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Chambres des représentants de Belgique
Séance du jeudi 4 mars 1852

Séance du 4 mars 1852

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1851-1852)

(Présidence de M. Verhaegen.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Vermeire (page 732) procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.

La séance est ouverte.

M. Ansiau donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. Vermeire présente l'analyse des pièces adressées à la chambre.

« La chambre de commerce et des fabriques de Gand présente des observations sur l'article 3 de l'arrêté royal du 2 février dernier, et demande que cette disposition qui se retrouve dans le projet de loi de modifications douanières soit rédigée de la manière la plus favorable aux transactions commerciales. »

M. Osy. - Messieurs, la chambre de commerce et des fabriques de Gand présente des observations sur l'article 3 de l'arrêté royal du 2 février dernier ; il me paraît que ces observations sont tout à fait d'accord avec la proposition faite au gouvernement par la chambre de commerce d'Anvers. Je demande le renvoi à la section centrale chargée de l'examen du projet de loi de réforme douanière et l'insertion au Moniteur.

M. Manilius. - J'appuie le renvoi à la section centrale, que je croyais d'abord avoir déjà terminé son travail ; car, si je suis bien informé, le rapporteur est nommé. Cependant, je ne m'opposerai pas au renvoi, mais je ne vois pas l'utilité de l'insertion an Moniteur.

Je me borne donc à appuyer la première partie de la proposition de M. Osy.

M. Osy. - Je demande l'insertion au Moniteur pour que le commerce connaisse les observations d'une chambre de commerce importante du pays et qu'il sache si les chambres de commerce de Gand et d'Anvers sont tout à fait d'accord.

Nous avons suivi la même marche dans la discussion du traité avec la Hollande.

M. Van Iseghem. - Ordinairement on n'insère pas de pétition au Moniteur avant que le rapport ne soit présenté. On pourrait annexer la pétition au rapport de la section centrale chargée de l'examen de la réforme douanière.

M. Vermeire. - La chambre de commerce de Gand, présentant des observations sur l'aricle. 3 de l'arrêté du 2 février, croit que cet article peut donner lieu à diverses interprétations. Je pense qu'il serait peut-être plus convenable aux intérêts du commerce d'ordonner le renvoi de cette pétition à la commission des pétitions, qui ferait un prompt rapport. M. le ministre des finances pourrait s'expliquer dans la discussion de ce rapport, sur le point de savoir si l'article 3 doit être interprété dans un sens tel que le désire la chambre de commerce de Gand.

MM. Delehaye. - Je pense, messieurs, que la proposition de M. Vermeire n'est pas acceptable et il s'en serait convaincu s'il avait eu le temps de lire la pétition : la chambre de commerce de Gand croit que le projet de loi soumis à la chambre est mal interprété, et elle appelle l'attention de la section centrale et de la chambre sur ce projet de loi ; il me semble donc qu'il est naturel de renvoyer la pétition à la section jcentrale.

L'honorable M. Manilius a cru que la section centrale avait terminé ses travaux ; la section centrale a déjà pris plusieurs résolutions, mais il en reste beaucoup à prendre, et M. le ministre des finances doit assister à la discussion de plusieurs questions qui ont été réservées. Je pense donc que l'on peut ordonner le renvoi.

Quant au deuxième objet de la proposition, l'insertion au Moniteur, elle ne serait autorisée par aucun antécédent ; cependant la pétition étant très importante, je pense qu'il serait bon d'attendre la proposition de la section centrale ; si la section centrale le croit utile, elle joindra la pétition a son rapport ; si, au contraire, elle pense que le dépôt sur le bureau suffit, elle en fera la proposition.

D'après ces considérations, messieurs, je crois que ce qu'il y a de mieux à faire, c'est de se borner à renvoyer la pétition à la section centrale.

M. Vermeire. - Je dois répéter que la chambre de commerce de Gand, dans sa pétition, dit qu'il semble y avoir du doute sur le sens d'un article du traité.

Si la pétition est renvoyée à la section centrale, je demande que cette section fasse un prompt rapport.

- Le renvoi de la pétition à la section centrale, chargée de l'examen du projet de loi de reforme douanière, est ordonné.

La chambre décide ensuite que la pétition ne sera pas insérée au Moniteur.


« M. le gouverneur de la Banque Nationale fait hommage à la chambre de 120 exemplaires du compte rendu des opérations de la Banque pendant l'année 1851. »

- Distribution aux membres de la chambre et dépôt à la bibliothèque.

«


M. Jobard fait hommage à la chambre de 110 exemplaires d'une brochure concernant la question des brevets d'invention. »

- Même décision.

Rapports sur des pétitions

M. Bruneau. - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport de la commission permanente d'industrie sur différentes pétitions qui demandent la révision du droit de douane sur le bétail.

- Ces rapports seront imprimés et distribués. La chambre en fixe la discussion à la suite de l'ordre du jour.


M. Lesoinne. - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport de la commission permanente d'industrie sur la pétition par laquelle les fabricants de tamis réclament de nouvelles protections douanières pour leur industrie.

- Ce rapport sera imprimé et distribué. La chambre en fixe la discussion à la suite de l'ordre du jour.

Projet de loi sur le code forestier

Rapport de la commission spéciale

M. Orts. - Messieurs, je dépose sur le bureau de la chambre le dernier rapport supplémentaire de la commission qui a été chargée de l'examen du projet de Code forestier. Le rapport comprend tous les amendements sur lesquels la chambre a encore attiré l'attention de la commission.

Le rapport est très court. Je suis prêt à en donner lecture, si la chambre le désire.

- De toutes parts. - Lisez ! lisez !

M. Orts. - Messieurs, la commission a examiné les amendements renvoyés dans les séances dernières à son appréciation.

L'amendement de l'honorable M. Coomans a été adopté par deux voix contre une et une abstention.

La majorité s'est ralliée, pour motiver son vote, aux considérations invoquées par l'auteur de l'amendement dans ses développements oraux.


Les amendements de MM. Moncheur et Lelièvre sur les articles 151, 160 et 169, ont ramené en discussion la question résolue déjà par une proposition contenue dans l'un des rapports précédents, où la commission demandait de s'en référer pour l'avenir au projet de Code pénal général et d'adopter provisoirement les articles du projet.

Des réflexions nouvelles soulevées depuis ce vote par les propositions faites hier, ont amené au sein de la commission une conciliation qui permet de résoudre d'accord commun et d'une manière définitive une difficulté d'ailleurs sérieuse.

Voici le texte du nouvel article 151, accepté par le gouvernement et la commission comme par les auteurs des amendements.

« Art. 151. En condamnant à l'amende, les tribunaux pourront ordonner qu'à défaut de payement dans le délai de deux mois à partir du jugement, s'il est contradictoire, et à partir de sa notification s'il est par défaut, cette amende sera remplacée par un emprisonnement dont ils détermineront éventuellement la durée et qui ne pourra excéder le terme de trois mois s'il s'agit d'une amende de plus de 25 fr. ou le terme de sept jours s'il s'agit d'une amende inférieure. »

En conséquence, les amendements de MM. Moncheur et Lelièvre sont retirés par leurs auteurs, ainsi que les article 151 du projet primitif et du projet de la commission.


L'amendement de l'honorable M. David à l'article 137 a déjà été rejeté au sein de la commission. Voir premier rapport, page 45.

Le nombre de membres présents aujourd'hui étant inférieur au nombre de ceux qui ont pris part à la première réunion, la commission croit ne pas pouvoir remettre cet objet en discussion.

La commission accepte la proposition faite par le gouvernement d'exiger pour les gardes particuliers l'âge de 25 ans exigé déjà pour les gardes de l'administration.

Les mêmes motifs justifient les deux dispositions. (Article 175.)


La commission s'occupant du tarif des peines, d'accord avec le gouvernement, propose les modifications suivantes aux articles réservés.

Article 73, paragraphe 1, supprimer les mots « au triple de » après le mot « égale », et y substituer le mot « à ».

Supprimer aussi le paragraphe 2 du même article.

Ajouter en remplacement le paragraphe suivant :

Si le fait a été commis volontairement, la peine sera double.

Article 153. Ajouter le paragraphe final suivant :

Le juge pourra suivant les circonstances porter l'amende au double.

Article 163 de la commission, n° 4°, dire simplement :

Si les contraventions ont été commises en bande ou réunion.

Article 160. Il est évident que dans les cas prévus par cet article, le juge sera tenu d'élever la peine au double du minimum fixé par l'article 153 ; de 8 à 16 fr., 4 à 8 fr., et 1 fr. 50 à 3 fr.

Il pourra néanmoins élever la peine au double du maximum.


Les honorables MM. Jacques, Rousselle et Lelièvre ont proposé divers amendements à l'article 80.

D'accord commun avec ces honorables membres, l'article est ainsi modifié par la commission :

(page 733) Les communes et les établissements publics peuvent, avec l'approbation de la députation permanente, soit adjuger, etc.

Paragraphe 2. Il en est de même, etc.

Supprimer le paragraphe additionnel et final de la commission.

L'honorable M. Jacques a proposé encore deux dispositions additionnelles, l'une portant le chiffre 79bis, l'autre imprimée sous le n°108 des documents parlementaires.

La commission rejette ces dispositions comme inutiles. La première est l'application du droit fiscal existant, la seconde est déjà inscrite dans l'article 2 du Code civil.

Ordre des travaux de la chambre

M. le président. - Messieurs, avant de nous occuper de l'ordre du jour, je dois dire un mot à la chambre concernant les travaux des sections. Il y a un inconvénient qui se présente. Certains budgets ont été renvoyés à l'examen des sections du mois de janvier, et les derniers budgets présentés ont été renvoyés à l'examen des sections du mois de février. Cela amène certains inconvénients en ce que ce sont des sections différentes qui examinent les budgets qui ont souvent quelques rapports entre eux. Il serait convenable que la chambre voulût bien revenir sur cette décision de renvoyer les derniers budgets à l'examen des sections de février et les renvoyer aux sections du mois de janvier, De cette manière, les budgets seraient examinés par les mêmes sections, et les inconvénients que je signale ne se présenteraient plus.

- La chambre, revenant sur sa décision, ordonne le renvoi des derniers budgets présentés aux sections du mois de janvier.

Projet de loi sur le code forestier

Discussion des articles

Titre III. Délimitations et abornements

Article 30

M. le président. - Nous avions tenu en suspens l'article 30. Cet article était ainsi conçu :

« Art. 30. Lorsque la séparation ou délimitation sera effectuée par un simple bornage ou par des fosses creusées à distance sur la ligne de séparation entre deux bois, elle sera faite à frais communs.

« Lorsqu'elle sera effectuée par des fossés de clôture, ils seront exécutés aux frais et sur le terrain de la partie requérante. »

Il y avait à cet article deux amendements, l'un de M. Moncheur, l'autre de M. Roussel. La commission qui a examiné ces deux amendements a proposé la suppression de l'article.

M. le ministre de la justice se rallie-t-il à cette proposition ?

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - La proposition de la commission est de laisser le bornage aux règles du droit commun. Je me rallie à cette proposition.

M. Moncheur. - Je me rallie à l'amendement de la commission.

M. Roussel. - Je m'y rallie aussi.

- La suppression de l'article 30 est mise aux voix et adoptée.

TitreVIII. Des adjudications et délivrances de la glandée, du panage, de la paisson, des chablis, bois de délits et autres produits forestiers

Article 80

« Art- 80. Les communes et les établissements publics pourront obtenir l'autorisation, soit d'adjuger la glandée et la paisson, soit d'en opérer la délivrance pour leurs troupeaux, soit d'en disposer de toute autre manière.

« Il en sera de même à l'égard des chablis et autres menus produits de leurs bois.

« Cette autorisation sera accordée par le ministre, après avoir pris l'avis de la députation permanente. »

Il y avait à cet article trois amendements, un de M. Jacques, un second de M. Lelièvre et un troisième de M. Ch. Rousselle.

M. Orts. - Voici ce que la commission propose, d'accord, je pense avec le gouvernement, mais d'accord certainement avec les honorables auteurs des amendements :

« Les communes et les établissements publics peuvent, sous l'approbation de la députation permanente, soit adjuger la glandée et la paisson, soit en opérer la délivrance pour leurs troupeaux, soit en disposer de toute autre manière.

« Il en est de même à l'égard des chablis et autres menus produits de leurs bois. »

L'article s'arrêterait là.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je pense que la commission est d'accord avec le gouvernement sur ce point, que la délivrance des bois, dont il est fait mention dans l'article, doit être faite par l'administration forestière. Ce n'est que quand l'administration a décidé qu'il y avait lieu à la délivrance des produits des bois que la députation interviendra pour décider si la glandée et la paisson seront mises en adjudication ou si la délivrance sera faite aux communes et établissements publics, pour leurs troupeaux ; enfin ce sera la députation qui décidera de quelle manière les communes jouiront des produits de leurs bois ; mais, dans tous les cas, la délivrance devra être faite par l'administration forestière elle-même.

M. Orts. - La commission est parfaitement d'accord avec le gouvernement sur le sens de la disposition. L'idée que vient d'exprimer M. le ministre de la justice est celle qui a guidé la commission.

C'est un principe général en matière forestière que jamais un usager ne se paye de ses propres mains, sans que l'administration forestière intervienne au préalable pour faire délivrance.

M. Lelièvre. - La proposition de la commission exprimant la pensée de mon amendement, je déclare m'y rallier.

- L'article 80 proposé par la commission est mis aux voix et adopté.

Titre X. Police et conservation des bois

Article 106bis (nouveau)

M. le président. - Nous avons maintenant l'article nouveau proposé par M. Coomans, sous le n°106bis$ (chiffre à vérifier), qui est ainsi conçu :

« Quiconque enlèvera des nids ou des œufs d'oiseaux sera puni d'une amende de 2 à 6 fr, »

La commission propose l'adoption de cet amendement.

M. Delfosse. - La commission ne se composait que de 4 membres, 2 ont voté pour, 1 contre, 1 s'est abstenu. L'avis de la commission ne doit donc pas être d'un grand poids.

Quant à moi, je pense que la disposition proposée par l'honorable M. Coomans trouverait mieux sa place dans une loi sur la chasse que dans un Code forestier. Il y a des nids ailleurs que dans les forêts.

M. de La Coste. - La disposition est extrêmement générale. Est-ce qu'un propriétaire ne pourra pas faire enlever les œufs d'oiseaux malfaisants, tels que les corbeaux et les pies ?

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - J'ai combattu dans la commission la disposition proposée par M. Coomans. Je dirai en quelques mots les raisons qui me déterminent à ne pas me rallier à la proposition. D'abord, comme l'a fait remarquer l'honorable M. de La Coste, la disposition est trop générale ; elle comprend l'enlèvement de toute espèce d'œufs d'oiseaux ; cependant il est plusieurs espèces d'oiseaux dont il serait utile de diminuer la quantité.

Ainsi je citerai les éperviers, les corbeaux, les pies, les geais. La nomenclature pourrait être très étendue. Toutes ces différentes espèces d'oiseaux sont comprises dans l'amendement présenté par l'honorable M. Coomans.

D'un autre côté, cette disposition n'a aucun rapport, ou au moins qu'un rapport très éloigné avec la législation qui nous occupe.

Ou bien lorsqu'on voudra enlever ces nids, on fera quelque tort aux bois, on endommagera les arbres, ou bien on ne fera aucune espèce de tort aux bois. Si l'on ne fait aucune espèce de tort aux bois, si l'on ne déshonore en aucune manière les arbres, il est évident qu'il n'y a point là de délit forestier.

Si au contraire un dommage est fait aux arbres, celui qui aura enlevé un nid sera puni comme un délinquant ordinaire. Ce serait donc en quelque sorte un délit sui generis qu'on établirait par la loi. Du moment qu'on en fait un délit de cette nature, il faudrait l'étendre à la destruction des nids d'oiseaux qui peut avoir lieu dans la campagne. Il est à remarquer que la plupart des oiseaux qu'il y a le plus d'intérêt à conserver ne nichent pas dans les bois, mais à la campagne. Vous auriez donc une législation différente pour les oiseaux qui nichent dans les bois et pour ceux qui nichent dans la campagne. Je pense que ce n'est pas admissible.

Je dis que cela n'a aucun rapport avec les délits forestiers. En effet, on ne peut considérer comme un fruit des bois les oiseaux qui y nichent. Le gibier n'est pas considéré comme l'accessoire du bois ; il n'est pas la propriété de celui dans la forêt de qui il se trouve. Il n'est sa propriété que quand il s'agit d'un parc. Mais quand il s'agit d'un bois ordinaire, le gibier est la propriété de celui qui s'en empare ; il n'appartient pas à celui qui a la propriété du sol.

Il y a une dernière raison pour laquelle je combats cet amendement ; c'est que je craindrais qu'en érigeant ces faits en délits on n'amenât tous les habitants des campagnes devant les tribunaux correctionnels ou de simple police pour des faits de minime importance. Il y aurait, à mon sens, quelque chose d'extrêmement grave à exposer un père de famille à être traduit devant les tribunaux correctionnels, parce que son fils, âgé de 7 ans, aurait pris un nid d'oiseau.

Voilà les raisons qui me déterminent à combattre l'amendement.

M. Coomans. - Je dois rectifier d'abord une erreur très involontaire de notre honorable président, qui a lu mon amendement tel que je l'avais rédigé ; la commission n'a pas déclaré dans son rapport et par M. Orts, que, quant au chiffre, cet amendement avait reçu une modification.

Je me suis rallié facilement à la réduction de moitié, de l'amende, c'est-à-dire qu'elle ne serait plus que d'un à 3 francs.

Un honorable député de Louvain trouve l'amendement trop sévère, en ce qu'il défendrait aux propriétaires de dénicher leur propre bien. Telle n'est pas la portée de mon amendement. Il va sans dire que le propriétaire pourra accorder la permission de dénicher ses oiseaux à qui il le voudra, ou se réserver ce plaisir-là à lui-même, s'il le trouve bien.

Je ne porte donc aucune atteinte au principe de la propriété.

L'honorable ministre de la justice constate, avec raison, qu'il est certains oiseaux malfaisants qu'il est bon de dénicher ; et dès lors il voudrait concéder ce droit au premier venu.

Mais, messieurs, n'est-il pas une foule d'animaux malfaisants que vous ne permettez pas au public de détruire ?

Il ne suffit pas qu'un animal soit malfaisant pour que la loi permette à tout le monde de s'en emparer ou de le tuer.

La loi sur la chasse le démontre suffisamment.

Cet argument donc n'est pas fort. Les lapins, les lièvres, les renards et une foule d'autres animaux sont beaucoup plus malfaisants, ce me semble, que les pies qu'a citées l'honorable ministre. Cependant il n'est pas permis à tout le monde de débarrasser le sol de ces animaux.

(page 734) L'honorable ministre croit que les oiseaux les plus intéressants (car il reconnaît qu'il en est d'intéressants, ce que je note bien volontiers) nichent à la campagne plus ordinairement que dans les bois ; qu'ils nichent dans les vergers, dans les champs et les prairies, Cela est vrai. Je voudrais que la chambre étendît la défense de dénicher à ces parties du sol.

Ce serait une reconnaissance nouvelle du droit de propriété. Mais telle n'est pas la portée de l'article ; et je ne vois pas un grand inconvénient à excepter les terres non boisées parce que les propriétaires de vergers et de prairies sont là pour protéger leurs biens. Ils ne permettront pas facilement, je crois même qu'ils ne permettent jamais de dénicher les oiseaux des vergers et des prés parce que, dans tous les cas, il en résulte certains dommages ; on gâte les arbres, on foule l'herbe ; les propriétaires ne le permettent pas. Par conséquent les oiseaux qui choisissent l'abri d'un verger ou d'un pré sont déjà garantis, dans une certaine mesure, par l'intérêt des propriétaires.

Mais les oiseaux les plus exposés, ce sont les oiseaux du gouvernement. Ils ont cela de commun avec les écus du gouvernement ; c'est le bien de tous, que trop de gens s'acharnent à dénicher. Ce sont ces oiseaux que je désire protéger dans l'intérêt de tous les contribuables.

On peut dénicher, dit l'honorable ministre, sans nuire aux arbres. Cela est parfaitement vrai. Mais je ferai remarquer à l'honorable ministre que l'on peut aussi cueillir des noisettes sans endommager les bois. Or la loi, ainsi que l'a constaté l'honorable rapporteur, défend l'enlèvement des noisettes. Les noisettes cependant nichent moins haut que les oiseaux ; il est donc plus facile de cueillir des noisettes sans endommager les arbres, que de dénicher des oiseaux.

Vous protégez les noisettes qui souvent se trouvent dans les taillis à fleur de terre. Protégez également les oiseaux. (Interruption.) Ce n'est pas ma faute si les noisettes sont dans le Code forestier, ce n'est pas moi qui les y ai mises.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Il y a cette différence que les noisettes sont incontestablement le fruit du bois.

M. Coomans. - Ces nids peuvent être considérés comme des fruits également. L'honorable ministre de la justice doute que ce soit dans les bois que nichent les espèces ornithologiques les plus utiles à l'agriculture, celles qui se nourrissent d'insectes. Cependant il a habité la campagne ; il a eu ce bonheur comme je l'ai eu longtemps, et il ne doit pas ignorer que les pinsons, les merles, les mésanges, les rouges-gorges, qui tous sont des oiseaux très utiles, nichent dans les bois.

M. Orts. - Tout autant dans les vergers et dans les campagnes.

M. Coomans. - Dans ce cas, je le répète, c'est le propriétaire qui protégera sa propriété.

D'après votre argumentation, mon amendement n'aurait qu'un tort, c'est de n'être pas assez large. Or, je suis prêt à y comprendre les vergers. Ce ne serait que juste.

Maintenant, messieurs, craignez-vous que ma proposition, protectrice du peu d'oiseaux qui nous restent encore, soit impopulaire dans les campagnes ? Ce serait une erreur : vous rendrez service à tous les pères de famille en les forçant à ne plus permettre à leurs enfants d'aller s'exposer, dans les bois, à des dangers de toute espèce. Je conçois que d'honorables députés du Luxembourg jugent que mon amendement est de peu d'importance, en ce sens que les oiseaux ne leur manquent pas : ils ont beaucoup de bois encore ; mais dans un grand nombre de localités où l'on a défriché à peu près tous les bois, je puis assurer que les oiseaux manquent. « Les oiseaux s'en vont, » c'est un mal au point de vue de l'agriculture. Il n'en existe presque plus dans les provinces dénudées de bois ; ne leur enlevez pas leur dernier asile, les petits bouquets de bois conservés encore dans les Flandres et dans la province d'Anvers.

Voici, du reste, ce qui se passe : au milieu du printemps, à la fin du mois d'avril et au commencement de mai, les enfants de tous les villages se réunissenl et vont faire dans les bois une razzia complète d'oeufs et d'oiseaux à peine éclos ; j'ai vu une cinquantaine de gamins réunir en peu d'heures 500 à 600 oiseaux, les égorger et les accommoder avec des œufs. Eh bien, messieurs, indépendamment de la peine que nous devons éprouver à voir détruire inutilement nos espèces ornithologiques, je pense que nous ne devons pas habituer l'enfance à ce plaisir stérile et cruel. J'ajouterai que ces jeunes oiseleurs se font souvent maraudeurs, contractent des habitudes de vagabondage, et deviennent plus tard des voleurs de profession.

J'insiste donc, messieurs, sur l'adoption de ma proposition. (Aux voix ! aux voix !)

M. de Mérode. - Je ne conçois pas qu'on rie d'une proposition si raisonnable que celle de l'honorable M. Coomans ; je ne conçois pas non plus le plaisir qu'on peut éprouver à détruire une chose utile et agréable comme les oiseaux. On a parlé d'oiseaux malfaisants, et l'honorable M. de La Coste s'y est tout particulièrement intéressé ; nous ne demandons pas mieux que de voir permettre la destruction de ces espèces, mais il me semble qu'il serait très à propos qu'on ne put pas monter sur les arbres sans la permission du propriétaire. Or, pour prendre les nids, il faut nécessairement monter sur les arbres.

M. Orts. - C'est la même chose pour les hannetons.

M. de Mérode. - On se borne, pour prendre les hannetons, à secouer les arbres. Au surplus, je ne prétends pas, ici, lutter de plaisanteries avec ceux qui me contredisent, mais je défends la proposition de l'honorable M. Coomans parce qu'elle me paraît très raisonnable et que je ne vois pas, je le répète, ce qu'il peut y avoir de bon à détruire les oiseaux. Que l'on détruise autant que possible les oiseaux malfaisants, mais il ne s'ensuit pas qu'il faille détruire tous les autres.

Quant aux noisettes, dont on a parlé, elles m'intéressent infiniment moins, et il est beaucoup plus difficile de dresser des procès-verbaux contre des troupes d'enfants qui cueillent des noisettes, des myrtilles ou des framboises sauvages que contre ceux qui vont dénicher des oiseaux ; cependant on n'a pas hésité à insérer dans la loi une disposition relative aux fruits. Eh bien, je demande que l'amendement de M. Coomans soit également adopté.

M. de La Coste. - Messieurs, je n'aurais pas fait mon observation si, dans l'amendement proposé, on avait mis la même restriction que dans l'article relatif aux fruits, aux noisettes, dont a parlé l'honorable M. de Mérode ; là on a dit qu'on ne peut pas enlever les fruits sans l'autorisation du propriétaire. Maintenant, d'après les explications données par l'honorable M. Coomans, mon observation devient sans objet.

II me reste cependant à dire que je ne m'intéresse pas du tout aux corbeaux, au contraire, je suis témoin de tous les dégâts qu'ils causent, ainsi que beaucoup d'autres oiseaux.

Quant aux oiseaux chanteurs, ils sont protégés par la loi sur la chasse.

Mais, je le répète, je n'aurais pas fait mon observation si l'article avait été plus explicite.

- L'amendement de M. Coomans est mis aux voix et adopté avec la modification proposée par la commission.

Titre XI. De la procédure en matière de délits commis dans les bois soumis au régime forestiers

Section I. De la poursuite des délits
Article 137

M. le président. - L'article 137 est ainsi conçu :

« Les procès-verbaux réguliers, dressés par un seul agent ou garde, feront de même preuve jusqu'à inscription de faux, si le délit on la contravention n'entraîne pas une condamnation de plus de 100 francs tant pour amende que pour dommages-intérêts. Lorsque le délit est de nature à emporter une plus forte condamnation, ces procès-verbaux ne feront foi que jusqu'à preuve contraire. »

M. David a présenté à cet article un amendement ainsi conçu :

« Les procès-verbaux réguliers, dressés par un seul agent ou garde, à charge d'un ou de divers individus, feront foi jusqu'à preuve contraire. »

La commission n'adopte pas cet article.

M. David. - Messieurs, vous avez remarqué que dans l'article 137 tel qu'il est proposé par le gouvernement et la commission, il existe une véritable anomalie. Quand il s'agit d'un délit emportant une condamnation dépassant cent francs, un agent forestier qui a dressé un procès-verbal à lui seul sera cru jusqu'à preuve contraire ; mais lorsqu'il s'agit d'un délit emportant une amende au-dessous de cent francs, le garde alors sera cru jusqu'à inscription de faux. Mais c'est précisément lorsque les délits sont d'une grande importance que le délinquant a intérêt à faire comparaître de faux témoins. Il y a donc une véritable anomalie dans l'article.

Lorsqu'un agent de police ou un garde champêtre dresse des procès-verbaux, vous ne les croyez que jusqu'à preuve contraire ; lorsqu'il s'agit d'employés de la douane, ils doivent nécessairement être deux pour dresser un procès-verbal, et là encore vous ne les croyez que jusqu'à preuve contraire. Je ne vois pas de raison pour donner plus d'autorité au procès-verbal dressé par un seul garde forestier.

Je maintiens donc mon amendement. On rendrait, pour des délits de peu d'importance, la défense presque impossible pour une quantité de prévenus qui peuvent être innocents et qui préféreront une condamnation à l'accomplissement de toutes les formalités, bien plus coûteuses, pour s'inscrire en faux.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, j'ai exposé hier les raisons qui me déterminent à ne pas me rallier à l'amendement de l'honorable M. David. La disposition que le gouvernement et la commission proposent est en harmonie avec l'état actuel des choses, qui n'a donné lieu jusqu'à présent à aucun inconvénient.

L'honorable M. David s'est borné aujourd'hui à dire que dans certains cas lorsqu'il s'agissait de procès-verbaux dressés par des agents de police, on ne leur accordait foi que jusqu'à preuve contraire. L'honorable membre oublie que ces agents ont mission de constater des délits d'une toute autre nature que les délits forestiers.

M. David. - Messieurs, si pour dresser un procès-verbal on pouvait toujours appréhender le délinquant au corps, je comprendrais qu'on put le croire jusqu'à inscription de faux ; mais très souvent c'est à la vue que le garde dresse le procès-verbal, il peut se tromper sur l'identité ; il lui arrive de dresser un procès-verbal à charge d'une personne qui se trouve à 4 ou 5 lieues de l'endroit où le délit est censé avoir été commis.

Un cas semblable s'est présenté devant le tribunal de mon arrondissement, à propos d'un procès-verbal dressé par des gardes forestiers particuliers. Ce sont des inconvénients que je voudrais éviter à des innocents.

M. Orts. - Messieurs, une des circonstances qui ont déterminé le maintien de la disposition dont l'honorable M. David réclame la suppression, c'a été, au sein de la commission, l'expérience. Si de graves abus étaient résultés de cette disposition, ces abus devraient être connus aujourd'hui de tout le monde, et énergiquement signalés à l'époque d'une réforme ; car ce que l'honorable M. David combat, ce que le gouvernement propose d'accord avec la commission, a été décrété parla loi sur la police forestière de 1791 ; et depuis que cette loi est (page 735) en vigueur en Belgique, les procès-verbaux ont la force probante que nous voulons leur conserver.

Pour ma part, dans la pratique, je n'ai jamais constaté, je n'ai jamais entendu constater par autrui que des plaintes vraiment sérieuses se fussent manifestées.

Ceux qui ont vu ces choses de près savent que dans la plupart des affaires de minime importance, les témoins qu'on produit sont des co-délinquants qui se montrent aujourd'hui complaisants, pour qu'on le soit demain à leur égard, témoins que les juges, dans 90 cas sur 100, ne croient pas et ont raison de ne pas croire.

M. Lelièvre. - Je ferai observer que dans les cas mêmes où la loi admet la preuve contraire, il est excessivement rare que la preuve contraire soit rapportée, et encore il arrive que celle-ci a pour appui des témoignages très équivoques. Pour moi, messieurs, j'ai une défiance extrême de la preuve testimoniale. Dans l'état actuel de nos mœurs, elle me semble plus conjecturale encore que l'expertise. L'expérience démontre que ce mode de preuve est extrêmement dangereux et qu'il donne lieu à une foule de parjures.

Dans ces circonstances, je pense qu'il vaut mieux s'en tenir à ce qui se pratique depuis plus de soixante ans, surtout qu'il s'agit de faits n'entraînant que des conséquences peu importantes. Ce n'est pas le cas d'innover, alors surtout qu'on ne peut attendre des résultats favorables de la mesure contraire. D'un autre côté, l'expérience n'a pas révélé des inconvénients graves, résultés de la législation dont le maintien est proposé.

Qu'on veuille remarquer, du reste, que le projet simplifie singulièrement la procédure en inscription de faux, et ce que la chambre ne perdra pas de vue, c'est qu'en France aussi on a cru devoir maintenir la législation de 1791 ; de sorte que là aussi la disposition en question n'a pas donné lieu à des abus justifiant son abrogation.

M. David. - Messieurs, puisqu'on se défie de la preuve testimoniale, pourquoi ne pas appliquer alors le système du projet aux délits qui peuvent entraîner une condamnation dépassant cent francs ? Je persiste à penser que lorsqu'on doit être condamné à 2,000 ou 3,000 fr. d'amende, on a plus d'intérêt à produire de faux témoins que lorsqu'on doit être condamné à 100 fr. et au-dessous. L'argument présenté par l'honorable M. Lelièvre me semble très faible.

- La discussion est close.

L'amendement de M. David est mis aux voix et n'est pas adopté.

L'article 137, tel qu'il est présenté par la commission, est mis aux voix et adopté.

Article 138

La chambre a tenu en suspens l'article 138 ; cet article est ainsi conçu :

« Art. 138. Si un procès-verbal constate à la fois, contre divers individus, des délits ou contraventions distincts et séparés, il n'en fera pas moins fo jusqu'à inscription de faux pour chaque délit ou contraventions qui n'entraînerait pas une condamnation de plus de 100 francs, tant pour amende que pour dommages-intérêts, quelle que soit la quotité à laquelle pourront s'élever toutes les condamnations réunies. »

- Adopté.

Section II. De l'exécution des jugements
Article 151

L'article 151 avait été également tenu en suspens ; il est ainsi conçu :

« Art. 151. Les condamnés contre lesquels la contrainte par corps aura été exercée, et qui justifieront de leur insolvabilité, suivant le mode prescrit par l'article 420 du Code d'instruction criminelle, seront mis en liberté après huit jours de détention, lorsque l'amende et les autres condamnations pécuniaires n'excéderont pas quinze francs.

« La détention durera 15 jours lorsque ces condamnations s'élèveront ensemble de 16 à 50 francs.

« Elle durera de 16 jours à deux mois, si les condamnations excèdent ces chiffres.

« En cas de récidive, la durée de l'emprisonnement sera double.

« L'emprisonnement libère des condamnations qui y ont donné lieu. »

M. le président. - A l'article 151 il y avait un amendement de M. Moncbeur, ainsi conçu :

« En condamnant à l'amende, les tribunaux ordonneront qu'à défaut de payement dans le délai d'un mois à partir du jugement, s'il est contradictoire, et à partir de sa notification, s'il est par défaut, cette amende sera remplacée par un emprisonnement correctionnel qui ne pourra excéder le terme de deux mois, si les amendes prononcées sont supérieures à 10 fr., et par un emprisonnement de simple police qui ne pourra excéder le terme de sept jours, si les amendes prononcées sont inférieures à 10 francs.

« En cas de récidive, la durée de l'emprisonnement sera double. »

- La commission chargée d'examiner cet amendement a proposé un nouvel article 151 qui a été accepté par le gouvernement et par l'auteur de l'amendement. Cet article serait ainsi conçu :

« Art. 151. En condamnant à l'amende, les tribunaux pourront ordonner qu'à défaut de payement dans le délai de deux mois à partir du jugement, s'il est contradictoire, et à partir de sa notification s'il est par défaut, cette amende soit remplacée par un emprisonnement dont ils détermineront éventuellement la durée, et qui ne pourra excéder le terme de trois mois s'il s'agit d'une amende de plus de 25 fr., et le terme de 7 jours s'il s'agit d'une amende inférieure. »

M. Moncheur. - Mon amendement avait pour but d'empêcher l'impunité des délits forestiers en autorisant les tribunaux à prononcer l'emprisonnement à défaut du payement de l'amende. La commission avant accueilli ce système dans la rédaction du nouvel article 151 qu'elle propose, je me suis rallié, dans son sein, à sa proposition, qui remplace mon amendement.

M. Lelièvre. - Messieurs, la disposition adoptée par la commission, relativement à l'autorisation de remplacer l'amende par l'emprisonnenrnt, est une amélhration, surtout que par une nouvelle disposition de l'article 153, le juge sera autorisé à doubler les amendes proposées primitivement par le projet.

Dans mon opinion, on devrait donner aux tribunaux la faculté de prononcer la peine d'emprisonnement, lorsqu'il s'agit de ceux qui volontairement coupent et enlèvent des arbres sur pied. Mais le gouvernement, conservateur des intérêts de la société, estimant que les peines pécuniaires sont suffisantes pour la répression des délits forestiers, je ne crois pas devoir me montrer plus sévère que lui.

Voilà pour quel motif je me suis contenté de l'amendement de la commission qui ne remplit qu'imparfaitement le but que je voulais atteindre.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Le gouvernement pense que de simples amendes suffisent pour la répression des délits forestiers lorsqu'elles atteignent des individus qui peuvent payer. Mais une simple amende ne suffirait pas toujours pour la répression lorsqu'elle tombe sur des personnes insolvables.

C'est précisément dans cet ordre d'idées, et pour cette raison que le gouvernement admet qu'en cas d'insolvabilité l'emprisonnement peut être prononcé par les tribunaux. Il y a une raison pour laquelle je n'ai pas admis que l'emprisonnement doive dans tous les cas être prononcé même contre des individus qui ne payeraient pas, puisque le délit étant commis par un individu de dix ou douze ans les parents seraient civilement responsables, ils courraient'peut-être le risque de subir un emprisonnement au lieu du délinquant principal. C'est pour cette raison que l'emprisonnement doit être facultatif pour le juge.

- La disposition nouvelle proposée par la commission est mise aux voix et adoptée.

Titre XII. Des peines et condamnations pour tous les bois et forêts en général

Article 153

« Art. 153. La coupe ou l'enlèvement d'arbres ayant deux décimètres de tour et au-dessus, donnera lieu à des amendes qui seront déterminées dans les proportions suivantes.

« Les arbres sont divisés en trois classes :

« La première classe comprend les chênes, châtaigniers, noyers, ormes, frênes et mélèzes.

« La deuxième se compose des hêtres, charmes, érables, platanes, arbres résineux autres que le mélèze, tilleuls, peupliers, bouleaux, aliziers, cerisiers, merisiers et autres arbres fruitiers.

« Et la troisième des trembles, aunes, saules, sorbiers et toutes autres espèces d'arbres.

« Si les arbres de la première classe ont deux décimètres de tour, l'amende sera d'un franc par chaque décimètre. Elle s'accroîtra ensuite progressivement, savoir : de cinq centimes par chaque décimètre jusqu'à cinq décimètres inclusivement.

« De dix centimes par chacun des cinq décimètres suivants : de quinze centimes par chaque décimètre, pour les arbres au-dessus d'un mètre jusqu'à quinze décimètres ;

« Et pour les arbres au-dessus de quinze décimètres, de vingt centimes par chaque décimètre.

« L'amende sera de la moitié des sommes fixées ci-dessus pour les arbres de la deuxième classe, et du quart pour ceux de la troisième classe.

« Le tout conformément au tableau ci -annexé. (Ce tableau, repris aux pages 735 et 736 des Annales parlementaires, n’est pas repris dans la présente version numérisée).

« La circonférence sera mesurée à un mètre du sol.

(page 736) - La commission, après un nouvel examen, propose un paragraphe final ainsi conçu : .

« Le juge pourra, suivant les circonstances, porter l'amende au double. »

M. Lelièvre. - Mon amendement est remplacé parla disposition de l'article 151 telle qu'elle est rédigée. Je me réfère à ce que j'ai dit sur cet article.

- L'article 153 est mis aux voix etadopté avec le paragraphe additionnel proposé par la commission.

Titre VII. Réarpentages et récolements

Article 73

M. le président. - L'article 73 a été voté sous la réserve de le coordonner avec les dispositions pénales qui seraient insérées dans les articles suivants. En conséquence, la commission propose de substituer dans le premier paragraphe de l'article 73, aux mots : « égale au triple de la valeur », ceux-ci : « égale à la valeur », et de remplacer le deuxième paragraphe par la disposition suivante :

« Si le fait a été commis volontairement, la peine sera double. »

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Nous nous sommes mis d'accord avec la commission sur tous les points sur lesquels rapport a été fait au commencement de la séance.

- Les modifications proposées à l'article 73 sont mises aux voix et adoptées.

Titre chapitre section (à retrouver)

Article 160

« Art. 160. L'amende pour coupe ou enlèvement de bois qui n'auront pas deux décimètres de tour sera, pour chaque charretée, de huit francs par bêle attelée, de quatre francs par charge de bête de somme et d'un franc cinquante centimes par fagot, fouée ou charge d'homme.

« L'amende sera triple s'il s'agit d'arbres semés ou plantés ayant moins de deux décimètres de tour. »

- M. Lelièvre a proposé à cet article une disposition additionnelle ainsi conçue :

« Les délinquants pourront en outre être condamnés à un emprisonnement dont la durée n'excédera pas trois mois. En cas de récidive, cette peine pourra être portée au double. »

La commission, après nouvel examen, propose de porter les amendes prononcées par l'article160 à 16, 8 et 3 francs au lieu de 8 francs, 4 francs et 1 fr. 50 c.

M. Lelièvre. - Mon amendement n'a plus d'objet d'après la disposition de la commission, adoptée par la chambre sur l'article 151. Je dois toutefois demander à M. le ministre une explication qui a pour objet de déterminer le sens de notre disposition. Celle-ci a donné lieu à une divergence d'opinion entre les cours d'appel de France et la cour de cassation. Cette dernière cour a décidé que l'amende était due pour chaque fagot enlevé, alors même qu'il en faudrait plusieurs pour composer une charge d'homme. Je pense que c'est en ce sens que l'article en discussion est soumis à la chambre.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - C'est dans ce sens que l'article doit être entendu, c'est aussi dans ce sens que la disposition a toujours été appliquée.

- L'article 160 est mis aux voix et adopté avec les modifications proposées par la commission.

Titre XII. Des peines et condamnations pour tous les bois et forêts en général

Article 167

M. Orts. - Je demanderai à la chambre de vouloir bien ajouter à l'article 167 un mot qui me semble nécessaire. Dans l'énumération des bestiaux qui peuvent être pris en contravention, on a omis une espèce qui pourrait impunément être introduite dans les bois si elle n'était pas mentionnée. Je propose d'ajouter à la fin du premier paragraphe le mot « taureau » : « par taureau, boeuf, vache ou veau ».

- L'amendement proposé à l'article 167 est mis aux voix et adopté.

Article 168

« Art. 168. Les peines pour délits et contraventions en matière forestière seront doubles :

« 1° S'il y a récidive dans l'année à dater du premier jugement rendu contre le délinquant ;

« 2° Si les contraventions ou délits ont été commis la nuit ;

« 3° Si les délinquants ont fait usage de la scie ou du feu pour abattre les arbres sur pied ;

« 4° La peine pourra être doublée si les délits ou les contraventions ont été commis en bande ou réunion. »

- La commission a examiné de nouveau cet article. Elle propose de rédiger comme suit le 4° :

« Si les contraventions ont été commises par bande ou réunion. »

M. Delfosse. - La chambre avait fait de cette disposition un article spécial ; si la dernière proposition de la commission est admise, il faut faire disparaître l'article nouveau et maintenir le paragraphe 4, modifié par la commission.

- L'article 168, tel qu'il est proposé par la commission, est mis aux voix et adopté.


M. le président. - La chambre a maintenant à statuer sur l'article 79bis et sur la disposition additionnelle proposés par M. Jacques.

M. Delfosse. - Je proposerai d'en ajourner la discussion après le vote du titre XIII. Nous attendons un renseignement.

- Cette proposition est adoptée.

Titre XIII. Des bois et des forêts des particuliers

Article 175

« Art. 175. Les gardes des bois de particuliers ne pourront entrer en fonctions qu'après avoir été agréés par le gouverneur de la province, sur l'avis de l'agent forestier du ressort, et avoir prêté serment devant le tribunal de première instance.

« Ils devront être âgés de 23 ans accomplis. »

M. Lelièvre. - Je pense qu'il est entendu que le serment doit être prêté devant le tribunal de la situation des biens ; mais il convient qu'il y ait à cet égard une explication qui ne permette d'élever aucun doute sur ce point ; en conséquence, si les biens étaient situés dans deux provinces contiguës, le serment devrait être prêté devant deux tribunaux, et le garde devrait être agréé par le gouverneur de chacune des provinces.

M. le président. - M. le ministre de la justice propose de substituer l'âge de 25 ans à l'âge de 23 ans. La commission se rallie à cette proposition.

- L'article 175 est adopté avec cette modification.

Article 176

« Art. 176. Les dispositions du titre IX relatif aux droits d'usage sont applicables aiix bois et forêts des particuliers, à l'exception des articles 81, 86, 97 et 99.

M. Roussel. - Je prendrai la liberté de demander à M., le ministre de la justice s'il a quelque objection à la suppression, dans cet article, de la mention de l'article 97, concernant une mesure de police qui pourrait être fort avantageuse aux bois des particuliers. Je ne vois pas pourquoi cet article serait excepté des mesures qui seront applicables aux forêts des particuliers.

Il est vrai qu'on pourrait se demander comment cette mesure serait prise, en ce qui concerne les bois des particuliers. Mais comme ii s'agit des communes usagères, il me semble qu'il n'y a rien de plus simple que d'appliquer aux bois des particuliers la mesure prescrite par l'article 97 pour les bois des communes et des établissements publics.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - L'article 97 a été excepté par l'article 176, parce qu'il s'agil là de rapports entre les usagers et les propriétaires de bois entre personnes privées. Je ne sais comment le gouvernernement pourrait s'immiscer dans ces rapports, comment il pourrait, par exemple, se charger de faire apposer la marque prescrite par l'article 97.

M. Roussel. - Cela se fait ainsi.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Pardon, cela ne se fait pas ainsi. Le gouvernement n'intervient pas ; il ne peut pas faire apposer les marques au bétail des usagers, lorsqu'il s'agit de bois où il n'exerce pas une certaine police. Il appartient au propriétaire de prendre les précautions nécessaires pour que le bétail des communes usagères aille seul dans leurs bois.

On ne peut forcer les agents du gouvernement à apposer ces marques, à prendre toutes les autres mesures prises par l'article 97 C'est aux particuliers à exercer, sous ce rapport, la police dans leurs bois.

M. de Chimay. - J'interviens à regret dans cette discussion. Je m'en suis abstenu jusqu'à présent, parce qu'étant malheureusement un peu juge et partie, je l'avais cru convenable. Mais comme il s'agit ici d'une question de fait, je crois devoir donner une explication à la chambre.

Cette disposition est plus grave qu'elle n’a l’air de l'être au premier (page 737) abord. En effet, vous comprendrez facilement combien il serait parfois difficile aux propriétaires ou à leurs agents d'intervenir avec toute l'impartialité désirable dans l'application de mesures d'un intérêt aussi différent pour eux et pour les usagers.

La difficulté ne sera peut-être pas aussi absolue lorsqu'il s'agira d'une seule commune usagère aux prises avec un propriétaire, Mais il est des circonstances où plusieurs communes prétendent à ce droit d'une manière complexe.

Dans ces circonstances, je crois utile d'éviter des chances de procès continuels entre les propriétaires et les communes usagères.

Je citerai un exemple dans la province du Hainaut. J'y connais telle forêt fréquentée par 17 communes usagères. Comment voulez-vous abandonner aux agents particuliers de cette forêt l'arbitrage de tant d'intérêts divers ?

Il pourrait en résulter des inconvénients sans nombre. J'ajouterai que ce qu'on demande n'est que le maintien de ce qui s'est toujours fait.

Jusqu'à présent, la marque du bétail par les agents forestiers n'a donné lieu à aucune plainte.

J'insiste donc pour que la mention de l'article 97 disparaisse de l'article en discussion. Je le demande plus encore dans l'intérêt des communes que dans celui des propriétaires. Je ne pense pas qu'il puisse en résulter la moindre difficulté pour les agents forestiers. Au contraire, cela préviendra toute discussion entre les parties intéressées.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Cela peut prévenir des discussions entre les usagers et les propriétaires. Mais cela ne préviendra pas les difficultés entre les usagers et les agents du gouvernement. Ce seront eux qui seront distraits des fonctions qu'ils doivent exercer dans l'intérêt des bois de l'Etat et des communes. On les accusera de favoriser les intérêts des propriétaires ou des communes usagères.

Je crois qu'il y aurait là un très grand danger.

D'un autre côté, qu'on veuille bien lire l'article 97, et l'on verra qu'il s'agit simplement de mesures de police, de gardiennat à prendre par le propriétaire lui-même. On ne peut distraire les agents du gouvernement de leur besogne, de leurs fonctions habituelles, pour les forcer à aller marquer dans les communes usagères, dans les bois des particuliers, les bestiaux qui peuvent y entrer.

Il peut même y avoir un autre inconvénient sous un rapport différent. Il pourrait y avoir dans telle contrée, dans tel arrondissement, des usagers dans des bois des particuliers, alors qu'il n'y aurait cependant ni bois de l'Etat, ni bois de communes, où par conséquent, il n'y aurait pas de garde forestier du gouvernement. Il faudrait donc déléguer d'une province ou d'une localisé éloignée un agent du gouvernement qui devrait aller marquer tout le bétail qui peut entrer dans les bois des particuliers., Il y aurait à cela de très grands inconvénients.

M. de Chimay. - Je répondrai à M. le ministre, que si les agents forestiers étaient requis dans ce seul cas, je crois qu'il y aurait lieu d'examiner en effet jusqu'à quel point il serait à propos de les faire intervenir. Mais je ferai observer que dans l'état actuel des choses, ils interviennent quant à la défensabilité des coupes. Ainsi, ce sont les agents forestiers qui viennent, dans les bois des particuliers, reconnaître la défensabilité des coupes, déclarer quelle est la quantité de bestiaux qui peuvent fréquenter ces bois. Par conséquent la marque ne serait pour eux qu'une formalité accessoire.

Je regrette de devoir entrer dans des détails en quelque sorte personnels. Mais je reviens à l'exemple que j'ai cité, parce qu'il est frappant. Ainsi, une partie de nos bois sont voisins de la province de Namur et d'un autre côté de la France sur une étendue de 20 à 22 kilomètres.

Comment voulez-vous que nos agents forestiers reconnaissent, par exemple, une vache française d'une vache belge ? C'est une affaire de physionomie assez difficile à constater. On en conviendra cependant, les usagers eux-mêmes ont le plus grand intérêt à ce que les villages voisins ne viennent pas empiéter sur leur parcours.

Ce que je dis est tellement vrai que plusieurs communes usagères du Hainaut sont venues nous prier de prendre les mesures nécessaires pour aller au-devant de ces difficultés.

Je dois faire remarquer, du reste, que ce que je réclame n'est, comme je l'ai déjà dit, que la continuation de ce qui existe. La modification apportée cette année seulement, l'a été en vertu d'une circulaire du département des finances et à la suite d'un conflit isolé. Je sais qu'après ce conflit une réclamation a été adressée à l'administration du domaine.

Un travail a été fait à cet égard par M. Leclercq, qui a cru devoir abonder dans le sens adopté par M. le ministre de la justice. Mais je crois que dans la pratique aucune des difficultés que l'on prévoit n'est àn craindre ; qu’au contraire, le régime nouveau qu’on veut y substituer donnera naissance à de grands embarras et sera une source intarissable de procès.

A ce titie j'insiste pour que le ministre se rallie à la proposition qui, je le réjète, nestera que la confirmation du système constamment suivi depuis un grand nombre d'années.

M. Orts. - Messieurs, en mon nom personnel et pas le moins du monde comme rapporteur de la commission, puisqu'elle n'a pas délibère sur cet objet, je dois déclarer que, dans ce que vient de dire l'honorable prince de Chimay, il y a une considération qui me touche, qui me paraît assez grave.

L'honorable membre demande que les bestiaux envoyés par les usagers dans un bois particulier soient marqués comme ceux des usagers dans les bois soumis au régime forestier. Cette mesure ne serait pas seulement utile aux propriétaires de bois ; mais ce qui m'a paru beaucoup plus important, elle serait aussi dans l'intérêt des communes usagères ; et à ce titre elle a un peu le caractère d'une mesure d'intérêt général.

Il est important pour l'usager de savoir s'il ne trouve pas lui-même dans les forêts du bétail appartenant à des personnes qui n'ait pas le droit d'exercer un pâturage. Cela est un peu de l'intérêt de tout le monde, de l'intérêt du propriétaire comme de l'intérêt de l'usager que celui-ci fasse lui-même la police du droit d'usage. Or, vous ne pouvez faciliter ce contrôle de l'usager véritable sur les empiétements d'un autre qu'à l'aide de la proposition de l'honorable prince de Chimay.

L'exemple qu'a cité l'honorable membre de forêts situées sur la frontière, et c'est le cas de la majeure partie de nos propriétés boisées, est surtout remarquable, parce que cet exemple prouve qu'il est facile, en l'absence de la mesure que l'on propose, de voir commettre des délits que l'usager ne pourra constater et qui, découverts plus tard, seront d'une réparation impossible, puisque les délinquants se trouveront en pays étranger.

M. de Theux. - Il me semble que parmi les articles qui ont été votés, il en est un que l'on peut invoquer en faveur de l'amendement do l'honorable prince de Chimay. C'est l'article 12 ; il porte : « Les gardes des bois et forêts soumis au régime forestier ont qualité pour constater les délits commis dans les bois des particuliers, lorsqu'ils en sont requis par les propriétaires. »

Ainsi le gouvernement permet aux particuliers de requérir l'intervention des gardes des bois domaniaux pour constater des délits dans des propriétés particulières.

Ce que l'honorable prince de Chimay demande en ce moment, ne serait qu'une extension d'application du principe déjà consacré par l'article 12.

M. David. - Je pense que nous ferons bien d'adopter l'amendement proposé par l'honorable M. Roussel. Voici, messieurs, comment se passent les choses en fait de pâturage ; l'honorable prince de Chimay vous l'a déjà à peu près indiqué. Il ne suffit pas à une commune usagère d'avoir le droit d'entrer dans une forêt ; s'il n'y a, par exemple, dans cette forêt que 20 hectares défensables, il n'est pas permis à la commune d'y entrer avec tout son bétail. L'administration forestière décide, d'après le nombre d'hectares déclarés défensables, le nombre de têtes qui peuvent paître dans cette partie de la forêt.

Il est donc indispensable qu'il soit apposé une marque sur les bestiaux qui pourront entrer dans cette partie de la forêt déclarée défensable par l'administration forestière.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je ne m'oppose pas à ce qu'il y ait une marque apposée aux bestiaux qui entreront dans la forêt. Mais ce que je désire empêcher, c'est qu'on force les gardes de l'Etat ou des communes à venir apposer eux-mêmes cette marque.

Si l'on veut entendre l'article en ce sens que les communes devront faire apposer une marque, que ces communes devront même faire déposer la marque au greffe du tribunal, je n'y vois aucune espèce d'objection. Mais la marque que l'Etat ferait apposer par ses gardes sur le bétail ne pourrait empêcher les difficultés, parce qu'on ne pourrait pas par cette simple marque, empêcher les particuliers comme les propriétaires de comparaître devant les tribunaux.

Ainsi, si l'on refusait de marquer une tête de bétail qu'un usager prétendrait avoir le droit d'introduire dans la forêt, ou si l'on marquait une tête de bétail que le propriétaire soutiendrait ne pas pouvoir y entrer, la marque apposée par les agents de l'administration ne pourrait pas évidemment éviter les difficultés. Je puis bien admettre que, par mesure de police, les bestiaux doivent porter une marque ou une clochette, mais je demande que l'administration ne soit pas appelée à intervenir dans ces difficultés.

M. Roussel. - L'explication que M. le ministre de la justice vient de donner est parfaitement exacte, c'est-à-dire qu'il ne s'agit dans l'article 97 que d'une mesure de police, sans préjudice au droit des parties, de se pourvoir devant l'autorité compétente. Je ne vois donc pas de difficulté à ce que la mention de l'article 97 disparaisse de l'article 176. Quant aux frais, je crois qu'ils ne sont pas assez considérables pour attirer l'attention du législateur en présence d'autres interventions de l'administration dans les bois des particuliers.

M. Moncheur. - J'ai l'honneur de faire observer à la chambre que dans l'article 97, que l'on désire être applicable aux bois des particuliers, il n'est pas dit que la marque sera apposée par les agents du gouvernement. Ou ne peut donc rendre l'article 97 applicable aux bois des particuliers.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Si on l'entend ainsi, je ne vois pas de difficulté à la suppression.

- L'article 176 est mis aux voix et adopté avec la suppression de la mention de l'article 97.

Article 177

« Art. 177. Les dispositions des articles 106, 107, 108 et 109 sont également applicables aux bois des particuliers.

M. Lelièvre. - Messieurs, je dois refuser mon adhéuon à l'article en question, en tant qu'il applique aux bois des particuliers la disposition de l'article 109 qui soustrait à l'élagage les arbres ayant plus de 30 ans lors de la publication de la loi en discussion. La (page 738) jurisprudence a décidé irrévocablement que sous nos lois actuelles l'article 672 du Code civil est applicable aux forêts de l’Etat.

Quant aux bois des particuliers, la question n'a jamais été douteuse, et l'on ne peut nier que l'article 672 ne soit général, sans aucune distinction entre les bois et les autres propriétés. Les mêmes motifs d'ailleurs militent pour l'une et l'autre hypothèse.

Notre disposition est exorbitante en ce qu'elle introduit, en faveur des bois des particuliers, un privilège dont ils n'ont jamais joui, et le privilège est accordé avec effet rétroactif, contrairement aux principes du Code civil qui ont régi les arbres que notre disposition soustrait à l'élagage. Semblable prescription occasionnera aux terres voisines un dommage notable, puisque ces terrains seront frappés de stérilité sur une grande étendue. Je dois nécessairement m'opposer à pareil ordre de choses.

M. Orts. - Je crois que l'honorable M. Lelièvre voit un privilège où il n'y en a point. Les dispositions relatives à l'élagage concernant les bois soumis au régime forestier, comme les autres, sont réglées désormais par le droit commun, sauf une exception temporaire dont l'existence dans la législation actuelle est déjà douteuse.

M. Lelièvre. - L'honorable M. Orts perd de vue l'extension dont il s'agit dans l'article en discussion. On étend aux bois des particuliers la disposition de l'article 109 qui soustrait à l'élagage les arbres ayant plus de 30 ans lors de la publication delà loi. Il n'est pas là uniquement question des bois soumis au régime forestier ; notre article, au contraire, rend applicable l'article 109 aux bois des particuliers spécialement. Or, c'est là une innovation contraire au droit commun. Ainsi, les propriétaires des terrains voisins ne pourront faire élaguer les arbres des bois existant depuis 30 ans, alors même que les branches n'ont causé dommage que depuis quelques années seulement, alors même que le propriétaire des arbres les aurait élagués jusqu'à ce jour.

On dénature les principes du Code civil qui ont régi ces arbres depuis leur plantation. En effet, le projet admet une prescription contraire aux règles admises par le Code. Non seulement cet état de choses est contraire à tous principes, mais il établit un privilège en faveur des bois, au détriment des propriétés rurales, et il force le propriétaire d'une terre à souffrir un dommage qui, peut-être, ne naîtra qu'après la publication de la loi en discussion. Je ne puis souscrire à cette dérogation aux principes.

- L'article est mis aux voix et adopté.

Articles 178 et 179

« Art. 178. Les procès-verbaux dressés par le garde des bois et forêts des particuliers font foi jusqu'à preuve contraire. »

- Adopté.

« Art. 179. Les dispositions contenues aux articles 121, 122, 123. 124, 125, 126, 128,129, 130, 132,135, 143, 145 et 147 sont applicables aux poursuites exercées au nom et dans l'intérêt des particuliers, pour délits et contraventions commis dans leurs bois et forêts.

« Toutefois, dans le cas prévu par l'article 130, lorsqu'il y aura lieu à effectuer la vente des bestiaux saisis, le produit net de la vente sera versé à la caisse des dépôts et consignations. »

- Adopté.

Article 180

M. le ministre de la justice déclare se rallier à la suppression de l'article 180, proposée par la commission.

- L'article 180 est supprimé.

Article 181

« Art. 181. Les procès-verbaux dressés par les gardes des bois des particuliers seront remis au procureur du roi ou au juge de paix, suivant leur compétence respective, dans le délai d'un mois, à dater de l'affirmation. »

M.Jacques. - D'après nos lois, les magistrats qui poursuivent la répression des délits et contraventions ne sont pas les mêmes que ceux qui prononcent l'application des peines : le procureur du roi appartient à la première catégorie de ces magistrats, le juge de paix appartient à la seconde.

Il y a donc quelque anomalie à dire dans l'article 181 que les procès-verbaux des gardes particuliers seront remis au procureur du roi ou au juge de paix, suivant leur importance. C'est bien le procureur du roi qui est chargé de poursuivre sur le procès-verbal, lorsque l'affaire est de la compétence du tribunal correctionnel ; mais ce n'est pas le juge de paix qui est chargé des poursuites lorsqu'il s'agit d'une contravention qui ressortit au tribunal de simple police.

Pour mettre l'article 181 du Code forestier en harmonie avec les dispositions du Code d'instruction criminelle (article 15, 20 et 144) je pense que les mots « au juge de paix » doivent être remplacés par ceux-ci : « à l'officier par qui est rempli le ministère public près le tribunal de simple police ». Ce sont là les termes employés par l'article 15 du Code d'instruction criminelle pour désigner le magistrat à qui les bourgmestres doivent remettre les procès-verbaux et autres pièces relatives aux contraventions de simple police.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je ne crois pas qu'il y ait d'inconvénient à maintenir l'article tel qu'il est rédigé. Aujourd'hui ce sont principalement les juges de paix qui s'occupent de la poursuite des délits, en ce sens que ce sont eux qui délivrent les avertissements aux individus qui comparaissent devant eux. Ainsi ils remplissent quelquefois les deux fonctions à la fois. Je ne vois pas la moindre difficulté à ce qui les procès-verbaux leur soient adressés.

M. Lelièvre. - Je dois proposer une observation qui rentre dans l'esprit de la loi. Par l'article 131, nous avons établi la juridiction correctionnelle à l'égard de toutes personnes même vis-à-vis des militaires ; mais il manquait une disposition qui appliquait aux militaires la juridiction des tribunaux ordinaires relativement aux faits qui d'après le projet constituent une simple contravention de police. Je pense que tel doit être l'objet de notre article qui est général, ne fait aucune distinction, et par conséquent est relatif à toutes personnes quelconques ; ainsi en adoptant l'article qui vous est soumis en ce sens, vous trancherez relativement aux contraventions de police la question concernant les militaires, et vous la déciderez en faveur de la juridiction ordinaire, d'après les principes déjà admis dans la séance d'hier.

- L'amendement de M. Jacques est mis aux voix ; il n'est pas adopté.

L'article est mis aux voix et adopté.

Article 182

« Art. 182. Les amendes, indemnités et restitutions pour délits et contraventions dans les bois des particuliers, sont les mêmes que celles réglées pour délits et contraventions commis dans les bois soumis au régime forestier. »

- Adopté.

Articles additionnels

M. le président. - Il ne reste plus, pour terminer le premier vote de la loi, qu'à voter sur deux dispositions.

M. de Theux. - Je demanderai à M. le ministre de la justice s'il est dans son intention de proposer un article par lequel les lois antérieures sur la matière sont abrogées. On a agité cette question dans le sein de la commission, et M. le ministre de la justice a déclaré qu'il proposerait probablement un amendement, ayant pour objet de faire connaître quelles sont les lois antérieures qui sont abrogées comme étant incompatibles avec la loi actuelle. Ordinairement, lorsqu'on fait une loi aussi générale, on prend une mesure comme celle-là. C'est extrêmement utile pour les tribunaux et plus encore pour les particuliers qui ont besoin de savoir quels sont leurs droits et leurs devoirs.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - La commission avait proposé un article dans le sens indiqué par l'honorable M. de Theux. Cet article n'a pas été reproduit dans le projet ; en voici les raisons : C'est que dans les lois qu'on désignerait comme étant abrogées, pourraient se trouver certaines dispositions non relatives à la matière forestière ; il y aurait donc une lacune dans la législation, en ce que nous ne remplacerions pas ces dispositions par d'autres.

Il y a plus d'inconvénients à insérer dans la loi un article semblable qu'à ne pas l'y insérer. Nous devons rester à cet égard sous l'empire des principes généraux.

M. de Theux. - J'engage tout au moins M. le ministre de la justice à faire examiner quelles sont les dispositions des lois antérieures, qui peuvent être considérées comme étant encore en vigueur et compatibles avec le Code forestier actuel, quelles sont celles qui ne le sont pas, et de faire plus tard de celles-ci l'objet d'une loi spéciale. C'est de la plus haute importance. Il y a fort peu de personnes qui soient au fait de la législation forestière ; par suite de cette loi spéciale, les particuliers, je le répète, connaîtraient leurs droits et leurs devoirs ; ils ne seraient pas exposés à tomber involontairement dans des contraventions ou à intenter des actions non fondées.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - La proposition de l'honorable M. de Theux, de soumettre ultérieurement à cet égard un projet de loi à la chambre, est la seule pratique. Mais il faudra faire peut-être encore auparavant une loi sur la pêche ; car la grande difficulté résulte de ce que dans plusieurs de nos lois, il se trouve des dispositions relatives à la pêche et aux forêts. Ainsi dans l'ordonnance de 1669, on rencontre différentes dispositions concernant la pêche. On ne peut donc pas décider que cette ordonnance est désormais abrogée. Il y a encore des lacunes dans la législation sur la pêche ; il y a à réglementer la culture des rivières, si je puis m'exprimer ainsi.

M. Orban. - Messieurs, rien ne me paraît s'opposer à ce qu'on abroge les dispositions antérieures qui règlent les matières contenues dans le présent Code. La disposition pourrait être conçue en ce sens :

« Toutes les dispositions réglant les matières prévues dans le présent Code sont et demeurent abrogées. »

De cette façon nous ne toucherions pas à l'ordonnance de 1669, en ce qui concerne la pêche, puisque le Code actuel ne s'occupe pas de la pêche. Il en serait de même d'autres matières qui auraient quelque affinité avec la police forestière, mais qui n'y rentrent pas directement.

M. Lelièvre. - Il se présente une autre question qu'il est nécessaire de décider par une disposition transitoire. Lors de la publication de la loi en discussion, des poursuites seront pendantes devant les tribunaux correctionnels du chef de faits qui, d'après la loi nouvelle, ne seront peut-être que des contraventions. Ainsi le maraudage de bois est puni d'une peine correctionnelle d'après la loi de 1791, il ne peut être jugé que par les tribunaux correctionnels d'après la loi de mai 1819 ; eh bien, ces faits peuvent ne constituer qu'une contravention de police d'après l'article 160 du projet ; en cet état de choses, que fera le tribunal correctionnel légalement saisi de la poursuite ? Pourra-t-il appliquer la peine ou bien devra-t-il se dessaisir et renvoyer l'affaire devant le tribunal de simple police, le prévenu devant jouir du bénéfice de la loi nouvelle ? Voilà ce qu'il est important de décider, et je recommande cette question aux méditations de. M. le ministre de la justice en le priant de bien vouloir s'en occuper avant le second vote.

- La discussion des dispositions relatives au Code forestier, sur lesquelles il n'a pas encore été statué, est remise à demain.

La séance est levée à 4 heures et demie.