Fer, soit portée à 250 fr., et celle de leurs veuves à 200 fr. ; et fait hommage à la chambre de 30 exemplaires du discours qu'il a prononcé à Liège le 30 septembre 1853. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le budget de l'intérieur et dépôt du discours à la bibliothèque.

« Plusieurs négociants à Gand demandent la libre entrée du bétail et du riz. »

M. Rodenbach. - J'ai appuyé, il y a quelques jours, une pétition sur les denrées alimentaires, qui nous a été adressée par quelques notables négociants de Gand. On vient de nous faire l'analyse d'une autre requête de la même ville, demandant la libre entrée du bétail. Je suis encore une fois de l'opinion des pétitionnaires. Voici mes motifs : la Belgique est un des pays où l'on consomme le moins de viande, parce qu'elle est excessivement chère ; les 7/8 de la population sont, par misère et par besoin, légumistes, et si j'en dois croire certains statisticiens, c'est dans notre royaume que l'on consomme le moins de viande. La moyenne ne serait, en Belgique, que 10 kil. par année. La France en consommerait 20 kil., l'Angleterre 67 kil., l'Amérique 120 kil.

Je me bornerai à ce peu de mots et je demande que cette pétition soit envoyée à la section centrale, chargée du projet de loi sur les denrées alimentaires, afin qu'elle nous fasse des propositions dans le sens des pétitionnaires de Gand, qui demandent, je le répète, la libre entrée du bétail à l'instar de la France, qui n'a eu qu'à se louer de la mesure qu'elle a prise.

- Renvoi à la section centrale qui sera chargée d'examiner le projet de loi sur les denrées alimentaires est ordonné.


« M. Alex. Rodenbach fait hommage à la chambre d'un exemplaire de son ouvrage : les Aveugles et les Sourds-Muets. »

- Dépôt à la bibliothèque.


« Les sieurs Palmers, Vander Voort, Quartier et Pietersz, membres de la commission administrative du comité central flamand, adressent à la chambre 110 exemplaires des considérations soumises par cette commission au conseil provincial du Brabant, à propos de la réunion projetée des faubourgs à la capitale. »

- Distribution aux membres de la chambre et dépôt à la bibliothèque.


« M. Ch. de Chênedollé fait hommage à la chambre de deux brochures dont il est l'auteur, intitulées, l'une les Rues de Bruxelles, l'autre : Simples conseils aux ouvriers. »

- Dépôt à la bibliothèque.


Rapport sur la reprise par l’Etat de certaines voies navigables

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau, en suite d'une résolution prise par la chambre, le rapport sur la reprise de certaines voies navigables.

- Le rapport sera imprimé et distribué.

Le renvoi de ce rapport à la section centrale du budget du département des travaux publics est également ordonné.


M. le ministre des finances (M. Liedts). - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau la situation générale du trésor public au 1er septembre dernier.

- Ce rapport sera imprimé et distribué.

Projets de loi de naturalisation

M. de Perceval. - Messieurs, j'ai l’honneur de déposer sur le bureau, au nom de la commission de naturalisations, un projet de loi tendant à conférer la naturalisation ordinaire à plusieurs intéressés dont les demandes ont été prises en considération par la législature à la fin de la dernière session.

-Ce projet de loi sera imprimé et distribué.

La chambre le met à la suite de l'ordre du jour.

Projet d’adresse

Discussion générale

La discussion générale est ouverte.

M. Verhaegen. - Je ne veux pas ouvrir une discussion sur le projet d'adresse, puisque l'on paraît décidé à renvoyer à d'autres temps l'examen des questions qui pourraient être soulevées à cette occasion. Cependant, pour mon compte, je ne voudrais pas que mon silence pût être considéré comme une approbation même implicite de certains faits directs ou indirects dont la presse s'est naguère occupée, et par suite je me crois obligé de faire à cet égard quelques interpellations au gouvernement.

J'ai lu avec satisfaction dans le discours du Trône que l'enseignement public à tous ses degrés prospère, que les établissements du gouvernement, grâce à la confiance que lui accordent les pères de famille, se peuplent de jour en jour davantage. Je voudrais savoir de M. le ministre de l'intérieur où en est l'instruction religieuse dans les établissements publics ? Si cette affaire n'est pas portée à fin, si M. le ministre de l'intérieur traite encore en ce moment, nous osons espérer que, conformément à sa déclaration très explicite de l'année dernière, il ne se départira en aucun point des principes que la chambre a adoptés dans la loi d'enseignement moyen. Nous pourrons, d'ailleurs, nous occuper d'une manière complète de cet objet, lors de la discussion du budget de l'intérieur.

On nous a parlé, dans le projet d'adresse, de nos relations internationales. Nous voudrions savoir, si M. le ministre des affaires étrangères n'y voit pas d'inconvénient, nous voudrions savoir, dis-je, si nos efforts pour traiter avec le Zollverein ont abouti, si nos négociations avec la France ont repris quelque activité.

M. le ministre voudra bien à cet égard nous donner les explications que sa position lui permettra de nous donner. La discussion d'ailleurs pourra s'ouvrir sur ce point lorsque nous nous occuperons du budget des affaires étrangères.

A M. le ministre de la justice nous désirons demander où en est son projet de loi sur la charité et les fondations, si ce projet sera bientôt présenté à la chambre. D'après la réponse qu'on donnera à cette question, nous verrons ce qu'il y aura à faire lors de la discussion du budget de la justice.

Je me borne donc à faire pour le moment aux trois ministres de l'intérieur, des affaires étrangères et de la justice, les interpellations que je viens de formuler, répétant toutes les réserves que j'ai faites précédemment et renouvelant l'espoir que les membres du cabinet ne se départiront en aucun point des principes qui ont servi de base à leurs déclarations de l'année dernière.

M. Orts, rapporteur. - Messieurs, l'honorable préopinant vient de faire allusion au silence du projet d'adresse qui est actuellement soumis aux délibérations de la chambre ; l'honorable membre aurait voulu des explications sur quelques points qu'il vient d'indiquer.

Le projet d'adresse, messieurs, n'est pas, de la part de la chambre, un acte qui a pour objet de donner des explications à ceux de ses membres qui en désirent ; c'est au ministère, c'est au gouvernement à répondre aux interpellations.

L'honorable membre a, du reste, compris d'avance la raison du silence qu'il vous a signalé.

La commission d'adresse a pensé que pour certaines questions qui doivent aboutir à une solution, le véritable terrain de la discussion, c'est la loi, c'est le budget auquel ces questions se rattachent et non pas une discussion d'adresse où l'on ne peut que parler sans conclure.

L'adresse et sa discussion n'admettent qu'une conclusion possible : accorder ou refuser le concours que le gouvernement demande aux (page 14) chambres. En dehors de cette question, aucune solution pratique ne peut sortir des débats.

Les explications à l'égard desquelles on aurait voulu quelque chose de plus dans le projet d'adresse, portent, d'après l'honorable membre, sur nos négociations commerciales avec les puissances étrangères, d'abord. C'est là évidemment l'objet d'interpellations à adresser à M. le ministre des affaires étrangères pendant la discussion et qu'il appartient à chaque membre de produire. La commission d'adresse ne pouvait faire autre chose que ce qu'elle a fait : elle n'entend enchaîner l'initiative de personne.

Quant aux explications demandées à M. le ministre de l'intérieur concernant les relations de l'Etat avec les chefs des différents cultes pour assurer la complète exécution de la loi sur l'enseignement moyen, c'est une question qui encore une fois se rattache directement à la discussion du budget de l'intérieur, et ne peut trouver de solution ailleurs. Or, ce budget est en section centrale.

Il a semblé plus utile, plus simple, il a paru un exellent moyen d'épargner les moments de la chambre, de réserver cette question pour le moment très prochain où ce budget sera soumis aux délibérations de la chambre.

Le budget de la justice appellera, dit-on, aussi des explications qu'on regrette de ne pas avoir reçues dès à présent ; elles ont trait au projet de loi sur la charité ou plutôt sur les fondations et l'administration des établissements de charité. Mais le projet d'adresse fait, sons ce rapport, tout ce qu'il était possible de faire ; il prend acte de la déclaration du gouvernement que ce projet sera soumis à nos délibérations et témoigne, de plus, le désir que ce projet lui soit soumis dans la session actuelle.

Il me paraît qu'il était impossible de faire plus pour satisfaire, autant qu'il était en notre pouvoir de le faire, aux explications que vient de demander l'honorable préopinanl.

M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Messieurs, le discours du Trône s'explique, je pense, dans des termes convenables sur toutes les branches de l'administration publique. Mais il reste libre à chacun des membres de la législature, de demander au gouvernement des explications particulières qui ne peuvent pas trouver place dans un pareil discours. Pour ma part, je vais répondre aux interpellations qu'a faites l'honorable M. Vcrhaegen, et qui concernent mon département.

Il désire savoir où en sont nos négociations commerciales.

Les négociations commerciales avec la France n'ont jamais été interrompues, en ce sens que jamais aucun acte n'a été posé par l'une des parties faisant connaître l'intention de ne les pas continuer. Mais il est très vrai que dans les premiers mois de cette année les négociations ont marché avec lenteur, d'abord par suite des circonstances politiques qui ont absorbé exclusivement l'attention des grandes puissances, circonstances que vous connaissez aussi bien que moi ; en second lieu, par suite des nombreuses mutations qui ont eu lieu dans le personnel de la légation française à Bruxelles. J'ai eu, messieurs, dans l'espace de quelques mois, à changer cinq fois de négociateur ; vous devez comprendre que cela ne fait guère avancer les affaires.

Depuis quelque temps, au contraire, les négociations marchent avec une très grande activité, et pour vous en donner la preuve, je vous ferai connaître la date des dernières notes qui ont été échangées. La dernière note du gouvernement belge date du 5 de ce mois et répond à une note qui lui avait été remise le 4 ; j'ajouterai que la dernière note, que j'ai remise au gouvernement français, contient des propositions complètes. Les deux notes précédentes étaient celle du gouvernement français, du 29 septembre, et celle du gouvernement belge, du 18 octobre, et si la note du gouvernement belge s'est fait, ici, attendre environ trois semaines, c'est que l'arrivée d'un nouveau ministre de France était annoncée comme très prochaine.

Voilà donc, messieurs, la marche que suivent les négociations commerciales avec la France. Quant à ce qui concerne le Zollverein, la chambre sait qu'il s'est, depuis peu de temps, reconstitué sur de nouvelles bases et, en se reconstituant, il a décidé qu'il arrêterait un nouveau tarif. Aussi longtemps que ce tarif n'était point formulé, nous manquions de base pour négocier. Cela n'empêche pas, cependant, que des explications ont été et données et réclamées sur ce qui se faisait et sur ce qui allait se faire ; mais, enfin, une négociation formelle, positive ne pouvait point s'entamer. Le tarif du Zollverein date de quelques jours et, à l'heure qu'il est, nos ministres en Allemagne ont reçu les instructions les plus complètes à l'effet de poursuivre les négociations.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Messieurs, l'honorable auteur des interpellations qui viennent d'être faites au gouvernement, a désiré savoir où en étaient les négociations ouvertes avec le clergé sur la question de l’enseignement moyen. Je m'empresse de déférer autant que cela est possible aujourd'hui, au désir exprimé par l'honorable membre, et d'informer la chambre que, conformément aux engagements pris à cet égard par le gouvernement, dans la dernière session, les négociations avec le clergé ont été reprises ; mais ces négociations ne sont pas encore arrivées à leur terme. Dans le cours de ces négociations il s'est produit un incident que l'on est convenu d'appeler le règlement d'Anvers. Cet incident ou plutôt ce projet de règlement est lui-même, en ce moment, l'objet d'un examen attentif de la part du gouvernement ; et j’ai lieu de croire que d'ici à l'époque de la discussion du budget de l'intérieur, je serai en mesure de m'expliquer d'une manière plus complète, aussi bien sur les bases d'un arrangement général proposé au clergé, que sur le règlement d'Anvers. Je prie donc la chambre de vouloir bien me permettre de différer jusqu'à l'époque de la discussion de mon budget, les explications que je lui dois sur ce point.

J'ajoute un mot, messieurs, pour répondre aux recommandations, faites par l'honorable auteur des interpellations ; c'est que, soit dans les négociations générales, soit dans l'examen du règlement d'Anvers, le gouvernement ne se départira en aucune façon des principes qu'il doit être le premier à faire respecter, des principes constitutionnels, et des principes de la loi organique de l’enseignement moyen.

M. le ministre de la justice (M. Faider). - Messieurs, le discours du trône explique la situation réelle des différents projets de loi dont le gouvernement s'occupe et particulièrement de ceux dont le département de la justice a à soigner l'élaboration et l'achèvement. S'il a été déclaré que le projet de loi relatif aux fondations et administrations de bienfaisance s'achève, c'est qu'en effet nous y mettons la dernière main. Je crois pouvoir déclarer à la chambre que l'année courante ne se passera pas sans qu'elle soit saisie des dispositions que le gouvernement arrêtera sur cette matière : ces dispositions pourront, je l'espère, être approuvées par ceux qui désirent que la charité publique et la charité officielle soient réglées aussi bien que les fondations.

Je pense que ces explications satisferont la chambre. Je suis d'autant plus heureux de les donner, que l'on a cru trouver dans la phrase du discours du Trône relative à cet objet, une pensée d'ajournement qui n'existe pas, et que ces explications ne pourraient pas être données utilement lors de la discussion du budget de la justice, puisque ce budget pour 1854 est voté et que celui de l'exercice 1855 ne sera présenté que plus tard à vos délibérations.

M. Verhaegen. - Je n'ai pas à insister, pour le moment : les réponses du gouvernement sont telles que je les avais prévues. Elles laissent entier le droit de chacun en confirmant la déclaration très explicite de M. le ministre de l'intérieur qu'il s'en tiendra rigoureusement, dans les négociations avec MM. les évêques, aux principes proclamés par la loi de l'enseignement moyen.

Je n'ai pas voulu ouvrir de discussion, puisqu'on paraissait disposé à renvoyer à chacun des budgets respectifs, les questions qui auraient pu être soulevées.

Je n'avais qu'un seul but, c'était de ne pas garder le silence sur certains points très importants que le discours du Trône et l'adresse laissaient dans l'oubli.

Ainsi que MM. les ministres l'ont reconnu, j'étais parfaitement dans mon droit quand j'ai demandé ces explications ; ces explications ont été données nettement, je m'en contente pour le moment ; et tous nos droits sont, dès lors, réservés.

M. Dumortier. - J'ai remarqué dans le discours du Trône un mot qui me paraît nécessiter quelques explications de la part du cabinet. En parlant de l'événement le plus grave de l'époque actuelle, pour la Belgique, de la crise alimentaire, qui fait naître tant de douleurs dans ce pays, le discours du Trône qualifie cette calamité de l'adjectif « passagère ». D'ordinaire, messieurs, une calamité passagère est celle dont on a l'espoir de voir immédiatement la fin. Je demanderai au gouvernement s'il a des motifs de croire que le prix élevé des céréales sera bientôt remplacé par un meilleur état de choses pour la classe ouvrière. En d'autres termes, je désire savoir ce qu'il entend par ce mot « passagère ». Je me réserve, au surplus, si les explications qui me seront données ne me se satisfont pas, je me réserve, dis-je, d'entrer dans de plus longs détails sur cette grave question.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Messieurs, je pense que l'exposé des motifs du projet de loi que j'ai eu l'honneur de déposer, il y a deux jours, aurait pu suffire en grande partie pour répondre à l'interpellation qui vient d'être faite par l'honorable M. Dumortier. Il demande notamment le sens que le gouvernement attache à ces mots : « crise passagère ». Cela signifie pour le gouvernement, comme pour vous, sans doute, que cette crise ne sera pas d'une durée trop longue, que du moins nous avons l'espérance d'en voir diminuer bientôt la gravité.

Je ne puis pas, pour le moment, donner des explications détaillées sur les motifs qui font espérer au gouvernement que la crise ne se prolongera pas trop longtemps, parce que ces considérations trouveront leur place naturelle dans la discussion du projet de loi qui vous a été soumis. Je suppose que l'honorable membre jugera avec nous qu'il est opportun d'ajourner jusque-là toute explication.

M. Dumortier. - Messieurs, je regrette de n'avoir pas reçu de M. le ministre de l'intérieur une explication catégorique sur l'interprétation à donner au mot « passagère ».

Le gouvernement a-t-il l'espoir que dans peu de semaines... (Interruption.)

M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Je demande la parole.

M. Dumortier. - Ainsi, dans l'acception du gouvernement, les mots sur lesquels j'ai demandé une explication aux ministres signifient que la crise alimentaire ne cessera qu'à l'époque où se fera la récolte du grain qu'on sème en ce moment. (Interruption de M. le ministre des affaires étrangères.) Oh ! j'ai remarqué la vivacité avec laquelle vous avez demandé la parole ; si vous avez des devoirs à remplir comme membre du gouvernement, nous avons, nous députés de la nation, des devoirs à remplir lorsque le gouvernement s'aveugle sur une situation si grave.

(page 15) Je sais fort bien qu'il est très facile, dans une pareille situation, de venir nous accuser d'imprudence. Mais je vous le demande, messieurs, peut-on accuser d'imprudence les sentinelles qui, placés au front de baudière, crient dans un moment de danger, à ceux qui sont derrière eux : Garde à vous ! Or, notre devoir à nous est de dire aux ministres : Garde à vous ! Quand on voit le gouvernement, pour porter remède à un mal si grave, se borner à faire des circulaires, quand nous n'avons pas d'approvisionnements assurés, quand les céréales ne sont pas même prohibées à la sortie... (Interruption.)

Les opinions sont libres, je pense ; prouvez-moi que je suis dans le tort, je vous écouterai avec plaisir ; mais ayez au moins la tolérance de me laisser justifier mon opinion dans des matières qui touchent de si près au plus grand de tous les maux, à la famine publique.

Mon opinion est que les céréales doivent être prohibées à la sortie ; lorsque le moment de la discussion arrivera, j'établirai cette nécessité d'une manière incontestable, j'établirai que tout ce grand échafaudage d'arrivages dont on nous parle n'équivaut, depuis le 1er août, qu'à dix jours de nourriture pour le pays ; je rétablirai par des chiffres, je suis même prêt à l'établir immédiatement.

Je dis donc qu'il est important pour nous, alors que la chambre aura bientôt à s'occuper de la grave question des denrées alimentaires, à l'occasion du projet de loi qui a été présenté, il y a deux jours ; il est important pour la chambre de savoir ce que le gouvernement entend par ces mois : « crise alimentaire passagère » : car si, dans cette crise passagère, il ne s'agit que d'attendre quelques semaines, alors nous prendrons des mesures en conséquence ; mais si les mots « crise passagère » doivent être entendus comme vos exclamations l'ont fait voir, s'il faut attendre jusqu'à la récolte prochaine dont le grain se sème en ce moment, alors ce n'est pas par de vains palliatifs qu'il faut conjurer les maux qui menacent la patrie, il faut recourir à des moyens énergiques pour empêcher le plus grand de tous les maux, la faim publique.

Messieurs, je n'en dirai pas davantage pour le présent. Nous sommes saisis d'un projet de loi. Lorsque la discussion s'ouvrira, je vous prouverai par des chiffres que nous sommes arrivés aujourd'hui à une situation comparable à celle des années les plus calamiteuses ; je vous montrerai que le mois le plus dangereux à passer est le mois de mai. J'adjure le gouvernement à ne pas se borner à des circulaires, mais à proposer à la chambre des mesures capitales, énergiques, pour empêcher les malheurs de fondre sur le pays à l'époque surtout que je viens d'indiquer.

M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Messieurs, en demandant la parole pour répondre à l'honorable M. Dumortier, je ne pense pas avoir manifesté par là le moindre blâme ni contre l'interpellation qu'il nous a adressée, ni contre l'usage qu'il fait de son droit de parler lui-même quand bon lui semble.

L'honorable M. Dumortier pourrait se plaindre de nous, si nous ne lui répondions pas ; mais alors que nous nous déclarons prèts à répondre à toutes ses interpellations, quelles qu'elles soient, je ne pense pas qu'il ait des raisons de blâmer notre conduite.

Je vais maintenant réduire à leur juste valeur les reproches que l'honorable préopinant adresse d'une manière si inopportune au gouvernement. Selon lui, le gouvernement dort, il ne fait rien ; je me trompe : le gouvernement se borne à faire des circulaires.

Eh bien, je prétends que le gouvernement a fait, pour prévenir les suites fâcheuses de la crise alimentaire, tout ce qu'il était en son pouvoir de faire. Je vais plus loin : je dis que le gouvernement ne devait, ne pouvait pas faire plus qu'il n'a fait. Lorsque nous discuterons le projet de loi qui a été présenté par M. le ministre de l'intérieur, le gouvernement fournira à cet égard les explications les plus satisfaisantes.

Mais l'honorable membre a révélé sa pensée ; ce qu'il nous reproche, c'est de n'avoir pas fait des approvisionnements de grains ; ce qu'il nous reproche surtout, c'est de n'avoir pas prohibé la sortie des grains.

Je suppose que quand le moment en sera venu, l'honorable député démontrera la convenance, la nécessité de ces mesures ; quant à nous, nous n'avons pas cru devoir les prendre, et nous pensons aujourd'hui encore que nous avons très bien fait de ne pas les décréter.

Maintenant, l'honorable M. Dumortier désire des explications sur la qualification de passagère que nous avons donnée à la crise alimentaire. Eh bien, je déclare, quant à moi, que j'espère que la crise, en effet, ne sera que passagère ; les motifs de mon espoir, les voici :

La crise, selon moi, est due bien moins à l'insuffisance de la récolte qu'aux circonstances politiques et aux circonstances commerciales dont nous sommes les témoins.

Ainsi, si l'état de guerre qui existe aujourd'hui, loin de nous à la vérité, mais dans des contrées qui, jusqu'à un certain point, approvisionnent l'Occident de grains ; si l'état de guerre venait à cesser, je suis très persuadé que les arrivages seraient beaucoup plus considérables. D'un autre côté, les moyens de transport manquent aujourd'hui au commerce ; les honorables membres de cette chambre qui s'occupent tous les jours d'affaires commerciales pourront confirmer cette déclaration ; eh bien, si les moyens de transport devenaient plus nombreux et plus faciles, si le fret qui est monté à un prix exorbitant, par suite des circonstances extraordinaires ; si le fret était abaissé, eh bien, oui, je le répète, ma conviction est que la crise diminuerait immédiatement d'intensité ; or je suis très loin de penser que ces circonstances ne peuvent pas se réaliser dans un avenir plus ou moins rapproché. S il en est ainsi, la crise loin d'aller en croissant diminuera dans un bref délai. Vous voyez donc que cette qualification de passagère n'a pas été insérée sans intention, et je crois l'avoir suffisamment justifiée.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Je ne demande la parole que pour ajouter un mol à ce que vient de dire M. le ministre des affaires étrangères ; afin de détruire l'impression fâcheuse que pourraient produire dans le pays les paroles prononcées par l'honorable M. Dumortier, quant à la prétendue insuffisance de nos approvisionnements et aux dangers dont nous serions menacés. Il a été jusqu'à attribuer en très grande partie la continuité et l'intensité de la crise à la législation libérale qui régit les céréales.

Les faits que nous aurons occasion d'exposer répondront victorieusement aux observations critiques dont cette législation a été l'objet. Lorsque la discussion du projet de loi que nous avons eu l'honneur de présenter aura lieu, le gouvernement n'aura pas de peine à établir, non seulement que notre législation ne met pas en danger nos approvisionnements, mais que c'est précisément à cette législation que le pays doit de pouvoir combler le déficit que présente sa production, même dans les circonstances normales ; car il faut qu'on le sache, la Belgique ne produit pas assez de grains pour suffire à ses besoins. La Belgique est, sous ce rapport, dans le cas de beaucoup d'autres pays.

A quels moyens avons-nous recours pour combler le déficit annuel de notre récolte ? Aux arrivages de l'étranger, et par conséquent à la liberté du commerce, qui doit nous les procurer.

Cette liberté, je le démontrerai les chiffres à la main, a produit un état d'approvisionnement satisfaisant ; la comparaison des importations et des exportations présente un excédant d'importations de nature à tranquilliser tous les esprits.

Pour le moment, je me borne à ces quelques paroles pour écarter les inquiétudes que pourraient faire naître les paroles de M. Dumortier. Je puis affirmer que l'état des approvisionnements est aussi satisfaisant que les circonstances le permettent, qu'il n'y a aucun danger dans la liberté du commerce des céréales qui nous a toujours procuré les moyens de couvrir le déficit de notre production par l'importation de grains étrangers.

M. Dumortier. - La question commence un peu à se dessiner. Vous avez entendu ce que signifie la crise « passagère », c'est ceci : si la guerre d'Orient vient à cesser ; si des moyens de transport viennent à arriver ; si le fret vient à diminuer. « Si », voilà la raison de l'espoir que la crise sera passagère. Je vous laisse à juger si c'est là le langage qui doit tenir un gouvernement dans des circonstances aussi graves. Mais si ces trois circonstances ne se produisent pas, que ferez-vous ? Nous avons posé cette question dans le sein de la commission d'adresse ; qu'a répondu M. le ministre ? Il nous a dit pour toute réponse : Je n'en sais rien.

Une pareille réponse m'a singulièrement frappé. Il me semble qu'on est ministre pour savoir ce que l'on doit faire dans des circonstances excessivement graves, aussi graves que celles qui se préparent. S'il est vrai, connue on vient de le dire, que dans les années ordinaires la Belgique ne produit pas assez pour sa consommation, il est d'autant plus évident que, dans une année où la culture présente un déficit considérable, il faut prendre d'autres mesures que les moyens ordinaires.

Quand M. le ministre vient parler de ce qu'il appelle l'influence funeste de mes paroles, cela me touche peu, car je n'ai, en définitive, parlé que de ce que tout le monde sait. Il n'y a pas d'imprudence à parler de ce qui est à la connaissance de tout le monde ; il y aurait de l'imprudente à parler de faits que je connais, mais que peu de personnes savent ; aussi en est-il que je tairai.

Mais quand je dis ce que tous les cultivateurs savent, ce n'est plus une imprudence, c'est un devoir civique. Eh bien, quel est le prix des céréales ? Tout le monde le sait : 36 à 37 fr. l'hectolitre. Quel est le prix des années communes à pareille époque ? 18 francs ; c'est-à-dire que le prix actuel est le double du prix auquel ou paye ordinairement le grain à pareille époque.

Y a-t-il imprudence à dire ce que tout le monde sait ? Tout le monde sait aussi que l'ouvrier paye son pain 40 à 45 centimes le kilogramme, tout le monde sait aussi que les ouvriers des manufactures ne gagnent qu'un franc par jour et les ouvriers des campagnes 70 à 80 centimes, tout le monde sait cela ; qu'on ne parle donc pas d'imprudence quand on demande au gouvernement ce qu'il fera pour parer aux dangers de la situation.

Avec votre système de liberté commerciale qui a pu suffire en temps ordinaire, avez-vous empêché la continuelle élévation des prix. C'est là un fait irrécusable, incontestable.

On vous parle, messieurs, des entrées considérables qni ont eu lieu ; je le crois bien, quand on met les tableaux des entrées au Moniteur on les établit en kilogrammes ; le grain ne se vend pas au kilogr. 8 millions de kilogrammes paraissent un chiffre fabuleux. C'est tout simplement 100 mille hectolitres. Qu'esl-ce que c'est donc que cent mille hectolitres ? C'est la consommation de 3 jours en Belgique. Car la consommation du grain en Belgique, est d'au-delà d'un million d'hectolitres par mois, d'après les statistiques publiées par le gouvernement.

Maintenant quel est le déficit ? Chacun de vous l'appréciera. Je ne veux pas en parler maintenant. Toutes les introductions faites en Belgique depuis le 1er août, déduction faite des exportations, se résument en (page 16) 347,000 hectolitres, dont il faut défalquer un million de kilogrammes de sarrasin qu'on a fait sortir du pays, de manière que vous n'avez eu que 330,000 hectolitres ; or, voulez-vous savoir ce que sont pour notre consommation ces trois cent trente mille hectolitres ? C'est la nourriture de dix jours. Et c'est sur de pareils moyens que vous voulez vous reposer pour parer aux malheurs qui peuvent menacer le pays, à la famine publique !

En cas de disette, ce n'est pas de théorie qu'il faut s'occuper, de liberté commerciale, de libre échange, mais de pratique, c'est par les faits qu'il faut se guider. J'aurais voté pour le libre échange qu'en voyant le pays menacé de ce mal immense, la faim ! je mettrais de côté toute théorie pour ne demander conseil qu'aux faits.

Messieurs, je laisse au gouvernement toute la responsabilité des événements, et je proteste contre la responsabilité que le ministère pourrait faire peser sur la chambre.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Messieurs, on continue à vouloir faire peser sur le gouvernement la responsabilité d'une situation qu'il n'a pas faite, que personne, en Europe, n'a faite, et que toute l'Europe subit comme nous. Je vous demande si cela est véritablement raisonnable ? Que peut-on demander au gouvernement ? C'est qu'il suive attentivement la situation des choses, quant aux denrées alimentaires ; c'est qu'il se préoccupe des mesures qui sont propres à atténuer, autant que possible, les effets de la crise alimentaire.

Eh bien, je le demande, n'est-ce pas ce que le gouvernement a fait ? Le projet de loi qui vous a été soumis récemment ne prouve-t-il pas, d'une part, que le gouvernement a pris les seules mesures qu'il fût en son pouvoir de prendre ; et, d'autre part, que des études approfondies ont été faites ?

Les renseignements statistiques les plus complets, les plus positifs ont été fournis à l'appui de ce projet de loi ; ces renseignements sont en ce moment à l'impression, et prouveront, quoi qu'on en dise, et quelque peu de confiance que certaines personnes accordent à la statistique, que le pays n'a réellement pas d'inquiétude à concevoir sur l'état des approvisionnements.

On demande s'il y a de l'imprudence à faire connaître que le grain est cher, qu'il se vend actuellement 37 francs l'hectolitre. Eh ! non, sans doute, messieurs, mais l'imprudence consiste à faire naître, dans une pareille situation, des appréhensions que les faits ne justifient nullement. Et quand on invoque les faits, que l'on ait du moins la patience d'attendre quelques jours ; et lors de la discussion du projet de loi sur les denrées alimentaires, les faits viendront démontrer de la manière la plus convaincante, que le pays n'est pas dépourvu de céréales ; et que, dans toutes les hypothèses, le gouvernement a fait tout ce qui était en son pouvoir.

Maintenant, y a-t-il encore quelque chose à faire ? Eh bien, vous qui vous alarmez tant, vous qui alarmez le pays, vous nous direz ce qu'il y a encore à faire ; et je ne doute nullement que la chambre n'accueille, comme le gouvernement, les mesures pratiques que vous pourrez proposer.

M. Orts, rapporteur. - Je n'ai qu'un mot à dire dans cette discussion, que je considère comme tout à fait inopportune et même comme dangereuse ; attendu qu'elle ne pourra pas être complète et que, si elle pouvait l'être, il serait sans doute prudent de ne pas la soulever. Je veux seulement dire que, dans la commission, on s'est contenté des réponses du gouvernement.

Maintenant, l'honorable M. Dumortier pose la question suivante : Si la crise alimentaire s'aggrave considérablement, que ferez-vous ? Et le gouvernement répond, avec raison :Je n'en sais rien, j'aviserai selon les événements, les dangers, les périls que les circonstances pourront révéler et que je ne puis avoir le don de deviner.

Si le gouvernement avait ce don, il y aurait eu imprudence de sa part à nous dire aujourd'hui qu'il ignore ce qu'il fera. Les dangers que l’on redoute ne résultent pas de faits appartenant à l'ordre naturel, ces dangers sont un peu fabriqués par la main de l'homme, et le meilleur moyen de s'en préserver c'est d'être très discret et fort sobre de paroles.

M. Prévinaire. - Je regrette que l'honorable M. Dumortier ait cru devoir insister comme il l'a fait sur la valeur du mot « passagère ». Je crois que les explications données par M. le ministre suffisent pour satisfaire la chambre et pour lui faire comprendre quelle a été la pensée du gouvernement en l’employant.

Si cette expression avait révélé de la part du gouvernement la pensée que la crise alimentaire est de nature à n'être réellement que passagère, je crois que nous aurions à examiner sérieusement les dispositions du gouvernement. Pour moi, je ne suis pas du tout alarmé de voir le prix élevé des céréales ; mais je crois aussi que la crise ne sera pas passagère. La seule chose qu'on pourrait peut-être reprocher au gouvernement, c'est d'avoir pris tardivement les mesures que nous connaissons.

Dès le mois de juin ou de juillet on pouvait prévoir une grande partie des événements qui se sont passés et les avis n'ont certes pas fait défaut, de sorte que, si un reproche peut être adressé au gouvernement, ce ne peut être que d'avoir pris tardivement ces mesures.

Quant à celles, que l'honorable M. Dumortier a paru indiquer, je les repousse, car si la situation actuelle n'est pas plus grave encore, nous le devons, je crois, à la liberté commerciale en matière de denrées alimentaires.

Je me borne à ces observations, faisant toutes mes réserves sur la conduite que le gouvernement tiendra dans cette question.

M. Osy. - L’honorable M. Dumortier a eu parfaitement raison, selon moi, d'interpeller le gouvernement sur l'expression de l'adresse relative à la crise alimentaire, parce que, d'après moi, s'il ne faut pas trop effrayer, il ne faut pas non plus donner aux populations des espérances illusoires. Mais la réponse que lui a donnée M. le ministre des aflaircs étrangères est parfaitement exacte et m'a tout à fait convaincu que, si les affaires politiques en Orient s'arrangent, on peut être certain qu'il arrivera en Belgique des quantités considérables de grains, que si, au contraire, les événements se compliquent, le commerce aura beaucoup de peine à continuer d'alimenter la Belgique, comme elle l’a fait dans d'autres circonstances analogues.

Toutes les fois qu'il y a eu disette de grains, le commerce belge a mis beaucoup d'activité pour alimenter nos populations ; mais, cette année, nous avons été très contrariés dans les arrivages que nous avons voulu faire venir de l'étranger. Les navires envoyés en Australie n'ont pas pu revenir régulièrement par suite de la désertion de leurs équipages ; de sorte que la rareté des navires a fait accroître considérablement le fret. C'est ainsi que d'Odessa pour Anvers le fret qui n'était autrefois que de 70 florins a plus que doublé depuis quelque temps.

Cependant, je nie hâte de le dire, les chiffres donnés par l'honorable M. Dumortier sont complètement inexacts. Il nous a dit que, dans le courant de l'année dernière, nous n'avons importé que 350,000 hectolitres de froment ; eh bien, messieurs, depuis que le besoin de céréales s'est fait sentir, nous avons importé près de 60 millions de kilogrammes, représentant 700,000 hectolitres ; plusieurs arrivages sont encore attendus ; de sorte que nous n'avons aucune inquiétude sous ce rapport.

Il se fait sans doute quelques exportations, mais elles sont insignifiantes. Par mer il n'y en a pas ; par terre il y en a un peu pour nos voisins du Midi ; mais qu'arrive-t-il ? C'est que nous vendons nos froments à un prix beaucoup plus élevé que celui par lequel nous le remplaçons et avec lequel, quoique d'une qualité inférieure, nous fabriquons cependant d'excellent pain.

Ainsi, dans la ville même qu'habite l'honorable M. Dumortier, on n'emploie pas le froment du Hainaut ; on le vend et on en achète d'autre en échange. C'est évidemment un grand avantage pour la Belgique de vendre ses beaux froments à un prix élevé et de le remplacer par un prix de beaucoup inférieur.

L'honorable membre a également cité des chiffres, quant aux ouvriers. Mais, messieurs, vous devez le savoir, à l'occasion de la cherté des grains, plusieurs établissements industriels ont recherché s'il convenait d'augmenter le salaire des ouvriers ; on s'est fait produire la statistique du salaire moyen des ouvriers, et il a été constaté qu'un ouvrier valide gagne non pas un franc, mais deux francs et même plus. (Interruption.)

M. Rodenbach. - Dans les campagnes ?

M. Osy. - Non, dans les villes. Je ne parle pas en ce moment des campagnes ; je vais y venir.

L'honorable M. Dumortier a dit que dans nos grandes villes, l'ouvrier ne gagnait qu'un franc. Or, la moyenne est de plus de 2 fr.

L'honorable membre a dit aussi que dans les campagnes, l'ouvrier ne gagne que de 60 à 70 c. Eh bien, le salaire des ouvriers à la campagne est, depuis bien des années, supérieur à ce chiffre. La journée de l'ouvrier dans les campagnes est de 12 sous courant de Braliant, ce qui fait plus d'un franc pendant l'été et de 10 sous pendant l'hiver, ce qui s'élève à beaucoup plus de 60 à 70 centimes. .

Je crois que nous devons prendre toutes les mesures possibles pour que nos populations puissent se nourrir au meilleur compte possible. Mais je dis : Ne donnons pas trop d'espoir, niais n'allons pas non plus trop effrayer les populations. Pour ma part, je sais que le commerce continue à donner des ordres considérables à l'étranger pour faire arriver des grains.

Si les circonstances politiques, si les faits dont a parlé M. le ministre des affaires étrangères ne nous contrarient pas, soyez persuadés qu'il arrivera encore beaucoup de grains en Belgique.

Mais il est une mesure dont on a parlé et dont on parlera certainement encore lors de la discussion du projet qui nous a été présenté par M. le ministre de l'intérieur, c'est la défense d'exportation des grains. Messieurs, je combattrai une pareille mesure, parce que je la crois la plus dangereuse que l'on puisse prendre, et sous ce rapport j'adhère complètement à la note que nous avons trouvée au Moniteur lorsque le gouvernement a pris la mesure par laquelle il a supprimé tout droit à l'importation des céréales. Je regrette seulement que le gouvernement n'ait pas fait davantage, et sous ce rapport je me réserve de faire des observations, lorsque nous discuterons le projet présenté par M. le ministre de l'intérieur.

M. Verhaegen. - Messieurs, la discussion dans laquelle on vient de s'engager ne peut pas aboutir ; car, on ne formule pas de conclusions. Dès lors cette discussion, que je puis appeler oiseuse, ne peut être d'aucune utilité aux populations qui souffrent. M. le ministre de l’intérieur vous l'a très bien dit, tout le monde aura la liberté d'énoncer son opinion dans la discussion qui va s'ouvrir sur le projet qui vous a été soumis, il y a peu de jours, des propositions seront faites ;; ellcs partiront de l'initiative des membres de cette chambre et chacun apportera sa part de patriotisme dans ce débat. J'entends l'honorable M. Dumortier, comme tous mes collègues dans cette discussion, pour nous éclairer, et nous ne serons certainement pas les derniers de concourir avec lui pour arriver à un résultat favorable. Mais pour le moment, ce qui est à faire, le voici, et je fais à cet égard une proposition formelle.

La question des céréales est une question urgente ; elle doit se (page 17) décider. Un projet a été soumis à la chambre ; il a été renvoyé aux sections. Je demande que la chambre, déclarant l'urgence, prie les sections de s'occuper immédiatement et toutes autres affaires cessantes, de l'examen de ce projet et que l'on mette dans la discussion toute la célérité possible. De cette façon, en mettant de l'activité dans nos travaux, en ce qui concerne ce point surtout, nous serons véritablement utiles aux populations. La lumière se fera jour ; chacun apportera son tribut dans cette discussion, et j'espère que nous arriverons alors au résultat que se propose l'honorable M. Dumorticr.

M. le président. - Mon intention était de faire convoquer pour demain les sections à l'effet d'examiner le projet de loi sur les denrées alimentaires. Mais M. le greffier me dit que le gouvernement a joint à son projet une quantité de pièces qui ne pourront être imprimées avant quelques jours.

La parole est à M. Rodenbach.

- Plusieurs membres. - La clôture !

M. Rodenbach. - Je renonce à la parole.

- La clôture de la discussion générale est prononcée.

La chambre passe à l'examen des paragraphes.

Discussion des paragraphes

Paragraphes 1 à 5

« Sire,

« La Belgique, puissamment aidée par la sagesse de son Roi, a définitivement conquis, au milieu des nations européennes, une place honorable et respectée. »

- Adopté.


« Le pays reconnaissant et juste devait se réjouir, comme il l'a fait, avec le cœur paternel de Votre Majesté, lorsque s'est réalisée sous nos yeux l'union qui assure à l'héritier du Trône une garantie de bonheur, à la dynastie un gage de perpétuité, en même temps qu'elle est pour la patrie un lien de plus avec l'Europe et un témoignage de confiance dans la nationalité belge. »

- Adopté.


« En applaudissant au projet de cette union, dès la session dernière, la chambre avait devancé l'expression du sentiment national. Elle est heureuse de constater aujourd'hui combien elle en avait été la fidèle interprète. »

- Adopté.


« La Belgique, également dévouée à ses institutions et à l'ordre, s'était à l'avance montrée digne des bons rapports internationaux dont la politique du gouvernement de Votre Majesté nous assure le maintien avec toutes les Puissances. »

- Adopté.


« Impartiale et bienveillante, cette politique ne saurait manquer, sans injustice, d'être chaque jour mieux comprise. »

- Adopté.

Paragraphe 6

« Votre Majesté veut bien le rappeler : des économies notables ont été procurées à l'Etat par la conversion d'une partie de la dette publique. La situation de l'armée est désormais assurée par l'organisation de notre établissement militaire et l'augmentation de nos moyens de défense. »

M. David. - Messieurs, je regrette que la commission d'adresse n'ait pas appuyé plus fortement sur le seul paragraphe où il soit question d'économies à introduire dans nos dépenses. Le gouvernement, messieurs, doit faire des efforts constants pour ramener les dépenses publiques au chiffre le plus minime possible. Je désirerais donc introduire quelques mots comme amendement, afin d'exprimer le vœu que le gouvernement continue à rechercher tous les moyens d'introduire dans les dépenses publiques toutes les économies possibles.

- Un membre. - Et la chambre aussi.

M. David. - Sans doute.

Je propose donc, messieurs, de dire :

« Nous espérons que le gouvernement continuera à rechercher les moyens d'introduire toutes les réductions de dépenses possibles dans les divers services publics. »

M. Thiéfry. - J'ai demandé la parole sur la deuxième partie de ce paragraphe ; je ne veux pas que l'on infère de mon vote approbalif de l'adresse une approbation semblable de l'organisation de l'armée. J'ai fait connaître, lors de la discussion de cette loi, les motifs pour lesquels je ne pouvais y donner mon assentiment. J’ai basé mon opposition sur le danger pour le pays d'avoir une infanterie de réserve aussi mal organisée ; sur le défaut du recrutement des cadres de sous-officiers, et sur le chiffre du budget dont la hauteur n'est pas en rapport avec les ressources de l'Etat. Je persiste toujours dans cette opinion, l'expérience même n'a fait que la fortifier.

Je ne veux pas provoquer une discussion que je crois inutile ; cependant j'ai cru devoir donner ces explications pour qu'on ne suppose pas que j'approuve aujourd'hui ce qui a été fait.

M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - L'honorable M. David présente à la chambre une phrase additionnelle qui a pour but de recommander au gouvernement de continuer à introduire dans l'administration des affaires de l'Etat, toutes les économies compatibles avec la bonne marche des services publics. Il n'y a dans cette phrase rien d'hostile au gouvernement puisque l'honorable préopinant demande une seule chose, c'est que le gouvernement continue à marcher dans la voie où il s'est engagé, du propre aveu de l'honorable membre. Je ne sais pas si l'honorable M. David se contentera de l'assurance formelle que je lui donne au nom du gouvernement, que tous nos soins, nos soins de chaque jour et ds chaque instant tendent à introduire des économies dans l'administration et surtout tendent à éviter autant que possible les crédits supplémentaires.

Nous faisons en effet, messieurs, de continuels efforts pour nous renfermer dans les chiffres fixés par la chambre. Si l'honorable M. David ne se contente pas de cette assurance, s'il persiste à vouloir qu'un vœu soit émis officiellement, nous n'avons aucun motif de nous y opposer puisque c'est plutôt une approbation de notre conduite, qu'un blâme ; je laisse seulement à la chambre à décider si l'expression de ce vœu est indispensable.

Quant aux observations de l'honorable M. Thiéfry, elles ne sont que la conséquence des opinions qu'il a défendues lorsque la chambre s'est occupée de l'organisation de l'armée ; mais l'honorable M. Thiéfry s'étant alors trouvé en minorité il est probable qu'il restera encore en minorité aujourd'hui et que la chambre, persévérant dans l'opinion qu'elle a émise lorsqu'elle a voté la loi sur l'organisation de l'armée, approuvera la phrase que la commission a insérée dans le projet d'adresse.

M. Orts, rapporteur. - Messieurs, la commission d'adresse n'a pas pensé devoir insister davantage sur les économies parce que, selon elle, louer le gouvcrnement d'avoir fait des économies, c'est le meilleur moyen de l'engager à en faire encore. Elle ne pouvait pas d'ailleurs indiquer telle économie plutôt que telle autre ; elle s'est donc renfermée dans une approbation générale.

Du reste, messieurs, je ne vois aucun inconvénient à admettre l'amendement de l'honorable M. David, seulement je crois que sa recommandation va beaucoup mieux à l'adresse de chacun de nous qu'elle ne trouve sa place dans la réponse de la chambre au discours du Trône

Quant aux observations de l'honorable M. Thiéfry, lorsque la chambre vote une adresse au Roi, il est évident qu'elle parle au nom de sa majorité, tous les droits de la minorité restant saufs.

M. le président. - Je vais mettre aux voix l'amendement de M. David.

M. David. - Je le retire.

- Le paragraphe proposé par la commission est mis aux voix et adopté.

Paragraphes 7 à 10

« La chambre se félicite du concours qu'elle a prêté à ces grandes mesures. Elle sait que l'armée et la garde civique méritent les éloges du Roi comme la confiance du pays. »

- Adopté.


« Nous avons appris, Sire, avec bonheur que la plupart des branches de notre prospérité industrielle et commerciale prenaient un développement favorable. Espérons que les moyens préparés par le gouvernement pour affermir et pour généraliser cet état de choses, atteindront le but, aidés par l'extension de l'esprit d'entreprise et par l'achèvement, dans les délais fixés, des travaux publics décrétés depuis deux ans. »

M. Orts, rapporteur. - Messieurs, il y a dans ce paragraphe une expression qui ne me paraît pas rendre exactement la pensée de la commission ;; il semblerait que c’est à dater de cette année seulement que la prospérité industrielle et commerciale se développe ;; pour être plus exact je proposerai de dire ;: « continuent à prendre ».

- Le paragraphe est mis aux voix et adopté avec cette modification.


« La chambre examinera avec un soin scrupuleux les modifications aux lois financières que le gouvernement se propose de lui demander. »

« Une calamité qui, nous l'espérons, sera de courte durée, pèse néanmoins lourdement sur les classes laborieuses, malgré les utiles ressources qu'offre, pour atténuer les effets du renchérissement des denrées alimentaires, l'activité imprimée au travail sur plusieurs points du pays. »

- Adopté.

Paragraphe 11

« Des mesures exceptionnelles ont été prises en l'absence du parlement : aussitôt que ces mesures nous seront soumises, elles feront l'objet de notre sérieuse attention et de notre vive sollicitude. »

M. le président. - Comme les mesures dont il s'agit sont maintenant soumises à la chambre, il faudra modifier le paragraphe dans ce sens. On pourrait dire : « Ces mesures, qui viennent de nous être soumises, feront l'objet, etc. »

M. Rogier. - On peut dire : « Elles feront l'objet. »

- Ce changement est adopté.

M. de Mérode. - Messieurs, je trouve dans ce paragraphe une expression qui n'est pas dans notre Constitution : « en l'absence du parlement. » Nous sommes constitués en deux chambres, la chambre des représentants et le sénat ; le mot « parlement » n'est pas dans notre langue constitutionnelle. Il me semble qu'il vaudrait mieux dire : « en l'absence des chambres. »

- Cette modification est mise aux voix ; elle n'est pas adoptée.

Le paragraphe de la commission est adopté avec le changement de rédaction qui a été admis tout à l'heure.

Paragraphe 12

(page 18) « La chambre ne peut plus que former des vœux pour voir donner promptement à la question du crédit foncier une solution satisfaisante. »

- Adopté.

Paragraphe 13

« La législation pénale étrangère et surannée qui nous régit encore appelle l'achèvement de la réforme commencée. Le pays est en droit d'espérer que le complément de ce vaste et utile travail pourra être incessamment soumis à la représentation nationale.

M. de Mérode. - Messieurs, je ne comprends pas qu'on parle du Code pénal comme d'une législation étrangère et surannée : il existe depuis près d'un demi-siècle et il est national depuis lors ; personne ne l'a jamais qualifié d'étranger jusqu'à présent ; il est nationalisé par le temps, et je ne vois pas pourquoi nous l'appellerions loi étrangère plutôt que le Code de procédure, le Code civil, le Code d'instruction criminelle. Tous les Codes, à peu près, sont de la même époque. Quant à l'épithète de surannée, il est inutile de faire, en quelque sorte, le procès à notre législation ; on peut la réformer si on le croit utile, mais il ne faut pas la flétrir alors qu'elle est encore en vigueur. Je pense qu'il conviendrait mieux de dire :

« La législation pénale qui nous régit appelle encore des réformes. Le pays espère qu'un utile travail complémentaire à ce sujet pourra être incessamment soumis aux chambres. »

Il me semble que la rédaction que je propose serait préférable à celle du projet d'adresse.

- L'amendement est appuyé.

M. Orts, rapporteur. - Messieurs, je ne tiens pas personnellement aux expressions que blâme l'honorable M. de Mérode, mais je tiens à déclarer que, dans ma pensée, elles sont justes, comme elles le sont dans la pensée de tous ceux qui se sont occupés de législation criminelle et des réformes à introduire dans le code pénal qui nous régit. J'en appelle volontiers à la pensée de M. le ministre de la justice tout le premier.

S'il est aujourd'hui un seul jurisconsulte dans le pays qui ne proclame pas le code pénal de 1810 une loi contraire à nos mœurs et à nos traditions nationales, je consens à passer condamnation.

S'il est un seul jurisconsulte qui ne dise pas que cette législation est antipathique à l'époque actuelle et par conséquent surannée, je consens encore une fois à passer condamnation. On ne me persuadera pas qu'un code pénal qui, d'un bout à l'autre, est empreint d'un esprit de rigueur, de despotisme, de tracasseries policières, soit un code conforme à nos traditions, à nos mœurs nationales. On ne me persuadera jamais qu'un code qui, à chaque page, commine la peine de mort contre des délits de mince importance, contre des attentats à la propriété, contre des faits politiques, ne soit pas, en 1853, un code tout à fait suranné.

Toutes les nations qui avec nous ont eu à subir ce code, l'ont réformé, et nous sommes les derniers dans la voie des améliorations. Il est plus que temps de réformer le code français, et c'est pour insister sur l'urgence de cette réforme, que nous avons cru pouvoir qualifier la loi impériale de 1810, comme nous l'avons qualifiée.

M. de Mérode. - Messieurs, je ne m'oppose pas à ce qu'on améliore le code pénal. Mais le code pénal fait partie de ceux qui sont en vigueur en Belgique et qui n'ont pas été qualifiés d'étrangers et de surannés. Il me paraît singulier de qualifier d'étrangère une législation qu'on a acceptée depuis un demi-siècle, sans lui donner cette qualification, et qu'on peut très bien réformer, sans se servir d'épithèles au moins inutiles.

On n'améliorera pas la législation, parce qu'on aura dit qu'elle est étrangère et surannée ; on dira seulement que les Belges ont vécu pendant un demi-siècle sous une législation étrangère et surannée, cela ne nous fera pas grand honneur.

- Le paragraphe amendé comme le propose M. F. de Mérode est mis aux voix et adopté.

Paragraphes 14 à 22

« Il ne dépendra ni du zèle, ni de l'activité de la chambre qu'un vote définitif du Code forestier et de la loi d'expropriation vienne assurera la Belgique le bienfait immédiat de ces perfectionnements législatifs. Elle est prête à discuter les modifications annoncées au Code pénal militaire. »

- Adopté.


« Le Gouvernement, Votre Majesté daigne nous le dire, poursuit sans relâche l'élude de réformes à introduire dans diverses branches de l'administration de la justice ; il achève d'en préparer d'autres. La Chambre s'estimerait heureuse de voir ces efforts aboutir enfin dans le courant de la session présente. »

- Adopté.


« Le développement de l'instruction publique à tous les degrés, et de l’enseignement professionnel, est un fait important dont le pays a le droit de se féliciter et de s'enorgueillir. La Chambre s'empressera d'accorder son appui à tout ce qui sera proposé de propre à éclairer la marche de notre agriculture. »

- Adopté.


« L'amélioration de la voirie vicinale a toutes nos sympathies. »

- Adopté.


« La législation sur l'art de guérir et sur la police médicale, combinée avec un système intelligent d'hygiène publique, ne peut manquer d'exercer une grande influence sur f'état sanitaire du pays. Nous attendons avec intérêt le résultat des efforts qu'a faits le gouvernement pour combler les lacunes existantes en cette matière. »

- Adopté.


« Assurer à nos populations le bien-être moral et matériel, affermir la nationalité belge, maintenir intactes les institutions qui la consolident, tel est, en ce pays, la véritable et noble tâche des pouvoirs publics. »

- Adopté.


« Votre Gouvernement, Sire, peut compter sur le patriotique concours de la chambre pour atteindre ce but de nos communs efforts. »

- Adopté.


« Comme Votre Majesté, nous avons foi dans l'avenir d'une Belgique indépendante, digne et sage. »

- Adopté.


« Fidèle à son passé, notre belle patrie, nous n'en doutons pas, saura trouver de plus en plus l'appui de son bon droit dans l'estime et la confiance des nations étrangères, comme elle le trouve déjà dans l'amour et l'union de ses enfants. »

- Adopté.

Vote sur l’ensemble du projet

La chambre décide que les changements de rédaction qui ont été adoptés ne doivent pas être considérés comme des amendements et que dès lors il sera procédé à l'appel nominal.

M. Coomans. - Je demande à pouvoir présenter quelques observations sur la rédaction de plusieurs paragraphes du projet d'adresse.

M. le président. - Y a-t-il de l'opposition à ce que M. Coomans présente ses observations ?

- De toutes parts. - Non ! non !

M. le président. - La parole est à M. Coomans.

M. Coomans. - Messieurs, dans le second paragraphe il y a ces mots : « assure à l'héritier du trône une garantie de bonheur. » On n'assure par des garanties ; on les offre ou on les donne. Je propose de substituer le mot « offre » au mot « assure ».

- Adopté.

M. Coomans. - Au huitième paragraphe je trouve : « nous avons appris, Sire, avec bonheur que la plupart des branches de notre prospérité industrielle et commerciale, etc. »

Je doute que la prospérité ait des branches. Je sais que le commerce et l'industrie en ont, mais je ne sache pas que la prospérité en ait. Je proposerai de dire : « que la plupart des éléments de notre prospérité, etc. »

- Ce changement est mis aux voix et adopté.

M. Coomans. - Au paragraphe 18 je lis : « nous attendons avec intérêt le résultat des efforts qu'a faits le gouvernement pour combler les lacunes existantes en cette matière », c'est « existant » qu'il faut dire.

M. Orts, rapporteur. - C'est une faute d'impression.

J'ai attendu que M. Coomans eût terminé pour m'expliquer sur les rectifications grammaticales qu'il vient de présenter. Je dirai que les mots « assurer une garantie » et « branches », qu'il vient de critiquer,, nous les avons empruntés au discours de la Couronne et que nous n'avons pas cru avoir le pouvoir de corriger.

- Personne ne demandant plus la parole, il est procédé au vote par appel nominal.

En voici le résultat :

72 membres répondent à l'appel.

71 membres répondent oui.

1 (M. Pierre), s'abstient.

En conséquence, la chambre adopte.

Ont répondu oui : MM. Laubry, le Bailly de Tilleghem, Lebeau, Lesoinne, Loos, Maertens, Magherman, Malou, Mascart, Matthieu, Mercier, Moreau, Orban, Orts, Osy, Pirmez, Prévinaire, Rogier, A. Roussel, Ch. Rousselle, Thiéfry, Thienpont, T'Kint de Naeyer, Vanden Branden de Reeth, A. Vandenpeereboom, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Overloop, Verhaegen, Vermeire, Veydt, Vilain XIIII, Ansiau, Anspach, Brixhe, Cans, Closset, Coomans, Dautrebande, David, H. de Baillet, de Baillet-Lalour, de Breyne, de Bronckart, de Brouwer de Hogendorp, de Haerne, de La Coste, Delehaye, Deliége, F. de Mérode, de Mérode-Westerloo, de Naeyer, de Perceval, Dequesne, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren, Desmaisières, de Theux, de T'Serclacs, Devaux, de Wouters, Dumon, Dumorticr, Frère-Orban, Jacques, Jouret, Julliot, Landeloos et Delfosse.

M. le président. - M. Pierre, qui s'est abstenu, est invité à faire connaître les motifs de son abstention.

M. Pierre. - J'aurais voté le projet d'adresse s'il ne contenait un paragraphe préconisant l'organisation militaire à laquelle je n'ai pas cru devoir donner mon assentiment.

M. Orts. - Lorsque j'ai commis une erreur, je tiens à le déclarer devant tout le monde et surtout devant la chambre. N'ayant pas le texte du discours du trône sous les yeux, quand je me suis permis de lui renvoyer les observations de l'honorable M. Coomans, j'ai commis une erreur, qui me prouve une fois de plus qu'on a toujours tort de vouloir citer de mémoire.

Je reprends donc pour le compte de la commission d'adresse la responsabilité des mots « assurer une garantie » qui ont effarouché l'honorable M. Coomans.

Formation de la députation au roi

(page 19) Il est procédé au tirage au sort de la députation chargée de présenter au Roi l'adresse votée par la chambre.

Les membres désignés parle sort sont MM. de Perceval, A. Vandenpeereboom, Vanden Branden de Reeth, Rodenbach, de Baillet-Latour, Orban, Pierre, Verhaegen, Ansiau, Vilain XIIII et H. de Baillet.

M. le président. - Le bureau prendra les ordres de S. M. pour savoir quand la députation sera reçue.

Notre ordre du jour de demain n'étant guère important, je vous propose, messieurs, de fixer la séance à 3 heures.

- Adopté.

La séance est levée à 4 1/2 heures.