Accueil Séances Plénières Tables des matières Biographies Livres numérisés Note d’intention

Chambres des représentants de Belgique
Séance du lundi 9 février 1857

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1856-1857)

(Présidence de M. de Naeyer, premier vice-président.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 793) M. Tack procède à l'appel nominal à deux heures et quart.

M. Calmeyn lit le procès-verbal de la séance précédente.

- La rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. Tack présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.

« Des habitants de Nederbrakel demandent un ressort unique de juridiction pour tous les notaires d'un même arrondissement judiciaire. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


M. le ministre de la justice transmet, avec les pièces de l'instruction, deux demandes de naturalisation.

- Renvoi à la commission des naturalisations.


M. le ministre de la guerre fait parvenir à la Chambre deux exemplaires de la quatrième livraison des feuilles gravées de la carte des environs du camp de Beverloo, comprenant les feuilles n°1, 2, 10, 15, 20 et le tableau d'assemblage du nivellement général. »

- Dépôt à la bibliothèque.


M. de Paul, retenu chez lui par une indisposition, demande un congé.

- Accordé.

Décès d’un membre de la chambre

M. de Naeyer. - Messieurs, depuis notre dernière réunion, la mort nous a enlevé un excellent collègue, M. le comte Félix de Mérode ; la Belgique perd en lui un de ses enfants les plus illustres, un de ses citoyens les plus vertueux et les plus dévoués. La famille nous annonce ce triste événement par une lettre dont je vais avoir l'honneur de vous donner lecture.

« A M. le président de la Chambre des représentants.

« Monsieur le président,

« J'ai l'honneur de vous informer de la perte douloureuse que nous venons de faire en la personne de mon père, le comte Félix de Mérode. Veuillez, M. le président, faire part de ce triste événement à la Chambre dont il a eu l'honneur de faire partie pendant 27 ans.

« Veuillez, M. le président, agréez l'assurance de ma haute considération.

« Comte Werner de Mérode.

« Bruxelles, ce 9 février 1857.

« P.S. Les funérailles auront lieu mercredi à midi et le service solennel aura lieu mercredi 18. »

Je propose de charger le bureau d'adresser, au nom de la Chambre, une lettre de condoléance à la famille.

- De toutes parts. - Oui ! oui !

M. de Naeyer. - Comment la Chambre entend-elle assister aux funérailles qui auront lieu mercredi prochain à midi, et au service solennel qui sera célébré le mercredi 18 de ce mois ?

M. Rogier. - Messieurs, une émotion douloureuse a saisi les collègues du très respectable comte de Mérode, à la nouvelle de son décès si inattendu. Je pense que dans cette Chambre il n'y aura qu'une voix pour rendre hommage aux services patriotiques, aux vertus privées et publiques qui recommandaient à l'estime générale notre tant regretté collègue.

Son loyal caractère, ses convictions inébranlables et ardentes lui ont concilié la considération même de ses adversaires. Dans un jour comme celui-ci, il n'y a plus d'hostilités politiques, il n'y a plus que des sympathies pour les hommes vertueux qui font l'honneur du pays, après avoir énergiquement et glorieusement contribué à fonder son indépendance !...

- De toutes parts. - Très bien ! très bien !

M. Rogier. - M. le comte Félix de Mérode était un de ces hommes-là. Son nom se rattache de la manière la plus glorieuse, non pas seulement par lui, mais encore par un frère, noble martyr ; son nom, dis-je, se rattache de la manière la plus glorieuse à l'origine de notre indépendance nationale. Depuis lors, M. le comte Félix de Mérode a continué à défendre, avec énergie, ce qu'il avait si puissamment contribué à fonder. Une telle mort peut être considéré, en quelque sorte, comme un malheur public.

Je demande que la Chambre tout entière rende hommage à cette existence, qu'on peut désormais dire illustre, par une démonstration unanime en l'honneur de feu notre collègue. Nous montrerons au pays que les services qu'on lui a rendus sont appréciés par tous ses représentants, sans distinction d'opinions.

Je laisse à la Chambre le soin de déterminer le genre de démonstration dont notre respectable collègue doit être l'objet. Je crois cependant que les antécédents nous indiquent la marche à suivre.

Lorsque le frère de celui dont nous déplorons la perte aujourd'hui, succomba pour la cause nationale, le Congrès ne siégeait pas encore, mais quand plus tard il fut réuni, il se rendit en corps au service funèbre de Frédéric de Mérode.

Je demande que la Chambre entière assiste aux funérailles de notre très regretté collègue, le comte Félix de Mérode.

Je pense aussi que la Chambre trouvera convenable de suspendre ce jour-là ses travaux ordinaires.

M. Dumortier. - La motion que vient de faire l'honorable M. Rogier est précisément celle que je me disposais à présenter, bien convaincu qu'en présence du malheur qui frappe si inopinément la Chambre et le pays, chacun de nous se réunira dans une même pensée pour déplorer la perte si grande que fait en ce moment la patrie.

La Chambre vient de perdre en ce moment une de ses colonnes les plus importantes, le pays un de ses plus grands, de ses plus illustres citoyens.

Vous vous rappelez tous les services que cette noble famille à rendus à la patrie.

C'est dans son hôtel, qu'ont eu lieu, à Bruxelles, les réunions pour le premier pétitionnement contre les griefs, et quand le gouvernement provisoire s'est constitué, l'honorable collègue que nous venons de perdre fut un de ceux qui, avec l'honorable préopinant, prirent en main les rênes du gouvernement pour assurer l'indépendance de la Belgique.

Cette illustre famille comptait quatre frères ; tous donnant l'exemple du dévouement et de l'amour de la nationalité. L'un est tombé glorieusement dans les champs de Berchem, en versant son sang pour la patrie et son deuil fut un deuil public. Les deux autres avaient été appelés à la défense des droits du pays, et nous avons eu la douleur de les voir tour à tour disparaître de nos rangs.

Mais, il en restait un parmi nous, modèle des vertus chevaleresques, distingué entre tous par son patriotisme, par l'élévation des sentiments et par le désintéressement, vertu qui fait la force des parlements ; le comte Félix de Mérode, vous l'avez tous connu ; homme probe et inébranlable dans ses convictions, il est resté toujours le même, il n'avait qu'une seule idée, le développement du bien-être de la patrie, qu'il recherchait en toutes choses avec une profonde conviction. Et c'est avec un esprit toujours nouveau qu'il fixait l'attention de tous chaque fois qu'il prenait la parole.

Ce grand citoyen sera dans la postérité un exemple constant de grandeur d'âme, de dévouement désintéressé.

Sa place restera longtemps vide pour tous, mais particulièrement pour nous qui avons eu l'honneur d'être admis dans son amitié. Nous avons tous un grand devoir à remplir, c'est d'admettre par acclamation la mention de l'honorable M. Rogier.

M. de Theux. - Je félicite l'honorable M. Rogier d'avoir pris l'initiative de la motion dont la Chambre est saisie. Cette initiative lui appartenait en sa qualité de membre du gouvernement provisoire. Collègue de l'honorable comte de Félix de Mérode dans ces éminentes et difficiles fonctions, c'est là qu'il a pu apprécier l'élévation de ses sentiments et l'énergie de son dévouement, de son patriotisme.

Je propose à la Chambre de voler par acclamation la motion de l'honorable M. Rogier.

- De toutes parts. - Oui ! Oui !

M. de Naeyer. - Les funérailles auront lieu mercredi prochain el le service funèbre solennel, le mercredi suivant. Je pense qu'il est entendu que la Chambre assistera en corps à ces deux cérémonies et qu'il n'y aura pas de séance le jour des funérailles. (Oui ! oui !)

- Il sera donné avis du décès à M. le ministre de l'intérieur.

Projet de loi sur les jursy d’examen universitaire

Discussion des articles

Titre II. Des moyens d'encouragement

Article 40

La discussion continue sur l'article 40 et les amendements.

M. Rogier. - Samedi dernier on avait levé la séance en me réservant le droit de prendre encore la parole. Je n'en userai pas. Seulement je persiste dans la proposition que j'ai faite de renvoyer à une commission ou à la section centrale, la proposition de l'honorable M. Frère.

(page 799) M. Verhaegen. - A la fin de la séance de samedi, le débat avait dégénéré dans une véritable lutte de partis et l'irritation s'était emparée des bancs de la droite, au point que nous avons entendu les mots de confiscation, de spoliation, que sais-je ? et d'autres monstruosités encore.

On avait perdu de vue ce qui avait donné naissance à l'incident.

L'honorable M. Julliot, au sujet de l'article 40 établissant soixante bourses de 400 fr. dans l'intérêt des hautes études, avait proposé la suppression de ces bourses. J'avais cru remarquer que la proposition n'était guère combattue par le ministère ou au moins qu'elle ne l'était que très faiblement. J'avais remarqué aussi que sur les bancs de la droite il ne se manifestait aucune intention bien prononcée de la combattre, et je me suis permis de dire à cet égard ma pensée tout entière ; j'ai dit que ceux qui donnaient leurs sympathies à certaine université libre, s'inquiétaient fort peu des soixante bourses dont il s'agissait à l'article 40, attendu que cette université jouissait de fait d'un nombre considérable de bourses de fondations ; qu'il y en avait pour des sommes tellement fortes qu'on ne pouvait pas en disposer, et que le restant du revenu formait un capital qui grossissait d'année en année et dont un jour, sans doute, on ferait un applicat dans l'intérêt de ce qu'on est convenu d'appeler la « bonne cause ».

J'ai ajouté, messieurs, en parlant de cette possession de fait, que j'étais loin de la reconnaître, de vouloir la légitimer, que je faisais à cet égard toutes mes réserves, que c'était une question qui méritait d'être examinée, et j'ai exprimé le désir qu'elle le fût sérieusement.

C'est à la suite de cette observation qu'un de mes honorables amis, ayant pris à son tour la parole, a formulé une proposition qui, au lieu d'éveiller les susceptibilités de nos adversaires politiques, aurait dû être considérée comme un moyen de conciliation, dans l'ordre de trancher une question dont on appréciera l'importance, si pas aujourd'hui, au moins dans un temps plus ou moins rapproché.

Messieurs, on a osé contester les faits que j'ai avancés en m'appuyant sur l'exposé de la situation administrative du Brabant pour 1856. On m'a objecté que j'avais attribué à l'université de Louvain des bourses dont elle ne jouissait pas ; que les sommes considérables que j'avais indiquées se trouvaient réparties entre plusieurs universités, que même l'université de Bruxelles en avait dix.

Messieurs, s'il y a eu erreur de ma part, ce n'est certes pas une erreur en plus, mais bien une erreur en moins ; car veuillez ne pas perdre de vue qu'indépendamment des fondations créées dans la province de Brabant, il y en a de très considérables dans les autres provinces, et que dans les divers exposés de situation administrative se rencontrent des faits analogues à ceux que j'ai signalés. D'où la conséquence que loin de devoir diminuer quoi que ce soit au chiffre que j'ai indiqué, il faudrait au contraire le majorer et de beaucoup. Je fais un appel aux honorables collègues qui représentent plus particulièrement dans cette enceinte les provinces d'Anvers, des Flandres, de Liège, de Namur et de Hainaut ; ils pourraient vous dire si j'ai rien exagéré.

D'ailleurs, je vais décomposer les chiffres généraux pour la seule province de Brabant et faire apprécier à la Chambre le véritable état des choses.

Messieurs, je ne m'occuperai plus des 71 bourses volantes dont la plupart sont destinées à encourager les études théologiques, et qui dès lors sont dévolues exclusivement à Louvain ; je ne m'occuperai que des fondations attachées aux 39 collèges de l'ancienne université de Louvain.

J'ai sous les yeux, non plus le chiffre total du revenu des fondations, non plus le chiffre total des bourses conférées, mais les chiffres spéciaux tant pour l'université de Louvain que pour tous les autres établissements d'instruction supérieure et autres.

Voici le relevé des comptes rendus en 1855.

Il a été conféré 486 bourses dans la proportion suivante :

Université de Louvain, 248 bourses.

Séminaire de Malines, 65, de Tournai 85, de Gand 2, de Namur 13, de Bruges 1, de Liège 5, de Saint-Trond 6.

Total, 425.

Université de Gand 12, de Bruxelles 12, de Liège 16.

Total, 40.

Collège de Floreffe 7, de basse Wavre 2, de Nivelles 1, d'Ath 1, de Binche 1, de Thuin 1, d'Enghien 2, de Termonde 2.

Athénée de Mons 1, collège de Bastogne, 1, d’Herenthals 1, de Saint-Josse-ten-Noode 1.

Total, 21.

Total des bourses conférées, 486.

Et notez bien que les collèges qui ont obtenu les 21 bourses que je viens de mentionner ne sont pas tous des établissements laïques, tout au contraire.

Mais, messieurs, il y a beaucoup plus de bourses attachées à ces fondations et on ne les a pas conférées. Il y a un restant de revenus tous les ans ; on n'en a pas fait emploi. Quand on emportait 425 bourses de fondations sur 485, indépendamment de toutes les bourses volantes et cela pour la seule province de Brabant, on en avait bien assez. Qu'est devenu ce restant de revenus ? Est-il capitalisé ? A quoi sert-il ? Qui l'administre ?

Il y a à Louvain un receveur particulier qui fait la recette de tous les revenus des fondations de bourses. Et notez que ce receveur est aussi le receveur particulier de l'université catholique.

J'ai dit, dans un premier discours, que la recette de ces fondations est tellement importante, que, pour l'année que j'ai indiquée, il a été alloué à celui qui en est chargé, un tantième de 15 mille et quelques cents francs.

El on me reproche des erreurs, et on ose crier à l'exagération !

Les chiffres ne trompent point ; les détails que j'ai exposés donnent à ces chiffres leur véritable portée et je défie bien qu'on me contredise.

M. Malou. - Je demande la parole.

M. Verhaegen. - Messieurs, pour distraire l'attention de la Chambre sur ce point important, on est entré dans un autre ordre d'idées, et l'on a dit : « Quel droit avez-vous de venir rechercher ce qui se fait en exécution de volontés exprimées par des testateurs ou donateurs ? Il s'agit du droit de collation ; or le droit de collation est un droit civil, c'est un droit attribué à un ou à plusieurs membres de la famille du fondateur ; vous voulez attribuer à l'Etat ce qui appartient à des particuliers ; vous êtes des spoliateurs ; vous voulez prendre le bien d'autrui. » Et tout cela, messieurs, a été couronné par de grands mots, par des injures.

Examinons. On dit, et pour cause, d'une manière générale, que le droit de collation est un droit civil, un droit sacré ; que les membres de la famille du fondateur ont seuls le pouvoir d'exercer ce droit.

Mais, messieurs, au sujet des nombreuses fondations dont nous nous occupons en ce moment, il est bon de savoir combien il reste de familles représentées, et combien de membres de ces familles sont maintenus comme collateurs.

Vous comprenez fort bien que beaucoup d'anciennes familles sont éteintes, et que l'Etat peut réclamer le droit de déshérence ; vous comprenez également qu'il y a une énorme différence entre le cas où des membres de la famille sont appelés au droit de collation, et celui où ce droit n'est assigné à certaines personnes que dans une qualité déterminé, par exemple, en qualité de fonctionnaire public, en qualité de vicaire, de curé, de doyen, d'évêque, etc. ; car, dans ce dernier cas il ne peut certes pas être question d'un droit civil, il s'agit de tout autre chose, il s'agit d'une question qui porte dans ses flancs le principe de la personnification civile.

L'appel successif et non interrompu de personnes dans une qualité déterminée, abstraction de tout lien de parenté, donnant ouverture au droit d'hérédité, caractérise certes la mainmorte.

Eh bien, nous allons reprendre, pour les 39 collèges annexés à l'ancienne université de Louvain, le chiffre des revenus des fondations et le chiffre des bourses, et nous verrons dans quelle proportion il y a encore aujourd'hui, parmi les collateurs maintenus, des membres appartenant aux familles des fondateurs.

Le nombre de fondations annexées aux 39 collèges est de 315. J'ai en mains l'état de ces fondations qui a été imprimé en 1846 par les soins du ministre de la justice et qui n'est, en définitive, qu'un extrait du Moniteur. Examinant chaque fondation séparément, je trouve que sur 315 fondations, disposant d'un nombre considérable de bourses, il n'y en a que 21 à l'égard desquelles le droit de collation est maintenu aux parents des fondateurs ; de sorte que pour les 294 restantes, les collateurs sont pris en dehors de la famille.

- Un membre. - Qu'est-ce que cela fait ?

M. Verhaegen. - On a parlé de spoliation, de confiscation, et on portait le nombre des familles spoliées à plus de sept cents ! On cherchait ainsi à faire de l'effet et à distraire l'attention de la Chambre et du pays sur le véritable objet de la question ! et on voit, en dernière analyse, à quoi se réduisent ces déclamations !

Les fondations sont indiquées séparément pour chacun des collèges auxquels elles sont annexées ; tous les collèges sont passés en revue et vous pourrez contrôler, messieurs, si vous le jugez à propos, ce que j'avance.

Je répète donc que sur 315 fondations, 21 seulement ont encore des collateurs de famille et que les autres sont quelquefois abandonnées à des bourgmestres et presque toujours à des vicaires, à des curés, à des doyens, à des évêques ou à d'autres membres du clergé.

(page 800) - Un membre. - C'est en vertu de la fondation.

M. Verhaegen. - Ce n'est pas la question ; vous battez déjà en retraite.

Voilà pour le nombre ; voyons maintenant les chiffres.

Ainsi que je l'ai dit dans mon précédent discours, le revenu des fondations annexées aux collèges de l'ancienne université de Louvaîn, d'après le document officiel que j'ai cité, s'élève à 133,815 fr. 43 c. et les 21 fondations pour lesquelles il y a encore des collateurs de famille n'y sont portées que pour un revenu de 5,878 fr. 70 c., de sorte que le montant du revenu des autres bourses, dont la collation appartient presque tout entière au clergé, est de 127,934 fr. 75 c.

Voilà, messieurs, les chiffres exacts.

Remarquons maintenant que beaucoup de bourses ne sont pas conférées, ou bien qu'elles sont conférées à des taux inférieurs à ceux établis par les actes de fondation. La preuve de cette assertion se rencontre dans ce même document que je viens d'invoquer, et il en résulte qu'à défaut de collation complète, il reste annuellement un surcroît de revenu qui forme déjà un capital assez rond et qui grossit sans cesse. Nous perdons nécessairement la trace de ce capital.

Ainsi le collège du Saint-Esprit, appelé le Grand Collège, possède 93 bourses, et on n'en a conféré que 47 ; le revenu de ce collège est de 19,480 fr. 97 c, et le montant des bourses conférées n'est que de 9,455 fr. 37 c, de sorte que l'excédant du revenu sur l'année 1855 seulement est de dix mille francs environ. Où est cet excédant ? Qu'en a-t-on fait ?

M. Malou. - Demandez cela à la députation permanente.

M. Verhaegen. - Pourquoi n'a-t-on pas distribué cet excédant en bourses ?

M. Malou. - Je vous le dirai.

M. Verhaegen. - Si l'administration des bourses était attribuée au gouvernement, il prendrait des mesures pour que, dans l'intérêt des études, il fût fait emploi de toutes les sommes dont disposent les fondations.

Continuons.

La fondation de Buslieden a un revenu de 334 fr. Aucune bourse n'a été conférée.

Le collège du Château jouit de 31 bourses, il n'en a été conféré que 23, d'où il résulte un excédant de revenu d'environ 1,000 fr.

Le collège de Craendonck a un revenu de 2,749 fr., il n'a été dépensé que 1,786 fr. Ainsi excédant de 963 fr.

Le collège des Drieux a un revenu, en bourses de fondation, de 3,937 fr. 44 c, et il n'a été dépensé que 1,228 fr. 77 c, ainsi excédant de 1,308 fr. 67 c.

Le collège d'Houterlée a un revenu de 3,022 fr., et il n'a été dépensé que 1,817 fr. ; excédant, 1,205 fr.

Le collège du Luxembourg a un revenu de 7,571 fr., et il n'a été dépensé que 4,740 fr. ; excédant, 2,831 fr.

Et ainsi de suite pour tous les autres collèges qui sont mentionnés dans le document que j'ai sous les yeux.

Messieurs, de ces observations basées sur des faits qui, j'espère, ne seront plus contestés puisqu'ils résultent de documents authentiques, Je tire la conséquence que l'administration telle qu'elle se fait aujourd'hui, est vicieuse et qu'elle devrait se faire d'une autre manière.

On paraît assez d'accord sur ce point et on ne serait pas éloigné de se rendre à l'avis qui a été exprimé naguère par la commission spéciale, que le gouvernement avait chargé d'élaborer un projet de loi sur les anciennes fondations de bourses. Aussi, à les en croire, nos adversaires ne crieraient plus à la confiscation, à la spoliation, si, laissant intact le droit de collation on se bornait à demander que l'administration des fondations fût confiée à l'autorité publique. Messieurs, c'est déjà un grand pas de fait que nous nous empressons d'enregistrer dans nos annales.

M. Van Overloop. - Pas du tout.

M. Frère-Orban. - On veut tout garder.

M. Verhaegen. - Ah ! l'on veut tout garder.

M. Van Overloop. - Nous admettons la surveillance par l'autorité publique.

M. Verhaegen. - Maintenant ce n'est plus que la surveillance que vous consentez à attribuer au gouvernement, alors qu'hier vous lui le connaissiez le droit d'administration, et demain vous refuseriez même le droit de surveillance si nous voulions nous en contenter aujourd'hui ; nouvelle retraite qui serait suivie de bien d'autres.

La commission dont je vous parlais il n'y a qu'un instant, composée d'hommes qui doivent vous inspirer toute confiance, a été unanimement d'avis d'attribuer l'administration des fondations à l'autorité publique. Si, revenant sur vos pas, vous voulez combattre cet avis, faites-le, nous vous répondrons. Mais ce n'est qu'un nouveau prétexte entre plusieurs autres ; il fallait jeter de l'odieux sur la proposition qui a été formulée par mon honorable ami M. Frère-Orban, il fallait crier à la confiscation, à la spoliation et faire croire en même temps qu'on était très modéré dans ses prétentions en consentant à laisser l'administration au gouvernement.

La proposition de mon honorable ami n'a certes pas la portée que lui assignent nos adversaires ; ils en sont eux-mêmes bien convaincus. C'est une proposition toute de conciliation en présence d'un texte de loi qui n'a jamais été abrogé quoiqu'on dise et dont il faudrait bien, à la rigueur, qu'on subît les conséquences.

D'ailleurs, encore une fois, ne perdons pas de vue que sur le chiffre total des fondations de bourses annexées aux 39 collèges de Louvain, soit 155,813 fr. 49 c, il n'y en a que pour la faible somme de 5,878 fr. 70c. à l'égard desquelles on pourrait invoquer des prétendus droits de famille ; de sorte que pour un revenu annuel de 127,934 fr. 73 c, toujours dans le Brabant seulement, la proposition de l'honorable M. Frère-Orban pourrait être admise sans aucun inconvénient.

Je ne traiterai pas la question de droit qui a été soulevée et telle qu'elle s'agite en présence des anciennes lois non abrogées jusqu'à présent ; il faudrait à cet égard entrer dans de longs développements. Je les réserve pour d'autres temps ; mais je dois une réponse à l'honorable M. Dumortier qui m'a effrayé par certaines doctrines. En effet, comment l'honorable membre a-t-il répondu à la base de l'argumentation de l'honorable M. Frère-Orban ? La Constitution, a-t-il dit, a brisé toutes les lois faites par l'ancienne révolution et qui sont contraires à son texte et à son esprit, et il a lâché les mots de liberté d'enseignement et de liberté d'association.

La portée de cette observation, je dois le répéter, m'a effrayé, et surtout dans les circonstances spéciales où nous nous trouvons, à la veille de la discussion de la loi dite sur la charité, et que j'appelle, moi, la loi rétablissant la mainmorte.

M. de Theux, rapporteur. - Nous verrons cela.

M. Verhaegen. - Je dis que la portée de cette observation m'a effrayé. En effet, d'après l'honorable M. Dumortier, la Constitution de 1831 aurait aboli la loi invoquée par l'honorable M. Frère-Orban par à seule raison que cette loi a été faite dans un temps où nous n'avions pas la liberté d'enseignement que la Constitution a proclamée en termes formels et que par conséquent, toujours d'après l'honorable membre, il faudrait restituer aux anciennes fondations d'instruction les biens qui avaient été nationalisés, sans égard aux conséquences produites par la nationalisation.

Et, à côté de la liberté d'enseignement, l'honorable membre a placé la liberté d'association. Serait-ce à dire par hasard que si les corporations religieuses, les établissements de mainmorte ont été supprimés par d'anciennes lois et que, par suite, leurs biens ont été nationalisés, on pourrait encore un jour, en invoquant la Constitution et, comme auxiliaire, une loi qui rétablirait les main mortes, criera la spoliation contre les acquéreurs des biens nationaux et tenter, de par la loi, des restitutions pour lesquelles on n'a pas cessé de faire appel à quelques consciences timides ? Mais non, ce serait par trop absurde.

M. de Theux, rapporteur. - C'est aussi dangereux que le rétablissement de la dîme et de la féodalité.

M. Verhaegen. - Cela me fait faire de sérieuses réflexions et même m'effraye dans l'intérêt du pays. Nous verrons bientôt où nous conduira la loi dite de charité.

De tout ce que je viens de dire il résulte que ceux-là mêmes qui repoussent la proposition de l'honorable M. Frère-Orban, quoiqu'elle ne soit qu'une mesure de transaction, un terme moyen en présence d'un texte de loi non abrogée, doivent reconnaître qu'il y a quelque chose à faire, tout au moins quant à l'administration des biens de fondations.

Cette question dût-elle même se réduire, comme nos adversaires le prétendent aujourd'hui, à une question de haute surveillance, mérite certes un examen sérieux et je pense qu'il ne convient pas de la discuter immédiatement.

Il convient, au contraire, de renvoyer la proposition de l'honorable M. Frère-Orban, et de toutes les questions qu'elle peut soulever, à l'examen d'une commission. Vous ne voudrez pas, messieurs, qu'il soit dit, alors même que vous avez la majorité, que vous vous opposez à une discussion sérieuse sur un point si important et que vous cherchez, au moyen du grand mot de spoliation, à distraire l'attention du pays sur la portée de l'incident.

M. Landeloos. - Nous ne voulons pas même la question préalable.

M. Verhaegen. - Encore un mot et je termine. Puisqu'on a osé parler de spoliation, je pourrais peut-être à mon tour et avec beaucoup plus de raison, crier à la spoliation. Car, si je suis bien informé, des communes, des provinces qui jouissaient de fondations importantes, en ont été dépouillées par le roi Guillaume au profit de son ancien collège philosophique ; ces fondations et les biens y affectés, si je ne me trompe, sont aujourd'hui en la possession de l'université de Louvain.

Il est très difficile, messieurs, pour nous qui n'avons pas en notre pouvoir le moyen de nous renseigner, de savoir exactement ce qui se passe à Louvain ; mais je pourrais dire qu'il me souvient (et je fais un appel au souvenir de l'honorable collègue qui m'interrompait tantôt), qu'il y avait dans la Campine, à Meerhout, un collège possédant d'importantes fondations, et qu'il est sorti de ce collège des élèves très distingués parmi lesquels se sont rencontrés ceux qu'on appelait les primus de Louvain.

Depuis 1827 ou 1828, ce collège a été supprimé et les biens de ses fondations ne sont cependant pas perdus. Que sont-ils devenus ? Si mes renseignements sont exacts (cependant, ici je n'affirme rien), lorsque le roi Guillaume a fondé son collège philosophique, il a repris certaines fondations particulières, notamment celles de Meerhout, pour les (page 801) attribuer à ce collège, et ce collège philosophique aurait bien pu avoir pour successeur l'université catholique. C'est ce que le gouvernement devrait savoir ; c'est sur quoi il pourrait nous donner des indications. C'est peut-être aussi sur quoi nos adversaires auront quelque réponse à nous fournir.

M. Malou. - Oui.

M. Verhaegen. - Je les attends. En attendant, je suis suffisamment édifié.

Voilà, messieurs, dans quel état se présente la question.

S'agit-il maintenant, comme on le voulait déjà samedi, de clore et de voter ?

- Plusieurs membres. - Non ! non !

M. Verhaegen. - Ou bien convient-il, et c'est ce que je demande formellement, que l'amendement de mon honorable ami soit renvoyé à l'examen d'une commission spéciale, qui nous fera son rapport, après quoi nous discuterons en pleine connaissance de cause ?

(page 793) M. Wasseige. - A l'appui de l'amendement qu'il a présenté, l'honorable M. Frère nous disait, dans la séance de samedi, qu'il s'étonnait de l'opposition que sa proposition rencontrait sur certains bancs de cette Chambre, attendu que, alors que l'on était au pouvoir, on n'était pas arrêté par les grands mots et les scrupules que l'on invoque aujourd'hui lorsqu'il s'agissait de changer administrativement, et dans l'intérêt d'un parti, les choses qu'on trouvait contraires à ce parti. A l'appui de ce fait, il vous a parlé d'une fondation d'instruction publique existant à Rochefort, réorganisée en 1838 sous le ministère de l'honorable comte de Theux, et il vous a dit que par l'administration instituée par l'honorable comte de Theux, on avait faussé complètement les intentions du fondateur, que l'on avait détourné de leur véritable but le fond de la fondation, et qu'il avait fallu l'arrivée aux affaires de l'administration libérale pour régulariser les choses conformément à la loi et aux intentions (erratum, p. 801) de l’évêque de Liège, le fondateur.

J'ai été à même de connaître cette affaire, qui s'est traitée à plusieurs reprises différentes devant la députation permanente de Namur, alors (page 794) que j'avais l'honneur de faire partie de ce collège, et je puis affirmer que les faits avancés par l'honorable M. Frère sont inexacts, que les conséquences qu'il a tirées de ce fait sont fausses et erronées.

Messieurs, cette affaire de la fondation de Rochefort n'est qu'un épisode dans le débat qui nous occupe. Cependant, si la Chambre pense qu'il puisse être intéressant pour elle de connaître les faits, je suis prêt à les lui indiquer.

- Plusieurs membres. - Oui ! oui !

M. Wasseige. - Messieurs, en 1761 et 1763, monseigneur Jacquet, évêque de Liège, a fondé à Rochefort, son lieu natal, une école primaire pour l'instruction gratuite des enfants pauvres des deux sexes. Il a acheté, à cet effet, une maison qu'il a fait arranger à grands frais, et il a désigné pour administrer ces fondations, quatre personnes, que je vais avoir l'honneur de vous faire connaître.

Il a déclaré d'abord que l'instruction primaire devait, autant que possible, être donnée par un prêtre, et il a institué pour premiers exécuteurs mambourgs, comme il les appelait, le chef de sa famille, un certain M. Delvaux, chanoine à Liége, le curé de Rochefort, l'abbé de Saint-Remi, près de Rochefort, et le pater des religieux carmélites de Rochefort.

Mgr Jaquet ne se contenta pas de cette fondation ; mais il institua par son testament des bourses pour être distribuées d'abord aux enfants de son frère, et à l'extinction des enfants de son frère, aux jeunes gens pauvres de Rochefort, bourses à l'aide desquelles ils seraient mis à même de suivre des cours d'instruction supérieure, soit dans la théologie, soit dans le droit, soit dans les arts et métiers.

Il confia la gestion de cette fondation à la même administration déjà instituée pour la direction de l'école primaire, administration à laquelle il ajouta deux membres de sa famille.

L'école primaire fut fondée et l'instruction donnée par un prêtre jusqu'en 1794. A cette époque, cette fondation subit le sort de toutes les fondations, et elle ne fut rétablie qu'en 1838, par suite de la demande qui en fut faite par le bureau de bienfaisance de Rochefort, à l'administration supérieure.

En 1838 donc, le bureau de bienfaisance de Rochefort s'adressa à l'administration supérieure, pour voir rétablir les fondations, et les faire rendre à la destination pour laquelle elles avaient été créées.

Le gouvernement d'alors se fit représenter les pièces nécessaires pour juger de la situation et voyant que dans la première institution faite par Mgr Jaquet lui-même, tous les collateurs étaient des prêtres, il crut avec raison ne pas pouvoir mieux remplir ses intentions qu'en reconstituant l'administration de la même manière.

Il consulta l'administration provinciale de Namur sur les personnes les plus convenables, et après rapport envoyé par l'honorable M. Lebeau, alors gouverneur de la province de Namur et sur la présentation qui lui en fut faîte par ce dernier, le ministre de l'intérieur composa cette administration du chef de la famille Jaquet, du curé doyen de Rochefort, qui était indiqué par le testament, du curé de Ave, du curé d'Eprave et du vicaire de Rochefort, personnes qui, au dire de l'honorable M. Lebeau, étaient le plus à même, par l'analogie des positions, de remplacer ceux qui avaient été primitivement instituées par le testateur.

Immédiatement après le rétablissement de cette fondation, on s'occupa de l'instruction primaire. Il existait déjà une communauté de religieuses qui donnaient l'instruction primaire aux jeunes filles. Il fallait pourvoir à celle des garçons.

L'honorable M. Frère nous a dit que l'administration de la fondation fut composée de manière à pouvoir être certain d'attirer à Rochefort les frères des écoles chrétiennes, contrairement au vœu de l'administration communale.

M. Frère-Orban. - Je n'ai pas dit cela.

M. Wasseige. - Eh bien, en 1845 les administrateurs communaux de Rochefort, marchant parfaitement d'accord avec les administrateurs de cette fondation, prirent l'initiative pour demander à ces derniers que l'instruction des garçons fût confiée aux frères de la doctrine chrétienne.

C'est après cette demande que l'administration de la fondation s'adressa aux supérieurs des frères, fit avec eux un arrangement, communiqué à l'administration communale et approuvé par elle, et qui consistait à faire venir trois frères pour les installer dans le bâtiment de la fondation, à leur payer une somme de 1800 fr., à condition que ces prêtres se chargeraient de l'instruction primaire de tous les enfants mâles de Rochefort, moyennant l'octroi par l'administration communale d'un subside de 600 fr. plus le payement d'une rente de 270 fr. laquelle était due par elle à la fondation.

Cette dernière se trouvait ainsi complètement déchargée de tous autres frais relatifs à l'instruction primaire.

Cet arrangement étant fait, le bourgmestre de Rochefort qui est encore le bourgmestre actuel écrivit à M. le doyen président de la fondation, la lettre suivante:

« Par sa dépêché en date d'hier, M. le commissaire d'arrondissement me fait connaître que la députation du conseil provincial approuve la délibération du conseil communal (du 7 octobre 1843), qui décide que l'instruction des garçons sera confiée aux frères des écoles chrétiennes, et qu'elle ne voit pas d'inconvénient à ce qu'une partie des revenus de la fondation soit affectée à payer les instituteurs et les institutrices des écoles communales.

« Je me fais un plaisir de porter cette résolution à votre connaissance, et de vous exprimer, M. le président, qu'elle est toute dans l'intérêt de la commune, vous assurant, ainsi que les autres membres de l'administration que vous avez des droits acquis à la reconnaissance des habitants, pour leur avoir procuré la faveur de pouvoir faire donner de l'éducation à leurs enfants, en leur épargnant des sacrifices pécuniaires (sic). »

Vous voyez, messieurs, combien il était inexact de dire qu'on avait réformé l'administration Jacquet de manière à obtenir des frères de la doctrine chrétienne, contrairement à l'avis de l'administration communale.

Mais, messieurs, en 1845, à l'époque où les frères devaient arriver, l'administration communale changea tout à coup d'avis et ne voulut plus consentir à les recevoir sous prétexte qu'ils auraient occasionné de trop grands sacrifices pécuniaires. Or, messieurs, ces sacrifices consistaient dans le payement du subside de 600 francs alloué par le conseil communal lui-même, puisque en tout cas, il ne pouvait, en vertu de convention être tenu qu'à cela ; les conditions imposées par les frères de la fondation n'étaient d'ailleurs que les conditions ordinaires.

Cependant, messieurs, les frères arrivèrent en 1845 et furent installés dans les bâtiments de la fondation Jacquet. Dès lors plus de repos pour l'administration communale de Rochefort qui, ainsi que j'ai eu l'honneur de le dire, avait, on ne sait trop pourquoi, complètement changé d'avis, l'administration communale de Rochefort intenta à la fondation Jacquet une action possessoire à l'effet de se faire maintenir en possession des bâtiments de l'école et d'en faire expulser immédiatement les frères de la doctrine chrétienne.

Celte action reçut une première solution devant le juge de paix qui maintint la fondation en possession des bâtiments de l'école. Appel fut interjeté devant le tribunal de Dinant et là, sur les conclusions conformes du procureur du roi, le jugement fut confirmé et la fondation maintenue, une deuxième fois, en possession des bâtiments de l'école. Ici, messieurs, je vous prie de faire attention aux dates. Ce jugement est du 14 août 1850, mais le 25 août de la même année, parut au Moniteur un arrêté contresigné De Haussy, ministre de la justice et portant la date du 12 août, dernier jour de l'existence ministérielle de M. de Haussy, arrêté qui renversait l'administration existante et qui en constituait une autre, et savez-vous, messieurs, quelle autre ? L'administration communale elle-même, la partie plaidante et condamnée. De sorte que presque le même jour la fondation se trouva avoir gagné son procès judiciairement et l'avoir perdu administrativement.

A peine en possession de la fondation l'administration communale somma les frères de la doctrine chrétienne de déguerpir.

Sur leur refus, cette même administration qui les avait appelés quelques années auparavant et qui leur avait alloué sur sa caisse un subside de 600 fr. eut recours à la gendarmerie pour les chasser ignominieusement par la force des baïonnettes. (Interruption.)

Permettez, messieurs, vous allez voir combien peu l'administration communale de Rochefort considérait cela comme une plaisanterie: elle fit dresser procès-verbal contre les frères, en les accusant de rébellion ; ce procès-verbal fut adressé au procureur du roi ; le procureur du roi consulta le procureur général M. Raikem et il fallut un avis fortement motivé de M. Raikem pour qu'on ne poursuivît pas les frères de la doctrine chrétienne devant les tribunaux répressifs comme coupable de rébellion au premier chef.

Cependant, d'après la convention approuvée car l'administration communale elle-même, les frères devaient être prévenus six mois avant d'être obligés à quitter l'école, force donc fut de les tolérer encore six mois.

Mais les frères étant enfin partis, l'autorité communale qui seule avait l'administration de l'école primaire et qui formait la majorité dans l'administration des bourses, imagina un singulier moyen de remplir les intentions de Mgr Jacquet ; elle sollicita l'érection à Rochefort, d'une école moyenne dont l'administration communale ferait tous les frais. L'administration communale consulta l'administration de l'école primaire et des bourses, c’est-à-dire que l'administration communale se consulta elle-même. Elle décréta qu'il était de l'intérêt de la fondation Jacquet que Rochefort eût une école moyenne ; elle décréta qu'il était de l'intérêt de cette fondation que l'école moyenne s'emparât des bâtiments de la fondation Jacquet, elle décréta qu'une somme de 2,000 fr. serait affectée aux frais de premier établissement de l'école moyenne et enfin qu'il lui serait alloué un subside annuel de 2,000 fr. le tout sur les revenus de la fondation des bourses.

Tous ces actes, messieurs, malgré une vive opposition de ma part, furent approuvés par l'administration dont l'honorable M. Frère-Orban faisait partie.

Cela dura pendant quelque temps ; mais en 1854, sous l'administration de l'honorable M. Piercot, et d'après l'initiative prise par la députation permanente, l'honorable M. Faider, alors ministre de la justice, trouva que les choses étaient poussées absolument trop loin et il fut écrit à la députation provinciale de Namur, pour lui faire connaître qu'il lui paraissait impossible de laisser distraire de la fondation de bourses la subvention annuelle de 2,000 fr. ; qu'il lui paraissait impossible de dire, avec quelque apparence de fondement, qu'une subvention donnée à une école moyenne pût être considérée comme l'équivalent des bourbes accordées par M. Jacquet à des jeunes gens de Rochefort pour continuer leurs études soit en théologie, soit en droit soit dans les arts et métiers.

(page 795) Ce qui avait été organisé par l'administration communale de Rochefort vint donc à disparaître par le fait d'un ministre libéral, par le fait de l'honorable M. Faider, qui avait succédé à l'administration de 1847.

Justice a donc déjà été rendue en partie aux principes violés par le ministère de M. Frère ; espérons que justice complète sera bientôt faite.

Voilà, messieurs, les faits tels qu'ils se sont passés.

Maintenant que vous les connaissez, vous apprécierez si j'ai eu raison de dire qu'il était inexact de soutenir qu'une administration appartenant au parti conservateur avait composé l'administration des bourses de Rochefort de manière à fausser l'esprit dans lequel la fondation avait été créée. Vous apprécierez aussi combien il était inexact de dire qu'il a fallu l'arrivée au pouvoir d'un ministère libéral pour rendre à la fondation et aux intentions du fondateur leurs conséquences naturelles.

Messieurs, cette affaire pourra peut-être se traiter plus à fond : une pétition aussi pauvre pour le fond que pour la forme, a été adressée à la Chambre ; quand elle sera discutée, je suis à la disposition de l'honorable M. Frère, s'il désire d'autres éclaircissements.

M. de Theux, rapporteur. - Je désire communiquer encore quelques observations à la Chambre, au sujet de trois questions qui se rattachent plus particulièrement à la proposition de l'honorable M. Frère : d'abord, les biens des bourses ont-ils été nationalisés ? En second lieu, dans le cas même où ces biens auraient été nationalisés, cette circonstance pourrait-elle exercer quelque influence en faveur de la proposition de M. Frère ? Enfin, peut-on dépouiller les administrateurs et les collateurs de leurs droits ? Je dirai ensuite quelques mots du renvoi à une commission spéciale.

Messieurs, je m'explique très bien la grande divergence d'opinions sur cette question de savoir si les biens des bourses ont été nationalisés et voici ce qui y a donné lieu.

Une loi du 13 messidor an II déclare, dans son article premier, que les dettes des hospices et des établissements de bienfaisance sont mises à la charge de l'Etat ; l'article 2 déclare, que l'actif de ces établissements passera également au domaine de l'Etat. Vous le voyez, messieurs, à cette époque on y mettait beaucoup de formes : ou déclare d'abord qu'on décharge les fondations de leurs dettes, mais, l'article 2 les décharge aussi de leur actif. Cette loi, messieurs, qui est du 11 juillet 1792, excita dans toute la France une telle réprobation que treize mois après, on porte une nouvelle loi qui suspend l'exécution de la première. Cette nouvelle loi est du 26 août 1795, et le décret qui réunit à la France les neuf départements qui comprenaient la Belgique est du 1er octobre de la même année. Ainsi, la réunion de la Belgique à la France, a été décrétée postérieurement à la loi qui avait suspendu l'exécution de la loi du 13 messidor an II.

Aussi, ai-je fait des recherches dans la collection où sont insérées les lois qui ont été publiées en Belgique ; et je n'y ai pas trouvé la loi du 13 messidor an II qui a déclaré nationaux les biens des établissements de bienfaisance. On ne peut donc pas invoquer cette loi.

L'honorable M. Malou disait que bien des fondations n'étaient pas comprises dans la mainmise nationale. En effet, si l'on s'en tient aux termes purs et simples de la loi du 13 messidor an II, l'honorable membre a parfaitement raison ; mais il paraît résulter de la loi du 16 vendémiaire an V, que le gouvernement français considérant les bourses comme des fondations charitables, avait eu l'intention de les comprendre dans la loi du 13 messidor an II.

Du reste je viens de démontrer que de ce que les biens des établissements de charité et des bourses ont été nationalisés en France, il ne s'ensuit nullement qu'ils l'aient été en Belgique. La preuve résulte des textes que je viens de citer.

Veuillez remarquer, même pour la France, quelle fut la conduite du pouvoir législatif. La loi du 16 vendémiaire an V se sert de ces mots:

« Les administrations des établissements de bienfaisance sont conservées dans la jouissance de leurs biens. »

Ainsi, la Convention a reculé elle-même devant la monstruosité d'appliquer à ces biens la loi du 13 messidor an II, en décidant que les administrations des établissements de bienfaisance seraient conservées dans la jouissance de leurs biens. (Interruption.)

Toutes les anciennes administrations étaient provisoirement conservées dans la jouissances des biens.

Il paraît cependant que dans l'intervalle de 13 mois et demi qui sépare la loi de confiscation de la loi de suspension, il y a eu quelques mainmises ; mais la loi du 16 vendémiaire an V a décrété que ces biens seraient remplacés au profit des hospices par d'autres biens.

Je ne sais si en Belgique il y a eu par ci par là quelques dépossessions de biens, exercées à l'égard des établissements de bienfaisance ou de fondations ; mais s'il y en avait eu, cette circonstance n'aurait aucune influence, parce que ces dépossessions proviendraient de l'état de désordre où la guerre avait laissé l'administration de ces sortes de biens, ainsi que de l'avidité de quelques agents du fisc qui étaient en général des Français et qui préoccupés de la loi du 13 messidor an II ont pu se comporter ici plus comme en France où la loi avait été publiée et se mettre en possession de quelques-uns de ces biens. Si donc certains faits se sont passés en Belgique, soit à l'égard des établissements de bienfaisance, soit à l'égard des fondations, ces faits n'auraient aucun caractère légal. Celte question de mainmise nationale doit donc être écartée, en ce qui concerne la Belgique.

Mais l'opinion de l'honorable M. Frère fût-elle fondée, ces biens eussent-ils été réellement nationalisés, il n'en serait pas moins vrai que la loi de vendémiaire an V les a restitués aux anciennes fondations. Une propriété restituée ne constitue-t-elle pas une propriété au profit de celui à qui on la restitue ?

Supposons, par exemple, que l'administration des domaines veuille ici s'emparer des biens des hospices existants à l'époque de la réunion, sous prétexte qu'ils auraient été nationalisés par le gouvernement français, quel accueil ferait-on à cette prétention ?

Evidemment, il y aurait un mouvement unanime d'indignation parmi les membres du tribunal, et séance tenante l'administration serait déboutée de sa demande.

S'il en est ainsi à l'égard des biens des hospices, il en est de même à l'égard des biens de fondation, parce que le décret de messidor an V déclare que la loi du 13 brumaire an II, est rapportée quant aux bourses qui sont envisagées par le législateur comme des établissements de bienfaisance.

Ainsi cette question n'a aucun intérêt pour nous. Les biens dont il s'agit n'ont pas été nationalisés en Belgique, et s'ils l'y avaient été, il suffit que cette loi de nationalisation ait été rapportée et que les administrations de fondations aient été maintenues pour qu'on ne puisse plus revenir sur ce qui a été fait.

Je reviens à la question des administrateurs.

Dans la séance de samedi dernier, j'ai établi que le gouvernement français, par le décret du 18novembre 1811, a rétabli les fondations et a maintenu le droit de collation. Qu'on ne vienne pas argumenter et distinguer en disant que c'était au profit des fondateurs et de leurs héritiers. Non, messieurs, ce n'était pas seulement là la pensée du décret, mais le décret maintenait également les administrateurs spéciaux, et la preuve résulte de l'article 179 du même décret qui dit :

« Si le fondateur a désigné des administrations du bien affecté à la fondation, cette administration aura lieu sous la surveillance du recteur de l'académie dans le ressort duquel l'objet de la fondation devra être rempli, »

Eh bien, c'est ce qui existe.

« Mais, dira-t-on peut-être, l'article 179 est relatif aux fondations futures ».

Je répondrai que cet article est à plus forte raison relatif aux fondations du passé, puisque par les articles 172, 173 et 174 les droits du fondateur sont maintenus ; or, un des droits du fondateur, c'est de faire exécuter la fondation par celui qu'il a constitué administrateur et collateur de la fondation ; c'est là un droit inhérent à la fondation même, c'est là un droit de propriété dont on ne peut être dépossédé que par une loi révolutionnaire ou par suite d’une expropriation pour cause d'utilité publique, moyennant une juste et préalable indemnité.

Ce décret n'a pas été immédiatement exécuté, à cause des événements de la guerre et des embarras du changement de domination ; mais le gouvernement des Pays-Bas, dès qu'il eut le temps de s’occuper spécialement de cette matière, a donné une exécution pleine et entière au décret, en rétablissant les anciens administrateurs, lorsqu'il a pu se conformer littéralement aux actes de fondation, ou en désignant des administrateurs par analogie, lorsque le rétablissement littéral n'était pas possible.

C'est ainsi qu'on a désigné spécialement Louvain parmi les collateurs certains fonctionnaires publics, le commissaire d'arrondissement, des membres du tribunal, etc., etc., qui étaient censés représenter en partie l'une des anciennes autorités.

Ainsi, messieurs, le gouvernement français admettait même pour le futur l'établissement d'administrateurs spéciaux de fondations de bourses ; il admettait à plus forte raison pour le passé les administrateurs des actes de fondation.

J'ai donc eu raison d'interrompre M. Verhaegen en disant que je considérais comme une spoliation d'enlever aux personnes désignées par des actes de fondation, soit l'administration des biens, soit la collation des bourses.

Messieurs, dans la dernière séance on a parlé de partialité, l'honorable M. Frère, sans suspecter mes intentions, a dit qu'en croyant agir avec équité, j'avais été entraîné à quelque préférence par affection. Il s'est grandement trompé ; je vais en administrer la preuve la plus manifeste.

Pendant que je dirigeais le département de l'intérieur, il s'éleva des difficultés entre l'administration des bourses de Louvain et la commune de Louvain qui, ayant emprunté les capitaux des fondations, avait négligé pendant quelque temps d'en servir les intérêts.

L'administration communale attraite devant les tribunaux proposait par transaction de payer à l'avenir les intérêts, mais à la condition que les boursiers étudieraient exclusivement à l'université de Louvain. J'ai refusé de souscrire aux conditions que la ville de Louvain stipulait en faveur de son université. J'ai répondu qu'en vertu des principes posés dans la Constitution et notamment de la liberté d'enseignement, les boursiers seraient libres d'étudier où ils jugeraient convenable ; preuve manifeste que je ne me laissais pas aveugler par des sentiments d'affection ; devant l'administration pas plus qu'en matière judiciaire devant les tribunaux, les affections ne doivent trouver de place ; une seule règle doit guider l'administrateur comme le magistrat de l'ordre judiciaire : la stricte et exacte exécution des lois et des contrats. Je n'en connais pas d'autre.

(page 796) L'honorable M. Rogier a parlé de la partialité de l'ancien jury dans les présentations pour les bourses. Je regrette que l'honorable membre ait cru pouvoir parler ainsi de jurys composés d'hommes si haut placés par le talent et par le caractère, qu'on aurait pu les croire à l'abri même du soupçon.

En fait nous avions entendu plusieurs fois des membres de la gauche, rendre justice aux sentiments d'impartialité de ces jurys. Le mode de composition a été trouvé vicieux.

Je reconnais que la Chambre a fait des choix dans un sens particulier, mais le Sénat et le gouvernement ont rétabli l'équilibre. Soit en particulier, soit en public, pendant ma carrière administrative, jamais le moindre reproche ne m'a été adressé d'avoir complété le jury en dehors de l'université de Louvain.

C'est donc dans cette pensée que la Chambre a agi en donnant une garantie à la partie de l'enseignement qui lui paraissait (erratum, p. 801) la plus menacée, laissant au gouvernement et au Sénat le soin de compléter équitablement le jury. C'est ce qui a eu lieu.

L'honorable M. Verhaegen se plaint de notre susceptibilité à l'égard de l'amendement de M. Frère. Oui, nous avons été froissés par la présentation de cet amendement, parce qu'il est étonnant qu'en 1857, on vienne lancer dans cette Chambre une proposition qui a véritablement le caractère de la spoliation, dont l'effet est d'une part d'effrayer la propriété et d'un autre côté de faire concevoir à l'étranger une mauvaise opinion de notre système représentatif.

L'attention de l'étranger est particulièrement éveillée sur ce qui se passe chez nous ; on a peine à croire qu'on puisse gouverner avec ce système tombé en discrédit en certains pays et anéanti par la force des circonstances. Il nous appartient à nous, qui l'avons conservé dans sa plénitude et son intégrité, de tâcher de le faire toujours respecter et considérer dans le pays et à l'étranger ; il nous appartient de nous indigner quand une atteinte nous semble portée à ce régime. C'est par ces considérations que je repousserai la proposition de M. Verhaegen de renvoyer à une commission l'amendement de M. Frère.

Le renvoi à une commission serait une prise en considération indirecte. Dans des autres circonstances, lorsqu'il s'agissait de propositions présentant beaucoup moins d'inconvénients, la Chambre n'a pas admis la prise en considération.

Ici plus que jamais je crois que la Chambre doit repousser l'ajournement ou le renvoi à une commission qui donnerait un caractère d'importance à la proposition. On pourrait croire dans le pays et à l'étranger qu'elle a des chances de succès, ce que je ne crois pas : c'est pour cela que je demande qu'elle soit mise aux voix. Le vote immédiat est même dans l'intérêt de M. Frère, l'ajournement aurait l'air d'un recul de sa part. C'est pour cela qu'il est intéressé à laisser voter la Chambre.

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Jusqu'à présent le gouvernement n'a pas pris part à la discussion des questions soulevées par l'amendement de l'honorable M. Frère-Orban.

La Chambre comprendra, je l'espère, la réserve que s'est imposée le gouvernement.

En effet, l'amendement de M. Frère-Orban tend, dans la pensée de son auteur, à augmenter les prérogatives du gouvernement, et à amener une plus grande participation des établissements de l'Etat aux bourses provenant des anciennes fondations.

Avant de me prononcer, j'ai donc voulu écouter attentivement tous les discours prononcés dans ce débat, et quoique ce sujet ne ressorte pas spécialement à mon département, j'ai voulu étudier d'une manière toute particulière la législation relative aux anciennes fondations de bourses d'études.

De cette étude, il est résulté pour moi la conviction que le devoir du gouvernement n'est pas où le place l'honorable M. Frère-Orban, mais que le devoir du gouvernement est de respecter les principes de justice, de légalité et de liberté engagés dans cet important débat.

Je regrette que la discussion ait lieu sous l'empire de certaines préoccupations nées de l'appréciation des résultats financiers que peut amener la solution de ces questions pour tels ou tels établissements d'enseignement supérieur auxquels on s'intéresse particulièrement. Je regrette que quelques honorables membres se soient laissé dominer par ces considérations accessoires.

Il me semble que les questions soulevées sont assez graves, pour être discutées au seul point de vue des principes et sans s'arrêter aux conséquences matérielles qu'elles pourraient avoir.

Nous savons, d'ailleurs, que la prospérité d'aucun établissement d'enseignement supérieur n'est ici en cause. Quelle que soit votre décision, il est certain que la Belgique n'en conservera pas moins tous les établissements qu'elle a, et que je désire qu'elle conserve, ne fût-ce que pour avoir la manifestation de la science dans toutes les directions que lui impriment les systèmes les plus opposés.

L'honorable M. Frère critique vivement ce qui se passe aujourd'hui à l'égard des fondations et des collations de bourses ; il y voit une violation flagrante et permanente de la loi. Il dit qu'il aurait pu se borner à demander au ministre de l'intérieur l'exécution de la loi.

Messieurs, je ne partage pas l'opinion de l'honorable M. Frère. Je ne vois pas dans ce qui se passe pour les fondations et les collations des bourses, une violation de la loi. D'ailleurs, s'il y avait violation de la loi, ce serait aux particuliers lésés par cette violation à recourir aux tribunaux pour obtenir que les droits qui leur sont assurés par les fondateurs leur soient reconnus.

Ceci m'amène à examiner quelle est la législation qui régit aujourd'hui les fondations de bourses. Elles existent toujours sous le régime légal qui a été établi par les arrêtés du 26 décembre 1818 et du 2 décembre 1823.

L'arrêté du 26 décembre 1818 a reconstitué les administrations spéciales des fondations de bourses, administrations basées sur le respect de la volonté des fondateurs scrupuleusement observée, et, dans le cas où cette volonté ne pourrait plus être suivie, y suppléant par des moyens analogues au but que les fondateurs se sont proposé.

L'arrêté du 2 décembre 1823 complète le premier. Il prescrit toutes les mesures nécessaires pour assurer la bonne administration des fondations et la collation équitable des bourses.

Voilà donc le régime légal sous lequel sont placées les anciennes fondations de bourses d'études.

Mais, dit l'honorable M. Frère, il y a un arrêté de 1816, qui ordonne que les bourses soient divisées entre les trois universités des provinces méridionales. Il y a l'article 13 de l'arrêté de 1823 qui dispose qu'aucun payement ne sera fait à ceux à qui les bourses seront conférées que pour autant qu'on produise, avec la quittance de boursier, le certificat constatant qu'il a fréquenté l'un des établissements d'instruction publique reconnus par le gouvernement.

Quelle est la portée de ces dispositions ? Déjà l'observation en a été faite par deux orateurs que vous avez entendus dans une séance précédente ; ces dispositions ont été prises en conformité avec l'organisation de l'enseignement supérieur à cette époque.

Le gouvernement voulait que les bourses profitassent aux jeunes gens fréquentant l'un des établissements existants. Le régime légal des administrations spéciales des fondations fut mis en rapport avec l'organisation de l’enseignement supérieur. Rien de plus simple, rien de plus rationnel.

Que s'est-il passé depuis lors ? Nous avons inauguré une ère nouvelle en 1830. Un principe nouveau a surgi : c'est le principe constitutionnel de la liberté d'enseignement. Il en résulte que les bourses, en général, doivent être indistinctement conférées aux jeunes gens qui fréquentent l'enseignement supérieur tel qu'il est organisé aujourd'hui.

C'est ce qui a lieu. L'administration particulière de toutes les anciennes fondations de bourses reste et a dû rester établie sur le pied des arrêtés de 1818 et de 1825 ; seulement la collation des bourses est mise en rapport avec la nouvelle organisation de l'enseignement supérieur, profondément modifiée par le principe de la liberté d'enseignement.

Je conçois que si l'université de Louvain avait réclamé pour elle seule l'attribution de bourses dont il n'a pas été disposé spécialement pour cette université, ce serait quelque chose d'exorbitant, qui ne pourrait soutenir un examen sérieux.

Mais l'université de Louvain n'a pas des prétentions de ce génie. Ce sont les collateurs qui, agissant en vertu des arrêtés de 1818 et de 1823, et conformément à la volonté des fondateurs, confèrent les bourses en laissant aux boursiers la liberté de faire leurs études où bon leur semble. Je trouve ce régime parfaitement légal et rationnel, parfaitement constitutionnel.

Messieurs, on a eu le tort, me semble-t-il, de se préoccuper trop de la position que ce régime fait aux établissements qui profitent d'une manière inégale de la collation des bourses. Une fois qu'on se place à ce point de vue, il devient impossible de résoudre convenablement la question de principe.

Or, la Chambre doit rester dans la discussion des principes, et ne pas se préoccuper ici des éventualités de leur application pour les divers établissements d'enseignement supérieur qui existent aujourd'hui.

Il me paraît donc évident que, dans ce qui se passe aujourd’hui relativement à l'administration des fondations de bourses et à la collation de ces bourses, il n'y a aucune violation de la loi.

Mais faut-il changer la loi ? L'honorable M. Frère lui-même ne va plus jusqu'à le demander.

Il se borne à demander que l'on change seulement le mode de collation.

Mais au nom de quels intérêts généraux demanderait-on un pareil changement ?

Est-ce dans l'intérêt de la justice ? Mais, au contraire c'est un principe essentiel de justice, qu'il faut respecter la volonté des fondateurs et les droits qui résultent de l'acte de fondation Et qu'il me soit permis de dire en passant que je ne conçois pas la distinction que fait l'honorable M. Verhaegen entre les collateurs parents des fondateurs et les autres collateurs également désignés par les fondateurs.

Les droits de ces tiers collateurs sont les mêmes que ceux des parents collateurs ; les uns ne peuvent pas être plus violés que les autres.

Est-ce dans l'intérêt des libertés constitutionnelles ? Au contraire, il me semble que le système actuel est parfaitement conforme aux exigences du régime constitutionnel, aujourd'hui tout jeune homme peut avec la bourse à laquelle il a droit, aller suivre un enseignement n'importe où il veut, dans l'un des quatre établissements.

Serait-ce dans l'intérêt des bourses actuelles qu'il faudrait changer le régime actuel ? Je crois qu'aujourd'hui on peut dire que les quatre (page 797) établissements qui existent en Belgique, offrent, au point de vue de la science, des garanties solides et complètes.

Est-ce dans l'intérêt de l'action gouvernementale ? Mais il me semble que l'on a glissé trop légèrement sur les garanties réelles, sur les garanties complètes qui se trouvent dans les arrêtés de 1818 et de 1823. Il suffit de lire ces deux arrêtés pour voir que toutes leurs disposions assurent une bonne administration des fondations et une bonne collation des bourses.

Les mesures les moins importantes et les plus minutieuses à la fois, sont prises pour qu'il y ait, à l'égard de l'administration comme de la collation, contrôle vraiment sérieux. Ce serait une erreur de croire qu'il n'y a pas là une action efficace du gouvernement ; la surveillance, dont parlaient, tout à l'heure certains honorables membres, existe en vertu des arrêtés de 1818 et de 1823.

Je ne vois pas ce qu'il y aurait, au point de vue du contrôle du gouvernement, à ajouter aux diverses dispositions des arrêtés de 1818 et de 1823.

Messieurs, ce qu'on veut donc après tout, c'est changer le mode de collation des bourses d'études. Je ne puis pas m'associer à cette espèce d'acte d'accusation qui est dirigé par l'honorable M. Frère contre les collations actuelles.

D'abord, nous savons qu'en vertu de divers articles des arrêtés de 1818 et de 1823, des conditions très sérieuses sont imposées pour la collation de ces bourses. Ces conditions sont-elles, oui ou non, observées ? J'ai lieu de croire qu'elles le sont. Si elles ne l'étaient pas, ce seraient les personnes qui auraient à se plaindre des vicieuses collations de bourses, à réclamer devant les tribunaux, et tout serait dit.

Je ne puis m'associer à cet acte d'accusation, alors surtout que je considère le genre de personnes qui, en général, sont désignées comme les collateurs de ces bourses. On a cité des membres du clergé ou des parents des fondateurs. Mais au nombre des collateurs figurent souvent les fonctionnaires les plus respectables. Presque partout vous avez des fonctionnaires de l'ordre judiciaire, tels que les présidents de tribunaux, les procureurs du roi, les juges de paix, solides fonctionnaires de l'ordre administratif, tels que commissaires d'arrondissement, les bourgmestres des principales villes du pays.

Il me semble que toutes ces personnes offrent, au point de vue d'une collation équitable, toutes les garanties que l'on peut désirer.

L'honorable M. Frère voudrait substituer à ces collations le gouvernement comme étant plus désintéressé. Certainement quel que soit le ministre de l'intérieur, le gouvernement agirait, j'en suis convaincu, d'une manière juste et rationnelle. Il ne faut pas se dissimuler, cependant, que le gouvernement, dans ces sortes d'affaires, serait à la fois juge et partie. Le gouvernement ne serait pas plus désintéressé que ne le sont les collateurs actuels, parfaitement étrangers à toute espèce d'établissement, et offrant par le caractère même des fonctions dont ils sont revêtus, toutes les garanties d'impartialité et de justice.

Vous le voyez, messieurs, j'ai voulu seulement présenter quelques courtes observations pour prouver que, d'après le gouvernement, ce qui se fait aujourd'hui en matière de fondations de bourses est parfaitement conforme à la loi, et qu'il n'y a aucun motif sérieux de changer l'état actuel des choses.

C'est vous dire, messieurs, que le gouvernement ne voit aucune raison pour motiver un examen ultérieur de cette question.

Quant à la question de l'administration des fondations, elle se présentera probablement à l'occasion de la loi de la charité ; on pourra alors la discuter à fond. Mais quant à la seule question actuellement en discussion, celle de la collation des bourses d'études, le gouvernement croit qu'elle est parfaitement élucidée.

Un examen ultérieur de l'amendement de l'honorable M. Frère, est inutile et ne pourrait servir qu'à détourner la Chambre de la discussion, déjà trop longue, du projet de loi soumis en ce moment à ses délibérations.

M. Landeloos. - Ce n'est pas la première fois que l'université de Louvain est en butte à certaines attaques de la part de quelques membres de cette assemblée.

A plusieurs reprises nous avons vu qu'on a cherché à démontrer que c'était son droit que les élèves qui suivaient les cours de cette université, jouissaient des bourses qui avaient été fondées antérieurement par leurs parents ou par des personnes qui tenaient à ce que certains gratifiés eussent ces bourses constituées dans l'intérêt des études. C'est ainsi, messieurs, que dès 1849, nous avons remarqué dans le rapport sur la loi votée à cette époque que l'on prétendait qu'il fallait examiner si l'université de Louvain avait droit aux bourses qui avaient été instituées par des fondations particulières. A cette époque déjà, on a discuté en partie cette question et l'on a démontré à la dernière évidence que ces bourses faisaient partie d'un patrimoine auquel le gouvernement ni la législature elle-même ne pouvaient porter atteinte.

On a invoqué les diverses dispositions légales qui ont été portées sous la république française, au moment de la tourmente révolutionnaire, sous l'empire et sous le roi Guillaume, et l'on a démontré qu'à toutes ces époques on a envisagé ce droit comme ne pouvant donner lieu à aucune mesure législative qui aurait eu pour effet de nationaliser des biens qui faisaient partie d'un patrimoine.

Aussi, messieurs, on s'est bien gardé alors de présenter un amendement quelconque, de présenter un projet de loi qui aurait eu pour effet d'enlever aux gratifiés les droits qui leur incombent en vertu des actes des testateurs. On a également eu soin de ne proposer aucune disposition qui aurait eu pour effet d'enlever à ceux qui avaient été désignés comme curateurs le droit de collation. Mais on a cru qu'avec (manque un mot) on serait peut-être parvenu à trouver une Chambre docile, à trouver une Chambre qui, comme la Chambre piémontaise, aurait adopté un système dont l'effet aurait été d'accorder au gouvernement le droit de conférer les bourses comme il l'entendait, de déposséder les familles, de déposséder les fonctionnaires publics qui avaient été institués par les propriétaires de ces biens comme ceux qui devaient les représenter dans la suite et qu'au gouvernement seul aurait appartenu le droit de conférer certaines bourses.

M. le ministre des affairss étrangères (M. Vilain XIIII). - Laissons-là le Piémont, je vous prie, mon cher collègue. Les Chambres belges n'ont pas plus le droit de juger le Piémont que les Chambres sardes de juger la Belgique.

M. Landeloos. - Je conçois qu'au point de vue diplomatique j'ai peut-être eu tort d'invoquer un exemple qui avait été invoqué par d'autres avant moi. En tout cas, si j'ai rappelé cet exemple, c'est pour démontrer que peut-être, dans certains pays, on a été trop loin et que la justice nouvelle est contraire à toute mesure qui porte atteinte au droit de propriété.

Je disais donc, messieurs, que ce n'est qu'actuellement pour la première fois qu'on a osé présenter un amendement, tendant à enlever à ceux qui ont été investis par les testateurs ou par les donateurs du droit d'exécuter leurs intentions, des prérogatives que l'on veut conférer au gouvernement.

On vous a déjà fait connaître, messieurs, que la législation, sous la république, sous l'empire, sous le roi Guillaume, avait toujours reconnu le droit à un testateur ou à un donateur d'apposer certaines conditions aux actes de libéralité qu'ils posaient, que nommément, en ce qui concerne les fondations, lorsque celles-ci avaient été approuvées ou autorisées par le gouvernement avec toutes les conditions apposées par les testateurs ou donateurs, il n'appartenait pas à une administration postérieure d'enlever ce droit qu'on avait reconnu en approuvant la fondation.

Si, messieurs, on pouvait adopter un pareil système, si, sous prétexte de faire mieux exécuter la volonté du testateur, on pouvait se mettre aux lieu et place de celui qui a été nommé par lui ; eh bien, messieurs, il appartiendrait au gouvernement de dire : Telle personne a été nommée exécuteur testamentaire d'un tel ; comme, à mon point de vue, cette personne ne présente pas toutes les garanties nécessaires, je vais me mettre à son lieu et place à l'effet de faire mieux exécuter les dernières volontés du testateur.

Voilà, messieurs, le système qu'on voudrait faire prévaloir.

Et, messieurs, dans quel but ? On vous l'a dit ; le but n'est point caché : l'université de Louvain jouit de la confiance des parents ; les études qu'on y fait sont solides, les principes qu'on y professe sont moraux et religieux ; on ne veut pas reconnaître que c'est à cause de ces études sérieuses, de ces principes moraux et religieux que les pères de famille préfèrent envoyer leurs enfants à Louvain ; on cherche un autre motif et on croit le trouver dans la circonstance que l'université de Louvain jouit presque exclusivement de toutes les bourses d'études qui ont été érigées antérieurement.

Et, messieurs, pour faire croire à la réalité d'un tel état de choses, l'honorable M. Verhaegen nous disait dès le 22 novembre dernier, que « l'université de Louvain était favorisée de presque toutes les bourses, au point que les trois quarts de ses élèves étaient des boursiers ».

Remarquez, messieurs, que l'université de Louvain a 600 ou 700 élèves, de sorte que, d'après les calculs de l'honorable M. Verhaegen il faudrait qu'il y eut à Louvain 450 à 500 boursiers. Or, messieurs, que trouvons-nous dans un document officiel qui nous a été transmis par le département de l'intérieur, le 15 janvier dernier ? Nous y trouvons aux pages 1, 8, 9, 19, qu'il existe à Louvain 157 boursiers.

L'honorable M. Orts, dans une séance postérieure, disait que le nombre des élèves qui jouissaient de bourses à l'université de Louvain s'élevait au moins à 250. Il y a une centaine à déduire de ce chiffre, comme vous le voyez messieurs, par le document officiel que je viens de citer ; mais pour le chiffre de l'honorable M. Verhaegen, c'est 300 à 350 qu'il faut en retrancher.

Et, messieurs, je serais peut-être en droit de dire que le nombre de boursiers indiqué par le gouvernement est exagéré ; qu'il y a confusion entre certaines catégories d'élèves qui jouissent de bourses. D'après certains renseignements que j'ai tâché de me procurer, il paraîtrait que le nombre des boursiers est loin de s'élever même à 157.

Ce n'est pas, messieurs, la seule inexactitude qui est échappée à l'honorable M. Verhaegen : il a prétendu que pour pouvoir accaparer plus facilement la jouissance de ces bourses, on avait nommé une seule et même personne pour en administrer le plus grand nombre, et il a ajouté que le tantième des recettes de cette personne s'élevait à près de 16,000 francs, si je ne me trompe.

Eh bien, messieurs, d'après les renseignements que j'ai obtenus et qui sont parfaitement exact, le tantième des recettes n'a jamais dépassé 6,900 francs.

En présence de ces chiffres outrés qu'on nous présente, que faut-il penser, messieurs, d'une mesure qu'on base principalement sur de (page 798) pareilles considérations ? Lorsque les chiffres sont aussi fautifs on doit croire que la mesure qu'ils servent à étayer n'a pas beaucoup de mérite.

Est-il vrai, messieurs, que ce soit la pensée de faire jouir l'université de Louvain des anciennes bourses d'études qui nous fait tenir à ce que les anciens administrateurs soient maintenus en possession des droits qui leur ont été conférés par les fondateurs ? Evidemment non, messieurs. Si les anciens administrateurs continuent à jouir de leurs attributions, c'est en vertu d'un droit civil, c'est en vertu d'un droit qui doit dominer toutes les questions de parti, c'est en vertu du droit de propriété. Il dépendait du fondateur de disposer de ses biens comme il l'entendait et il n'appartient pas à un législateur ni à un gouvernement de disposer de ces biens contrairement à la volonté du fondateur qui doit être envisagé dans une pareille matière comme législateur.

Maintenant avons-nous à examiner si les dispositions de l'article 23 s'opposent à ce que les étudiants qui suivent les cours de l'université de Louvain puissent jouir de ces bourses ?

Les honorables MM. Malou et de Theux vous ont déjà fait connaître qu'en présence de la Constitution on ne pouvait plus exiger de la part d'un élève qu'il suivît plutôt une université reconnue par l'Etat qu'une université libre, que la Constitution avait implicitement abrogé la disposition qui exigeait de la part du gratifié la condition de fréquentation d'un cours donné dans une université de l'Etat ?

A cet égard, les honorables MM. Frère-Orban et Verhaegen ont répondu que pour que cette disposition soit abrogée, il faut une disposition formelle d'une loi postérieure ; que ce n'est qu'une question de principe qui a été posée dans la Constitution et que cette question n'abroge pas nécessairement une disposition prise antérieurement ; l'honorable M. Verhaegen, en poussant les comparaisons à l'extrême, en est venu jusqu'à prétendre que les acquéreurs de biens nationaux, en présence de la disposition de la Constitution qui déclare que le droit d'association est libre en Belgique, devraient, s'ils en étaient requis, restituer les biens des anciennes corporations qui ont été vendus par le gouvernement. Je croirais abuser des moments de la Chambre, en réfutant sérieusement une pareille doctrine.

Messieurs, puisqu'on a invoqué le droit d'association, j'invoquerai, à mon tour, l'article qui consacré cette liberté, pour démontrer à l'honorable membre que réellement la Constitution a abrogé l'article 13 de l'arrêté de 1823.

Nous savons tous que, d'après le Code pénal en vigueur, il est défendu de s'assembler, sans une autorisation préalable, a plus de 20 personnes ; la Constitution, au contraire, accorde à tous le droit s’assembler sans autorisation aucune ; eh bien, aucune disposition, depuis que la Constitution a été promulguée, n'a été portée par la législature pour abroger la disposition contenue dans le Code pénal ; et d'après la manière de voir de ces honorables membres, cette disposition devrait encore recevoir son exécution, puisqu'il n'y a pas une loi formelle qui l'ait abrogée. Or, en présence de l'article 138 de la Constitution, comment est-il possible de soutenir encore qu'il faille absolument une disposition qui abroge celle de l'arrêté de 1823 ?

L'article 138 porte : « A compter du jour où la Constitution sera exécutoire, toutes les lois, décrets, arrêtés, règlements et autres actes qui y sont contraires, sont abrogés. »

En présence de cet article, il n'est plus possible de soutenir que l'article 13 de l'arrêté de 1823 est encore en vigueur, puisque la Constitution reconnaît la liberté d'enseignement. J'ai dit.

- La suite de la discussion est remise à demain.

La séance est levée à quatre heures trois quarts.