Accueil Séances Plénières Tables des matières Biographies Livres numérisés Note d’intention

Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 8 décembre 1854

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1854-1855)

(Présidence de M. Delfosse.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 251) M. Dumon procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.

M. Ansiau lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. Dumon présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.

« Plusieurs habitants d'Oostham prient la Chambre de voter un crédit destiné à les indemniser des pertes qu'ils ont éprouvées par suite des logements militaires, et demandent à être exemptés à l'avenir de ces logements ou qu'on leur donne une indemnité en rapport avec les dépenses que cette charge leur occasionne et qu'une indemnité proportionnelle leur soit également accordée quand ils sont obligés de loger des officiers. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Hanin-Dresmal appelle l'attention de la Chambre sur des articles concernant l'élection de Marche qui se trouvent dans deux numéros du Journal d'agriculture. »

- Même renvoi.


« Le conseil communal de Fouron-St-Pierre prie la Chambre d'examiner s'il n'y a pas lieu de supprimer les dépôts de mendicité. »

- Même renvoi.


« Le sieur Van Blyenberg, secrétaire du parquet à Termonde, demande que les secrétaires des parquets aient un traitement égal à celui des commis-greffiers. »

- Même renvoi.


« Le sieurs Suetens présente des observations sur le projet de loi relatif à la réunion de deux cantons de justice de paix de Courtrai. »

- Dépôt au bureau des renseignements.


« Le sieur Henri Van Ermingen, directeur de la société royale de musique et de rhétorique de Hasselt, né à Maestricht, demande la naturalisation ordinaire. »

- Renvoi au ministre de la justice.

Projet de loi prorogeant la libre entrée des charbons étrangers

Dépôt

M. le ministre des finances (M. Liedts). - présente un projet de loi ayant pour objet de proroger pour une année la loi qui autorise la libre entrée des charbons étrangers.

- La Chambre ordonne l'impression et la distribution de ce projet et le renvoi à l'examen des sections.

Projet de loi sur la police sanitaire des animaux domestiques

Rapport de la section centrale

M. Lelièvre donne lecture du rapport suivant :

Messieurs, votre section centrale m'a chargé de vous faire rapport sur quelques amendements proposés au projet de loi concernant la police sanitaire des animaux domestiques.

La section centrale a examiné l'amendement proposé par l'honorable M. T'Kint de Naeyer à la séance d'hier et ayant pour objet de supprimer les expressions « ou suspectés d'être atteints », écrites dans l'article premier de la loi en discussion.

La section centrale fait d'abord observer qu'on a donné aux mots en question une portée exorbitante qu'ils ne comportent pas. Quand le projet parle d'animaux suspectés d'être atteints de maladie contagieuse, il n'a eu en vue que l'hypothèse où le détenteur doit avoir de justes motifs de croire à l'existence de l'une des maladies dont il s'agit.

Il est donc nécessaire qu'il se soit produit des signes extérieurs qui ont dû éveiller l'attention du détenteur de l'animal et l'engager à faire la déclaration prescrite par la loi. Evidemment toute peine suppose une faute de la part de l'individu auquel on veut l'appliquer.

Il est donc indubitable que le projet en discussion qui, comme toutes les lois en général, doit être entendu d'une manière raisonnable, ne prescrit la déclaration énoncée à l'article premier qu'en ce qui concerne des animaux présentant quelque symptôme d'une maladie contagieuse. C'est, du reste, en ce sens qu'ont toujours été interprétés les lois et règlements en vigueur jusqu'à ce jour, dont le texte est littéralement conforme à la teneur de l'article premier du projet.

La section centrale a, du reste, été d'avis que des expressions énonçant la pensée du législateur dans le sens ci-dessus énoncé, devaient être maintenues dans le projet. En effet, il existe plusieurs maladies qui, quoique n'étant encore ni reconnues ni déclarées, sont cependant annoncées à l'avance par des signes non équivoques. Il en est ainsi notamment de la morve et du farcin.

Or, il importe qu'en ces cas le détenteur fasse la déclaration conformément à la loi. Un système contraire entraverait le but que se propose le législateur par le projet, et donnerait lieu aux inconvénients que l'on veut prévenir. Du moment que des signes extérieurs, caractéristiques d'une maladie contagieuse, viennent à apparaître, le détenteur est tenu de faire la déclaration requise par la loi dans des vues d'ordre supérieur et d'intérêt général.

En conséquence, nous croyons devoir maintenir dans la loi les expressions dont la suppression est demandée ; mais il est bien entendu qu'elles ne s'appliquent qu'aux animaux « présentant quelques symptômes de maladies contagieuses ». C'est en ce sens que la disposition est soumise au vote de la Chambre qui, en l'adoptant, l'admettra nécessairement avec la signification que nous venons d'indiquer.

Il en sera de même de tous les articles du projet dans lesquels on rencontre la même expression.

La section centrale a aussi examiné l'amendement proposé par l'honorable M. Visart, relativement à l'article 4 nouveau par lui présenté. Elle est d'avis qu'il n'appartient pas à la législature de se prononcer sur la valeur d'un procédé quelconque ni de sanctionner solennellement une invention dont elle n'a pas à contrôler le mérite.

La mesure énoncée à l'amendement est du reste purement administrative et ne saurait convenablement figurer dans le projet en discussion.

En conséquence la section centrale ne croit pas devoir admettre l'amendement dont il s'agit.

Toutefois, la section appelle l'attention du gouvernement sur le procédé signalé par M. Visart.

Il importe que le mérite de cette invention soit apprécié en connaissance de cause.

Quant à l'amendement proposé à l'article 15 par l'honorable M. de Steenhault, un membre de la section centrale a été d'avis que le projet abandonnant aux dispositions du Code, pénal l'hypothèse où le détenteur a laissé communiqué avec d'autres les animaux infectés, il ne peut être question d'adopter, pour le moment, l'amendement présenté. Il a dit que lors de la révision du Code pénal, on pourra examiner la question de savoir s'il y a lieu à comminer des pénalités contre ceux qui, avant la défense de l'autorité administrative, ont laissé communiquer avec d'autres leurs animaux infectés de maladies contagieuses.

Il ne convient pas, pour le moment, de déroger au Code pénal pour un cas particulier dont le règlement doit dépendre du système général qui sera admis lors de la révision des articles 459 et suivants de la législation pénale de 1810.

Ne perdons pas de vue, a-t-on dit, qu'aux termes de l'article 459 ci-dessus rappelé, le détenteur qui n'a pas tenu renfermés les animaux soupçonnés d'être infectés, avant même la décision du maire, peut être puni d'emprisonnement et d'amende. Or, cette disposition est applicable au fait énoncé à l'amendement de l'honorable M. de Steenhault.

En conséquence ce membre a pensé que les dispositions du Code pénal et celles du projet suffisaient pour le moment, et en conséquence il n'a pas cru pouvoir donner son assentiment à l'amendement.

Il a dit qu'en tout cas la rédaction de l'amendement était inadmissible, et qu'il était impossible d'inscrire dans la loi la disposition telle qu'elle est formulée.

La section centrale, à la majorité de quatre voix contre une et une abstention, a adopté l'amendement en ces termes :

« Seront, en outre, punis d'une amende de 100 à 500 francs, sans préjudice de celles comminées par les paragraphes précédents, ceux qui auront fait cheminer, stationner ou héberger leurs auimaux atteints de maladie dans des écuries ou locaux placés hors de la commune qu'ils habitent, ou qui les auront exposés dans des foires ou marchés. »

La majorité de la section centrale a été d'avis que le fait énoncé à l'amendement était plus grave que celui dont s'occupe le projet, et qu'en conséquence il devait être réprimé d'une manière particulière. Elle a pensé que les faits énoncés à l'amendement ne pouvaient être omis dans une loi spéciale, destinée à prévoir les cas qui peuvent se présenter fréquemment dans la matière dont il s'agit.

Projet de loi approuvant le traité conclu entre la Belgique et le Mexique

Rapport de la section centrale

M. Iseghem dépose le rapport de la section centrale qui a examiné le traité conclu avec le Mexique.

- La Chambre ordonne l'impression et la distribution de ce rapport et décide que la discussion aura lieu, à la suite des objets à l'ordre du jour.

Projet de loi interprétatif de la réglementation sur la police des constructions

Rapport de la commission

M. Deliége dépose le rapport de la commission spéciale qui a examiné le projet de loi interprétative de l'article 5 du règlement d'Anvers sur les bâtisses.

- Même décision.

Vérification des pouvoirs

Arrondissement de Bastogne

Vote des conclusions du rapport de la commission de vérification des pouvoirs sur l'élection de Bastogne.

Ces conclusions, qui tendent à l'admission de M. Lambin, sont mises aux voix et adoptées.

En conséquence, M. Lambin est admis comme membre de la Chambre.

Rapports sur des pétitions

(page 252) >M. Vander Donckt, rapporteur. - Messieurs, vous avez demandé un prompt rapport sur les pétitions suivantes.

« Les membres du conseil, communal d'Ottignies demandent que la société concessionnaire du cheminde fer du Luxembourg soient autorisés à faire l'ouverture de la partie de cette voie qui est achevée jusqu'à la station d'Ottignies.

« Plusieurs industriels des vallons de la Dyle et de l'Orneau réclamant l’intervention de la Chambre pour que la société du Luxembourg soit autorisée à exploiter la partie de son chemin de fer qui est achevée jusqu'à Ottignies. »

Les pétitionnaires disent que la partie de la voie jusqu'à Ottignies est entièrement achevée et qu'ils retireraient un avantage immense de ce moyen de communication en présence de la crise alimentaire qui pèse lourdement sur toutes les industries qu'en leur procurant une grande économie sur le prix des transports, ils traverseraient la saison morte sans devoir restreindre le nombre de leurs ouvriers. Votre commission, sans rien préjuger quant au fond de cette affaire, a l'honneur de vous proposer le renvoi de leur demande à M. le ministre des travaux publics.

- Ces conclusions sont adoptées.

Projet de loi concernant la police des animaux domestiques

Discussion des articles

Article premier

M. le président. - La discussion est ouverte sur l'article premier et sur l'amendement de M. T Kint de Naeyer qui s'y rapporte.

M. T’Kint de Naeyer. - Messieurs, le caractère essentiel d'une loi pénale c'est d'être claire et précise. Nous avons ici à voter sur un texte et non sur des commentaires, Je serais peut-être d'accord avec l'honorable M. Lelièvre, s'il modifiait la rédaction de l'article dans le sens des explications qu'il vient de donner ; mais je ne veux pas qu'un simple soupçon suffise pour entraîner une condamnation. (Interruption.) Si la Chambre redoute des abus, on pourrait, il me semble, compléter le sens du paragraphe en disant :

« Tout propriétaire ou détenteur, à quelque lttre que ce soit, d'animaux atteints d'une des maladies contagieuses déterminées par le gouvernement, ou de symptômes apparents de ces maladies, etc. »

De cette manière de simples soupçons ne suffiront pas pour autoriser des mesures préventives, et il serait bien entendu que la faute doit résulter de faits constants que les tribunaux apprécieront.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Messieurs, c'est une appréciation qui est fort délicate que celle qui se rapporte à l'état de suspicion qui doit déterminer l'isolement d'un animal réputé malade. Jusqu'à ce matin, j'avais pensé avec l'honorable M. T'Kint de Naeyer que cet état ne pouvait résulter que de signes apparents extérieurs ; il me semblait qu'en subordonnant la suspicion aux symptômes qui se manifesteraient, on pourvoyait à toutes les nécessités. Depuis, j'ai pu me convaincre, en consultant un des professeurs les plus habiles dans la science vétérinaire que non seulement le mot « suspect » doit être maintenu, mais que le commentaire restrictif qu'on vient de mentionner dans le rapport de la section centrale serait dangereux dans l'application. Voici pourquoi :

En général, l'état de suspicion résulte de symptômes qui se manifestent extérieurement, et sous ce rapport, il est vrai de dire que le détenteur d'un animal qui, apercevant ces symptômes extérieurs, ne déclarerait pas la situation de l'animal, est en faute et doit être l'objet d'une répression. Mais il y a des maladies dans lesquelles les symptômes n'arrivent que lentement à l'état extérieur longtemps après que l'infection existe déjà.

Ainsi, par exemple, il y a une maladie qui affecte très souvent la race bovine et qui est connue sous le nom de peste bovine ; il y a la clavelée, la gale, la rage ; toutes ces maladies ne se manifestent pas immédiatement par des symptômes extérieurs, même quand le germe est déjà déposé dans l'animal.

L'incubation de ces maladies dure souvent plusieursjours, c'est souvent 8 ou 15 jours après que le mal est déjà déposé en germe, qu'on peut s'apercevoir par des symptômes que l'animal est réellement atteint de la maladie.

La rage, par exemple, et je cite cette maladie, parce qu'elle excite une horreur universelle ; la gale, peuvent se développer plusieurs jours après que l'animal aura été en communication avec un autre qui aura été atteint ; et néanmoins pendant tout cet intervalle, la maladie ne se déclare par aucun signe extérieur.

Il n'en résultera pas moins que cet animal est dans un état de suspicion suffisant pour que tout le monde cherche à s'en préserver. Ainsi la peste bovine, la clavelée peuvent être la conséquence d'une communication entre un animal sain et un animal malade ; cependant cet animal sain, aux yeux de tous, ne présentera de symptôme de maladie qu'après un délai moral de quelques jours. Mais en sera-t-il moins suspect ?

Que ferez-vous d'un animal sain qui aura été en communication avec un autre animal atteint d'une maladie contagieuse ? Je suppose un chien sain qui aura été en communication avec un autre chien chez lequel la rage se sera manifestée ; n'obligerez-vous pas le propriétaire du premier à faire la déclaration que cet animal est soupçonné être atteint de la maladie que nous redoutons ?

Il est incontestable que l'animal, cheval ou bœuf, qui aura reçu par communication le germe d'une maladie qui ne se développe que 7 ou 8 jours après, est dans une position telle, que le propriétaire devra être tenu de le déclarer.

Vous devez donc maintenir dans la loi les mots : « suspects d'être atteints », et vous ne pouvez vous contenter des définitions de l'honorable rapporteur, d'après lesquelles ce serait à raison des symptômes extérieurs que l'obligation de faire une déclaration serait imposée au propriétaire.

Il y a ici un intérêt considérable, sur lequel il faut avant tout consulter les hommes de l'art qui ont vieilli dans la pratique. Je prie la Chambre de s'en rapporter à l'application que la disposition a reçue ; jusqu'à présent elle n'a donné lieu à aucune espèce d'abus sensible.

Il ne faut pas vous effrayer du mot « suspect » qui a pu avoir une application fâcheuse appliqué à d'autres matières ; mais dans l'espèce particulière, il n'implique que des précautions légitimes que l'autorité pourrait avoir le regret de n'avoir pas prises ; ainsi entendu, il doit être sanctionné par la Chambre.

M. de Mérode. - Si on consulte les hommes de l'art, ils établiront toute espèce de règlement leur donnant autorité en tout et partout.

Ces prescriptions tendent à restreindre la liberté de chacun et à imposer des obligations dans lesquelles on sera circonvenu de toute manière.

On a déjà obligé les cultivateurs à faire traiter leurs animaux par le vétérinaire officiel ; on a supprimé ceux qu'on appelle empiriques ; on entasse prescription sur prescription ; nous finirons par être environnés de tant de précautions pour nous préserver du danger que nous ne pourrons plus nous remuer.

Je crains beaucoup toutes ces précautions, au moyen desquelles on circonscrit les habitants d'un pays ; je suis fort embarrassé pour voter une loi qui, à mon avis, les multiplie outre mesure.

M. le président. - Voici la nouvelle rédaction proposée par M. T'Kint de Naeyer :

« Tout propriétaire ou détenteur, à quelque titre que ce soit, d’animaux atteints de l’une des maladies contagieuses déterminées par le gouvernement ou de sympômes apparents de ces maladies, est tenu, etc. »

M. David. - Les amendements proposés doivent avoir pour but de fixer d'une manière bien claire le sens de l'article premier.

Cet article, rapproché de l'article 15, devient excessivement important ; vous voulez qu'un paysan soit plus clairvoyant, ait plus de science que l'artiste vétérinaire lui-même.

Vous voulez qu'un cultivateur sache quand on pourra suspecter sa bête d'être atteinte ou de pouvoir plus tard être atteinte de telle ou telle maladie contagieuse. Mais les artistes vétérinaires eux-mêmes se trompent bien souvent sur les symptômes d'une maladie ; et vous voudriez que le cultivateur en sût plus, que beaucoup de vétérinaires en certains cas !

Rapprochant l'article premier de l'article 15, vous verrez que, pour ne pas avoir prévenu l'autorité locale, un cultivateur peut être condamné, surtout en cas de récidive, à 200 fr. d'amende et à un emprisonnement. Vous sentez que cela devient extrêmement grave. Lisez le dernier paragraphe de l'article 15 et vous y trouverez : L'amende sera de 200 fr. en cas de récidive, et le délinquant pourra, en outre, être condamné à un emprisonnement de 8 jours.

Messieurs, la question est trop sérieuse pour que nous ne cherchions pas à améliorer autant que possible l'article premier. Je voterai l'amendement de l'honorable M. T'Kint de Naeyer, s'il n'en est pas proposé de plus précis.

M. Van Overloop. - Messieurs, il est de principe que, lorsque le législateur fait une loi pénale, il faut qu'il existe des abus et des abus graves que l'on ne puisse faire disparaître qu'à l'aide de l'application d'une peine. C'est dans ce cas seulement qu'il est donné au législateur de porter une atteinte quelconque à la liberté humaine. Il est incontestable pour moi que toute pénalité qui n'est pas nécessaire pour faire disparaître des abus, des abus invétérés qu'on ne saurait faire disparaître d'une autre manière, est un malheur pour un pays. C'est le cas de dire avec un ancien : « plurimae leges, pessima respublica. »

Messieurs, je vous le demande, pour justifier le projet en ce moment en discussion, quels sont les graves abus qu'on nous a signalés ? L'exposé des motifs n'en dénonce aucun. Quel est donc le motif déterminant de cette loi ? Quel est-il surtout aujourd'hui que la Chambre est à la veille de procéder à la révision complète du Code pénal ?

Quel est-il ? L'exposé des motifs n'en dit rien. Je ne vois, messieurs, qu'une seule chose dans le projet de loi : c'est l'organisation nouvelle d'un corps de vétérinaires, d'un grand nombre de fonctionnaires du gouvernement, vivant aux frais du gouvernement, aux frais du contribuable, avec la possibilité de tourmenter d'une manière incessante nos paysans qui ne sont déjà que trop tracassés.

« Mais, dit-on, l'article premierne consacre que le maintien du Code pénal de 1810. »

Je vous le demande, messieurs, ce Code pénal de 1810, contre lequel nous protestons tous, ce Code pénal, dont le Congrès national a ordonné la révision ; ce Code pénal que le gouvernement est occupé lui-même à réviser, irez-vous le prendre pour modèle ? Ne voulez-vous pas améliorer ?

Messieurs, en relisant les documents produits par le gouvernement, j'ai fait une fâcheuse réflexion. On veut, et l'on a raison de le vouloir, développer de plus en plus le sentiment national en Belgique, et que (page 253) fait-on lorsqu'il s'agit de modifier la législation belge ? C'est toujours la législation française que l'on prend pour modèle. Messieurs, comparez les documents qui nous viennent de Marie-Thérèse avec les documents émanés des rois de France, avec la législation d'un pays où depuis deux siècles avait été supprimée, au profit de la centralisation, « l'administration du pays par le pays », et demandez-vous s'il nous convient, à nous, législateurs belges, qui avons nos mœurs nationales, de marcher toujours à la remorque d'un autre peuple ! Messieurs, la plus grave atteinte qu'on puisse porter à l'esprit national d'un peuple, c'est d'introduire dans la législation de ce peuple des principes qui ne sont pas compatibles avec ses mœurs, c'est d'appliquer à un peuple essentiellement décentralisateur et libre les principes qui régissent un autre peuple essentiellement centralisateur.

Messieurs, réfléchissez-y bien, c'est dans l'intérêt de mon pays que je parle. Toujours lorsqu'il s'agit de faire des réformes, c'est sur la législation française qu'on les calque. Je vois là un grave danger ; ce danger, je veux, autant que possible, chercher à le prévenir.

J'en reviens à l'amendement.

Il est incontestable que l'amendement de l'honorable M. 'T Kint doit être admis. Il est certain, comme l'a dit avec beaucoup de raison l'honorable M. 'T Kint, qu'une loi pénale doit être claire et précise et que ce n'est pas dans l'opinion du rapporteur de la section centrale ou dans l'opinion émise par le ministre qui prend part à la discussion, que l'on peut aller chercher la véritable pensée du législateur. Toute loi pénale doit être claire et précise ; et par cela même qu'elle n'est pas claire et précise, elle n'est pas bonne.

Ce motif et les autres considérations que j'ai fait valoir me détermineront, malgré l'amélioration qui résultera de l'adoption de l'amendement de l'honorable M. T'Kint, à voter contre le projet de loi.

M. Lelièvre, rapporteur. - La matière dont nous nous occupons est une matière spéciale soumise à des règles particulières. On ne peut donc l'assimiler à d'autres règles par des principes différents.

Or, tous les hommes de l'art, consultés, sont d'avis qu'il faut maintenir les expressions que l'on veut supprimer et que cela est indispensable pour qu'on ne puisse étuder la loi en discussion.

Vraiment, je ne conçois pas comment les expressions dont il s'agit peuvent exciter une si vive répugnance. Elles ont un sens raisonnable tel qu'il est énoncé au rapport.

Jamais le détenteur de l'animal ne sera frappé d'une peine, que dann le cas où après avoir eu de justes motifs de croire que l'animal est atteint d'une maladie contagieuse, il aura négligé de satisfaire à la loi.

C'est, du reste, dans le même sens qu'est conçu le Code pénal, et il en est de même des lois antérieures en vigueur, sous l'ancien régime, dans notre patrie.

Je demande de nouveau à mes contradicteurs pour quel motif nous devrions changer une législation qui n'a jamais donné lieu à aucun abus ni à aucun inconvénient !

Je conçois qu'on modifie les lois quand il en est résulté des abus réels, mais changer une législation qui remonte à nombre d'années et qui n'a jamais donné lieu à aucune plainte, c'est ce que je ne puis admettre.

Mais en France même, lorsqu'on s'est occupé en 1832 de la révision du Code pénal, on a maintenu la disposition si vivement critiquée en cette enceinte, ce qui prouve qu'en France aussi la prescription attaquée n'a jamais été considérée comme abusive.

Et lorsqu'on fait appel à nos anciennes ordonnances, c'est probablement parce qu'on n'en a pas pris une lecture attentive. On n'a qu'à lire les anciennes ordonnances de Belgique annexées au projet loi et notamment l'ordounance régissant les Flandres et l'on y verra sanctionnées des amendes considérables, des peines corporelles et arbitraires très graves, alors que le projet eu discussion ne prononce que des peines beaucoup moins sévères. Il n'y a nulle comparaison à établir entre le projet de loi et l'ancienne législation de Belgique, sons le rapport de l'importance des pénalités.

Dans la matière,qui nous occupe et qui est spéciale, il faut laisser quelque chose à l'appréciation des juges qui appliquent les lois d'une manière sensée, et ne prononcent pas des condamnations, alors que le délinquant n'est pas en faute.

Mais l'expérience m'a appris combien il est facile d'échapper à des lois de police qui prêtent à la moindre équivoque, et c'est pour ce motif que je persiste à m'opposer à l'amendement rejeté par.la section centrale.

M. Tesch. - Messieurs, je n'éprouve, pour mon compte, aucune répugnance à accepter la rédaction du gouvernement. Cette rédaction à déjà été admise dans d'autres lois, et je crois qu'elle pourrait l'être encore. Car, au fond de quoi s'agit il ? Il ne s'agit que d'une interprétation et d'une application à faire par les tribunaux.

Le but que l'on poursuit est celui-ci : c'est de forcer le propriétaire ou le détenteur d'animaux qui peut avoir des doutes sérieux sur la question de savoir si l'animal qu'il détient est atteint de maladie, d'en faire la déclaration à l'autorité et de prendre toutes les précautions pour que cette maladie ne soit pas communiquée à d'autres animaux. Voilà quel est le but de la loi.

Quand maintenant des poursuites seront faites devant les tribunaux, qu'arrivera-t-il ? Les tribunaux se demanderont : Ce propriétaire avait-il des raisons suffisantes de croire que l'animal était atteint de la maladie ? et si l'on ne prouve pas devant les tribunaux que ce propriétaire avait des raisons suffisantes pour croire que son animal était atteint de la maladie, en d'autres termes qu'il avait des motifs de suspecter qu'il était atteint, ils acquitteront. Il ne suffira pas, comme on paraît le croire, de venir dire à un tribunal : Ce propriétaire pouvait suspecter que son animal était atteint de maladie. Pour qu'une condamnation soit prononcée, il faudra qu'il soit démontré au tribunal qu'il y avait des raisons suffisantes de croire l'animal atteint.

Voilà au fond le résultat auquel on tend et qu'il faut obtenir.

Mais comme le mot « suspecter » paraît inspirer des répugnances à quelques-uns de nos honorables collègues, je puis parfaitement me rallier à l'amendement proposé par l'honorable M. T'Kint de Naeyer, mais en complétant sa pensée. Il ne suffit pas, à mon avis, de dire dans la loi que le détenteur ou le propriétaire d'un animal qui présentera les symptômes d'une maladie, devra faire sa déclaration ; il faut ajouter qu'il en sera de même du propriétaire ou du détenteur qui aura des raisons suffisantes de croire que son animal est atteint de cette maladie.

M. le ministre de l'intérieur vous a tantôt indiqué un cas extrêmement grave et dans lequel, lors même qu'il n'y aurait pas de symptômes de maladie, un propriétaire doit prendre toutes les précautions imaginables. Il a cité la rage. Le propriétaire, le détenteur d'un chien a vu ce chien en communication avec un chien enragé.

Il est reconnu le lendemain et le surlendemain que le fait est incontestable.

Le chien de ce propriétaire ne présente encore aucun symptôme de la rage. N'est-il pas cependant du devoir de ce propriétaire de prendre toutes les précautions voulues ?

Ju vous citerai d'autres maladies : la morve, le farcin. Il est connu que le cheval d'un cultivateur, d'un routier a été en communication avec un autre cheval atteinl de maladie, permettez-moi l'expression, que ces chevaux ont mangé au même râtelier.

Cela est signalé au propriétaire ; il lui est recommandé de ne pas laisser ce cheval en communication avec d'autres ; le propriétaire résiste à ces remontrances, il n'en tient aucun compte. Eh bien, il faut qu'on puisse sévir contre ce propriétaire, puisque jusqu'alors l'animal ne présente aucun symptôme de maladie.

Je pense, messieurs, qu'il faut adopter l'amendement de l'honorable M. T'Kint, en ajoutant à l'article un paragraphe ainsi conçu :

« Il en sera de même des propriétaires ou détenteurs d'animaux qui auront des raisons suffisantes de croire que leurs animaux sont atteints des mêmes maladies. »

Si cet amendement est adopté, ce sera aux tribunaux à décider si les raisons ont été suffisantes, oui ou non. Ainsi, par exemple, si l’on produisait des témoins constatant qu'un chien a été en communication avec un chien enragé, que le propriétaire en a eu connaissance et que, malgré cela, il a laissé son chien parcourir les rues et a exposé ainsi tous les passants à être mordus, je dis que dans ce cas le propriétaire doit être condamne.

Si au contraire il n'est pas établi que le propriétaire avait connaissance du fait et que l'animal n'avait aucun symptôme de maladie, il sera évident qu'il n'avait pas de raisons suffisantes de croire que son animal était atteint de la rage, et aucune condamnation ne pourra être prononcé contre lui.

Je crois, messieurs, que c'est dans ce sens que l'article doit être rédigé.

- Les amendements de MM. T'Kint de Naeyer et Tesch sont successivement mis aux voix et adoptés.

L'article premier ainsi amendé est ensuite mis aux voix et adopté.

Article 4 (nouveau)

« Art. 4 nouveau (proposé par M. Visart). Quand la maladie aura été reconnue être la pleuropneumonie exsudalive, le troupeau, qui aura été en contact avec l'animal abattu, sera soumis à l'inoculation, avec toutes les précautions qu'exige le procédé Willems.

« Les frais en seront répartis, par moitié, entre l'Etat et le propriétaire. »

M. Visart. - Messieurs, tout en conservant mes convictions sur l'efficacité du système que j'ai préconisé, en présence des observations qui se sont produites, je retire ma proposition.

Article 5

« Art. 5. Les animaux que le médecin vétérinaire a déclarés être atteints d'une maladie contagieuse incurable sont abattus immédiatement après la remise de l'ordre écrit des autorités que le gouvernement chargera du soin d'ordonner l'abattage. »

M. Julliot. - Messieurs, je demanderai à l'honorable ministre de l'intérieur de vouloir nous expliquer quel est le sens qu'il attache à la dernière phrase de l'article 5, que voici : « (Les animaux) sont abattus immédiatement après la remise de l'ordre écrit des autorités que le gouvernement chargera du soin d'ordonner l'abattage. » Ces autorités paraissent ne pas encore être connues puisqu'elles ne sont pas désignées.

Je demanderai à M. le ministre si, lorsqu'il sera nanti de cette loi il se croira en droit de créer et de payer des autorités nouvelles que nous ne connaissons pas encore, par exemple des contrôleurs, des vérificateurs des opérations, des vétérinaires.

Je voudrais à cet égard quelques explications.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Messieurs, il n'est pas le moins du monde question de créer des autorités nouvelles ; celles que la loi actuelle charge de la police sont les seules que le gouvernement chargera d'ordonner l'abattage. Ainsi, dans les cas ordinaires, ce sera le (page 254) bourgmestre ; dans d'autres circonstances et à défaut du bourgmestre, ce sera le commissaire d'arrondissement. Cela se fait ainsi aujourd'hui, et cela continuera à se faire de la même manière.

M. Allard. - Messieurs, on parle plusieurs fois du commissaire d'arrondissement, mais dans les villes où le commissaire d'arrondissement n'a rien à voir, qu'arrivera-t-il ?

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Dans les villes, ce sera le bourgmestre.

- L'article 5 est mis aux voix et adopté.

Article 6

« Art. 6. Lorsque le propriétaire d'un animal dont l'abattage est provoqué, conteste la nature ou l'incurabilité de la maladie, le bourgmestre réclame la présence d'un second médecin vétérinaire pour faire une visite contradictoire.

« En cas de dissidence, il appelle un troisième médecin vétérinaire qui décide en dernier ressort. »

M. le président. - M. de Bronckart a présenté l'amendement suivant :

« Lorsque le propriétaire d'un animal, dont l'abtatage est provoqué, contestera la nature de l'incurabilité de la maladie, il pourra désigner au bourgmestre, qui en réclamera la présence, un second médecin vétérinaire pour faire une visite contradictoire. »

Le paragraphe 2 comme au projet du gouvernement.

« Les frais à résulter des dispositions ci-dessus sont à charge du propriétaire si la contre -visite lui est défavorable, dans le cas contraire, ils sont à charge du gouvernement. »

M. de Bronckart. - Messieurs, le projet de loi que nous discutons commine des peines extrêmement graves contre les propriétaires ou détenteurs d'animaux malades et ne contient aucune garantie en leur faveur ; il les livre pieds et poings liés ou à l'ignorance ou à la malveillance des vétérinaires du gouvernement.

J'eniends dire que ce sont des gens instruits et probes, j'en demeure d'accord, j'en connais, effectivement, comme cela : mais il en est d'autres aussi. Pour être vétérinaire du gouvernement, on n'en est pas moins homme. On peut se tromper, j'imagine ; on peut avoir de petites animosités, de petites rancunes, de petites vengeances à exercer. Et soyez assurés, messieurs, que dans bien des villages - je ne dis pas dans tous - mais dans bien des villages, il en sera ainsi. Le cultivateur qui ne fera pas habituellement traiter son bétail par le vétérinaire du gouvernement aura beaucoup plus de maladies contagieuses dans ses étables, beaucoup plus d'animaux à abattre que pas un autre.

Or, il ne faut pas que cela soit ; il ne faut pas que cela puisse être ; il ne faut pas même qu'on soupçonne que cela puisse être. Il faut donc des garanties et des garanties sérieuses pour les cultivateurs. Celles que lui offre l'article 6 du projet sont-elles de nature à les satisfaire ? Je ne le crois pas.

D'après cet article 6, le propriétaire ou le cultivateur, qui ne voudra pas s'en rapporter à l'infaillibilité du vétérinaire du gouvernement, peut provoquer une visite contradictoire. Jusque-là tout est bien ; mais par qui sera faite cette visite contradictoire ? Par un vétérinaire appelé à cet effet, par le propriétaire sans doute ? Du tout, par le bourgmestre qui désignera presque toujours et de nécessité, même dans la plupart des localités, le vétérinaire du gouvernement dans le canton le plus voisin. Celui-ci, par politesse, par les égards que l'on se doit entre fonctionnaires, et peut-être un peu aussi à charge de revanche, ne manquera pas de trouver que son collègue a parfaitement saisi les symptômes du mal ; que c'est un homme qui a le sens du diagnostic développé, et qu'il ne reste qu'une chose raisonnable à faire, c'est de tuer l'animal malade.

Mais supposons pour un moment un cas tout à fait exceptionnel, n'en doutez pas, prenez que ce contre-examinateur soit un homme sans égards pour les convenances, qu'il trouve que son collègue s'est trompé, qu'il n'y a pas la moindre apparence de maladie contagieuse et qu'il s'en explique clairement. Aussitôt le bourgmestre réclame, au terme du deuxième paragraphe de l’article 6, un troisième vétérinaire, toujours du gouvernement, chargé de mettre les deux autres d'accord.

Je vous le demande, messieurs, que voulez-vous que la pauvre bête fasse contre trois ? Elle sera abattue, messieurs, et le propriétaire, lui, sera battu et payera ; et non seulement il sera battu et payera l'amende, mais il payera encore les bâtons que l'on aura employés pour le battre ; car c'est ainsi que l'entendent et l'article 6 et la section centrale et le gouvernement. On s'en est expliqué, et à cet égard il ne peut rester aucun doute ; tous les frais résultant d'une contre-expertise sont à charge du propriétaire ou détenteur qui la provoque.

En présence d'une semblable disposition, ainsi entendue, qui viendra jamais réclamer une contre-visite ? Quel est l'homme assez dépourvu de sens pour se faire le Géronte d'une telle comédie ?

Et il n'y a pas à s'y tromper, messieurs ; je dis qu'en fait, les choses se passeront ainsi les trois quarts du temps, dans les campagnes ; et c'est parce que j'en ai la conviction intime, que j'ai l'honneur de proposer à la Chambre un changement de rédaction à l'article 6, qui a pour but de consacrer, dans la question qui nous occupe, le principe protecteur qui a présidé à toute expertise contradictoire, à savoir, que le vétérinaire appelé par le bourgmestre, pour procédera la contre-visite, sera désigné par le propriétaire ou le détenteur de l'animal accusé de maladie contagieuse, et que les frais à en résulter seront à charge de l'ayant tort.

M. de La Coste. - Je voudrais demander au ministère une explication relativement à cet article mis en rapport avec l'article 16.

L'article 16 commine une pénalité de 100 à 500 francs d'amende et d'un emprisonnement de 8 à 15 jours, et, en cas de récidive, de 500 à 1,000 francs et d'un emprisonnement de 15 jours à 1 mois. Parmi les articles qui donnent lieu à l'application de ces peines, on cite l'article 6. Je demande, prématurément peut-être, mais l'objet pourrait échapper plus tard à notre attention ; je demande comment on peut à l'article 6 encourir ces pénalités, quel est le délit qui est supposé à l'article 6 ?

Je vois simplement que le propriétaire conteste le fait qui lui est opposé et qu'on demande une expertise contradictoire. Mais il n'y a pas de délit à contester un fait. Je ne comprends donc pas à qui la pénalité peut s’appliquer. Est-ce la personne qui conteste ? Est-ce le bourgmestre qui nomme les experts ? Sont-ce les experts mêmes ? Je ne vois donc aucune application raisonnable, qui tombe sous les yeux, des pénalités de l'article 16. Je désirerais avoir une explication à cet égard.

M. Coomans. - Messieurs, je n'ajouterai rien aux bonnes observations que vient de présenter M. de Bronckart. Il me semble que la justice exige que l'amendement proposé par cet honorable membre soit adopté.

Je proposerai un autre amendement au second paragraphe de l'article 6. Ce paragraphe est ainsi conçu :

« En cas de dissidence, il (le bourgmestre) appelle un troisième médecin vétérinaire qui décide en dernier ressort. »

Je propose de rédiger ce paragraphe de la manière suivante :

« En cas de dissidence, l'abattage est ajourné. »

Messieurs, il n'y a pas de raisons valables ni pour faire supporter au propriétaire de l'animal les frais résultant des investigations proposées par l'autorité, ni pour abattre un animal dont un médecin vétérinaire a déclaré que la santé est bonne. C'est le cas de dire que lorsqu'il y a doute, il faut s'abstenir.

Je me borne à présenter ces observations, me réservant de défendre mon amendement plus en détail, s'il est attaqué.

M. Lelièvre, rapporteur. — Il me paraît essentiel que les amendements qui viennent d'être présentés soient l'objet d'un examen attentif. On ne peut en effet discuter des propositions sans en avoir étudié la portée. Je demande donc le renvoi des amendements à la section centrale.

M. Coomans. - Je ne m'oppose pas au renvoi de mon amendement à la section centrale.

M. de Theux. - Je ne fais pas non plus d'opposition à la motion d'ordre de l'honorable M. Lelièvre ; mais puisque la section centrale va être saisie de nouveau de l'examen de cet article, je crois qu'il est bon de déposer dès à présent tous les amendements dont l'article est susceptible. Pour que l'amendement de l'honorable M. de Brouckart puisse produire de l'effet, il faut que le troisième expert soit désigné par le juge de paix, car si le bourgmestre désigne le premier et le troisième expert, il est très probable qu'il sera fort inutile pour le propriétaire de désigner le second expert.

Je demande donc que le troisième expert soit désigné par le juge de paix.

- L'amendement est appuyé.

M. Pierre. - Je viens appuyer, messieurs, l'amendement proposé à l'article 6 par mon honorable ami, M. de Bronckart. Cet amendement a un double but.

Il offre au propriétaire de l'animal malade une garantie que ne lui donne pas le projet.

Il met, en outre, les frais de contre-expertise à charge de l'Etat, s'il est reconnu que l'animal ne doit pas être abattu et, dans tous les cas, les frais du tiers expert, quand l'autorité jugera à propos d'en appeler un.

Enoncer le double but de l'amendement, c'est démontrer qu'il est parfaitement logique, rationnel.

L'abattage d'un animal par voie d'autorité constitue une perte réelle, parfois importante, imposée au propriétaire.

Le corps social exige du particulier ce sacrifice dans l'intérêt de l'état sanitaire du bétail de tous, quelquefois même dans l'intérêt de la santé publique.

Sans aucun doute, l'intérêt individuel doit céder devant l'intérêt général, cela n'est pas contestable.

Nous n'en devons pas moins sauvegarder le plus possible cet intérêt individuel. Il ne doit être sacrifié que lorsque la nécessité en est complètement établie. On sait comment les choses se passent. L'autorité ordonne la visite de l'animal atteint, ou plutôt, soupçonné atteint de maladie contagieuse et l'abattage ensuite, quand l'existence de cette maladie est constatée. Si le propriétaire la conteste, n'est-il pas juste de lui laisser le choix du médecin vétérinaire qui sera chargé d'opérer la visite contradictoire ? n'est-il pas juste également de faire supporter les frais de cette contre-visite par le gouvernement, si elle aboutit à reconnaître que l'animal ne doit pas être abattu ? Il n'est pas moins équitable d'attribuer à l'Etat les frais du tiers expert, car il sera nécessairement et constamment appelé par l'autorité, puisque l'intervention de ce tiers expert ne sera jamais réclamée qu'en cas de dissidence des deux autres experts. A ce sujet, j'approuve le sous-amendement que nous soumet l'honorable M. de Theux. Je trouve plus de garantie dans la désignation du tiers expert par le juge de paix du canton. Il ne faut pas perdre de vue que la désignation du premier expert appartient au (page 255) bourgmestre. On pourrait admettre qu'il y aurait chez lui propension à choisir le tiers expert dans le sens du premier expert. La désignation ainsi faite ne présenterait dès lors pas autant de conditions d'impartialité qu'étant confiée au juge de paix, magistrat plus à l'abri de petites influences de localités, souvent regrettables.

M. Lelièvre, rapporteur. - Je me bornerai, pour le moment, à répondre à l'interpellation de M. de La Coste. L'honorable membre demande pour quel motif il est fait mention de notre article 6 dans l'article 16 comminant les pénalités. La réponse est facile.

Dans le cas de l'article 5, lorsqu'un médecin vétérinaire a ordonné l'abattage de l'animal sans réclamation du détenteur, celui-ci, s'il s'oppose à l'exécution de la mesure, encourt la peine énoncée à l'article 16.

L'art. 6 prévoit un autre cas, c'est l'hypothèse dans laquelle il aurait été décidé sur expertise contradictoire que l'animal doit être abattu. Eh bien, en ce cas encore, le détenteur de l'animal qui, nonobstant l'expertise dans laquelle il aurait succombé, s'opposerait à l'abattage, encourrait aussi les pénalités énoncées à l'article 16. L'article 6 prévoit donc un cas différent de celui énoncé à l'article 5, et comme dans ces deux hypothèses le propriétaire récalcitrant encourt la même pénalité, l'article 16 a dû nécessairement se référer à l'article 6 non moins qu'à l'article 5.

M. de La Coste. - Je demanderai que la section centrale veuille bien examiner également si l'on ne pourrait pas rendre plus clair dans le texte de la loi l'idée que vient d'exprimer l'honorable rapporteur.

- Le renvoi à la section centrale, de tous les amendements proposés à l'article 6, est mis aux voix et adopté.

Articles 7 et 8

« Art. 7. Tout propriétaire ou détenteur d'animaux ou de bestiaux est tenu de déclarer, dans les vingt-quatre heures, au bourgmestre de la commune, ceux qui succombent à l'une des maladies contagieuses déterminées en vertu de l'article premier, ou qui sont tués comme atteints de l’une de ces affections.

« Cette déclaration doit être faite, dans le même délai, par les maréchaux ou les médecins vétérinaires qui ont donné leurs soins à ces animaux ou en ont prescrit l'abattage. »

- Adopté.


« Art. 8. Un médecin vétérinaire doit assister à chaque foire ou marché de chevaux ou de bestiaux, à l'effet de s'assurer de l'état sanitaire des animaux qui y sont exposés en vente.

« Les frais résultant de cette surveillance sont, par moitié, à la charge de l'Etat et des communes où les foires et marchés sont établis. »

- Adopté.

Article 9

« Art. 9. Les animaux chez lesquels les médecins vétérinaires, chargés de la surveillance des foires et marchés, reconnaissent ou soupçonnent l'existence de l'une des maladies contagieuses déterminées en vertu de l'article premier, sont mis en fourrière, sur la déclaration desdits médecins vétérinaires, et isolés dans le lieu désigné par le bourgmestre de la commune, pour être entretenus et traités jusqu'à parfaite guérison, aux frais du propriétaire ou du détenteur, ou abattus conformément aux articles 5 et 6 ci-dessus, le tout sans préjudice des peines encourues pour contravention à l'une des dispositions de la présente loi. »

M. Thibaut. - Messieurs, en présence de cet article, lorsqu'un animal malade ou suspect d'être atteint de maladie contagieuse est amené sur une foire ou marché, le propriétaire est exposé soit à voir cet animal mis en fourrière pour être entretenu et traité jusqu'à parfaite guérison à ses frais, ou à voir cet animal abattu. Cette alternative sera toujours excessivement onéreuse pour le propriétaire de l'animal. En général, cependant, il n'aura pas de reproche à se faire, car on ne s'expose pas à conduire sur une foire ou un marché un animal présentant des signes visibles de maladie contagieuse ; mais ce n'est pas même le cas où l'animal serait condamné à être abattu que je considère comme étant toujours le plus grave pour le propriétaire.

Ce que je considère comme pouvant être le plus onéreux pour lui, c'est la mise en fourrière de son bétail pour être entretenu et traité jusqu'à parfaite guérison, à ses frais. Sans suspecter le moins du monde la délicatesse des vétérinaires du gouvernement, ne peut-il cependant arriver que tel vétérinaire chargé d'examiner les animaux présentés sur un marché, soit disposé à les croire trop facilement malades et les fasse mettre en fourrière pour être entretenus et traités jusqu'à parfaite guérison ?

L'intérêt personnel est ici en jeu, puisque d'ordinaire le même vétérinaire traitera l'animal en fourrière. Cependant le propriétaire payera tous les frais, dussent-ils dépasser la valeur de l'animal en traitement. Il faut, ce me semble, admettre dans certains cas la faculté pour le propriétaire de reconduire chez lui les animaux que le médecin vétérinaire ne permettrait pas de laisser sur la foire.

Je proposerai un amendement dans ce sens ; il serait ainsi conçu :

« Remplacer la partie de l'article qui commence aux mots « sont mis en fourrière », par ce qui suit :

« Sont, par ordre du bourgmestre, sur la déclaration desdits médecins vétérinaires, et suivant les cas, reconduits isolément chez le propriétaire, ou mis en fourrière et isolés pour être entretenus et traités jusqu'à ce que le transport de ces animaux puisse avoir lieu sans inconvénient, ou enfin abattus, conformément aux articles 5 et 6 ci-dessus. »

M. Tesch. - J'ai demandé la parole pour faire des observations analogues à celles que vient de présenter M. Thibaut. L'article qui nous occupe peut donner lieu à des abus sur lesquels j'appelle l'attention de la Chambre. Ainsi il suffirait qu'un artiste vétérinaire suspectât un animal d'être atteint d'une des maladies déterminées par le gouvernement pour qu'immédiatement cet animal fût mis en fourrière et dût y rester. Cependant l'artiste vétérinaire peut se tromper, l'animal devra être mis en fourrière pour y être traité jusqu'à parfaite guérison ou jusqu'à l'abattage ; il pourra y rester quinze jours, un mois et davantage.

Si le médecin vétérinaire s'est trompé et qu'il ait reconnu au bout de ce temps que l'animal n'était pas atteint de maladie contagieuse, ce sera toujours, d'après le projet, le propriétaire qui devra payer tous les frais de fourrière. C'est là une chose extrêmement grave, que je ne puis admettre.

Il est indispensable qu'on introduise dans la loi un amendement dans le sens de celui que vient de présenter M. Thibaut.

J'en avais préparé un, ayant le même objet ; il consiste à dire : « Les animaux, etc., en vertu de l'article premier, devront quitter les foires et marchés ; les propriétaires ou détenteurs de ces animaux seront tenus de les isoler jusqu'à l'abattage ou jusqu'à parfaite guérison. »

Le propriétaire, en reconduisant ces animaux chez lui, aura à prendre les mesures nécessaires pour éviter toute espèce de danger de contagion.

L'article du gouvernement pourrait entraîner pour le cultivateur les conséquences les plus désastreuses ; on pourrait lui imposer des frais qui souvent dépasseraient la valeur de l'animal.

Si cet article devait passer, je proposerais un amendement ayant pour objet de mettre à la charge de l'artiste vétérinaire ou du gouvernement les frais de fourrière, quand l'animal serait reconnu n'être pas atteint de la maladie dont on l'avait suspecté.

Il y aurait injustice à faire supporter ces frais par le propriétaire ; c'est une chose que je ne puis pas admettre. Je demanderai que mon amendement, comme celui de M. Thibaut, soit renvoyé à la section centrale. La rédaction devra probablement en être modifiée.

M. Lelièvre, rapporteur. - Je pense qu'il est inutile de continuer la discussion. Les amendements sont de nature à modifier profondément l'article 9. Il me paraît essentiel que la section centrale les examine sérieusement. Je demande donc le renvoi de ces amendements à la section centrale qui émettra son avis.

M. Coomans. - Avant que la Chambre prononce le renvoi à la commission, je ferai une observation : c'est que, selon toute vraisemblance, la rédaction actuelle de l'article 9 aurait pour conséquence la désertion des foires et marchés.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Je désire présenter une seule observation, c'est que le but du gouvernement eu proposant l'article 9 a été d'obtenir une garantie très complète ; elle ne peut résulter que de l'isolement ; on craint que la mise en fourrière n'entraîne des abus ; mais l'autorité locale est là pour les faire cesser dans le cas où il y aurait excès de la part du vétérinaire sur la réquisition duquel la mise en fourrière a lieu.

Sous un autre rapport, les mesures qu'on propose de substituer à la mise en fourrière présentent l'inconvénient de ne pas rendre l'isolement immédiat et d'occasionner des frais assez élevés ; car la conduite de ces animaux ne pouvant être abandonnée au propriétaire seul, il faudra que l'animal qui se trouve dans cette situation soit escorté, afin qu'on soit sûr qu'il a été isolé depuis la foire jusqu'à sa destination.

Il y a donc là des inconvénients réels. J'appelle sur ce point l'attention de la section centrale.

M. Vander Donckt. - Messieurs, pour donner toute garantie aux propriétaires ou détenteurs d'animaux présents aux foires et marchés et prévenir tout arbitraire à leur égard, je demanderai que la section centrale veuille bien examiner si les dispositions de l'article 6 modifié ne pourraient leur être rendues applicables pour le cas où les vétérinaires reconnaissent ou soupçonnent l'existence de l'une des maladies contagieuses déterminées en vertu de l'article premier aux animaux présents à la foire, et qu'en vertu de cet article il leur soit permis de contester la nature ou l'incurabililé de la maladie et dans ce cas designer un deuxième vétérinaire de son choix pour constater si l'animal est infecté ou non, et, en cas de dissidence, nommer un troisième vétérinaire pour statuer définitivement. La section centrale pourrait examiner en outre, à propos de l'amendement de l'honorable comte de Tlietix, qui propose la nomination du troisième vétérinaire par le juge de paix, s'il ne serait pas préférable de laisser cette faculté aux deux premiers vétérinaires, comme cela se pratique habituellement dans tous les cas d'expertise.

Il y aurait dans cette mesure, me semble-t-il, une grande garantie pour les propriétaires de bestiaux contre l'arbitraire et le défaut de connaissances des vétérinaires.

M. de Bronckart. - Je désire appeler l'attention de la section centrale sur le point de savoir si la mise en fourrière n'irait pas directement contre le but que se propose la loi ? N'est-elle point un moyen infaillible de multiplier outre mesure les foyers de contagion ? A mon avis, messieurs, il serait de beaucoup préférable de forcer, dans dans tous les cas, le propriétaire ou le détenteur d'un animal atteint d'une maladie contagieuse, à reconduire cet animal chez lui sous l'escorte du garde champêtre, ou de toute autre personne désignée par l'administration communale.

(page 156) M. Orts. - Je désirerais appeler l'attention de la section centrale sur les difficultés que présente l'organisation du principe de l'article que nous discutons quant à la mise en fourrière.

D'abord je ferai l'observation que vient de faire l'honorable M. de Bronckart, et je demanderai si le gouvernement a l'intention de faire construire dans toutes les communes où se tiennent des foires des espèces de lazarets avec des cases pour chaque espèce d'animaux et chaque espèce de maladie, où l'on mettrait les animaux atteints de la morve, de la gale, voire même de la rage. Ce serait peut-être un moyen de propager les plus graves maladies. Cela irait donc contre le but de la loi.

Cependant une considération qui rendrait nécessaire la construction de lazarets, si vous n'admettez pas que l'animal malade soit de suite reconduit chez le propriétaire, c'est que je ne sais qui consentirait à prêter son étable pour mettre en fourrière des animaux suspectés d'être atteints de maladies contagieuses. Aucun particulier n'y consentira. Le gouvernement devra donc avoir des locaux particuliers pour exécuter cette loi.

Ce sont des raisons, qui, au point de vue de l'économie et du but que la loi se propose, me paraissent militer en faveur de l'amendement qui dispose que l'animal malade devra être reconduit chez le propriétaire, avec les précautions qui seront jugées nécessaires pour qu'il ne communique pas la maladie dont il est atteint.

M. Tesch. - Mon amendement admet l'isolement. On peut dire que l'animal malade devra être escorté par le garde champêtre ou par tout autre agent de la force publique.

Au reste, le propriétaire qui n'aurait pas pris les précautions nécessaires tomberait sous l'application de l'article premier ; car après l'avertissement de l'artiste vétérinaire, il aurait évidemment des raisors suffisantes de croire l'animal malade.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Je crois qu'on exagère singulièrement les conséquences de la mise en fourrière. Dans la pratique cela se simplifie. Il ne faudra ni hospices, ni lazarets. Quand dans une foire un cheval est signalé comme atteint d'une maladie contagieuse, rien n'est plus simple que de l'isoler ; il suffit pour cela d'un hangar ou d'une grange, ou de tout autre abri provisoire ; ou peut même l'isoler en plein air. C'est ainsi que cela se passe dans la pratique. Les craintes que l'on a sont donc, je le répète, exagérées.

- Le renvoi de l'article 9 à la section centrale est prononcée.

Article 10

« Art. 10. Le gouvernement détermine les cas où il est interdit aux propriétaires ou détenteurs d'animaux atteints ou suspects de maladie contagieuse, de les vendre, faire vendre, tuer ou faire tuer pour la consommation ou tout autre usage ; il règle tout ce qui est relatif à l'équarrissage et à l'enfouissement des cadavres et des dépouilles des animaux morts ou abattus par suite de l'une de ces maladies, et il donne les instructions nécessaires pour purifier les écuries, étables et autres locaux dans lesquels les animaux atteints ou suspects de l'une de ces affections ont séjourné, ainsi que les équipages, harnais, colliers et autres objets à leur usage. »

- Adopté.

M. le président. - Il est entendu que l'on pourra introduire au second vote dans cet article et dans les autres articles du projet les changements qui seraient la conséquence des amendements introduits dans l'article premier.

Article 11

« Art. 11. Il est ouvert, dans chaque commune, un registre particulier dont le modèle est prescrit par le gouvernement, et qui sert à la transcription, par ordre de dates, des déclarations mentionnées aux articles premier, 7 et 9. »

- Adopté.

Article 12

« Art. 12. Une indemnité est accordée, par l'Etat, à tout propriétaire dont les chevaux ou les bestiaux sont abattus par ordre de l'autorité compétente, dans l'intérêt de la salubrité publique, à la suite de l'une des maladies contagieuses déterminées en verlu de l'article premier.

« Le gouvernement règle le taux de cette indemnité, ainsi que les formalités et les conditions auxquelles le payemeut en est subordonné. »

M. Visart. - Je ne veux pas contrarier le sens de cet article. Seulement pour rendre le deuxième paragraphe plus clair, je propose d'en rédiger la fin comme suit : « Conditions sans l'observation desquelles le payement ne pourra avoir lieu. »

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Je ne comprends pas bien la différence qu'il y a entre l'amendement proposé par l'honorable membre et le texte du projet. Il me semble que la rédaction du projet est aussi précise. S'il y a une différence, je demande qu'on veuille la signaler.

M. Visart. - C'est le même sens ; mais il me semble que cette phrase : « auxquelles le payement en est subordonné », laisse à désirer sous le rapport de la clarté et même du style. Je voudrais faire au moins disparaître le mot « en ».

M. Lelièvre. - Il me semble qu'on pourrait dire : « Le gouvernement règle le taux de cette indemnité ainsi que les formalités et les conditions auxquelles le payement est subordonné. »

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - La phrase me paraît cependant correcte : auxquelles le payement en est subordonné, c'est-à-dire le payement de l’indemnité.

- L'amendement de M. Visart est mis aux voix ; il n'est pas adopté.

- L'article 12 est adopté.

Articles 13 et 14

« Art. 13. En l'absence des Chambres législatives, le gouvernement prescrit les mesures que la crainte de l'invasion de maladies contagieuses régnant à l'étranger peut rendre nécessaires sur les frontières de terre et de mer.

« Ces mesures sont soumises à la sanction des Chambres, lors de leur prochaine réunion. »

- Adopté.


« Art. 14. Les médecins vétérinaires qui peuvent être requis par les autorités compétentes, en verlu de l'une des dispositions de la présente loi, sont désignés par le gouvernement, conformément à la loi du 11 juin 1850. »

- Adopté.

Article 15

« Art. 15. Seront punis d'une amende de 26 à 100 francs :

« Ceux qui n'auront pas fait, dans le délai voulu, les déclarations prescrites par les articles 1 et 7 ;

« Ceux qui se seront abstenus d'isoler, conformément à l'article 2, leurs animaux atteints ou suspects de maladie contagieuse ;

« Ceux qui auront contrevenu à l'article 4.

« En cas de récidive, l'amende sera de 100 fr. au moins et de 200 fr. au plus, et le délinquant pourra, en outre, être condamné à un emprisonnement de huit jours. »

M. le président. - M. de Steenhault a proposé un paragraphe additionnel ainsi conçu :

« Seront en outre punis d'une amende de 100 à 500 fr., sans préjudice de celles comminées par les paragraphes précédents, ceux qui auront fait stationner ou héberger leurs animaux atteints de maladie dans des écuries ou locaux placés hors de la commune qu'ils habitent ou qui les auront exposés dans des foires ou marchés. »

La section centrale propose de modifier cet amendement comme suit :

« Seront en outre punis d'une amende de 100 francs à 500 francs, sans préjudice de celles comminées par les paragraphes précédents, ceux qui auront fait cheminer, stationner ou héberger leurs animaux atteints de maladie, dans des écuries ou locaux placés hors de la commune qu'ils habitent ou qui les auront exposés dans des foires ou marchés. »

M. de Steenhault. - J'ai demandé la parole, non pour défendre mon amendement, mais pour faire observer que la rédaction de la section centrale est vicieuse. On ne peut pas faire cheminer des animaux dans des écuries ou locaux. Je crois que ce mot « cheminer » a été mal placé. On doit dire : « ceux qui auront fait cheminer leurs animaux atteints de maladie, qui les auront fait stationner ou héberger dans des écuries, etc. »

M. Lelièvre. - Je suis le membre de la section centrale qui me suis opposé à l'amendement de M. de Steenhault, parce qu'en effet il est inadmissible, soit en la forme, soit quant au fond de la disposition.

Il ne peut être admis en la forme ; en effet, sa rédaction ne peut être approuvée. D'abord on prononce deux amendes contre le même fait. Or, bien certainement cela n'est pas admissible en matière de législation ; impossible de comminer une nouvelle amende, sans préjudice de celles comminées par les paragraphes précédents. Cela est inouï en style législatif, indépendamment du mot « cheminer » introduit, par un de nos collègues de la section centrale, et formant un non-sens ; l'amendement énonce une disposition incomplète. Pourquoi, en effet ne punir que ceux qui hébergent leurs animaux hors la commune ? A mon avis, l'amendement devrait atteindre d'une manière générale tous ceux qui, sans avoir fait la déclaration prescrite par l'article premier n'isolent pas leurs animaux infectés de maladies contagieuses.

Un délit doit être défini d'une manière générale, et il n'est pas possible de le restreindre seulement à certains faits tels qu'ils sont énoncés à l'amendement ; mais ceux qui laissent leurs animaux infectés parcourir la commune même qu'ils habitent, séjourner dans des écuries, avoir communication avec d'autres, etc., commettent bien certainement un délit comme les individus dont s'occupe l'amendement.

En conséquence, indépendamment de la rédaction qui est vicieuse, l'amendement n'est pas rédigé en style législatif ; il devrait être généralisé et s'appliquer à un ensemble de faits, sans être restreint, comme il l'est, à certaines circonstances seulement. En conséquence, je dois déclarer qu'il m'est impossible de me rallier à la proposition de M. de Sieenhault.

M. Coomans. - Messieurs, il n'est pas juste de prescrire des formalités impraticables.

L'article 15 frappe d'une amende de 26 à 100 francs le petit cultivateur qui n'aura pas isolé dans un lieu fermé un animal suspect. Mais mettons-nous au point de vue des réalités de la vie rurale. Nous verrons qu'une foule de cultivateurs ne possèdent qu'une seule petite étable, renfermant deux vaches, un veau et un porc. L'un de ces animaux devient malade… non, est seulement suspect d'être malade. On ordonne au cultivateur d'isoler cet animal dans un lieu fermé. Le cultivateur répond que cela lui est impossible, et la justice réplique par une amende de 26 à 100 francs.

Je ne voterai jamais une pareille disposition.

M. Van CromphautC. - Messieurs, à l'exception de l'honorable rapporteur de la section centrale, aucun autre orateur n'a combattu l'opinion que j'ai émise dans la séance d'hier, contre la pénalité de l'emprisonnement ; d'où il m'est permis de conclure que la Chambre partage ma manière de voir dans cette grave question. Je viens donc par un (page 257) amendement proposer à la Chambre la suppression au dernier paragraphe de l'article 15, les quatorze derniers mots, à savoir :

« Et le délinquant pourra, en outre, être condamné à un emprisonnement de huit jours. »

Plus je réfléchis, messieurs, sur les conséquences funestes qui peuvent résulter de la conservation de la pénalité de l'emprisonnement, plus je trouve que dans pareille matière une pénalité de ce genre est contraire à nos mœurs et à la civilisation. Si la Chambre adoptait cette pénalité rigoureuse, combien d'honnêtes cultivateurs, ne connaissant réellement pas le genre de maladie de leurs animaux, ne seraient-ils pas dupes de leur ignorance !

L'honorable rapporteur de la section centrale qui est d'un avis contraire, doit savoir cependant combien les juges diffèrent dans l'appréciation des choses. Il suffit d'un malentendu, de la haine d'un témoin, ou d'une déclaration plus ou moins accablante par les médecins vétérinaires du gouvernement qui ne sont pas toujours les traitants, et par cela un peu mal disposés, pour jeter en prison un honnête cultivateur qui aurait tout au plus mérité une légère amende.

Je crois inutile de m'étendre davantage sur cette question. La pénalité des amendes dans ces divers cas est plus que suffisante pour la répression des délits, et je forme le vœu le plus sincère pour que la Chambre adopte mon amendement, qui a le caractère de la plus haute convenance.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Je sais qu'en général nos mœurs répugnent à des peines d'emprisonnement qui ne sont pas commandées par une nécessité absolue. Cependant, je dois faire remarquer que dans le cas actuel, il s'agit d'un délit assez grave, et que d'un autre côté, la loi ne punit de la peine de l'emprisonnement en cas de récidive, que d'une manière facultative ; c'est-à-dire que les tribunaux auront à apprécier si les circonstances réclament l'application d'une peine de cette nature.

Messieurs, puisque j'ai la parole, je dirai un mot aussi sur l'amendement de l'honorable M. de Steenhault. Je pense avec l'honorable rapporteur de la section centrale que cet amendement est inutile car, si le fait qu'on veut réprimer est plus grave que ceux dont il s'agit dans l'article auquel l'amendement se rapporte, d'un autre côté le juge a à sa disposition une échelle de peines assez étendue, qui lui permet de proportionner la pénalité à la gravité du délit. Si cependant la Chambre était disposée à adopter le principe de l'amendement je pense devoir dire que la disposition est incomplète. En effet l'honorable auteur de l'amendement le propose en vue de ceux qui auront fait stationner ou cheminer des animaux malades hors de la commune ; or, il peut arriver qu'on laisse stationner ou cheminer des animaux malades dans la commune et ce fait doit être puni tout aussi bien que l'autre.

Je proposerai donc de rédiger l'amendement de M. de Steenhault de la manière suivante :

« Seront punis d'une amende de 100 à 500 francs et d'un emprisonnement de huit à quinze jours :

« Ceux qui auront contrevenu aux articles 3, 5, 6 et 9, en ce qui concerne les mesures ou visites qui y seront mentionnées, ainsi qu'aux dispositions intervenues en exécution des articles 10 et 13.

« Ceux qui, sans avoir fait la déclaration voulue par l'article premier et en l'absence des mesures prévues par les articles 2, 3, et 4, n'auront pas isolé dans des lieux fermés ceux de leurs animaux atteints ou soupçonnés d'être atteints de l'une des maladies contagieuses déterminés par le gouvernement.

« En cas de récidive, etc. (Le reste comme à l’article.) »

Par cette rédaction, messieurs, je pense que tous les cas seraient prévus.

M. le président. - L'amendement de M. de Steenhault, tel qu'il vient d'être modifié par M. le ministre de l'intérieur, se rapporte à l'article 16. Nous le discuterons quand nous serons arrivés à cet article.

M. Coomans vient de proposer un amendement à l'article 15. Il consiste à ajouter au troisième paragraphe les mots : « S'ils le peuvent. »

M. Lelièvre. - L'amendemcni de M. Coomans est en opposition manifeste avec les articles que nous avons votés, et il introduit une anomalie inadmissible. Notre honorable collègue veut ne punir que les individus qui se seront abstenus d'isoler, s'ils le peuvent, leurs animaux. Mais les articles 2 et 3 ont établi l'obligation d'isoler, il ne s'agit donc pas de dire : « s'ils le peuvent », puisque nous avons admis d'une manière générale et absolue que l'isolement était obligatoire.

D'ailleurs, les expressions s'ils le peuvent anéantiraient toute l'économie de la loi. Chaque délinquant viendrait prétendre qu'il n'a pu isoler, et les prescriptions de la loi deviendraient illusoires ; Si nous voulons porter une loi, faisons-la sérieuse. Admettre l'addition proposée, c'est vraiment fournir à chaque individu les moyens de se soustraire aux prescriptions législatives ; c'est anéantir l'obligalion que nous avons créée dans d'autres dispositions.

M. Coomans. - Messieurs, je respecte infiniment les articles proposés par la section centrale, mais je respecte infiniment davantage la justice et le bon sens. L'honorable M. Lelièvre dit : « Nous créons une obligation et les petits cultivateurs seront forcés d’isoler ; nous le voulons ; c'est écrit dans la loi. » Mais ils répondent : « Nous ne le pouvons pas. » Direz-vous toujours : « Nous le voulons » ? Mais vous aurez fait là quelque chose d'injuste

Je ne tiens pas à mon amendement ; mais je supplie l'honorable ministre de lever les difficultés que j'ai indiquées tout à l’heure, difficultés pratiques. Le cultivateur est forcé à l'une de ces deux choses, soit à isoler l'animal suspect, simplement suspect ; soit à l'envoyer dans le pâturage que l'autorité communale aura indiqué.

Mais, ainsi que j'ai eu l'honenur de le dire, dans les deux tiers des villages de la Belgique, il n'y a point de pâturages. Nous ne faisons pas la loi seulement au point de vue des Ardennce, nous la faisons aussi au point de vue des Flandres et du Brabant flamand. J'en appelle à mes honorables collègues de ces parties du pays. En fait, un grand nombre de communes n'ont point de pâturages ; le bourgmestre s'abstiendra donc d'indiquer un pâturage et alors le cultivateur reste forcé, de par la loi, d'isoler l'animal malade ou suspect ; mais le peut-il ? Sont-ce vos articles de loi qui élargiront les étables du pauvre cultivateur. Je vous en supplie, messieurs, n'imposons que des choses praticables et voyons ensuite si les pénalités ne sont pas trop fortes.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Je demande encore, messieurs, qu'on veuille ne pas exagérer les conséquences de la loi. Toute la loi repose sur le principe de l'isolement des animaux malades. Otez cet isolement, il n'y a plus de loi. La propagation du mal ne peut être empêchée que par l'isolement.

Maintenant, messieurs, que, dans une commune où il n'y a pas de pâturage, un cultivateur ait un animal malade ; cet animal devra être isolé chez son propriétaire. J'ajoute que dans la pratique cela ne sera jamais impossible. L'animal pourra toujours être isolé dans un coin quelconque, dans une grange ou même en plein air, sans un abri provisoire.

Cela est très possible, et au surplus une pareille difficulté ne doit pas nous arrêter. En présence d'un mal aussi grand qu'une maladie contagieuse tout cultivateur doit s'imposer les sacrifices nécessaires pour empêcher la contagion de s'étendre. Un abri est bientôt trouvé. A défaut de hangar, quelques branches d'arbre et d'un toit de paille suffisent. Ainsi ces difficultés doni on se fait un épouvantail n'existent pas en réalité.

Sans avoir beaucoup habité la campagne, j'ai vu bien souvent des cultivateurs trouver sous une grange ou sous un toit de paille un abri où les animaux pouvaient être isoles.

- La discussion est close sur l'article 15 et l'amendement de M. Coomans.

On procède au vote par division.

Les deux premiers paragraphes de l'article sont mis aux voix et adoptés.

L'amendement de M. Coomans au paragraphe 3 est ensuite mis aux voix ; il n'est pas adopté.

Le troisième paragraphe est mis aux voix et adopté.

Le quatrième paragraphe est mis aux voix et adopté.

Le cinquième et dernier paragraphe est mis aux voix.

M. David. - Je demande que le dernier paragraphe soit mis aux voix par division.

- Il est procédé au vote par division.

« (Première partie du cinquième paragraphe) En cas de récidive, l'amendement sera de 100 fr. au moins et de 200 fr. au plus. »

- Cette partie du cinquième paragraphe est mise aux voix et adoptée.

« (Deuxième partie du cinquième paragraphe) Et le délinquant pourra, en outre, être condamné à un emprisonnement de huit jours. »

On demande le vote par appel nominal.

Il est procédé à cette opération.

72 membres répondent à l'appel.

52 membres répondent non.

20 membres répondent oui.

En conséquence, la seconde partie du cinquième paragraphe de l’article 15 n'est pas adoptée.

Ont répondu non : MM. Goblet, Landelos, Lange, le Bailly de Tilleghem, Lejeune, Lesoinne, Maertens, Malou, Matthieu, Mercier, Osy, Pierre, Pirmez, Rodenbach, Rousselle, Thibaut, Thienpont, T'Kint de Naeyer, Van Cromphaut, Vanden Branden de Reeth, Vander Donckt, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Vermeire, Vervoort, Veydt, Wasseige, Anspach, Brixhe, Coomans, David, de Bronckart, de Haerne, de La Coste, Deliége, Dellafaille, F. de Mérode, de Mérode-Westerloo,' de Moor, de Perceval, de Portemont, de Renesse, de Royer, de Ruddere de Te Lokeren, de Sécus, de Theux, de Wouters, Dubus, Dumortier, Faignart et Delfosse.

Ont répondu oui : MM. Julliot, Laubry, Lebeau, Le Hon, Lelièvre, Mascart, Moreau, Orts, Tack, Tesch, Thiéfry, Visart, Allard, Ansiau, Calmeyn, Closset, Coppieters 't Wallant, de Baillet-Latour, de Steenhault et Devaux.

- L'ensemble de l'article 15, ainsi modifié, est mis aux voix et adopté.

Article nouveau

M. le président. - Voici un article nouveau proposé par M. Orts, ni le numéro ni la place n'en sont indiqués.

(page 258) M. Orts. - Je désire que la section centrale, en l’examinant, en détermine le numéro et la place.

M. le président. - Cet amendement est ainsi conçu :

« Dans tous les cas où l'autopsie d'un animal abattu par ordre d'un médecin vétérinaire établirait l'absence de maladie contagieuse, le médecin de qui émane l'ordre d'abattage sera passible de tous les frais d'expertise, abattage, fourrière, etc., et de dommages-intérêts qui ne pourront être inférieurs à la valeur de l'animal. »

M. Orts. - L'article nouveau que j'ai l'honneur de présenter a pour but de rassurer plusieurs honorables membres de cette Chambre, qui m'ont paru préoccupés d'une crainte fort légitime, c'est que les artistes vétérinaires ne se pressent trop d'ordonner l'abattage des animaux sous prétexte qu'ils sont atteints d'une maladie contagieuse.

Cette crainte légitime trouvera une garantie dans la loi si on engage la responsabilité des agents chargés de l'exécution de la loi, par exemple, si on décide que quand un artiste vétérinaire aura ordonné l'abattage d'un animal pour cause de maladie contagieuse et que, par l'autopsie de l'animal, il sera démontré qu'on n'avait pas la moindre maladie à lui reprocher, et par conséquent que l'abattage doit être attribué à l'incapacité du vétérinaire ou à une intention de nuire, il y aura répression du fait dommageable par ignorance ou mauvais vouloir ; cela n'est que juste ; qu'on ne recherche pas des fonctions quand on n'est pas capable de remplir toutes les obligations, tous les devoirs qu'elles imposent.

Je demande donc à la Chambre de décider, dans le cas que je viens d'indiquer, la présomption de mauvaise intention ou d'ignorance. Quand il sera démontré que le médecin vétérinaire a eu tort, il payera les frais et la réparation du dommage causé. Je n'entends pas que l'Etat paye les frais des bévues de ses vétérinaires ou la réparation des dommages qu'ils pourraient causer volontairement par mauvaise intention.

- L'article additionnel proposé par M. Orts est renvoyé à la section centrale.

Article 16

« Art. 16. Les contraventions aux mesures ou aux visites prescrites en vertu des art. 3, 5, 6 et 9, ainsi qu'aux dispositions intervenues en exécution des articles 10 et 13, seront punies d'une amende de 100 à 500 francs et d'un emprisonnement de huit à quinze jours.

« En cas de récidive, l'amende sera de 1,000 francs et la durée de l'emprisonnement d'un mois. »

M. le président. - M. le ministre de l'intérieur a présenté à cet article l'amendement suivant :

« Seront punis d'une amende de 100 à 500 francs et d'un emprisonnement de huit à quinze jours :

« Ceux qui auront contrevenu aux article 3, 5, 6 et 9, en ce qui concerne les mesures ou visites qui y sont mentionnées, ainsi qu'aux dispositions intervenues en exécution des articles 10 et 13 ;

« Ceux qui, sans avoir fait la déclaration voulue par l'art.icle premier et en l'absence des mesures prévues par les articles 2, 3 et 4, n'auront pas isolé dans des lieux fermés ceux de leurs animaux atteints ou soupçonnés d'être atteints de l'une des maladies contagieuses déterminées par le gouvernement.

» En cas de récidive, etc. (le reste comme à l'article). »

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Il remplave en le complétant celui de M. de Steenhault.

Je crois qu’il serait sage de renvoyer également cet amendement à la section centrale

M. de Steenhault. - Je répondrai par un mot à l'amendement de M. le ministre de l'intérieur. Cet amendement, qu'il propose pour remplacer le mien, n'a pas le même but ; il parle toujours de l'isolement et il commine une peine très forte, trop forte même, à mon avis, contre le défaut d'isolement.

Le cultivateur qui n'aura pas isolé son bétail avant d'avoir fait sa déclaration au bourgmestre, sera passible d'une amende de 100 à 500 fr. ; je ne voulais, moi, punir de cette amende que le fait d'avoir colporté la maladie de commune en commune avant d'avoir fait la déclaration au bourgmestre.

Ce que je voulais atteindre, c'était celui qui aurait été conduisant le long des routes ses attelages infectés de maladies contagieuses ; mais je trouve la peine trop forte pour le délit mentionné dans l'amendement de M. le ministre. Ce délit et celui que j'ai en vue sont deux faits distincts, deux idées différentes.

Quant à ce qu'a dit M. Lelièvre de mon amendement, je répondrai qu'hier il déclarait inadmissible un amendement que je proposais, parce que le cas était prévu par le Code péual ; j'ai suffisamment prouvé que les idées contenues dans l'article du Code pénal et dans mon amendement étaient complètement différentes.

L'honorable rapporteur me disait également que mon amendement détruirait l'économie de la loi, parce que le fait était prévu par le Code pénal ; à ce compte-là l'article 459 détruirait l'économie de votre loi puisque les articles 1 et 2 en reproduisent les dispositions, et votre projet ne vaudrait pas mieux que mon amendement.

Vous devez comminer deux amendes puisqu'il y a deux délits : l'amende de 26 à 100 fr. contre le défaut d'isolement et de déclaration au bourgmestre ; et quand le délit va plus loin, quand le propriétaire ou détenteur va conduire des attelages infectés le long des routes et expose le bétail des autres à la contagion, vous devez prononcer une amende plus forte ; je propose, pour ce cas, de la porter à 100 et 500 fr. Je reste ici dans les termes du Code pénal.

Je le répète de nouveau, ce n'est pas le simple défaut d'isolement que j'ai voulu punir, mais le fait d'avoir fait circuler le long des routes des animaux infectés.

M. Lelièvre. - Je dois dire qu'à mon avis l'amendement de M. le ministre de l'intérieur est le seul qui me paraisse admissible et il doit nécessairement prévaloir sur celui de l'honorable M. de Steenhault. En section centrale j'avais précisément voulu remplacer l'amendement de ce dernier par une disposition analogue à celle proposée par M. le ministre.

Je conçois parfaitement qu'il y avait, dans le projet, certaine lacune à combler. On ne s'occupait pas de ceux qui, n'ayant pas fait la déclaration prescrite par l'article premier, négligeraient d'isoler les animaux à eux appartenant, qu'ils sauraient atteints de maladies contagieuses. L'amendement de M. le ministre répare cette omission, et par sa généralité, il comprend les faits énoncés à l'amendement de M. de Steenhault. Celui-ci veut punir ceux qui ont exposé les animaux dans les foires ou marchés, et les ont fait héberger hors de l'enceinte de la commune.

Mais tous ces faits sont compris dans le délit défini d'une manière générale dans la proposition de M. le ministre. Tous les individus qui auront posé les faits auxquels fait allusion M. de Steenhault, auront manqué à l'obligation qui leur est imposée d'isoler les animaux infectés, dans le cas même où ils n'auraient pas fait la déclaration dont s'occupe l'article premier et par conséquent ils encourront la peine énoncée à l'amendement du ministre.

Cette peine est suffisante et, du reste, si les circonstances signalées par M. de Steenhault présentent certain caractère dc gravité, n'oublions pas que le juge pourra, le cas échéant, prononcer le maximum de la peine.

L'amendement de M. le ministre forme une disposition complète qui s'applique à tous faits de non-isolement. Il existe ainsi un délit parfaitement défini, et nous échappons aux reproches qui pourraient à juste titre être adressés à la rédaction de l'honorable M. de Steenhault.

D'un autre côlé, la lacune que présentait le projet de loi relativement à l'obligation d'isoler les animaux, qui existe dans le cas même où la déclaration prescrite par l'article premier n'a pas eu lieu, cette lacune, dis-je, est comblée, et la disposition proposée paraît devoir être acceptée, comme satisfaisant à toutes les exigences.

- La Chambre ordonne l'impression et la distribution de l'amendement de M. le ministre de l'intérieur et le renvoi à la section centrale.

M. le président. - Par une lettre, en date du 6 décembre, M. de Naeyer, retenu chez lui par indisposition d'un de ses enfants, demande un congé de quelques jours.

- Accordé.

M. de La Coste. - La section centrale devra examiner si les pénalités à établir par l’article 16 ne doivent pas se ressentir du changement introduit à l’article 15.

Il remplace en le complétant nalilés à établir par l'art. 16 ne doivent pas se ressentir du changement introduit à l'article 15.

M. Veydt. - Messieurs, l'observation de l'honorable M. de La Coste me paraît fondée. Je crois aussi opportun d'appeler l'attention de la section centrale sur un autre point.

L'article 16 applique les mêmes pénalités à des infractions à la loi, qui diffèrent beaucoup entre elles. Par suite du vote qui vient d'avoir lieu, il est probable que la peine de l'emprisonnement, sera jugée trop forte pour les contraventions aux articles 3, 4 et 5.

Mais elle ne l'est certes pas pour punir les contrevenants aux articles 10 et 13, qui intéressent si hautement la santé publique. Il y est question, en effet, de l'abattage et de la vente pour la consommation de viande provenant de bestiaux atteints d'une maladie contagieuse (article 10) et de l'infraction aux mesures administratives tendant à prévenir l'invasion de maladies contagieuses régnant à l'étranger (article 13). Dans ces deux cas on ne peut agir que par un esprit de lucre, et les conséquences de pareilles infractions peuvent être très graves. Il faut donc une pénalité plus sévère pour les empêcher.

Il y a une distinction à faire, et j'en soumets l'idée à l'examen de la section centrale.

- La discussion est continuée à demain.

La séance est levée à 4 heures trois quarts.