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Chambres des représentants de Belgique
Séance du lundi 6 juin 1853

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1852-1853)

(Présidence de M. Delfosse.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 1581) M. Ansiau procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart ; il lit le procès-verbal de la séance précédente dont la rédaction est adoptée ; il présente l'analyse des pièces adressées à la chambre.

- La séance est ouverte.

Pièces adressées à la chambre

« Plusieurs négociants, fabricants et industriels à Bruxelles prient la chambre de ne point se prononcer sur la réunion des faubourgs à la capitale, avant qu'une loi ait supprimé les octrois et établi un nouveau mode de perception de l'impôt. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le conseil communal d'Avin déclare adhérer à la pétition du conseil communal de Hannut, relative à la concession d'un chemin de fer de Huy à Landen. »

- Même disposition.


« Des électeurs à Baelen demandent que les élections aux chambres se fassent au chef-lieu de canton et que chaque circonscription de 40,000 âmes nomme un représentant. »

- Renvoi à la commission des pétitions du mois de mars.


« Les administrations communales de Glabbeek et Stierbempde, Capellen, Wever et Attenrode, Meensel-Kieseghem, Bincom, Kerkom, Hoeleden, Hauthem Ste-Marguerite demandent la construction d'un chemin de fer de Jemeppe à Diest par Jodoigue, Hoegaerde et Tirlemont. »

« Même demande des administrations communales de Bunsbeek, Vissenaeken, Saint-Pierre, Saint-Martin et Roosbeek. »

« Même demande des administrations communales de Büdingen et Cortenaeken. »

« Même demande de l'administration communale de Geetsbetz. »

« Même demande des administrations communales de Wommersom, Melkwezer, Oirbeek et Haekendover. »

« Même demande des administrations communales de Hoegaerde, Bost et Remmersom et d'autres habitants de ces communes. »

« Même demande de l'administration communale de Neerlinter. »

« Même demande de l'administration communale de Kersbeek-Miscom. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi relatif au chemin de fer de Fleurus à Landen.


« Le conseil communal de Mechelen demande que la compagnie concessionnaire d'un chemin de fer de Hasselt à Maestricht construise un embranchement de Bilsen sur Tongres et Ans. »

« Même demande du conseil communal d'Eysden. »

« Même demande du conseil commnnal de Stockheim. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi relatif au chemin de fer.


« Les bourgmestre, échevins et conseillers communaux de Saint-Gilles et d'autres propriétaires et habitants de cette commune demandent l'observation des lois qui défendent la pêche en temps de frai. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Werter présente des considérations sur les opérations du tissage dans l'industrie linière. »

- Même disposition.


« Les membres du conseil communal de Rosmeer demandent que le concessionnaire d'un chemin de fer de Hasselt vers Maestricht soit obligé d'établir une station à Bilsen, et de construire un embranchement de Tongres à Ans. »

« Même demande du comice du 8ème district agricole du Limbourg. »

« Même demande des conseillers communaux de Mopertingen. »

« Même demande des conseillers communaux de Petit-Spauwen. »

« Même demande du conseil communal de Martenslinde. »

« Même demande de de conseillers communaux à Waltwilder.

« Même demande de conseillers communaux d'Eygenbilsen. »

« Même demande des conseillers communaux de Zutendael. »

« Même demande de membres du conseil communal de Genck. »

« Même demande des conseillers communaux de Grand Spauwen. »

« Même demande des conseillers communaux de Hoelbeek. »

« Même demande des conseillers communaux de Rommershoven. »

« Même demande de membres du conseil communal de Bilsen. »

« Même demande des conseillers communaux de Beverst. »

« Même demande du conseil communal de Membruggen. »

M. de Renesse. - Dix-sept conseils communaux de l'arrondissement judiciaire de Tongres, et les membres du comice du 8ème district agricole de la province de Limbourg, viennent se joindre aux nombreuses pétitions déjà adressées à la chambre, pour demander que, dans l'acte de concession du chemin de fer de Hasselt à Maestricht, il soit formellement stipulé que la société concessionnaire sera obligée de construire un embranchement se dirigeant de Bilsen par Tongres à Ans, et qu'une station soit établie à Bilsen.

La section centrale ayant déposé son rapport, j'ai l'honneur de proposer à la chambre de vouloir ordonner le dépôt de ces pétitions sur le bureau, pendant la discussion du projet de loi autorisant la concession d'un chemin de fer de Hasselt à Maestricht.

- Cette proposition est adoptée.


« Des membres de l'administration communale et des électeurs de Cortil-Noirmont demandent que les districts électoraux pour les nominations aux chambres soient composés de 40,000 âmes et que les élections se fassent au chef-lieu de canton. »

- Renvoi à la coaimission des pétitions du mois de mars.


« M. L. Maertens demande un congé de quelques jours pour cause d'indisposition. »

- Accordé.

Projet de loi sur la garde civique

Rapport de la section centrale

M. Coomans. - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport de la section centrale chargée d'examiner le projet de loi sur la garde civique.

- Ce rapport sera imprimé et distribué.

M. de Renesse. - Je demanderai que la discussion du rapport soit mise à l'ordre du jour de mercredi prochain.

M. le président. - La section centrale ne propose qu'un seul changement au projet qui est sorti des délibérations du sénat : elle propose de rétablir 12 exercices par an comme maximum.

M. Rogier. - Qu'on mette ce projet à la suite des autres.

M. Coomans, rapporteur. - Messieurs, la section centrale a voulu se montrer conciliante, afin d'aboutir dans cette session-ci, afin de ne pas laisser l'institution de la garde civique sous le coup d'une discussion qui, d'après le gouvernement lui-même, était fâcheuse pour elle ; la section centrale a cru qu'il fallait en finir. Or, mettre le rapport à la suite de l'ordre du jour, ce serait probablement l'ajourner à l'année prochaine. Je pense que ceux qui s'intéressent réellement à l'institution de la garde civique doivent désirer que cette discussion aboutisse bientôt à un résultat définitif, que la garde civique ne reste pas jusqu'à l'année prochaine, peut-être jusqu'au cœur de l'hiver, dans un état plein d'incertitude. C'est pour cela qu'au nom de la section centrale je crois devoir m'opposer à ce qu'on mette la discussion du rapport à la suite de l'ordre du jour ; c'est pour ce motif aussi que je me rallie à la proposition de l'honorable M. de Renesse, tendant à fixer la discussion à mercredi prochain. (Appuyé !)

M. Lebeau. - Quelle sont les conclusions de la seciion centrale ?

M. Coomans, rapporteur. - Si la chambre le désire, je lui soumettrai mon rapport qui est très court. (Oui ! oui !) Sortant de la section centrale je n'ai guère que des notes, mais les conclusions que nous avons prises étant très simples, je puis vous les soumettre en peu de mots. (Oui ! oui !)

(page 1673) Messieurs, le projet de loi, sorti de vos délibérations, n'a guère été amendé par le sénat, que relativement au nombre des exercices imposés à la garde. Votre section centrale l'avait fixé à douze ; la chambre l'a réduit de moitié. Appelé à se prononcer à cet égard, le sénat a rétabli, au premier vote, les douze exercices, mais au second vote, il a écarté, par suite d'un partage égal des suffrages, tant le nombre de douze exercices qui lui était proposé, que les six exercices inscrits au projet de loi. Le résultat de ce vote était la suppression de tous les exercices pour les gardes âgés de moins de 35 ans, car le projet de loi renfermait ces mots, conservés par le sénat : « Les dispositions suivantes remplacent l'article 83. » Il ne restait ainsi de l'article 83 de la loi du 8 mai 1848 que les dispositions maintenues au projet de loi, après les résolutions négatives du sénat.

Votre section centrale a reconnu unanimement qu'il était impossible d'affranchir de tous exercices les gardes âgés de moins de 35 ans, et que telle n'avait pu être l'intention du sénat. Un membre a proposé sept exercices ; cette motion ayant été rejetée par cinq voix contre deux, le chiffre de douze exercices a été adopté à la même majorité.

La section centrale a admis ensuite la suppression du paragraphe 4 du même article et la substitution de l'âge de 40 ans à celui de 35, parmi les dispositions qui remplacent l'article 108.

Elle prend derechef acte de la déclaration, faite dans son sein et à la chambre, par M. le ministre de l'intérieur, à savoir que les gardes ne seront pas obligés de se rendre en personne aux inspections d'armes.

En somme, la section centrale, mue par le désir de se montrer conciliante et d'arriver au but dans la session actuelle, accepte le travail du sénat, sauf à remplir la lacune laissée à l'article 83. L'article nouveau commencerait donc en ces termes :

« Les gardes peuvent être exercés au maniemeent des armes ou aux manœuvres douze fois par an. Ce nombre d'exercices ne peut être dépassé, si ce n'est en vertu d'une autorisation écrite du collège des bourgmestre et échevins. »

(page 1581) M. Rogier. -Messieurs, j'avais proposé de mettre la discussion du rapport à la suite de l'ordre du jour, quand je ne connaissais pas encore le rapport ; maintenant qu'on vient de nous donner lecture de ce rapport, je n'ai plus d'objection à faire contre la mise à mercredi prochain de la discussion de cet objet.

- La chambre, consultée, décide que le rapport sera mis en tête de l'ordre du jour de mercredi.

Projet de loi augmentant la dotation de l’héritier présomptif du trône

Discussion des articles

M. le président. - La discussion est ouverte sur le projet de la section centrale, auquel le gouvernement se rallie.

Articles 1 et 2

« Art. 1er. La disposition suivante est ajoutée à l'article premier de la loi du 23 mars 1853 (Moniteur, n°81) :

« A dater du jour du mariage de l'héritier présomptif du Roi, cette dotation annuelle sera portée à cinq cent mille francs (fr. 500,000). »

- Adopté.


« Art. 2 (nouveau). A partir du même jour, la disposition du paragraphe 2 de l'article 2 de ladite loi cessera d'être en vigueur. »

- Adopté.

Article 3

« Art. 2 (art. 3 du projet de la section centrale). Un crédit de deux cent cinquante mille francs (fr. 250,000) pour couvrir les frais de premier ameublement du palais de la rue Ducale, à Bruxelles, est ouvert au budget des dotations de l'exercice 1853. Il en formera l'article premier. »

M. Loos. - J'applaudis de tout cœur aux intentions la section centrale et aux modifications qu'elle a proposées au projet de loi. Mais j'aurais désiré, pour ma part, qu'elle eût également modifié l'article 2 du projet du gouvernement. J'aurais désiré que la somme allouée pour ameublement des palais eût pu être quelque peu augmentée, parce que j'aurais voulu que ce ne fussent pas seulement les diverses industries du pays qui eussent à concourir à l'embellissement des palais, que les arts aussi fussent appelés à les décorer comme le sont aujourd'hui la plupart des palais de l'Europe. Le Roi et le Prince royal viennent d'être reçus en Allemagne dans plusieurs palais dont les dorures et les riches (page 1582) tentures ne constituent pas seules le luxe, mais qui doivent surtout leur éclat aux œuvres d'art dont ils sont décorés. J'aurais désiré qu'il eu pût être de même pour le palais de notre Prince royal.

L'argent que l'on dépense pour décorer les palais royaux fait faire des progrès immenses à l'industrie, parce qu'on s'efforce de perfectioner les différents produits qui doivent concourir à leur embellissement. J'applaudis donc à ces dépenses ; mais, à mon avis, cela ne suffit pas ; dans un pays qui, comme le nôtre, compte tant d'artistes éminents, ce ne sont pas seulement les tapissiers et les doreurs que je voudrais voir à l'œuvre, c'est surtout l'élite de nos artistes que je voudrais voir appelée. Ce serait là pour eux le plus puissant des encouragements, et, j'en suis certain ils s'acquitteraient de leur tâche de manière à augmenter la gloire artistique du pays.

- L’article est mis aux voix et adopté.

Article 4

« Art. 3 (art. 4 du projet de la section centrale). Les crédits alloués à l'article 1er bis du budget des dotations de l'exercice 1833, et à l'article 2 du même budget pour l'exercice 1854, seront respectivement augmentés conformément à l'article premier de la présente loi. »

- Adopté.

Vote sur l’ensemble du projet

Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet.

En voici le résultat : 70 membres répondent à l'appel.

69 répondent oui.

1 membre (M. Jacques) s'abstient.

En conséquence, la chambre adopte le projet de loi ; il sera transmis au sénat.

Ont répondu oui : MM. Van Iseghem, Van Renynghe, Veydt, Ansian, Anspach, Brixhe, Cans, Closset, Coomans, Dautrebande, de Baillet (H.), de Brouckere, de Brouwer de Hogendorp, Dechamps, de Decker, de Haerne, Delehaye, de Man d'Attenrode, de Mérode (F.), de Naeyer, de Perceval, de Pitteurs, de Portemont, de Renesse, de Ruddere, de Sécus, Desmaisières, de Steenhault, de Theux, de T'Serclaes, Devaux, Dumortier, Jouret, Julliot, Landeloos, le Bailly de Tilleghem, Lebeau, Le Hon, Lelièvre, Lesoinne, Loos, Malou, Manilius, Mascart. Matthieu, Mercier, Moncheur, Moreau, Moxhon, Orban, Orts, Osy, Peers, Pirmez, Prévinaire, Rodenbach, Rogier, Roussel (Adolphe), Rousselle (Ch.), Sinave, Thiéfry, Tremouroux, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom (A.), Vandenpeereboom (E.), Vander Donckt, Van Grootven, Van Hoorebeke et Delfosse.

M. Jacques est invité à faire connaître les motifs de son abstention.

M. Jacques. - Je n'ai pas vu d'utilité à reproduire l'opinion que j'ai développée naguère sur le même objet : je n'ai d'ailleurs rien à modifier dans cette opinion ; je te pouvais donc pas voter pour la loi.

Je n'ai pas voté contre, parce que j'ai réfléchi que l'on pourrait donner à ce vote une fausse interprétation : l'on aurait pu supposer, si j'avais voté de nouveau contre la dotation du prince royal, que je me laissais aller à des sentiments de mécontentement ou d'antipathie contre la royauté ; de pareils sentiments ne s'introduiront jamais chez moi, je n'ai pas cessé et je ne cesserai pas d'être entièrement dévoué aux institutions décrétées par le Congrès, à sa monarchie constitutionnelle, au Roi et à la famille royale. Voilà ce que je tenais à déclarer hautement et loyalement et je me suis abstenu pour en avoir l'occasion.

M. Vermeire. - Ayant dû m'absenter un moment pour le service de la chambre, je n'ai pu prendre part au vote qui vient d'avoir lieu.

Je tiens à déclarer que j'aurais voté pour le projet de loi.

Projet de loi autorisant la concession d’un chemin de fer de Tubize à la Dendre, par Enghien

Second vote de l’article unique

M. le président. - Le premier amendement adopté consiste dans les mots : « d'un chemin de fer partant de Tubize et se dirigeant, par Enghien, sur un point de la Dendre à déterminer par le gouvernement. »

M. de Steenhault. - J'ai demandé la parole pour adresser une interpellation à M. le ministre des travaux publics.

Si j'ai bien compris, lors de la première discussion, il a dit que le chemin de fer de Tubize aux Acren n'était pas, dans son esprit, une cause de non-exécution pour un chemin de fer direct de Hal sur Lille. Je lui demande si je ne me suis pas trompé, si c'est bien là sa pensée et si réellement dans son esprit la construction d'un chemin de fer de Tubize aux Acren n'est pas un obstacle à ce qu'ultérieurement un chemin de fer direct de Hal sur Lille soit concédé.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Je ne puis que renouveler, au sujet de cette interpellation la déclaration que j'ai eu l'honneur de faire : à savoir que ces deux chemins de fer ont une destination spéciale, et qu'ainsi l'un ne met pas obstacle à l'établissement de l'autre. Du reste, pour tranquilliser davantage l'honorable député de Bruxelles, je le prie de vouloir remarquer les articles 47 et 48 du cahier des charges qui prévoient formellement les cas. Ilssont ainsi conçus :

« Art. 47. Le gouvernement pourra également, pendant toute la durée de la concession, autoriser, soit dans le pays traversé, soit partout ailleurs, la construction des routes, canaux, chemins de fer, sans que les concessionnaires puissent réclamer, de ce chef, aucune indemnité quelconque.

« Art. 48. Dans le cas où le gouvernement ordonnerait ou autoriserait la construction de routes, canaux ou chemins de fer, qui traverseraient le chemin de fer concédé ou ses embranchements, les concessionnaires ne pourront y mettre obstacle, ni réclamer de ce chef aucune indemnité si ce n'est un dédommagement de l'augmentation éventuelle des dépenses d'entretien, le gouvernement s'engageant à faire exécuter, sans frais pour les concessionnaires, tous les ouvrages définitifs ou provisoires qui seraient nécessaires pour que l'exploitation du chemin de fer ne pût être entravée ni interrompue. »

Ces articles sont formels et répondent d'une manière complète à l'interpellation de l'honorable membre.

M. Mercier. - Dans la première discussion, M. le ministre a contesté une explication donnée par la section centrale sur l'application de l'article 10 de la convention du 1er juillet 1852 entre le gouvernement et les concessionnaires du chemin de fer de Dendre-et-Waes en ce qui concerne les transports dirigés de Bruxelles vers les Acren. J'ai vérifié le fait dans l'acte de concession du chemin de fer de Dendre-et-Waes et j'ai vu que la station des Acren est comprise dans le tracé de cette ligne, est comprise parmi celles de cette ligne ; par conséquent c'est par erreur que M. le ministre a contesté les explications données dans le rapport de la section centrale.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - L'assertion est vraie.

M. Dumortier. - Messieurs, il y a deux manières d'envisager le projet de loi : ou bien dans ses termes ou bien dans son esprit. La majorité de la chambre ne s'est pas encore prononcée définitivement, mais si elle adopte le projet de loi, il est certain qu'elle aura voulu un chemin de fer de Braine-le-Comte à la Dendre.

Eh bien, messieurs, le projet de loi ne dit pas un seul mot de Braine-le-Comte, et si vous laissez le projet tel qu'il est, vous aurez voté un chemin de fer de Tubize vers la Dendre et non pas de Braine-le-Comte vers la Dendre.

Or, messieurs, je crois que si l'on n'avait pas déclaré que Braine-le-Comte serait le point principal, le projet de loi n'aurait pas été adopté.

On dira peut-être que l'on stipulera dans le cahier des charges l'obligation de relier Braine-le-Comte à ce chemin de fer ; mais, messieurs, ce n'est pas un cahier des charges que vous votez, c'est une loi ; or, une loi sur la concession d'un chemin de fer doit indiquer la direction de ce chemin de fer.

Savez-vous, messieurs, ce qui peut arriver ? Il peut arriver, et ce sera, un inconvénient très grave, que le chemin de fer ne se fasse que de Tubize à Enghien et que, dans un grand nombre d'années, on fasse un petit embranchement vers Braine-le-Comte.

Quant à moi, messieurs, je ne m'en plaindrai pas, car je désirerais vivement que le projet de loi n'existât pas, attendu qu'à mes yeux il froisse tous les sentiments de justice ; je ne pourrai jamais concevoir un système dans lequel on accorde au dernier venu tout le fruit des labeurs de ceux qui ont étudié le tracé. S'il est une propriété sacrée sur la terre, c'est certainement celle qu'on acquiert à la sueur de son front, et quand je vois ainsi dépouiller ceux qui sont en quelque sorte les inventeurs d'une voie ferrée, je me rappelle ces mots de Virgile « sic vos non nobis », c'est un socialisme de la plus mauvaise espèce que de prendre aux uns pour donner aux autres.

Mais enfin, messieurs, si la chambre veut passer outre sur ces considérations, si elle veut adopter le projet malgré l'injustice, malgré la spoliation qu'il consacre, il faut au moins qu'elle s'explique clairement sur la direction.

Je crois que la chambre ferait chose sage d'insérer le mot de « Braine-le-Comte » dans le projet de loi ; sinon, ce projet ne représenterait pas l'esprit qui a présidé à la discussion ; en effet, ceux qui ont appuyé le projet ont soutenu que Braine-le-Comte devait être l'artère principale.

Je demande s'il ne serait pas juste d'autoriser le gouvernement à concéder la construction de la route dont vient de parler l'honorable député de Bruxelles.

Veuillez remarquer, messieurs, que presque tous les projets que nous sommes appelés à voter et une partie de ceux que nous avons déjà votés ont un but que peu d'entre nous ont aperçu ; moi-même j'avoue que j'étais dans ce cas ; à cette occasion je remercie l'honorable M. Rogier de la motion qu'il a faite il y a quelques jours et qui a excité mon attention sur ce point ; je suis arrivé a la connaissance de faits qui me renversent, à savoir que dans peu de temps toutes nos relations internationales seront perdues pour le chemin de fer de l'Etat.

On vous propose des chemins de fer par tronçons ; puis tous ces tronçons reliés entre eux présentent des relations internationales infiniment plus courtes que celles que nous avons.

Quand nous en serons aux divers chemins de fer demandés par l'arrondissement de Nivelles, je démontrerai que ces tronçons qu'on indique comme étant peu de chose, auront pour résultat de raccourcir le trajet de Paris à Bruxelles de plus de 20 lieues.

Le résultat fatal que j'indique aura lieu également sur la route de Liège par les nouveaux embranchements qu'on propose ; le chemin de fer du Luxembourg produira un résultat analogue sur la route de Namur.

Or, quand on vient présenter un système de communication directe entre Bruxelles et Calais et entre Bruxelles et Lille, le gouvernement ne devrait pas repousser un pareil système, qui est aussi avantageux à l'Etat que les lignes dont je viens de parler seraient dévantageuses au trésor public.

(page 1585) Je pense donc que je suis recevable à présenter un amendement qui autorise le gouvernement à concéder la construction d'un chemin de fer de Hal sur Ath ; cet amendement découle de ce qui se fait en ce moment.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Messieurs, il n'est pas exact de dire que les concessions que le gouvernement a soumises à la sanction législative auront pour effet de nuire au transit international.

Je ferai même remarquer à l'honorable M. Dumortier que la ligne privilégiée sur laquelle se portent toutes les sympathies de l'honorable membre, a précisément pour effet d'enlever les relations internationales. (Interruption.)

J'ai ici la direction de Bruxelles vers Mouscron et Lille ; elle est de 121 kilomètres ; par la ligne directe de Hal ; par la ligne de Dendre-et-Waes, elle est de 126 1/2 kilomètres ; il y a donc une différence de 5 kilomètres au profit de la ligne de Jurbise.

Je n'insisterai pas sur ce point. Je voulais seulement faire remarquer à l'honorable membre que, s'il croit que l'embranchement de Braine-le-Comte n'est pas aussi garanti parla loi que nous votons, que l'embranchement de Tubize, il se trompe : le premier embranchement figure à l'article 2 du cahier des charges qui fait corps avec la loi ; il a été parfaitement entendu en section centrale que cet embranchement constitue une obligation rigoureuse de la part des concessionnaires.

L'honorable M. Dumortier a encore prétendu que ce projet de loi consacre une sorte de spoliation. Je répète à cet égard ce que j'ai déjà dit. La ligne de Braine-le-Comte à Enghien et celle d'Enghien à la Dendre, n'ont pas fait l'objet de la moindre étude de la part de M. Bouquié. (Interruption.)

L'honorable M. Dumortier ne veut pas que je réponde à une allégation qui a un côté injurieux. Il prétend que je viens soumettre aux chambres des projets de loi qui sont la propriété d'autres demandeurs ; je réponds à cette accusation, à laquelle je suis très sensible ; je maintiens ce que j'ai dit, à savoir que les deux lignes dont il s'agit n'ont jamais été étudiées par M. Bouquié.

Ainsi, je suis entièrement en droit de dire qu'en ce qui concerne les deux mêmes lignes, elles peuvent être attribuées aux concessionnaires avec lesquels le gouvernement a traité, sans qu'on soit en droit de sa plaindre et de réclamer.

M. Dumortier. - Messieurs, je ne conçois pas vraiment comment M. le ministre des travaux publics peut me réfuter de la manière dont il vient de le faire : il met dans ma bouche, pour me combattre, des choses que je n'ai nullement dites, auxquelles je n'ai pas même pensé. Je n'ai jamais dit que M. Bouquié avait étudié le chemin de fer de Braine-le-Comte à Enghien et d'Enghien aux Acren. Je porte à M. le ministre des travaux publics le défi le plus formel de trouver dans les Annales parlementaires un mot, un seul mot de moi qui justifie ce qu'il vient de dire. (Interruption.)

Il est facile de se poser en triomphateur, qnand on détourne la question d'une manière inconvenante, pour me faire dire ce à quoi je n'ai même pas songé. J'ai dit qu'il y avait des études faites dans cette direction et par M. Maertens et par M. Tarte ; il ne s'agit donc pas du tout de M. Bouquié ; ne détournez pas la question ; ne vous placez pas sur un terrain où je ne me suis pas placé et qui tend à induire la chambre en erreur.

Un fait hors de doute, c'est que des études consciencieuses ont été faites sur le terrain, que des sommes considerables ont été dépensées, d'un côté, par M. Maertens, et par M. Tarte, de l'autre.

Voilà le tracé que vous donnez à un autre. Voilà les études et les dépenses faites dont vous faites profiter d'autres sans indemnité. Je prie la chambre de considérer comment les choses se passent en France en pareil cas.

En France, quand un ingénieur civil, quel qu'il soit, a fait un tracé dans le genre de ceux qui sont déposés sur le bureau et que le gouvernement, soit par adjudication soit autrement, juge à propos d'en donner la concession à un autre, quelle compensation croyez-vous qu'on donne à celui qui a fait le travail et des dépenses ?

Ou lui accorde non seulement le remboursement de ses dépenses, mais une indemnité égale à deux fois ces dépenses ; et en Belgique où la Constitution porte qu'aucun citoyen ne peut être privé de sa propriété sans une juste et préalable indemnité, on concède ces travaux à un autre non seulement sans accorder d'indemnité à leur auteur, mais sans lui rembourser ses dépenses.

C'est en changeant la question, en répondant sur M. Bouquié quand on lui parle de M. Tarte et en répondant sur M. Tarte quand on lui parle de M. Bouquié, qu'on se pose en triomphateur. Vous voyez la valeur des arguments qu'on m'oppose.

- Plusieurs voix. - La clôture ! la clôture !

M. Prévinaire. - On n'a parlé jusqu'à présent que de questions étrangères à l'amendement soumis au second vote. Je demande la permission de dire un mot sur cet amendement. Il a pour but de faire fixer administrativement le point de jonction de la ligne de Tubise à la Dendre. Quant à moi je ne puis donner ce pouvoir au gouvernement. Il ne suffit pas, quand on décrète un chemin de fer, de fixer le point de départ, il faut aussi fixer le point d'arrivée.

Le projet du gouvernement avait fixé les Acren comme point de jonction ; je reprends le projet du gouvernement, le projet primitif et je demande qu'on le substitue à l'amendement adopté au premier vote et auquel M. le ministre s'est rallié.

Je crois qu'il serait très fâcheux et très dangereux pour le gouvernement de lui donner un pareil pouvoir ; car il va se trouver en présence d'intérêts rivaux qui ont donné naissance à des débats très sérieux dans la chambre. Cette question, au lieu d'être résolue par la chambre, va retomber dans l'incertitude. Quand la législature intervient dans de pareilles questions, elle doit non seulement déterminer la direction, mais fixer le point d'arrivée comme elle détermine le point de départ.

Je conçois qu'on donne une certaine latitude au gouvernement pour changer une direation de peu d'importance ; mais quand la direction qu'on adoptera doit froisser un des deux intérêts rivaux, c'est à la chambre à prononcer, car la mission du législateur est de faire quelque chose de sérieux. C'est pourquoi je demande à la chambre de préférer le projet primitif du gouvernement qui faisait aboutir aux Acren le chemin à concéder. La chambre méconnaîtrait tous les intérêts en agissant autrement et placerait le gouvernement dans une position difficile.

Dans toutes les propositions de concession qui nous sont adressées, les grands intérêts généraux me paraissent placés sur le second plan et les projets conçus par les demandeurs en concession trop complaisamment admis. Je voudrais que le gouvernement dressât un plan d'ensemble déterminant certaines grandes voies et le soumît à la sanction de la législature, sauf à chercher des concessionnaires plus tard auxquels on les accorderait au rabais.

Aujourd'hui nous sommes engagés dans une voie qui entraîne la chambre dans des tiraillements qu'on éviterait si on arrêtait d'avance les grandes lignes dont la concession serait dans les intérêts généraux du pays.

Je ne présente ces considérations que pour l'avenir, je ne veux pas les opposer au projet que nous discutons. Bien que ce projet ait pris naissance dans un intérêt privé, car il avait pour but de prolonger une voie industrielle, ce n'est pas une raison pour que j'y sois contraire, cet intérêt est aussi légitime que tout autre.

Le gouvernement a bien fait d'approuver une concession qui doit faciliter l'écoulement des produits des concessionnaires. Il a voulu rattacher à cette voie d'autres intérêts en facilitant les transports de Braine-le-Comte vers le bassin de la Dendre. Les demandeurs y ont consenti ; je crois qu'ils ont fait quelque chose d'utile pour le pays aussi bien que pour leur entreprise.

Mais si nous nous préoccupons des intérêts généraux du pays, nous ne pouvons abandonner au bon vouloir des demandeurs en concession les changements de direction ou les directions à suivre ; il faut que nous prescrivions, c'est notre devoir, et notre intervention n'a pas d'autre raison d'être. Je demande à la chambre de voter le projet primitif du gouvernement.

M. le président. - C'est inutile ; si l'amendement n'est pas maintenu, le projet du gouvernement sera mis aux voix.

M. de Naeyer, rapporteur. - Peu de mots suffiront pour vous faire voir que les observations présentées par M. Prévinaire ne sont pas fondées.

Je ferai remarquer qu'il serait insolite de laisser le gouvernement se montrer absolu quant à la direction d'un chemin de fer sans que la chambre ait pour ainsi dire arrêté aucun des points par lesquels il devra passer ; mais telle n'est pas la situation, ici le tracé en général est déterminé par la loi. Le point de départ et les principaux points de passage sont formellement indiqués, et il ne s'agit plus que d'autoriser le gouvernement à y apporter des modifications quant au point de jonction, avec une autre ligne déjà décrétée et qui est en voie d'exécution,

Cette manière d'agir est d'ailleurs entièrement conforme aux antécédents de la chambre. Il y a quelques jours, vous avez concédé le chemin de Mons vers la Sambre. Là le point d'arrivée n'est pas déterminé. Nous avons laissé au gouvernement la faculté d'adopter la direction soit vers Maubeuge.soit vers Haumout. Pour le chemin du centre que vous avez voté le même jour (dans la séance du 25 avril dernier), la latitude laissée au gouvernement est plus grande encore ; voici en effet ce qui est dit à l'article premier de ce projet de loi : « Par dérogation à l'article 7 de la loi du 20 décembre 1851, l'embranchement du chemin de fer ayant son origine au chemin de fer de Manage à Mons se dirigera vers la Sambre pour aboutir à un point à déterminer par le gouvernement. »

En effet, cette disposition est conçue dans les mêmes termes que l'amendement qui nous occupe, en ce qui concerne la fixation du point de jonction ; il s'agit d'un côte d’un point à déterminer sur la Sambre, et de l'autre côté d'un point à déterminer sur la Dendre ; mais il est à remarquer que pour le chemin de fer du Centre vers la Sambre on n'avait indiqué aucun point de passage obligé, pas même la ville de Binche, qui avait cependant fait valoir des réclamations très énergiques, afin d'être reliée au réseau national par une voie ferrée. Ici donc le gouvernement avait bien plus de latitude, et cependant l'adoption de cette disposition n'a rencontré aucune objection dans cette enceinte.

Eh bien, le gouvernement a-t-il abusé de ce pouvoir-là ? Mais si je suis bien informé, il vient de conclure une convention très avautageuse, qui satisfait complètement à tous les intérêts. Toute la question est de savoir s'il y a des motifs pour laisser quelque latitude au gouvernement.

Or, qu'ont dit les adversaires eux-mêmes du projet de loi ? Ils ont trouvé qu'il était en quelque sorte absurde de faire aboutir ce chemin de fer à un village, au lieu de le faire aboutir à une ville d'une certaine importance, et, en effet, tout le monde doit reconnaître que c'est là un vice (page 1584) dans le projet dont il s'agit. Il convient donc d'examiner s'il n'y a pas moyen de corriger ce vice ; eh bien, c'est là l'objet de l'amendement, nous demandons qu'un tracé laissant beaucoup à désirer sous le rapport que je viens d'indiquer, ne soit pas adopté définitivement, sans que le gouvernement ait le droit d'y apporter des améliorations qui seraient indiquées par de nouvelles études. Il me semble que cela est excessivement simple et ne peut réellement donner lieu à une discussion sérieuse.

Ensuite, j'ai fait voir l'intérêt du trésor : j'ai démontré qu'il était dans l'intérêt des recettes du chemin de fer, de savoir si la ligne aboutira à une ville d'une certaine importance au lieu d'une simple commune rurale ; surtout à cause de la convention conclue avec la société de Dendre-et-Waes. Il y a donc des motifs déterminants pour laisser une certaine latitude au gouvernement.

- La clôture est prononcée.

Le premier amendement introduit dans le premier paragraphe, consistant dans les mots « d'un chemin de fer partant de Tubize et se dirigeant, par Enghien, sur un point de la Dendre à déterminer par le gouvernement, » est définitivement adopté.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Je demande la suppression des mots « annexés à la présente loi » comme inutiles, puisque la convention est rappelée dans l'article premier, et que l'authenticité de la convention est ainsi constatée. Du reste, on a agi de même dans plusieurs lois.

- La suppression des mots « annexés à la présente loi » est prononcée.

Les autres amendements sont successivement adoptés ; en conséquence l'article unique du projet de loi est ainsi conçu :

« Le gouvernement est autorisé à accorder aux sieurs Joseph-Emmanuel Zaman, propriétaire à Saint-Josse-ten-Noode, et François Coppens, architecte et propriétaire à Bruxelles, la concession d'un chemin de fer partant de Tubise et se dirigeant, par Enghien, sur un point de la Dendre à déterminer par le gouvernement, aux clauses et conditions de la convention et du cahier des charges du 28 janvier 1853, et sous les modifications ci-après :

« Dans tous les cas où les lignes explorées par la compagnie aboutiront soit aux stations des chemins de fer de l'Etat, soit aux stations d'autres lignes concédées, la compagnie, indépendamment du prix de location auquel elle pourra être tenue pour l'usage de ces stations, devra supporter tous les frais et dépenses que nécessiteront les changements à y faire, tels que déplacements et augmentation des voies, excentriques, gares d'évitement, et en général tous travaux quelconques que le gouvernement trouvera bon de prescrire pour la bonne et régulière exploitation des diverses lignes. »

Vote sur l'ensemble du projet

Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi ; en voici le résultat :

67 membres sont présents.

4 (MM. de Brouwer de Hogendorp, Dumortier, Osy et Ch. Rousselle) s'abstiennent.

63 prennent part au vote.

62 votent pour l'adoption.

1 (M. Vander Donckt) vote contre.

La chambre adopte.

Ont voté pour l'adoption : MM. Van Iseghem, Van Renynghe, Vermeire, Ansiau, Anspach, Brixhe, Cans, Closset, Coomans, Dautrebande, de Baillet (Hyacinthe), de Brouckere, de Decker, de Haerne, Delehaye, de Man d'Attenrode, de Mérode (F.), de Naeyer, de Perceval, de Pitteurs, de Portemont, de Renesse, de Ruddere, de Sécus, de Steenhault, de Theux, de T'Serclaes, Devaux, Jacques, Jouret, Julliot, Landeloos, le Bailty de Tilleghem, Lebeau, Le Hon, Lelièvre, Lesoinne, Loos, Malou, Manilius, Mascart, Matthieu, Mercier, Moncheur, Moreau, Moxhon, Orts, Peers, Pierre, Pirmez, Prévinaire, Rogier, Adolphe Roussel, Sinave, Thiéfry, Tremouroux, Vanden Brauden de Reeth, A. Vandenpeereboom, Ernest Vandenpeereboom, Van Grootven, Van Hoorebeke et Delfosse.

M. le président. - Les membres qui se sont abstenus sont invités à faire connaître les motifs de leur abstention.

M. de Brouwer de Hogendorp. - Je n'ai pas voulu voter contre le projet de loi, parce qu'il est possible qu'il soit bon. Mais il est possible aussi que la concession soit mauvaise. Je n'en sais rien, et je crois que dans la chambre il y a beaucoup de membres qui n'en savent pas beaucoup plus que moi.

D'un autre côté, je n'ai pas voulu voter pour, parce qu'il me semble que nous accordons ces concessions avec une légèreté beaucoup trop grande.

Nous sommes beaucoup trop faciles ; ou n'a pas de plans d'ensemble et je crois que l'intérêt général est très peu garanti.

M. Dumortier. - Je n'ai pas voulu voter contre le projet de loi, parce qu'il ne nuit pas au trésor public et qu'il y a des localités intéressées à avoir un chemin de fer que je ne veux pas leur refuser. Mais je n'ai pas voté pour, par les motifs si graves que j'ai développés en prenant part à cette discussion.

M. Osy. - Je n'ai pas voté contre le projet, parce que je crois ce chemin de fer avantageux pour les localités qu’il traversera. Mais je suis décidé à ne plus voter de chemin de fer ni de travaux publics quelconques tant qu'un cautionnement préalable ait été déposé, pour que nous n'ayons pas à voter comme en 1851 des minimums d'intérêts pour des chemins de fer qui auraient été concédés sans cette garantie.

M. Rousselle - Je me suis abstenu parce que je ne suis pas contraire à l’établissement d'un chemin de fer partant de notre ligne du midi et aboutissant à la Dendre.

Mais comme le point d'arrivée n'était pas déterminé et que la loi veut que les chemins de fer soient concédés par la législature, et non par le gouvernement, je n'ai donc pu voter ni pour ni contre le projet.

Projet de loi accordant des crédits supplémentaires au budget du ministère de l’intérieur

Discussion générale

M. le président. - Dans la dernière séance la chambre a voté par appel nominal sur une proposition de M. de Man ainsi conçue :

« Je propose à la chambre de décider qu'il n'y a pas lieu de discuter les crédits sur lesquels il n'a pas été fait rapport par la section centrale. »

La chambre ne s'étant pas trouvée en nombre, l'appel nominal va être recommencé.

M. de Man d'Attenrode. - Je demande la parole.

M. le président. - On ne peut pas demander la parole pendanl le vote.

M. de Man d'Attenrode. - C'est pour retirer ma proposition.

M. le président. - On ne peut retirer une proposition, lorsque le vote est commencé.

- Il est procédé au vote par appel nominal sur la proposition de M. de Man.

En voici le résultat :

63 membres sont présents.

2 membres (MM. de Haerne et Jacques) s'abstiennent.

18 votent pour la proposition.

43 votent contre.

En conséquence la proposition n'est pas adoptée.

Ont voté l'adoption : MM. Brixhe, Coomans, de Man d'Attenrode, F. de Mérode, de Portemont, de Ruddere, de Sécus, de Theux, de T'Serclaes, Dumortier, Landeloos, Malou, Moncheur, Osy, Pirmez, Roussel (Adolphe), Van den Branden de Reeth et Vander Donckt.

Ont voté le rejet : MM. Van Iseghem, Vermeire, Veydt, Ansiau, Anspach, Cans, Closset, Dautrebande, de Baillet (H.), de Brouckere, de Decker, Delehaye, de Naeyer, de Perceval, de Pitteurs, de Renesse, de Steenhault, Devaux, Julliot, le Bailly de Tilleghem, Lebeau, Le Hon, Lelièvre, Lesoinne, Loos, Manilius, Mercier, Moreau, Moxhon, Orts, Peers, Pierre, Prévinaire, Rogier, Rousselle (Ch.), Sinave, Thiéfry, Tremouroux, Vandenpeereboom (Alphonse), Vandenpeereboom (Ernest), Van Grootven, Van Hoorebeke et Delfosse.

- Les membres qui se sont abstenus sont invités à faire connaître les motifs de leur abstention.

M. de Haerne. - Tout en admettant les principes invoqués dans la séance précédente par l'honorabie auteur de la proposition, je pense que la forme pouvait en être un peu insolite ; et ce qui confirme cette opinion, c'est que l'honorable M. de Man semblait tout à l'heure disposé à retirer sa proposition si le règlement le lui avait permis. Tel est le motif pour lequel je me suis abstenu.

M. Jacques. - Je n'étais plus à la dernière séance, lorsque la question sur laquelle on vient de voter a été posée.

M. Osy. - Je propose le renvoi de tous les amendements à la section centrale.

M. le président. - M. Osy, je crois que vous devez réserver cette proposition pour le moment où l'article sera mis en discussion.

M. Osy. - Je fais ma proposition maintenant, parce que si l'on décidait aujourd'hui le renvoi à la section centrale, elle pourrait s'occuper dès demain des crédits dont il s'agit.

M. Malou. - M. le président, deux opinions s'étaient produites dans la dernière séance : d'après la minorité, qui résulte du vote de tout à l'heure, il n'y avait pas lieu d'aborder dès à présent la discussion des articles nouveaux proposés par M. le ministre de l'intérieur ; d'après l'autre opinion, il y a lieu de faire un examen quelconque de ces articles en section centrale. Mais il se présente à cet égard deux formes : l'une consisterait à discuter d'abord ces articles et à discuter ensuite s'il y a lieu de les renvoyer à la section centrale ; l'autre, celle que propose l'honorable M. Osy, consisterait à renvoyer ces articles dès maintenant à la section centrale pour être l'objet d'un examen à bref délai, car je pense que c'est ainsi que l'entend l'honorable M. Osy.

Eh bien, messieurs, pour les travaux de la chambre, l'adoption de la motion du l'honorable M. Osy présenterait un grand avantage ; en effet, au lieu d'avoir autant de discussions que d'articles, pour le renvoi à la section centrale, on commencerait par ordonner ce renvoi in globo ; la section centrale s'attacherait à faire un triage parmi les propositions nouvelles qui n'ont subi aucune espèce d'examen et elle soumettrait à un examen sommaire celkes qui lui en paraîtraient susceptibles, je crois que cela ne peut rencontrer d’objection.

(page 1585) Il serait vraiment sans précédent de discuter les articles dont il s'agit sans examen de la section centrale.

M. Rogier. - Je crois aussi que nos travaux y gagneraient si on pouvait renvoyer à la section centrale non pas ce qu'on appelle les amendements de M. le ministre de l'intérieur, mais les articles du projet primitif que M. le ministre de l'intérieur a reproduits et que la section centrale n'a pas examinés. Ces articles lui seraient donc renvoyés pour un prompt examen et je supplierai l'honorable rapporteur de vouloir bien continuer ses fonctions ; sous ce rapport, il peut encore rendre des services.

J'appuie donc le renvoi à la section centrale.

M. A. Vandenpeereboom. - Si la chambre avait décidé qu'elle votera immédiatement les articles du projet de loi auxquels M. le ministre de l'intérieur semble tenir, j'aurais demandé qu'elle voulût bien aussi voter un autre article du crédit que j'aurais proposé par amendement. Cet amendement pourrait être également renvoyé à la section centrale.

M. de Man d’Attenrode, rapporteur. - Quel est cet amendement ?

M. A. Vandenpeereboom. - C'est le n°43, relatif à des subsides à accorder à quelques communes pour la restauration des monuments.

L'honorable M. Vilain XIIII a déjà demandé, dans la discussion dn budget de l'intérieur, que la chambre votât ces subsides ; ils ont été distraits alors du budget pour être compris dans les crédits supplémentaires à présenter. Ce sont des dépenses extrêmement urgentes, comme je tâcherai de le démontrer si la chambre veut bien autoriser le renvoi de mon amendement à la section centrale et le discuter ultérieurement.

M. Osy. - J'ai demandé le renvoi à la section centrale de la proposition de M. le ministre de l'intérieur ; maintenant s'il y a des collègues qui veulent présenter de nouveaux amendements on pourra les renvoyer également à la section centrale, mais vous comprenez, messieurs, que plus vous chargerez la section centrale plus son rapport se fera attendre.

J'ai examiné la proposition de M. le ministre de l'intérieur et j'ai vu qu'elle est beaucoup plus longue que celle qu'il avait faite à la section centrale. Je le répète, plus vous allongerez la proposition plus vous retarderez la présentation du rapport.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Messieurs, rien ne sera long si l'on veut bien examiner. Parmi les propositions que j'ai faites dans la dernière séance il n'y a que deux articles nouveaux et ils n'exigeront pas une longue discussion. Je les ai proposés, parce que depuis les réunions de la section centrale des faits d'urgence se sont présentés.

Quant à l'amendement de l'honorable M. Vandenpeereboom, je m'en expliquerai ; il est d'une simplicité telle que la section centrale n'aura pas à s'en occuper pendant cinq minutes.

M. le président. - En attendant le rapport de la section centrale nous pourrons nous occuper des articles dont elle propose l'adoption.

- Le renvoi à la section centrale est mis aux voix et adopté.

M. le président. - Nous reprenons la discussion du projet de loi.

M. Rousselle. - Messieurs, l'bonorable M. Rogier, dans le discours qu'il a prononcé à la séance de samedi, a dirigé contre la section centrale, dont j'ai eu l'honneur de faire partie, uue accusation qu'il m'est impossible de passer sous silence et de ne point repousser comme souverainement injuste.

« A voir, a-t-il dit, la manière dont la section centrale était composée, il devait s'attendre à un rapport sévère, très sévère. Le rapport, a-t-il ajouté, a dépassé son attente. »

Sur quoi se fonde une pareille articulation ? Sont-ce les conclusions du rapport, les propositions de la sectien centrale qui l'autorisent ? Nullement. L'honorable M. Rogier la déduit de doctrines, de remarques, d'expressions plus ou moins vives, qui sont non pas l'oeuvre spontanée de la section centrale, mais la relation obligée pour elle, d'après le règlement de la chambre, non seulement de la désapprobation qui a été manifestée dans les diverses sections, mais encore de ce qui a fait l'objet de leur examen et de leur travail.

L'honorable M. Rogier a sur les crédits supplémentaires des doctrines qui ont été trop bien réfutées par le zélé et infatigable rapporteur, pour qu'il soit nécessaire de m'étendre davantage à cet égard : ce seraient des redites inutiles.

Quant à moi, messieurs, je tiens que loin que la section centrale se soit montrée sévère, elle a été facile et même un peu large. Elle a considéré qu'elle pouvait l'être en présence des déclarations faites très sévère, et des instructions données par les membres du nouveau cabinet.

Mais la section centrale a voulu exercer un contrôle très sérieux sur tous les articles de dépenses, afin de remplir la mission qui lui avait été confiée et d'être à même de signaler, pour pouvoir les éviter à l'avenir, les procédés administratifs qui ont été la cause occasionnelle de tous ces accroissements de crédits si généralement désapprouvés par la chambre.

De tant de dépenses irrégulièrement faites puisque la plupart ont eu lieu ou sans prescription antérieure d'une loi, ou sans l'autorisation préalable de la législature, quelles sont celles que la section centrale a rejetées définitivement ? L'bonorable M. Rogier ne s'est plaint d'aucun rejet, n'en a indiqué aucun.

J'ai revu tout le travail soumis à la chambre par la section centrale ; j'y trouve bien plusieurs augmentations s'élevant à la somme de 52,027 francs 87 centimes, mais je n'y vois qu'une seule diminution de 1,760 francs 50 centimes.

Je dirai maintenant ce qui, dans l'examen approfondi que la section centrale a fait du projet de loi, a été plus particulièrement remarqué, ce que nous devons plus sévèrement désapprouver, ce qu'il faut éviter à l'avenir : c'est que, à l'égard des allocations budgétaires, destinées à faire face à la fois à des dépenses obligatoires et à des dépenses facultatives, c'est que l'on prenne des engagements pour ces dernières dépenses, c'est qu'on les paye même avant de s'être assuré qu'il y a suffisance d'allocation pour les premières. Il est évident qu'avec un tel mode de procéder, on creuse infailliblement un déficit et l'on met la chambre dans l'impossibilité de refuser les augmentations. Je pourrais multiplier les exemples, je me bornerai à indiquer les suivants :

On propose d'augmenter de fr. 12,000 70 le crédit alloué à l'article 122 du budget de 1852 relatif aux frais de rédaction et d'impression du rapport décennal prescrit par l'arrêté royal du 14 mars 1850 ; mais que voit-on dans le détail de cet article ? C'est que l'on a payé des frais considérables pour salaires d'employés extraordinaires et pour gratification à des employés ordinaires du département ; mais qu'on a laissé à payer une assez forte somme à l'imprimeur. A la vérité, j'ai entendu dire que l'on pouvait faire restituer par les employés du département de l'intérieur, ce qu'ils ont reçu sans vote de la chambre ; mais c'est tout bonnement impraticable.

La section centrale s'est bornée à proposer de retrancher la part d'indemnité qui n'a pas encore été distribuée.

L'honorable M. Rogier a prétendu que la somme de fr. 132,000 destinée aux frais de l’instruction primaire, en 1851 et 1852, était demandée en exécution de la loi, qu'elle ne constituait qu'une insuffisance de crédit, que la prévision de dépense avait été mal calculée au budget. Je ne saurais être de cet avis.

L'allocation pour l'instruction primaire comprend grand nombre de littéras, parmi lesquels il y en a qui concernent des dépenses légales et qu'il faut payer, mais dans lesquels aussi il y des prévisions de dépenses facultatives que l'on peut restreindre à volonté. Or, on a absorbé et au-delà tout en ce qui concerne les dépenses facultatives et oa n'a pas trouvé de quoi satisfaire au service obligatoire de l'instruction primaire. Ainsi, par exemple, un littera de l'article 77 du budget de 1851 prévoyait que le service ordinaire, obligatoire de l'instruction primaire exigerait une dépense de fr. 698,731 53 ; la dépense réelle a été de 709,119 36. La différence n'était donc sur ce poste que de fr. 10,388 03, mais l'on demande pour l'insuffisance de l'exercice fr. 50,490 15

C'est donc une augmentation sans vote de la chambre pour les autres dépenses, que l’on pouvait éviter ou réduire, de plus de 40,000 fr.

Une même recherche sur l'exercice 1852 nous montrerait sans doute un pareil résultat.

Je ne crois pas avoir besoin de vous rappeler ce qui a été annoncé par l'honorable M. de Brouckere à la séance de samedi, que, dans le crédit pétitionné pour l'insuffisance prétendue des allocations pour les beaux-arts, il y avait des sommes destinées au payement de dettes coustituées en faveur de la viile de Bruxelles : ainsi de ce chef encore, on a pris des engagements pour des objets que l'on pouvait rejeter ou au moins ajourner, et on a laissé en arrière de véritables dettes.

Je n'en dirai pas davantage pour le moment, et la chambre sera, je l'espère, convaincue comme les sections et la section centrale, malgré l'assertion de l'honorable M. Rogier, que tout a été loin d'être régulier.

M. Rogier. - Je commence par remercier l'honorable membre d'avoir bien voulu enfin préciser quelque chose.

Sur les 44 articles dont se compose le projet de loi, et qui se trouve réduit par la section centrale l'honorable M. Rousselle vient d'en signaler trois comme susceptibles de contestation ! Je demande dès lors comment l'honorable M. Rousselle et ses honorables amis de la section centrale peuvent justifier cette assertion très sévère qui consiste à dire que la plupart des dépenses pour lesquelles on demande des créiits supplémentaires, sont entachées d'irrégularités et d'inconstitulioanalité.

Qu'on veuille bien concilier cette impuissance à prouver une assertion si grave, avec l'assertion elle-même.

J'ai donc eu raison de soutenir que la section centrale, composée comme elle l'était, devait produire un rapport très sévère ; et que ce rapport a même dépassé mon attente.

En effet, l'on vient reprocher à l'ancien ministre de l'intérieur, car, je pense que presque tout tombe sur lui dans cette circonstance de n'avoir commis que ces irrégularités, des illégalités. Vous avez tous les yeux un projet de loi en 44 articles, et les honorables MM. de Man, Osy et Rousselle parviennent à eux trois à découvrir trois irrégularités ; je vous engage, messieurs, à en signaler d'autres ; c'est le moment. Il ne serait pas juste de vous borner à ces assertions vagues, à ces accusations (page 1586) sans preuves ; vous devez des preuves à la chambre, pour la convaincre ; et permettez-moi de le dire, avant le lancer contre un ministre quelconque et surtout contre un ministre qui a disparu du pouvoir, des accusations pareilles, il faudrait au moins s'être assuré de la réalité des faits.

Il est donc constaté que sur les 44 articles proposés, il n'en est que trois qu'on nous signale comme renfermant des irrégularités. Nous les discuterons.

Il y a d'abord le rapport décennal. Le crédit voté au budget a été insuffisant ; pourquoi ? Je rappellerai que dans le budget de 1849, l'allocation destinée aux travaux de statistique a été réduite d'une manière tellement considérable, que le chef de service m'a déclaré que très probablement le crédit serait insuffisant.

Quant au rapport décennal, je n'ai pas à faire ressortir tout ce que ce travail renferme d'utile au point de vue général. Je crois que ceux qui ont pu le parcourir ont rendu hommage au talent qui a présidé à la rédaction de ce travail.

Que s'est-il passé ? Des fonctionnaires se sont livrés, hors des heures de bureau, à des travaux spéciaux pour concourir au rapport décennal ; des employés extraordinaires ont dû être adjoints aussi au bureau de statistique pour ce travail auquel je suis personnellement étranger, qui doit être approuvé, me semble-t-il, tant par mes amis que par mes adversaires.

L'honorable M. de Man a eu des conférences fréquentes avec divers chefs de service : il a pu les interroger ; les dossiers lui ont été ouverts ; eh bien, je voudrai que les honorables membres qui me lancent si gratuitement cette accusation d'habitudes dépensières ; je voudrais qu'ils parcourussent les dossiers du département de l'intérieur ; je pose en fait qu'ils trouveraient plus de cent annotations de ma main, ayant pour but d'engager les chefs de service à se restreindre dans les limites du budget.

J'ai tenu à honneur, pendant mon administration, à tenir, autant que possible, les dépenses dans des limites régulières. J'étais averti par les leçons excessivement sévères qui avaient été faites à mes honorables prédécesseurs ; rappelez-vous en quels termes on a parlé de l'administration de mes prédécesseurs au sujet des crédits supplémentaires. Je ne veux pas remettre sous vos yeux ce qui leur a été dit dans le temps, notamment par l'honorable M. Osy, cela paraîtrait encore trop dur à côté des reproches qu'on m'adresse. Averti donc par toutes ces leçons données à mes honorables prédécesseurs, et sachant d'ailleurs ce qui m'était réservé par l'opposition, j'ai recommandé incessamment aux chefs de service de ne pas dépasser les limites du budget.

Messieurs, soyons de bonne foi. Il est impossible, - c'est ce que disait l'honorable M. deTheux pour se défendre - il est impossible à un ministre d'être tenu à chaque heure, au courant de la situation exacte des crédits. Il y a certains crédits qui viennent à être dépassés, sans qu'il le sache, malgré toutes nos recommandations. Cela est arrivé à tous les ministres ; cela arrivera, si déjà cela ne lui est arrivé, à l'honorable M. Piercot lui-même ; il aura beau s'abstenir de faire certaines dépenses, se croiser les bras ; il aura beau, dans la crainte de dépasser les crédits, ne rien dépenser du tout, la force des choses l'entraînera à certaines dépenses supérieures aux crédiis qui doivent les couvrir.

On vient de combattre ma doctrine sur les crédits supplémentaires ; cette doctrine, je l'ai exposée dans la séance de samedi, et j'avais prié les honorables MM. de Man et Osy de vouloir bien me donner leur avis sur cette doctrine. La doctrine que j'ai exposée était celle-ci : plus vous vous montrez sévères dans l'appréciation des crédits supplémentaires, plus un ministre, dans la crainte de cette sévérité, se montrera disposé à augmenter les crédits normaux qu'il vous propose, afin de ne pas avoir à dépasser ces crédiis. »

Cette doctrine, je me hâte de le dire, n'était pas de moi ; je voulais la soumettre à l'appréciation de mes honorables adversaires ; ils ne l'ont pas combattue jusqu'ici, je ne sais s'ils la combattront ; je déclare que j'en nommerai ultérieurement l'auteur, s'il le faut ; elle vient, d'ailleurs, d'une autorité respectable et respectée dans cette enceinte.

Messieurs, l'ancien ministre a-t-il eu tort d'allouer une indemnité aux fonctionnaires qui ont été chargés de la rédaction du rapport décennal ? C'est possible. Je dirai que plusieurs notes écrites de ma main décident qu'il n'y aura lien d'accorder d'indemnité à ces fonctionnaires qu'après l'achèvement complet de travail ; on peut s'en convaincre, en parcourant les dossiers.

Mais, messieurs, est-ce une raison de leur refuser aujourd'hui le prix de leurs travaux ? Si M. le ministre de l'intérieur trouve que les 1,750 fr. proposés ne doivent pas être alloués, je ne les soutiendrai pas ; d'après ce qui m'est revenu, il paraîtrait qu'on n'insisterait pas sur cette demande.

Ce sera 1,750 fr. dont les employés seront privés ; mais ce sera une réduction. Il n'est pas exact de dire que je défends tout, que je maintiens tout, que je prétends qu'absolument rien d'irrégulier n'a pu être fait. Je reconnais qu'on aurait mieux fait de ne pas imputer sur l'allocation destinée à la statistique les indemnités accordées aux fonctionnaires ; je reconnais que c'est une irrégularité ; en voilà une ; mais il y a loin de là aux reproches si nombreux qui pullulent, qui fourmillent dans le rapport.

Que direz-vous quand vous viendrez aux dépenses tenues en reserve, si, pour les dépenses non contestées, vous dites qu'elles sont entachées d'irrégularités, d'inconstitutionnalité, d'arbitraire, de prodigalité ? Au reste, quand nous en serons là, en présence de la réalité, la chambre se convaincra que dans la deuxième partie, dans les crédits réservés pour le deuxième rapport il n'y a pas plus d'irrégularité, d'illégalité que dans les autres ; et la chambre votera les secondes comme les premières.

La deuxième irrégularité est celle qui concerne l'instruction primaire. M. le ministre aura à répondre à ce reproche, car il a présenté la demande de ce crédit comme résultant de la loi d'instruction primaire, comme nécessitée par l'exécution d'une loi. C'est ce que je lis dans l'exposé des motifs. Quant à l'allocation pour les beaux-arts, on voudra bien attendre que nous en soyons à ce chiffre, pour que je combatte les observations de M. Ch. Rousselle.

En attendant, je prends acte des indications qui viennent d'être fournies ; après avoir longuement parlé d'irrégularités, d'illégalités, on en est réduit à citer trois allocations dont j'en maintiens au moins deux comme irréprochables. (Interruption.)

Cette discussion doit présenter pour la chambre peu d'intérêt ; elle lui paraîtra peut-être un peu longue, mais elle l'eût été moins si la section centrale avait procédé d'une autre manière.

Le rapporteur s'est enquis de beaucoup de choses, il a pendant trois mois cherché des renseignements partout, dans les divers bureaux, près des divers employés ; il est une seule personne qu'il ait omis de consulter, c'est l'ancien ministre de l'intérieur, qui est, ce semble, le principal accusé ; il n'a pas été entendu ; on ne lui a demandé ni explications ni renseignements, on ne l'a pas appelé dans la section centrale, alors que des accusations si graves étaient articulées et que des explications verbales auraient suffi pour les réduire à rien. On s'est abstenu d'entrer en rapport une seule minute avec l'ancien ministre.

Puisqu'on était en train de faire une enquête, de s'adresser à tout le monde, pourquoi ne s'est-on pas adressé une seule fois à l'ancien ministre de l'intérieur. Si on l'avait fait, on aurait reçu de lui des explications satisfaisantes. On s'est adressé à mon successeur. Et qu'est-on venu nous dire ? N'a-t-on pas prétendu que mon successeur avait avoué qu'il y avait beaucoup de choses irrégulières dans les crédits demandés. Je suis étonné qu'on attribue à mon honorable successeur de semblables paroles ; car lorsque j'ai eu l'honneur de le voir, il m'a dit qu'il se chargeait de tout défendre jusqu'au dernier centime, qu'il trouvait toutes les dépenses parfaitement régulières.

Voilà là déclaration formelle qu'il m'a faite. Sur cette déclaration je me suis tenu tranquille, je n'ai pas demandé à être entendu au sein de la section centrale.

Messieurs, ce n'est pas seulement pour la chambre que j'entre dans ces explications, c'est aussi pour une certaine partie du pays. A l'occasion d'une de ces discussions de crédits supplémentaires, je me suis vu accusé dans une presse qui a la prétention de représenter la modération, l'honnêteté, l'esprit religieux à la suite de pareille discussion, qu'ai-je lu dans la presse de cette espèce ?

Que le plus grand désordre régnait dans les finances belges et que le ministre de l'intérieur venait d'acheter pour un million de florins d'immeubles en Hollande.Voilà le résultat de cette discussion. On comprendra que j'aie à cœur de me défendre non pas de ces stupides et misérables accusations, mais d'empêcher que dans une partie du public de pareilles accusations prennent de la consistance.

D'honorables représentants peuvent attester le fait que je viens de citer. Oui voilà ce que disaient certains journaux qui prétendent parler au nom de la religion, de l'honnêteté, de l'esprit de modération et de conservation, je vois un honorable député qui sait à quel journal je fais allusion. Il faudrait, semble-t-il, se montrer peu soigneux de ménager l'honneur des hommes publics ; avant de lancer de pareilles accusations il faudrait être trois fois sûr qu'elles sont fondées, il ne faudrait pas les lancer à la légère. Ces accusations consistent à dire : Vous avez, violé la loi, vous avez violé la Constitution, vous dilapidez les deniers publics. De pareilles accusations peuvent se comprendre à l'égard des ministres non éprouvés, mais voilà 22 ans que je suis dans la vie publique, toute ma carrière devait protester contre de pareilles accusations.

J'abandonne maintenant à M. le ministre de l'intérieur le soin de défendre le projet qu'il a présenté, parce qu'il a cru pouvoir le justifier de tout point.

Si j'ai une observation à faire sur quelque article spécial, je me réserve de la produire ; et je supplie de nouveau les honorables membres de la section centrale, qui croient avoir découvert des irrégularilés de les signaler, de les préciser.

Je les supplie de ne pas se renfermer dans des accusations vagues, de bien préciser les faits. C'est le meilleur moyen de jeter la lumière sur la discussion, de rendre justice à tout le monde.

M. Osy. - Je ne m'inquiète pas de ce qui se trouve dans les journaux ; nous n'avons à parler que des pièces'qui sont entre nos mains et de ce qui s'est dit à la chambre. Pour moi, je ne connais que l'article115 de la Constitution. Ce qui n'a pas été voté au budget ne peut être dépensé. Lorsque le gouvernement a des besoins en dehors du budget, il doit faire des propositions à la chambre avant de faire la dépense. L'article 115 de la Constitution est formel. Un subside en faveur de la Ville de Bruxelles porté au budget de l'exercice de 1815 n'a pas été payé à la ville, et ces fonds ont (page 1587) reçu une autre destination. L'honorable M. de Brouckere a eu parfaitement raison de s'en plaindre.

Pour être juste, il y a des distinctions à faire. Les crédits supplémentaires demandés s'élèvent à 971,000 fr. 277,000 fr. sont de simples transports devenus nécessaires parce que les exercices étant clos, la dépense n'a pu être imputée sur les budgets de ces exercices, 289,000 fr. résultant de l'exécution des lois et règlements. Le seul reproche qu'il y ait à faire pour ces deux catégories de crédits, c'est que la demande en a été faite très tardivement. Reste 464,000 fr. qui sont dépensés tout à fait en dehors des règlements et des lois.

Cette somme en comprend une de 190,000 fr. pour les beaux-arts, pour lesquels nous avons voté des sommes très fortes. Si l'honorable M. Rogier trouvait l'allocation insuffisante, il pouvait demander une somme plus forte, comme l'a fait l'honorable M. Piercot. La chambre a statué et a rejeté l'augmentation demandée. Mais vous ne pouvez aller au-delà du chiffre alloué par la chambre.

Je le répète 464,000 fr. ont été dépensés, en dehors des budgets, des lois et des règlements.

M. Rogier. - C'est une erreur complète.

M. Lebeau. - Attendez le rapport.

M. Osy. - Il ne s'agit donc pas de trois articles seulement. L'honorable M. Ch. Rousselle en a cité trois ; mais il y en a plus.

Je crois que nous ferions très bien de voter les articles des deux premières catégories compris dans le premier rapport et sur lesquels il y a peu d'observations à faire. Nous aborderions les autres, quand la section centrale aurait fait son rapport.

M. de Man d'Attenrode, rapporteur. - Messieurs, l'objet en discussion est entièrement dans la question de savoir si le gouvernement a procédé régulièrement en dépassant le crédit qui lui a été accordé pour la publication de la statistique décennale. Ce crédit alloué est de 20,249 francs ; il a été dépassé de 12,000 francs...

M. le président. - Nous ne sommes pas encore à la discussion des articles. Nous en sommes toujours à la discussion générale.

M. de Man d’Attenrode, rapporteur. - Si nous n'en sommes pas arrivés à la discussion des articles, je dirai encore quelques mots dans la discussion générale.

D'abord, l'honorable M. Rogier a déclaré que cette discussion est dénuée d'intérêt pour la chambre. Quant à moi, je la trouve au contraire du plus haut intérêt et digne d'appeler toute votre attention. J'entends dire à mes côtés qu'elle est surtout intéressante pour les contribuables ; cela est d'une vérité incontestable.

De quoi se plaint-on sans cesse ? On se plaint de ce que le département de l'intérieur a une tendance à augmenter annuellement les dépenses. Voulez-vous arrêter cette progression incessante ? Ce n'est pas en discutant péniblement et sans résultats des prévisions de dépenses des budgets, c'est en discutant des faits accomplis, des comptes, que vous y parviendrez.

Je vous le déclare avec assurance : si vous m'accordiez le loisir de scruter suffisamment les actes accomplis, il ne me serait pas difficile de vous établir que le budget de l'intérieur peut être réduit d'une manière notable, et l'administration hésiterait un peu à faire progresser les dépenses, et son système d'intervention en toutes choses.

L'honorable député d'Anvers s'est plaint aussi de ce que j'aurais consulté les chefs de service du département de l'intérieur et de ce que je me suis abstenu de l'entendre lui-même ; je vous avoue, messieurs, que cette idée ne m'est pas venue, je n'ai pas eu cette prétention.

Or, l'honorable membre a fait erreur. Je n'ai consulté aucun chef de service du dépariement de l'intérieur. J'ai pris mes renseignements surtout à la cour des comptes. Sans la cour des comptes, sans cette institution si utile, notre besogne serait impraticable.

L'honorable M. Rogier continue à soutenir que tous ses actes sont à l'abri de toute critique, qu'ils sont d’une régularité à toute épreuve ; mais il oublie toujours ou fait semblant de ne pas connaître l'article 110 de la Constitution. Quand il dépasse un crédit, il prétend (il l'a dit avant-hier avec la plus grande assurance) que ce n'est pas une irrégularité. Je dis que c'est pire qu'une illégalité, c'est une inconstitutionnalité, c'est donc la quelque chose de plus sérieux qu'une irrégularité.

L'honorable prédécesseur de M. le ministre de l'intérieur nous a en quelque sorte mis en demeure de vous signaler les actes blâmables de son administration. Qu'il ait un peu de patience, nous y viendrons, quand nous serons arrives à la discussion des articles, surtout à la discussion des articles ajournés par la section centrale. Il n'aura rien perdu pour attendre.

Eu attendant je vais, pour satisfaire l'honorable M. Rogier, faire l'exposé de deux actes administratifs difficiles à expliquer au point de vue de nos institutions constitutionnelles.

Vous savez, messieurs, qu'un arrêté royal a décrété qu'un monument serait élevé en mémoire du Congrès, et qu'un autre arrêté royal a décrété qu'une église serait construite en mémoire de notre excellente Reine. On a fait appel aux souscriptions, des sommes assez considérables ont été recueillies.

Que devait-on faire de ces sommes ? Nos lois de finances voulaient qu'elles fussent versées au trésor public.

Qu'a-t-on fait ? Elles ont été retenues dans une caisse, espèce de succursale du trésor public qui se trouve au département de l'intérieur, et dont l'existence irrégulière fera l'objet en temps et lieu de mes observations.

Qu'a-t-on fait ensuite de ces valeurs ? On s'en est servi sans scrupule pour payer les frais résultant de la publication d'une édition illustrée de la Constitution. Il paraît que 25,000 fr, ont été prélevés sur les sommes destinées à élever la colonne au Congrès national ; et cela contrairement à l'intention bien positive des souscripteurs. Je tiens ici cette œuvre. Je doute qu'elle obtienne vos suffrages.

Il paraît d'ailleurs que d'autres dépenses ont encore été imputées sur ces fonds, qui sont restés à la disposition du département de l'intérieur. La cour des comptes paraît avoir entrepris une correspondance pour faire disparaître cette irrégularité. L'expérience prouve que les valeurs ne sont pas faites pour rester déposées au département de l'intérieur, puisque lorsque l'on éprouve le besoin de fonds, l'on en use pour un usage contraire à leur destination.

Il ne serait pas même impossible qu'on y ait eu recours sous la forme d'emprunts jusqu'à ce que vous ayez voté des crédits.

Voici une autre irrégularité, pour me servir de termes modérés. Vous vous rappellerez, sans doute, messieurs, qu'il y a trois semaines j'appelais votre attention sur ce qui se passe à l'école vétérinaire.

Par suite d'une phrase prononcée dans un discours par M. le ministre de l'intérieur, et à laquelle on a fait peu d'attention, le gouvernement s'est figuré qu'il était autorisé à disposer des économies qui se réalisent à l'école vétérinaire, pour faire des constructions nouvelles. C'est ce que j'ai qualifié de système déclaratif. Depuis, j'ai pris des renseignements ; je me suis adressé à l'architecte chargé primitivement de diriger ces constructions et j'ai été bien étonné de voir des plans considérables commandés par le département de l'intérieur en 1850. Je me suis empressé de demander quelle était l'estimation de ces projets. Et l'on m'a déclaré que la réalisation de ces plans nécessiterait une dépense d'environ 300,000 fr.

C'est ainsi, messieurs, que petit à petit, et à votre insu, on vous engage dans une dépense considérable, puisqu'il s'agit de doubler au moins les bâtiments de l'école vétérinaire, et un beau jour l'on viendra vous dire : les travaux sont commencés, il faut les terminer et l'on vous demandera à cet effet des crédits supplémentaires.

Je vous le demande, messieurs, est-ce là procéder constilutionnellement ? Vous conviendrez que c'est de l'arbitraire au moins.

L'honorable M. Rogier s'est étonné de ce qu'il y aurait plus ou moins de désaccord entre les déclarations de l'honorable M. Piercot en section centrale et celles qui lui ont été faites concernant la régularité des actes soumis à votre examen. Je maintiens ce que j'ai dit à cet égard, et j'en appelle aux souvenirs de tous les membres de la section centrale. M. le ministre de l'intérieur n'a-t-il pas déclaré sans détour, que si on lui accordait les fonds qu'il demandait, il s'engageait d'entrer dans une voie plus régulière et à l'abri de tout reproche, et qu'il donnerait des ordres à cet effet à ses subordonnés.

Au reste, savez-vous, messieurs, quelle est la cause des débats pénibles auxquels nous assistons et dont je suis en quelque sorte la cheville ouvrière ? La voici :

L'intervention du département de l'intérieur s'étend à de trop nombreux services, à des services que le gouvernement n'a pas mission de rendre au pays. Et cette intervention s'est notablement accrue depuis 1847. Le déparlement de l'intérieur en subit les conséquences. Il est un proverbe qui lui est très applicable et qui dit : Qui trop embrasse mal étreint.

L'on cède trop facilement dans ce département à une foule de sollicitations, sans songer aux charges que ces prodigalités imposent aux contribuables.

Quelque bien constituée que soit la tête d'un ministre, elle ne peut suffire à diriger convenablement tous ces services, on veut intervenir en toutes choses ; ce système doit nécessairement faire surgir de nombreux abus, qui vous sont ensuite révélés, quand il s'agit des crédits supplémentaires.

Messieurs, l'honorable député d'Anvers s'est plaint de ce que l'on cherchait même à porter atteinte à sa réputation, à mettre son intégrité en question. Il accuse la presse d'avoir poussé l'antagonisme jusqu'à ce point. J'ignore quel est le journal qui s'est livré à cette odieuse accusation. Mais quant à moi je le déclare hautement, jamais je n'ai suspecté l'intégrité de mon honorable adversaire ; toujours j'ai rendu hommage à son intégrité.

M. Roussel. - Tous.

M. de Man d'Attenrode. - Je suis heureux, en terminant, de faire cette déclaration. J'estime, malgré de profonds dissentiments, cet honorable collègue qui a contribué à fonder notre nationalité ; et je suis persnadé qu'il n'a jamais rien fait qui soit de nature à compromettre son honneur, et qu'il restera tel qu'il était dans les premières années de sa carrière politique.

Je réserve ce que j'ai à dire sur le n°1er quand la discussion générale sera close.

- Plusieurs membres. - A demain !

M. Rogier. - On vient de dire que cette discussion était intéressante ; continuons-la pour quelques moments encore. Je désire répondre quelques mots au discours de l'honorable M. de Man.

Sollicités par mes interpellations, les membres de la section centrale (page 1588) ont fini par citer, à l'appui de leurs assertions, quelques faits. J'ai relevé ceux de l'honorable M. Rousselle. L'honorable M. de Man vient d'en articuler trois autres. Mais ces faits, il les emprunte à une série totalement étrangère au projet de loi. Il n'est pas question, en effet, dans les crédits demandés, ni du monument du Congrès, ni du monument de la Reine, ni de l'école vétérinaire. Ce sont trois faits qu'on va chercher en dehors des crédits pour appuyer l'accusation qui est produite dans le rapport de la section centrale sur les crédits. Je répondrai en temps et lieu à ces faits. Je parlerai seulement de la révélation d'une caisse qui existerait au département de l'intérieur et dans laquelle on puiserait pour des dépenses irrégulières.

Messieurs, les fonds qui ont été versés par suite des souscriptions, tant pour le monument de la Reine que pour le monument du Congrès, ne reposent pas au département de l'intérieur, ils reposent au département des fibances. Les versements s'effectuent au trésor, et dès le jour da leur versement, ils portent intérêt.

Maintenant, quand le département de l'intérieur a besoin de disposer sur ces fonds, et il a dû le faire dans des circonstances qu'il sera facile de justifier, et dispose par mandats sur la caisse du département des finances. Mais, je le répète, les fonds provenant des souscriptions ne sont pas au département de l'intérieur.

Quand nous en viendrons à la discussion pour le monument du congrès et pour le monument de la reine, j'expliquerai comment le gouvernement a disposé de certains fonds de la souscription en destination soit du monument de la reine soit du monument du congrès. Je suis convaincu qu'après les explications qui seront données à la chambre, elle reconnaîtra qu'ici encore j'ai agi régulièrement.

Les fonds qui ont servi à construire les fondations du monument du congrès et à son inauguration ont dû être, en grande partie, imputés sur le fonds des souscriptions ; ceux qui ont été affectés aux meilleurs plans pour le monument de la Reine ont été prélevés sur les souscriptions pour le monument de la Reine. Etait-ce possible de les prélever ailleurs ? Du reste, je discuterai ces questions à leur place.

Je constate seulement que l'honorable rapporteur, sans pouvoir ajouter un fait nouveau à ceux qui avaient été signalés par son honorable collègue, a été chercher des faits entièrement étrangers au rapport sur les crédits supplémentaires. Je suis prêt à répondre à tous les faits qu'on pourra alléguer ; mais, pour ne pas jeter de confusion dans le débat, je demande qu'on renferme la discussion dans les 44 articles du projet actuel.

M. de Man d'Attenrode. - Je tiens à constater que mon honorable contradicteur n'a pas renversé ce que j'ai eu l'honneur de vous déclarer quant à l'emploi abusif, qui a été fait des fonds déposés par les souscripteurs, pour le monument du Congrès. Je maintiens tout ce que j'ai dit à cet égard.

Mais je conviens que depuis ces valeurs ont été converties en bons du trésor. (Interruption.) Cela est parfaitement exact.

Mais il n'en existe pas moins au département de l'intérieur une caisse alimentée d'une manière fort irrégulière par suite d'une interprétation, donnée fort mal à propos à l'article 15 de la loi sur l'organisation de la cour des comptes.

Le département de l'intérieur sous prétexte de dépenses urgentes et de détail fait mandater des ordonnances de payement au profit d'un comptable, qui ne fournit aucun cautionnement, et au moyen de ces fonds, dont il n'est rendu compte que d'une manière tardive, l'on paye des dépenses souvent dépourvues de crédits, et qui se régularisent ensuite au moyen d'un système de remboursement demandé plus tard à la cour des comptes, quand les crédits sont votés.

Au reste, j'aurai l'honneur de vous entretenir ultérieurement de cette infraction portée contre la loi du 29 octobre 1846.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - J'aurai besoin de répondre à quelques allégations qui ont été produites ; je demanderai la permission de le faire à l'occasion de l'article premier.

- La discussion générale est close.

La séance est levée à 4 heures trois quarts.