Accueil Séances Plénières Tables des matières Biographies Livres numérisés Note d’intention

Chambres des représentants de Belgique
Séance du lundi 18 décembre 1854

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1854-1855)

(Présidence de M. Delfosse.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 323) M. Maertens procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.

M. Ansiau donne lecture du procès-verbal de la séance de vendredi. La rédaction en est approuvée.

M. Maertens présente l'analyse des pétitions adressées à 'la Chambre.

Pièces adressées à la chambre

« Les sieurs Van Raes se plaignent de ce que leur détention préventive se prolonge au-delà du terme fixé par la loi. »

M. Verhaegen. - Cette pétition est le renouvellement d'une pétition précédente par laquelle quelques habitants de Furnes se plaignent d'une détention préventive qui se prolonge au-delà de toute mesure. Une ordonnance de la chambre du conseil avait ordonné la mise en liberté des prévenus. Il y a eu opposition de la part du procureur du roi. Les choses restent en cet état depuis trois à quatre semaines.

Je demande le renvoi de cette requête à la commission des pétitions avec, prière de faire un prompt rapport.

M. Vander Donckt. - Le rapport sur la première pétition était prêt ; lorsqu'un honorable membre de la Chambre est venu me demander de sutreoir jusqu'à ce jour à la présentation de ce rapport, parce qu'il attendait des renseignements des lieux mêmes. J'ai reçu ce matin ces renseignements ; et si la Chambre le désire, je suis prêt à lui présenter ce premier rapport.

M. le président. - Il s'agit d'une nouvelle pétition qui n'a pas encore été renvoyée à la commission.

M. Vander Donckt. - Je suis saisi d’une première pétition sur ce même objet.

M. le président. - Oui, mais en ce moment nous nous occupons de la nouvelle pétition, et elle doit, avant tout, être renvoyée à la commission.

M. Verhaegen. - L'honorable M. Vander Donckt est prêt à faire son rapport, et je l'en remercie ; car l'objet est très urgent. Je demande que la nouvelle pétition soit renvoyée à la commission pour qu'il soit fait rapport, dans la séance de demain, sur les deux pétitions en même temps.

M. Vander Donckt. - Je demande à la Chambre de vouloir décider le renvoi à la commission de novembre qui a examiné la première pétition.

M. le président. - S'il n'y a pas d'opposition, la nouvelle pétition sera renvoyée à la commission de novembre avec demande d'un très prompt rapport.


« La dame Lehouque, veuve du sieur Havard, ancien receveur des contributions, demande une modification à l'article 55 de la loi du 21 juillet 1844, en faveur des veuves qui se remarient. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Godart demande une loi qui oblige les fabriques de produits chimiques à chômer pendant l'été. »

- Même renvoi.


« Le sieur Hordemans, soldat au 4ème de ligne, réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir sa réhabilitation. »

- Même renvoi.


« Le sieur Thillt demande la révision des lois sur l'enfouissement des animaux morts. »

- Même reuvoi.


« Le sieur Heyndryckx, conducteur de première classe des ponts et chaussées, prie la Chambre de voter un crédit destiné à soulager la position des employés subalternes de l'Etat. »

- Même renvoi.


« La dame Rutten, veuve en premières noces du sieur Vereycken, employé des douanes, demande une augmentation de pension pour les deux enfants de son premier mari. »

- Même renvoi.


« Les membres des administrations communales de Lavacherie et de Thionville appellent l'attention de la Chambre sur les avantages que présente le système d'enseignement ambulant agricole qui a été mis en pratique par le sieur Gatellier. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur l'enseignement agricole.


« Le sieur Ballieux, capitaine pensionné, présente des observations au sujet des explications données par le gouvernement sur les pétitions des officiers pensionnés, en vertu de la loi du 24 mai 1838. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Plusieurs habitants de Quaed-Mechelen demandent à être indemnisés des pertes que leur ont occasionnés les logements militaires et prient la chambre de les exempter de cette charge ou de leur faire accorder une indemnité en rapport avec la dépense que nécessitent les logements des officiers et des soldats. »

- Même renvoi.


« Les sieurs Buyck et Gillis, facteurs ruraux du bureau des postes, à Eecloo, demande une augmentation de traitement ou une gratification. »

- Même renvoi.


« Le sieur Blondiau, secrétaire au parquet à Neufchâteau, demande que les secrétaires des parquets aient un traitement égal à celui des commis-greffiers. »

« Même demande du sieur Lemaître, secrétaire du parquet à Namur. »

« Même demande du sieur Roumy, secrétaire du parquet à Malines. »

« Même renvoi. »


« Le sieur Grégoire, ancien militaire pensionné pour cause d'infirmité contractée au service, demande une augmentation de pension. »

- Même renvoi.


« Le sieur Renotte, clarinette solo à la musique du 12ème régiment de ligne, demande que, dans l'armée, la clarinette en cuivre soit substituée à la clarinette en bois. »

- Même renvoi.


« Les sieurs Vandenbrouke, Desmet, Vervacke-Vandekerkhove et Vandekerckhoven-Vandenbrouck demandent que le déchet du lin autre que le snuit soit soumis à un droit supplémentaire de sortie de 20 à 25 fr. les 100 kilog. »

- Sur la proposition de M. T'Kint de Naeyer, renvoi à la commission d'industrie avec demande d'un prompt rapport.


« Le sieur J.-A. Lutgeirs, instituteur communal, à Mont, né à Grummelscheir (grand-duché de Luxembourg), demande la naturalisation ordinaire. »

- Renvoi à M. le ministre de la justice.


« Par dépêche du 17 décembre, M. le ministre des travaux publics adresse à la Chambre les procès-verbaux du comité consultatif des chemins de fer, postes et télégraphes. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget des travaux publics.

Rapports sur des pétitions

M. Vander Donckt, rapporteur. - Un grand nombre d'habitants de la ville de Soignies demandent que la ligne directe de Charleroi à Gand par Soignies obtienne la préférence outre les projets de chemins de fer destinés à relier le marché des Flandres aux bassins houilles du Centre et de Charleroi et que la concession en soit accordée aux sieurs Dupont, Houdain et Ce.

Votre commission des pétitions a l'honneur de vous proposer le renvoi de cette demande à M. le ministre des travaux publics.

- Ces conclusions sont adoptées.

Projet de loi accordant un crédit provisoire au budget du ministère de l’intérieur

Dépôt

M. le ministre des finances (M. Liedts). - Comme il n'est pas probable que le budget du département de l'intérieur puisse être discuté avant votre ajournement, j'ai cru devoir demander au Roi la permission de soumettre à la Chambre un projet de loi tendant à accorder au département de l'intérieur un crédit provisoire pour le mois de janvier.

- Il est donné acie à M. le ministre de la présentation de ce projet de loi ; la Chambre en ordonne l'impression et la distribution et le renvoie à l'examen de la section centrale qui a examiné le budget de l'intérieur.

Rapport sur une pétition

Discussion du rapport de la commission des pétitions sur la pétition des habitants de Berchem, relative aux opérations électorales de cette commune

M. le président. - La commission propose le renvoi de la pétition à M. le ministre de l'intérieur avec demande d'explications.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Je suis prêt à donner, dès à présent, à la Chambre les explications qu'elle désire sur le conflit qui s'est élevé à Berchem entre quelques électeurs et la députation permanente.

Des électeurs de la commune de Berchem se sont adressés d'abord à la députation permanente pour demander l'annulation des élections qui ont eu lieu dans cette commune le 31 octobre dernier. Ils se sont ensuite adressés à la Chambre pour se plaindre de ce que leur réclamation n'avait pas été prise en considération.

Messieurs, la réclamation de ces électeurs repose sur un double motif.

D'abord ils prétendent que la députation permanente a eu tort de déléguer, pour présider le bureau électoral de cette commune, un fonctionnaire amovible. En second lieu, ils se plaignent de ce que les motifs qui ont déterminé l'envoi d'un délégué spécial, n'auraient pas été insérés au procès-verbal d'élection.

Quant au premier grief, il n'est fondé sous aucun rapport. L'article 25 de la loi du 30 mars 1836 autorise la députation permanente à envoyer, (page 324) dans des circonstances extraordinaires, un commissaire spécial, sans limitation du choix des personnes, pour présider un bureau électoral.

Sous ce rapport donc, la décision par laquelle un commissaire a été envoyé à Berchem est inattaquable en droit.

Le second grief mérite un examen plus sérieux. Les électeurs se plaignent de ce que les motifs de la nomination du commissaire spécial n'ont pas été insérés au procès-verbal.

Sous ce rapport, il y a eu en effet contravention à une prescription légale. La loi veut que les motifs soient insérés au procès-verbal.

Je reconnais qu'il y a eu là une omission, mais la députation n'a pas cru que ce fût un motif d'annulatitn des élections ; d'abord parce que la loi ne prononce pas cette nullité, et en second lieu parce que, dans cette circonstance, elle a fait un usage légitime du droit que la loi lui accorde.

Le fait de l'envoi d'un commissaire spécial a paru nécessité à la députation, par la situation exceptionnelle dans laquelle la commune se trouve, eu égard à la division qui règne parmi les habitants. Sous ce rapport, la décision est parfaitement justifiée, et il n'y a qu'une seule chose à reprocher au procès-verbal de l'élection, c'est de ne pas avoir mentionné les motifs de cette décision ; c'est là une irrégularité, mais ce n'est pas une de ces irrégularités graves dont la loi fait dépendre la validité des élections. C'est ce qui a porté la députation à maintenir les élections du 31 octobre.

Maintenant je pense que la Chambre ne peut pas, en droit, intervenir dans un débat de cette nature, puisque la députation a fait un usage légal de sa prérogative et qu'elle est souveraine dans l'appréciation des motifs de la mesure qu'elle a prise. A la vérité le gouverneur aurait eu le droit de se pourvoir devant le Roi, comme chef du pouvoir exécutif pour faire annuler la délibération dont il s'agit, mais le gouverneur, dans cette circonstance, n'a pas pensé que l'irrégularité reprochée au procès-verbal fût de telle nature qu'elle nécessitât un recours au Roi. En effet, messieurs, il ne s'agit que d'un vice de forme et l'élection dans son essence même a été à l'abri de toute suspicion.

Je pense que la Chambre sera satisfaite de ces explications et qu'elle ne jugera pas nécessaire de donner suite à cet incident.

M. Dellafaille. - Je ne puis pas, messieurs, me contenter des explications que l'honorable ministre vient de nous donner. Je regrette doublement de devoir prendre la parole dans cette circonstance, parce qu'il s'agit d'un corps dont j'ai fait parlie pendant treize ans, et pour lequel j'ai conservé de vives sympathies. Si j'ai appuyé la réclamation des pétitionnaires, c'est que je crois que l'irrégularité commise dans l'élection du 31 octobre, à Berchem, est réellement une irrégularité grave. Je pense (et je partage en ceci l'opinion de l'honorable M. Loos) que la Chambre ne pourra point redresser ce grief ni faire droit aux justes réclamations des pétitionnaires.

Je crois encore que la députation seule était apte à prononcer dans la question, excepté toutefois le recours du gouverneur auprès du Roi, dans le délai de huitaine, conformément au paragraphe 3 de l'article 46 de la loi communale. Mais il ne résulte point de là que la Chambre ne puisse plus porter remède à l’irrégularité commuse, qu’elle n’ait pas un devoir moral à remplir quand elle sait qu’une loi a été transgressée ou mal interpétée. Je pense qu'il est du devoir de la Chambre de tâcher d'éclairer le pays pour que de pareilles irrégularités ne se reproduisent plus, et que de semblables abus ne puissent plus se commettre.

Je vous demanderai donc, messieurs, un moment de bienveillante attention pour vous expliquer les faits tels qu’ils se sont produits, tels que les pétitionnaires nous les présentent.

Je ne puis nullement admettre que la commune de Berchem se trouvât dans une position exceptionnelle de nature à motiver l'usage que la députation a fait dans cette circonstance du pouvoir exceptionnel de déléguer un fonctionnaire de l'ordre judiciaire pour présider les comices électoraux.

Dans la loi électorale nous remarquons, d'ailleurs, que ce sont des fonctionnaires inamovibles ou électifs qui sont appelés à présider les élections. Il suffit de jeter les yeux sur les articles 20 et 21 de cette loi pour s'en convaincre.

Depuis presque 20 ans que je siège au conseil provincial d’Anvers et pendant les 13 années que j’ai siégé à la députation permanente, je ne sache pas qu’il y ait jamais en à Berchem le moindre trouble qui fût de nature à motiver l’envoi d’un fonctionnaire judiciaire pour y présider les élections.

Cette commune s'est trouvée dans le cas où se trouvent à peu près toutes les communes en Belgique, c'est-à-dire qu'il y a deux partis dans la commune, l'un qui approuve les actes de l'administration, l'autre qui les désapprouve.

En effet, la réélection du bourgmestre de Berchem était menacée aux élections du 31 octobre. Il est bien certain que l'envoi et la présence d'un commissaire extraordinaire qui était le substitut du procureur du roi, personnage que les électeurs ne connaissent pour la plupart à la campagne que le réquisitoire à la main, qui ne leur apparaît, pour ainsi dire, que comme un gendarme en robe noire, a eu une influence très grande sur le résultat de l'élection ; et à mon avis cette influence a été telle que si l'on considère la faible majorité obtenue, elle a vicié l'élection dans sa base, elle l'a complètement dénaturée.

Voilà le reproche que j'adresse aux élections qui ont eu lieu à Berchem, et ce reproche, messieurs, est-il sans valeur, ne mérite-t-il pas votre plus sérieuse attention si vous remarquez de quelles précautions le législateur a entouré nos libertés électorales ? Il est dit à l'article 24 de la loi communale :

« Le bourgmestre, ou, à son défaut, l'un des échevins, suivant l'ordre de leurs nominations, et, à défaut de bourgmestre et échevins, l'un des conseillers communaux, suivant leur rang d'inscription au tableau, préside le bureau principal ; les quatre membres du conseil communal les moins âgés remplissent les fonctions de scrutateurs ; si le nombre prescrit de scrutateur ne peut être rempli au moyen des conseillers, il est complété par l'appel des plus imposés des électeurs présents sachant lire et écrire.

« S'il y a plusieurs sections, la deuxième et les suivantes sont présidées par l'un des échevins, suivant leur rang d'ancienneté, ou, à défaut des échevins, par l'un des conseillers, suivant leur ordre d'inscription au tableau. Les quatre plus imposés des électeurs présents, sachant lire et écrire, sont scrutateurs. Chaque bureau nomme son secrétaire, soit dans le collège électoral, soit en dehors : le secrétaire n'a point voix délibérative.

« Toute réclamation contre l'appel d'un électeur désigné à raison de la quotité de ses impositions, pour remplir les fonctions de scrutateur doit être présentée avant le commencement des opérations ; le bureau en décide sur-le-champ et sans appel.

« Dans aucun cas les membres sortants du conseil ne pourront faire partie du bureau, à quelque titre que ce soit. »

Pourvu qu'on sache lire et écrire, pourvu qu'on soit de la commune, et que les qualités dont un citoyen est investi ne lui permettent pas d'exercer de pression sur l'élection, le législateur lui reconnaît les qualités requises pour diriger les élections, et au lieu de ce luxe de libertés et de garanties qui se trouve dans l'article, on déploie un luxe tout contraire, celui de l'intimidation résultant de la présence de ce fonctionnaire. C'est une première irrégularité grave, à mon point de vue. Le législateur a fort bien fait de prescrire que les motifs de semblables irrégularités devaient être inscrits au procès-verbal, afin que chaque électeur pût juger pourquoi on avait imposé à la commune cette espèce d'état de siège dans lequel on l'a mise et qui se trouvait complété par la présence de plusieurs gendarmes. Là, messieurs, ne se bornent pas les irrégularités commises, et j'en vois une autre qui est bien plus grande et plus déplorable à mes yeux.

Remarquez-le bien, comme j'ai eu occasion de le dire, l'élection avait eu lieu sous la présidence du procureur du roi ; aussi les électeurs se sont-ils pourvus auprès de la députation, pour déclarer que cette élection avait eu lieu sous une pression extralégale et pour demander son annulation. Mais quand ont-ils pris leur recours à la députation ? C'est ce qu'il importe surtout de remarquer. L'élection a eu lieu le 31 octobre ; la réclamation est arrivée à la députation le 8 novembre, et s'empressant de statuer sur la requête des électeurs de Berchem, la députation, avec ce louable empressement qu'elle met à traiter toutes les affaires, a pris une décision le 10. Naturellement la députation qui avait jugé bon et utile d'après les renseignements exagérés qu'elle avait reçus, mais bien à tort d'après moi, d'envoyer le substitut du procureur du roi comme commissaire spécial, la députation, juge et partie, a approuvé ce qu'elle avait fait elle-même, elle ne s'est pas déjugée.

Mais qu'est-il arrivé ? Au lieu de transmettre la décision de la députation immédiatement aux pétitionnaires qui auraient pu éclairer le gouverneur, et le mettre à même d'exercer dans la huitaine son recours au Roi, cette décision ne leur a été signifiée que le 21 octobre, c'est-à-dire 11 jours après la décision prise, quand le délai de recours était écoulé. Je vois là une négligence coupable, et si je suis venu appuyer la pétition des habitants de Berchem, c'est afin de prier M. le ministre de l'intérieur d'inviter M. le gouverneur de la province d'Anvers à infliger un blâme sévère au fonctionnaire qui a négligé de transmettre en temps utile la décision de la députation aux pétitionnaires qui auraient pu éclairer M. le gouverneur et obtenir de lui qu'il prît son recours près du Roi et fit décider que l'élection qui avait eu lieu sous l'influence d'une pression illégale avait été viciée dans sa base et dans ses résultats.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - L'honorable préopinant a confondu des choses essentiellement distinctes : la loi électorale pour les Chambres et l'article 25 de la loi communale relatif aux élections communales.

Nous n'avons pas à nous occuper en ce moment des élections pour les Chambres, mais du droit spécial que les articles 24 et 25 de la loi du 30 mars 1836 donnent aux députations permanentes.

Il est évident que les députations permanentes ont le droit de déléguer, pour présider les élections, des personnes prises en dehors du corps électoral, que leur droit n'est pas limité, qu'elles peuvent choisir des fonctionnaires amovibles ou inamovibles, suivant les circonstances.

La décision qu'elle prend à cet égard ne peut être critiquée en droit. Mais en fait la députation permanente de la province d'Anvers a-t elle abusé du droit que la loi lui confère ? Est-il vrai qu'elle a envoyé un gendarme en habit noir comme on se permet de le dire ? Le fonctionnaire qu'elle a délégué est un magistrat du parquet d'Anvers, le substitut du procureur du roi sur le compte duquel il n'est pas permis d'élever le moindre soupçon.

Quant à la pression qu'il aurait exercée sur le corps électoral, sur (page 325) lequel on aurait agi par intimidation ; est-il besoin de combattre des insinuations dépourvues de toute vraisemblance ?

Ce n'est pas en se livrant à des exagérations semblables qu'on parvient à se faire écouter dans cette Chambre. Il y a dans cette enceinte un de nos honorables collègues qui a vu ce qui s'est passé à Berchem, qui ne partagera pas l'émotion, l'indignation même, dont vous venez d'être témoins.

Non content de la connaissance que j'avais de l'impartialité de la députation d'Anvers, j'ai pris des renseignements près du gouverneur, lequel m'a répondu qu'il n'avait aucune raison de douter de la parfaite impartialité avec laquelle la députation avait agi dans cette circonstance, qu'elle avait des motifs graves pour l'appréciation desquels elle est exclusivement compétente.

Est-ce la première fois que pour présider un bureau électoral la députation a délégué un magistrat, non seulement de l'ordre judiciaire mais de l'ordre administratif ? Nullement, car souvent on a envoyé un commissaire d'arrondissement en mission semblable. S'est-on jamais plaint de l'usage de cette faculté ? Non, c'est pour la première fois qu'une plainte semblable se produit.

On veut que les abus ne se reproduisent plus à l'avenir. Quant aux droits de la députation je n'ai pas à intervenir, la Chambre ne le peut pas non plus ; le droit de la députation est écrit dans la loi, et quant à l'usage qu'elle en fait, elle est seule juge.

Le seul grief que l'on puisse articuler, c'est l'omission qui existe dans le procès-verbal d'élection. Ce grief, je le reconnais, et des instructions seront données pour qu'à l'avenir les procès-verbaux d'élection mentionnent, dans des cas analogues, les circonstances qui ont donné lieu à l'envoi d'un commissaire spécial.

Au moyen de cette déclaration, je pense, messieurs, que l'incident pourrait être clos.

M. Vander Donckt, rapporteur. - La députation permanente de la province d'Anvers a agi, je crois, dans la limite de ses pouvoirs. Mais sur quoi s'est-elle basée ? Sur des rapports, des renseignements qui lui ont été donnés. Ces auteurs de ces renseignements ont-ils, eux aussi, agi de bonne foi, ont-ils été aussi sincère que la députation permanente ? J'en doute ; peut être l'ont-ils fait dans le but d'intimider certaines catégories d'électeurs.

C'est sur ces renseignements cependant que la députation a pris cette résolution de déléguer un homme étranger à la commune pour présider les élections. C'était un fonctionnaire amovible, le substitut du procureur du roi d'Anvers, accompagné d'une forte brigade de gendarmerie, qui s'est présenté dans cette commune. Il est à remarquer qu'on voulait intimider certaine catégorie d'électeurs.

A mon avis, c'est évident, de la part de ceux qui ont provoqué cette mesure exceptionnelle.

A son arrivée dans la commune, où tout était tranquille, où il n'y avait ni trouble ni émeute, tous les habitants y ont strictement observé l'ordre ; la tranquillité n’a pas été troublée un seul instant. Tous se sont fait un devoir d'observer strictement la loi, à l'exception d'un seul individu, d'un fonctionnaire public et amovible, à l'exception du substitut du procureur du roi, qui seul, sautanl à pieds joints sur toutes les formalités de la loi, a commis une irrégularité, à savoir celle de ne pas insérer au procès-verbal des élections les motifs qui l'avaient amené au fauteuil de la présidence du bureau électoral.

Dans l'état actuel des choses, le gouvernement ne voudrait pas se mêler des élections communales ; nous avons cette conviction quant au cabinet actuel, nous avons la conviction que le ministère actuel est incapable de peser sur les élections. Mais nous avons traversé d'autres circonstances, d'autres époques, et j'ai entendu reprocher amèrement à d'autres cabinets la manière dont ils pesaient sur les élections.

Je suis le premier à rendre au cabinet actuel cette justice qu'avec lui nous ne pouvons avoir cette crainte ; mais ce que nous avons vu dans le passé on peut le tenter dans l'avenir ; notre devoir, à nous, c'est de veiller à la stricte exécution des lois, c'est de prévenir les abus par la stricte observation de toutes les formalités prescrites.

L'irrégularité grave qui a été signalée dans les élections de Berchem serait, à mon avis, un motif suffisant pour en prononcer i annulation.

Il y a un autre point, une autre observation à faire, c'est qu'en présence des dispositions du deuxième paragraphe de l'article 24 de la loi communale modifiée par la loi du 20 mai 1848, le législateur semble avoir voulu écarter du bureau électoral tout fonctionnaire amovible, lorsqu'il dit :

« ...Le bourgmestre ou à son défaut l'un des échevins, suivant l'ordre de leurs nominations, et, à défaut de bourgmestre et échevins l'un des conseillers communaux suivant leur rang d'inscription au tableau, préside le bureau principal, les quatre membres du conseil communal les moins âgés remplissent les fonctions de scrutateurs. Si le nombre prescrit de scrutateurs ne peut être rempli au moyen des conseillers, il est complété par l'appel des plus imposés des électeurs présents sachant lire et écrire.

« S'il y a plusieurs sections, la deuxième et les suivantes sont présidées par l'un des échevins suivant leur rang d'ancienneté, ou, à défaut des échevins, par l'un des conseillers, suivant leur ordre d'inscription au tableau, et au besoin par les personnes désignées à cet effet par le président du bureau principal, parmi les électeurs qui ne sont pas fonctionnaires amovibles.

« Les quatre plus, etc., etc. »

Eh bien, la députation, contrairement aux intentions clairement exprimées par le législateur, a désigné un fonctionnaire amovible, précisément celui qui, dans des circonstances graves, est obligé de veiller au maintien de l'ordre et de la tranquillité, alors qu'il y a des troubles ou des émeutes. Cela a dû exercer une certaine influence sur quelques électeurs, dans une commune rurale.

Or, il s'agit de l'une des plus précieuses prérogatives de nos libertés constitutionnelles. Donc cette affaire est plus sérieuse qu'elle ne paraît de prime abord, et nous devons prévoir le cas où le gouvernement pourrait faire usage de cet expédient pour peser sur les élections. Je recommande donc spécialement cette affaire à I'altention de M. le ministre de l'intérieur.

M. de Theux. - Je pense que la Chambre doit donner toute son attention à cette question, parce qu'elle est très grave, non pour les faits de la commune de Berchem, sur lesquels il n'y a plus à revenir, mais pour la question de principe.

J'ai entendu M. le ministre de l'intérieur émettre un doute sur le point de savoir si le défaut de faire connaître les motifs de la désignation d'un commissaire spécial était de nature à entraîner la nullité de l'élection. Pour moi, je n'en doute aucunement. Si le pourvoi avait été formé auprès du gouvernement, il n'y a pas de doute qu'il aurait dû annuler l'élection.

La présidence d'un collège électoral est une formalité substantielle. La loi a eu soin de dire qui préside le collège électoral, et même de désigner tous les membres qui composent le bureau électoral tout entier. Sans un cas extraordinaire, lorsque la tranquillité publique est menacée, on peut, en raison de motifs graves, dont l'appréciation est laissée à la députation permanente, appeler à la présidence du bureau-un commissaire spécial ; l'article de la loi communale est formel. Mais à quelle condition ? A la condition de faire insérer dans le procès-verbal le motif de cette désignation. Pourquoi cette disposition de la loi ? C'est pour qu'il y ait dans la commune notoriété des motifs ; c'est pour qu'on puisse réclamer contre la désignation d'un commissaire spécial pour la présidencedu bureau. S'il n'en était pas ainsi, on pourrait s'ciu-parerdela présidence delà plupart dés élections communales en disant : < Nous avons des motifs graves pour désigner un commissaire spécial pour présider le bureau. « Ce qui serait la violation la plus flagrante de la liberté communale qu'on pût imaginer.

La loi n'a pas admis un tel système. Il faut la publicité des motifs : c'est la seule sanction de la nomination d'un commissaire spécial. Hors de là, il n'y a plus de liberté communale. C'est là une des formalités substantielles de l'élection.

Maintenant, je conviens que si la députation avait indiqué dans sa décision le motif pour lequel il y a eu désignation d'un commissaire spécial, et si ce commissaire spécial avait fait insérer ce motif dans le procès-verbal, le choix d'un fonctionnaire amovible ne pourrait entraîner de nullité. Le choix de la députation est libre, j'en conviens ; mais, quoiqu'il soit libre, il faut tenir compte de l'esprit de nos lois ; or, la loi électorale pour les élections des membres des chambres et les lois provinciale et communale pour les élections provinciales et communales ne désignent comme membres du bureau aucun fonctionnaire de l'ordre administratif, aucun fonctionnaire amovible de l'ordre judiciaire. Ce sont toutes personnes revêtues de fondions inamovibles ou électives. Il est vrai que le bourgmestre est un fonctionnaire amovible ; mais il a un mandat électif. Voilà ce qui constitue la liberté de l'élection.

Dans un cas de nécessité, lorsqu'on ne peut pas trouver un fonctionnaire inamovible, on peut recourir à un fonctionnaire amovible. C'est une règle de conduite qu'on doit strictement observer à l'avenir. En agir autrement, c'est avoir l'air d'imposer en quelque sorte un choix à la commune, si le fonctionnaire désigné a une opinion politique caractérisée et connue dans la localité où les élections se font.

Quant au fait, je conviens que le choix du substitut du procureur du roi à Anvers n'avait rien d'offensif quant à sa personnalité. Je n'ai entendu articuler aucun reproche contre la personnalité de M. le substitut, et je pense que l'honorable député d'Anvers n'en a articulé aucun. La seule observation qui ait été communiquée à la Chambre est celle-ci : c'est que les membres du parquet se présentent ordinairement dans la commune pour instruire des délits, et surtout lorsqu'ils sont accompagnés d'une force armée, de la gendarmerie. Il y a là quelque chose d'imposant qui est de nature à exercer de l'influence sur le corps électoral d'une commune rurale. Je crois que cela n'était pas dans l'ordre. Tout en respectant le caractère et les opinions de M. le procureur du roi, je dis qu'en fait il a pu résulter de sa présence une influence quelconque sur les électeurs.

Quant à la notification tardive de l'approbation des élections de Berchem ou de la décision de la députation permanente qui confirme sa première résolution, il y a là évidemment une faute qui a été commise : car l'on a jugé à propos de notifier la décision après que tout délai de recours était passé. Or on aurait dû la notifier quand les délais de recours étaient encore ouverts. La notifier après coup, c'était une formalité inutile ou c'était forclore les pétitionnaires.

Je n'en dirai pas davantage.

M. Loos. - Il paraît que nous sommes tous d'accord que la Chambre n'a rien à voir dans cette affaire.

(page 326) M. Dumortier. - Non ! non !

M. Loos. - Permettez. Si vous m'interrompez, vous ne connaîtrez pas ma pensée.

Je dis que nous sommes tous d'accord, que la Chambre ne peut modifier la décision qui a été prise par la députation permanernte, qu'elle n'a rien à y voir pour le présent. Mais cette décision on l’a attaquée comme non motivée ; on va même jusqu'à incriminer le caractère du délégué de la députation.

M. de Theux. - Non !

M. Loos. - Il a influé par sa présence sur les élections ; il y a eu pression ; l'honorable M. Dellafaille a dit (j'ai noté immédiatement ses paroles) : L'élection a été dénaturée. Cela veut bien dire, je crois, que c'est la présence du substitut du procureur du roi qui a dénaturé l'élection. Messieurs, je m'étonne d'une chose, c'est que ce soit l'honorable M. Dellafaille, qui, comme il vous l'a dit, sort de la députation d'Anvers, qui a conservé une très haute estime pour les membres de ce corps, qui soit venu vous apporter une accusation contre l'acte qu'il a posé dans la limite de ses droits.

L'honorable M. Dellafaille dit que les circonstances ne justifiaient pas la mesure exceptionnelle qui a été prise. Ainsi les membres de la députation ont mal vu ou ils ont agi avec partialité. La mesure n'était pas justifiée par les circonstances ; c'est l'honorable M. Vander Donckt aussi qui juge d'ici dans quel état se trouvait la commune. Elle était paisible et tranquille ; il ne fallait pas y envoyer de délégué.

Que l'honorable M. Dellafaille tienne ce langage, je le conçois. Il habite Anvers ; il est plus rapproché de la commune ; il a pu mieux juger de ce qui s'y est passé. Mais je prétends que la députation en a mieux jugé encore que l'honorable M. Dellafaille.

Que tout le monde ne soit pas satisfait des élections de Berchem, je le conçois ; mais qu'on récrimine contre la décision de la députation, c'est ce que je ne conçois pas, surtout de la part de l'honorable M. Dellafaille. Je crois que la députation a montré dans cette circonstance beaucoup d'impartialité, beaucoup de justice et de prudence.

De quoi était menacée la commune de Berchem ? de quoi étaient menacées les élections ? Mais c'est l'échevin qui devait présider l'élection de Berchem qui a eu recours à la députation permanente pour lui dire qu'il n'y avait pas de sécurité pour les élections, qu'il n'y avait plus indépendance pour les électeurs, qu'un certain parti menaçait de renverser le bureau des élections du moment où il s'apercevrait que l'élection tournait contre lui. C'est en présence de ces circonstances que le président désigné, que l'échevin qui devait présider le bureau est allé trouver le gouverneur, lui a rendu compte des bruits qui circulaient. M. le gouverneur a soumis le cas à la députation, qui a décidé qu'elle ferait usage des pouvoirs que lui confère la loi de 1836 et qu'elle enverrait un commissaire spécial.

Je le répète, messieurs, je crois que la députation permanente a agi dans la plénitude de ses droits et qu'elle a agi avec la plus grande impartialité.

L'honorable M. Dellafaille trouve encore que la députation a posé un fait exorbitant en ne faisant connaître que onze jours après sa décision la solution qu'elle avait donnée à la réclamation des électeurs, et il dit : Si M. le gouverneur avait connu les motifs de cette décision, il aurait pu user de son droit, c'esl-à dire aller en appel auprès du Roi.

Mais l'honorable M. Dellafaille oublie que c'est le gouverneur qui préside la députation, qu'il connaît dès lors tous les actes de la députation et qu'il savait fort bien quels étaient les motifs qui avaient fait maintenir l'élection de Berchem.

Un dernier fait que l'on invoque, c'est la gravité de l'omission qui a été commise par le président du bureau électoral de Berchem. Il a omis de mentionner, bien que l'article 25 de la loi communale lui en fit une obligation, les motifs de sa présence au bureau électoral.

Messieurs, nous raisonnons ici d'une chose que nous connaissons imparfaitement ou plutôt que nous ne connaissons pas ; nous n'avons pas le procès-verbal sous les yeux. Quant à moi, si mes renseignements sont exacts, voici ce qu'il contient. Il dit que le substitut du procureur du roi se trouve au bureau pour présider l'élection en vertu d'une délégation qui lui a été donnée par la dépuiation permanente sous la date de...

Fallait-il insérer dans le procès-verbal tous les motifs ?

- Un membre. - La loi le dit.

M. Loos. - La loi dit qu'il faut insérer au procès-verbal les motifs qui font prendre la mesure.

Eh bien, le substitut du procureur du roi se réfère à la décision de la députation permanente en date du... Je vous le demande, messieurs, que pouvait-on insérer dans le piocès-verbal ? Il y avait des menaces, ii était question, disait-on, de piller ou de saccager la demeure du bourgmestre, de renverser le bureau électoral ; pouvait-on insérer cela dans le procès-verbal ? Evidemment, personne ne le ferait. Eh bien, la députation permanente a dû invoquer l'agitation qui régnait dans la commune, les menaces qui avaient été proférées, et M. le substitut du procureur du roi, en insérant au procès-verbal la date du mandat qu'il avait reçu et l'arrêté de la députation, arrêté motivé, avait, je crois, à peu près satisfait à tout. Les motifs de la décision ne se trouvent pas expliqués d'une manière complète ; il y a donc, sous ce rapport, une omission, mais cette omission est très légère et elle ne vaut, certes, pass tout le bruit qu'on en a fait dans cette enceinte.

M. Dellafaille. — Messieurs, je dois repousser la qualification d'exagérées que M. le ministre a bien voulu donner à mes paroles. Je me suis borné à relater les faits tels qu'ils se sont passés.

Je dois repousser aussi ce que l'honorable M. Loos a bien voulu, dire à mon adresse en ce qui concerne mes anciennes fonctions de membre de la députation permanente.

J'ai commencé par exprimer mon regret de devoir prendre part à cette discussion, mais aujourd'hui je ne suis plus membre de la députation, je suis membre de cette Chambre et j'ai à juger la valeur de la pétition qui nous est adressée ; j'ai à prononcer entre la députation et les pétitionnaires.

Dès lors j'ai dû m'enquérir de ce qui s'était passé, et j'ai pu me convaincre qu'il n'existait à Berchem rien d'alarmant dans la situation des esprits, rien enfin qui dût inspirer la moindre inquiétude ; c'est parce que j'avais cette conviction que je me suis permis de dire avec toute la modération possible que M. le gouverneur et la députation avaient été induits en erreur, et je dois déclarer, en effet, que c'est aujourd'hui dans cette Chambre que j'ai entendu parler pour la première fois de cette situation inquiétante ; personne que je sache dans les environs d'Anvers ne s'en était douté le moins du monde.

Quant à l'impartialité de la députation, comme M. Loos a semblé l'insinuer, je ne l'ai pas mise en doute le moins du monde. Je n'ai pas mis plus en doute le caractère honorable du fonctionnaire qui a été envoyé pour présider les élections. M. Loos n'avait nul besoin de prendre sa défense, c'est un fonctionnaire qui jouit de l'estime et de la considération générale la plus méritée.

Ce n'est donc pas à l'homme privé, ni au caractère de l'homme public, c'est aux fonctions qu'il exerce que j'ai fait allusion, et là, je le maintiens, ces fonctions inspirent aux citoyens illettrés et peu familiarisés aux attributions des fonctionnaires, l'inquiétude et la crainte même ; mais je remarque que pour donner de l'importance à des détails peu importants, on glisse très légèrement sur une irrégularité, qui est pourtant très grave, c'est le retard qu'on a mis à informer les électeurs de la décision de la députation.

Je connais trop M. le gouverneur, j'ai trop longtemps eu l'honneur de siéger à la députation, pour ne pas être convaincu que si les élecîeurs avaient pu, en temps utile, éclairer sa religion sur la véritable situation, des faits dans la commune de Berchem, il eût pris son recours au Roi ; mais les pièces ne sont parvenues aux pétitionnaires qu'après l'expiration du délai utile, et les électeurs n'ont été informés que quand il était trop tard. Je dis que c'est une amère dérision.

J'insiste, messieurs, pour que, si un fonctionnaire quelconque s'est permis de ne pas transmettre en temps utile la décision de la députation, il lui soit infligé un blâme sévère.

M. Verhaegen. - Il me paraît, messieurs, que tout le monde est d'accord pour reconnaître qu'une irrégularité quelconque a été commise au sujet des élections de Berchem ; mais la question est de savoir, dans le cas où il y aurait lieu à blâme, à qui le blâme doit être infligé. On a fait usage, à mes côtés, de précautions oratoires, on a défendu d'avance le gouverneur d'Anvers ; eb bien, je le dis hautement, si quelqu'un est à blâmer, c'est le gouverneur d'Anvers, et je vais le prouver.

Messieurs, deux griefs sont articulés : d'abord on dit que lorsqu'on use de la faculté d'envoyer un commissaire spécial, il faut indiquer au procès-verbal les motifs de cette mesure.

Ensuite, on prétend que la décision de la députation rejetant les réclamations qui avaient été faites n'a été portée à la connaissance des intéressés que 11 jours après sa date, et que, de cette manière, ils n'ont pas été mis à même de prendre des mesures contre cette décision. On demande qu'un blâme soit infligé au fonctionnaire qui serait coupable de cette négligence. Fixons-nous bien, messieurs, sur les faits et appliquons-y les dispositions de la loi.

Aux termes de l'article 25 de la loi communale, la députation permanente peut, dans certaines circonstances, envoyer un commissaire spécial pour présider les élections.

C'est un droit que personne ne conteste ; seulement le procès-verbal doit mentionner les motifs qui ont fait prendre cette mesure. Mais, messieurs, ce n'est pas la députation permanente qui rédige le procès verbal des élections, et dès lors il n'y a aucun reproche à lui adresser de ce chef. On dit que c'est une difficulté qui surgit entre la dépuiation et les électeurs ; pas le moins du monde : la députation a usé d un droit que la loi lui donne, et que personne, d'ailleurs, ne lui conteste. (Interruption.) On dit à mes côtés : « C'est clair ! » Ainsi mon honorable collègue doit être satisfait ; il n'y a aucun reproche à adresser à ce corps dont naguère il faisait partie.

Mais la décision de la députation a été notifiée trop tard aux intéressés, ce qui les a mis dans l’impossibilité d'user de leur droit d'opposition.

Messieurs, les intéressés n'ont pas ce droit d'opposition ; ils n'ont pas le droit de se pourvoir contre la décision de la députation permanente. C'est le gouverneur seul qui peut faire opposition dans le délai fixé. On n'a donc pu priver les intéressés d'aucun droit quelconque.

Je conviens, messieurs, que s'il y avait eu une irrégularité grave, le gouverneur qui, si je ne me trompe, prédisait ce jour-là la deputation, aurait dû se pourvoir contre la décision

Ainsi la seule objection que vous ayez à faire s'adresse au gouverneur d'Anvers et je vous demande si c'est ce fonctionnaire que vous voulez blâmer.

(page 327) - Un membre. - Nous blâmons le fait.

M. Verhaegen. - On ne blâme pas un fait, on blâme celui qui a posé le fait.

Eh bien, messieurs, je suis d'accord avec vous, il y a eu une irrégularité, il peut y avoir lieu à un blâme, mais je demande sur qui le blâme doit tomber, si, en effet, quelqu'un doit être blâmé ? Quant au gouvernement, il n'y a aucun reproche à lui faire ; l'honorable M. Vander Donckt lui donne toute son approbation quant à sa conduite en matière d'élections.

Vous voulez blâmer un employé, celui qui n'a pas transmis en temps utile la décision de la députation aux intéressés ; mais les intéressés n'avaient aucun droit à exercer, et dès lors il était sans importance que la décision leur fût communiquée un peu plus tôt ou un peu plus tard. Celui qui avait un droit à exercer, celui qui avait un recours à former, c'est l'honorable M. Teichman, gouverneur d'Anvers ; votre intention est-elle de blâmer M. Teichman ? Veuillez-vous en expliquer.

M. Dumortier. - Messieurs, j'ai toujours considéré tout ce qui concerne les libertés communales comme l'une des bases principales de notre édifice social et je déclare que ce qui vient de se passer à Berchem me paraît d'une gravité extrême.

Lorsque nous eûmes à faire la loi communale, l'article dont il s'agit ici fut un de ceux qui rencontrèrent la plus vive opposition. La section centrale, dont j'avais l'honneur d'être rapporteur, avait proposé la suppression de cet article parce qu'elle ne reconnaissait pas qu'il fût utile de laisser au gouvernement ni à la députation permanente une intervention dans les élections communales.

Ce n'est que lors de la discussion que cet article a été admis. Mais comment a-t-il été admis ? Il l'a été par une seule considération qui vous a été rappelée tout à l'heure par mon honorable ami, M. de Theux, que le procès-verbal contiendrait les motifs pour lesquels un commissaire extraordinaire était envoyé. Qu'on ne vienne donc pas prétendre que cette disposition ne constitue pas une formalité substantielle. Je dis qu’une élection dans laquelle cette formalité n’est pas remplie, est viciée, entachée de nullité ; que si cette règle essentielle n’est pas observée, alors vous pouvez faire bon marché de vos libertés communales, car il peut dépendre du caprice d'une deputation permanente de supprimer une disposition favorable à la liberté qui se trouve dans la loi et de faire présider tous les collèges électoraux de la province par des commissaires spéciaux, cl, dans ce cas, la loi n'existe plus.

La formalité donl il s'agit est donc substantielle, essentielle, elle forme la base de l'autoriration accordée dans cette circonstance au gouvernement ; et je le répète, lorsque nous discutâmes la loi communale, sans cette stipulation, l'article n'eût jamais été admis.

Maintenant que s'est-il passé ? Les motifs de l'envoi d'un commissaire extraordinaire n'ont pas été insérés dans le procès-verbal ; tout le monde est d'accord sur ce point.

L'honorable M. Loos prétend que si nous avions été en lieu et place, du commissaire extraordinaire, nous aurions dû agir comme lui, ce qui signifie, en bon français, que nous aurions dû nous mettre au-dessus de la loi.

Quand la loi commande, il faut obéir ; il n'appartenait pas à un commissaire spécial, fût-il même substitut du procureur du roi, de se soustraire à l'exécution de la loi. La loi eslinipérative, elle commande, il faut qu'elle soit exécutée.

Cela n'a pas eu lieu dans le cas dont nous nous occupons ; il en résulte que la grande commune de Berchem s'est vu enlever, par l'envoi d'un commissaire extraordinaire, ses libertés communales dans ce qu'elles ont de plus précieux, les élections ; qu'une pression très grande, personne ne peut le méconnaître, a dû s'exercer sur ces élections, et qu'ainsi cette commune s'est trouvée momentanément hors du droit commun.

Mais les choses au moins en sont-elles restées là ? Nullement, à un abus en a succédé un autre ; l'arrêté de la députation, qui doit être envoyé dans les huit jours, n'a été signifié que onze jours après qu'il avait été pris, il en résulte, que les délais sont périmés et que les électeurs ne peuvent plus user du droit de pétition.

L'honorable M. Verhaegen dit : « C'est le gouverneur qui est coupable. » Je ne vois pas, pour ma part, en quoi le gouverneur est coupable dans cette circonstance ; mais ce que je vois, c'est qu'il y a une élection nulle, viciée dans son essence. Remarquez-le bien, vous avez ici à vous prononcer sur un fait qui, s'il se généralisait, serait l'anéantissement de vos libertés communales.

Supposez que les élections se fussent accomplies dans des conditions aussi irrégulières à Anvers, qu'on eût envoyé dans cette ville un commissaire spécial pour présider les élections, que ce commissaire se fût conduit comme se conduit celui qui a été envoyé à Berchem, n'y aurait-il pas eu dans cette ville une explosion générale de mécontentement ? Ne viendrait-on pas vous demander l'annulation d une pareille élection ?

Messieurs, quand il s'agit du principe sacré des élections, surtout en matière de libertés communales, il ne faut pas légèrement passer l'éponge sur des faits de ce genre. Je ne connais ni les candidats qui ont été élus, ni ceux qui ont été écartés ; je ne vois que la liberté communale, et je déclare, que les faits dénoncés sont d’une gravité extrême.

En effet, à deux reprises différentes, les pétitionnaires ont été mis hors du droit ; ils ont été mis hors du droit commun, une première fois quand il s'est agi des élections mêmes, une seconde fois quand il s'est agi de réclamer auprès de la députation contre ce qui s'était fait.

S'ensuit-il qu'il n'y ait plus rien à faire ? Ce serait une grave erreur de le croire.

Et ici, permettez à l'ancien rapporteur de la loi communale de rappeler l'esprit qui a dirigé l'assemblée à cette époque.

Lorsque nous avons fait la loi communale, nous n'avons pas voulu, le Moniteur et le rapport en font loi, laisser au gouvernement un pouvoir illimité en pareille matière ; nous avons voulu circonscrire dans des limites étroites son action sur les résolutions de l'autorité communale et de l'autorité provinciale ; et pourquoi avions-nous agi ainsi ? Parce que nous nous étions dit que si des abus venaient à se commettre, la Chambre était là pour y porter remède.

Il y a donc un remède en pareil cas, c'est une loi. Je laisse à mes honorables collègues, plus au fait que nous de ce qui s'est passé à Berchem, le soin de juger s'il y a lieu à employer ce remède dans le cas actuel ; niais si une proposition de loi était déposée, je le déclare, je n'hésiterais pas un instant à remplir ce que je considérerais comme un devoir, à appuyer cette loi, à voter l'annulation de l'élection.

Voilà, je le repète, le remède que la loi communale a voulu nous offrir contre les abus, c'est donc une erreur de prétendre qu'il n'y a pas de remède ; reste à savoir s'il est utile de l'employer.

M. Osy. - Messieurs, habitant une commune limitrophe de Berchem, j'ai été à même de bien savoir ce qui s'est passé dans cette dernière localité. Nous savions tous d'avance que la lutte serait très vive. Et, en effet, les candidats élus l'ont été à des majorités insignifiantes. Où n'y a-t-il pas lutte, quand il s'agit d'élections pour les Chambres ou pour la commune ?

Il est vrai que la députation permanente a pu s'exagérer peut-être la lutte qui devait avoir lieu à Berchem ; elle a craint peut-être qu'il n'y eût quelque trouble. Sous ce rapport, je ne blâme pas la députation d'avoir fait usaga de l'article 25 de la loi communale ; mais vous conviendrez que l'envoi d'un substitut du procureur du roi, chargé d'un mandat de la députation, doit faire un très grand effet sur les électeurs.

Le principal grief à articuler contre les mesures qu'on a prises à l'égard de la commune de Berchem, c'est que le procès-verbal ne contient pas les motifs pour lesquels la députation avait envoyé un commissaire spécial dans cette localité. C'est là un fait grave.

Un fait plus grave, encore, c'est que la décision de la députation n'a été notifiée aux électeurs que le onzième jour après qu'elle avait été prise.

Je ne viens, pas comme l'honorable M. Verhaegen, dira : C'est la faute du gouverneur ; je crois qu'il a signé la pièce le 10 novembre, elle a été contresignée par le greffier et envoyée par le greffier de la province à la commune ; c'est au ministre à rechercher si c'est le greffier qui a envoyé la pièce trop lard, ou si c'esl le bourgmestre qui ne l'a communiquée aux électeurs que plusieurs jours après l'avoir reçue.

Il n'y a pas de doute que si les électeurs avaient pu connaîtrc la décision de la députation, ils auraient pu éclairer la religion du gouverneur qui, reconnaissant qu'il y avait eu irrégularité grave, aurait usé de son droit de recours au Roi. Voilà ce qui n'a pas pu être fait.

Je me joins à M. Dellafaille pour demander à M. le ministre de rechercher par la faute de qui ce retard a eu lieu, et j'espère que la discussion d'aujourd'hui portera ses fruits et que MM. les gouverneurs n'enverront plus des commissaires spéciaux dans les communes quand ce n'est pas nécessaire, quand il n'y a pas d'excès à craindre. En effet, après l’élection il n'y a eu aucun excès dans la commune de Berchem, tout s'est passé très tranquillement.

Je demande donc l'envoi au ministre de l'intérieur, afin qu'il recherche la cause du retard de la notification de la députation permanente.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Il n'y a pour la Chambre, à mon avis, qu'une seule chose à faire, c'est d'admettre les explications données par le gouvernement.

L'unique grief imputable aux opérations électorales, c'est que le procès-verbal ne mentionne pas les circonstances dans lesquelles l'envoi d'un commissaire a eu lieu. Sans doute, c'est une irrégularité, mais elle n'a point paru à la députation aussi grave pour motiver une annulation.

- Un membre. - Elle se trompe !

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Elle se trompe quant à la nécessité de l'insertion au procès-verbal, mais il n'en résulte pas qu'elle ait dû annuler.

En réalité, il n'y a de blâme à infliger à personne. La députation a usé de son droit.

Et quant au gouverneur, est-il blâmable de n'avoir pas envoyé immédiatement aux intéressés la décision de la députation ?

En aucune façon, car les électeurs n'avaient plus de droits à exercer. Leur droit était épuisé par la réclamation adressée à la députation et sur laquelle celle-ci avait statué. Le gouverneur avait un recours ouvert. en vertu de l'article 46 de la loi ; et s'il n’en a pas usé, c'est qu'il n'a pas cru les circonstances assez graves pour agir.

(page 328) M. Orts. - Messieurs, j'ai une simple observation à faire. Jusqu'à présent, il me paraît que les honorables préopinants sont quelque peu restés à côté de la question.

Le grief capital, le fait vraiment grave, posé vis-à-avis de la commune de Berchem serait celui-ci : la décision par laquelle la députation permanente a validé les élections de Berchem a été notifiée beaucoup trop tard au conseil communal que la loi désigne pour recevoir cette notification. Si l'on avait fait connaître la décision de la députation dans le délai fixé par la loi pour permettre au gouverneur d'exercer son recours près du Roi, il serait arrivé ceci, nous dit-on : les électeurs mécontents auraient été trouver le gouverneur, ils lui auraient expliqué l'aflaire à leur manière, ce qui l'aurait engagé à se pourvoir.

On a privé ces pauvres électeurs du moyen d'obtenir satisfaction, en ne leur faisant connaître la décision de la députation que quand elle avait acquis force de chose jugée. Il faut blâmer le coupable de ce retard : voilà la conclusion. Qui est-il ? On le cherche partout.

Le coupable, messieurs, c'est l'article 46 de la loi communale. Cet article défend de communiquer au conseil communal intéressé une décision de la députation encore susceptible d'être réformée par arrêté royal. Je suis fâché pour la Chambre qu'aucun des honorables membres ayant pris la parole sur ce point, pas plus que M. le ministre de l'intérieur, n'ait songé à lire d'abord le texte que l'on prétendait avoir été violé. Lisons donc cet article 46 ; il est ainsi conçu :

« Le gouverneur peut, dans les huit jours qui suivront celui de la décision, prendre son recours auprès du Roi qui statuera dans le délai de quinzaine à dater du pourvoi.

« L'arrêté royal, ou, s'il n'y a point de pourvoi, la décision de la députation permanente sera immédiatement notifiée par les soins du gouverneur au conseil communal intéressé, etc. »

Ainsi donc le gouverneur ne doit faire notifier la décision de la députation qu'après l'expiration du délai de pourvoi.

Il était impossible, en effet, d'exiger qu'on notifie une décision pouvant encore être changée par arrêté royal, à des gens qui n'ont pas le droit de recours au Roi. La décision doit avoir acquis force de chose jugée pour qu'on la notifie au conseil intéressé, afin que celui-ci l'exécute.

Voilà le texte et l'esprit de la loi, et tout débat sur ce point me paraît tomber à néant.

M. de Theux. - L'honorable M. Orts a raison dans l’interprétation qu'il donne à l'article 46, mais il a tort quand il dit que le seul grief dont on se plaigne soit l'envoi tardif de la décision de la députation permanente aux électeurs de Berchem. Non, là n'est pas le grief ; il consiste en ce que la députation n'a pas consigné les motifs pour lesquels elle envoyait un commissaire spécial pour présider les élections de Berchem, et en ce que le commissaire n'a pas consigné au procès-verbal d'élection les motifs pour lesquels il était envoyé.

La députation, dans sa décision, doit consigner les motifs pour lesquels elle envoie un commissaire, car il ne peut pas dépendre du commissaire d'alléguer les motifs qu'il croit être ceux de sa mission.

C'est la députation permanente, qui use du droit conféré par l'article 25 de la loi communale, qui doit par conséquent motiver sa décision ; le commissaire exécute cette décision en faisant insérer au procès-verbal des élections les motifs de la mission qu'il a reçue.

Voilà l'exéculion de la loi. Si l'on n'agit pas ainsi, l'article 25 de la loi communale ponrraêtre violé tant qu'on voudra, sans qu'il y ait de plainte ou de redressement possible pour ceux qui auront été victimes de la violation de la loi.

M. Dellafaille. - J'ai demandé la parole pour répondre à l'honorable M. Verhaegen. Je dirai que je n'ai nullemcut parlé du droit d'opposition qu'avaient les pétitionnaires contre la décision prise par la députation permanente. J'ai dit seulement que les pétitionnaires avaient le droit de réclamer auprès du gouverneur pour faire rectifier une erreur, s'il y en avait une, et obtenir de ce fonctionnaire qu'il usât de son droit de recours si, mieux éclairé, il le jugeait équitable.

L'honorable M. Verhaegen était bien persuadé aussi qu'en priant M. le ministre de l'intérieur d'adresser un blâme au fonctionnaire qui a négligé de transmettre en temps utile la décision de la députation aux pétitionnaires, ce n'est pas au gouverneur que s'adressait mon observation.

La meilleure preuve qne ce fonctionnaire est irréprochable, c'est qu'aussitôt que les pièces sont arrivées au gouvernement il y a eu décision. Mais je suis surpris que l'honorable M. Verhaegen, qui est habitué à nos rouages administratifs, ne sache pas qu'il y a d'autres fonctionnaires chargés de transmettre les pièces émanées de l'administration. Les fonctionnaires chargés de ce soin sont : le greffier, le commissaire royal, le bourgmestre de la commune. Un de ces fonctionnaires a pu négliger cette transmission. C'est à cette fin que je me suis adressé à M. le ministre de l'intérieur. Je n'ai pas examiné ici quel a été le coupable. Le blâme, messieurs, s'il est prononcé, sera par qui il appartient adressé à qui de droit.

Je ne puis partager l'opinion de l'honorable M. Orts. Le paragraphe 3 de l'article 46 porte :

« Le gouverneur peut, dans les huit jours qui suivront celui de la décision, prendre son recours auprès du Roi qui statuera dans le délai de quinzaine à dater du pourvoi. »

Il y avait huit jours pour transmettre les pièces. Puisque la députation a pris sa décision le 10, pourquoi les pièces n'ont-elles pas été transmises dans le délai pendant lequel le recours était ouvert ? Tous ces délais doivent être rigoureusement observés, tous peuvent être utilement employés pour révéler une erreur, et je crois qu'il est du devoir de la Chambre, n'importe quand, n'importé à quel moment l'erreur a été reconnue, de rendre justice quand justice n'a pas été rendue.

M. Van Overloop. - L'article 46 de la loi communale est formel ; il porte :

« La députation permanente du conseil provincial peut, dans les trente jours à dater de l'élection, soit sur réclamation, soit d'office, annuler par arrêté motivé l'élection pour irrégularité grave. Passé ce délai, l'élection est réputée valide.

« En cas de réclamation de la part des intéressés, ou d'opposition de la part du gouverneur, la députation est tenue de prononcer dans le même délai de trente jours.

« Le gouverneur peut, dans les huit jours qui suivront celui de la décision, prendre son recours auprès du Roi, qui statuera dans le délai de quinzaine à dater du pourvoi.

« L'arrêté royal, ou, s'il n'y a point eu pourvoi, la décision de la députation permanente, sera immédiatement notifiée, par les soins du gouverneur, au conseil communal intéressé, qui, en cas d'annulation, convoquera les électeurs endéans les quinze jours, à l'effet de procéder à de nouvelles élections. »

Je ne vois nullement qu'il soit dit dans l'article 46 que la députation permanente, après avoir statué sur une réclamation, doit notifier sa décision, dans un délai de huit ou de dix jours, aux personnes qui ont réclamé.

Il serait peut-être convenable que semblable notification eût lieu, mais enfin la loi ne la prescrit pas. Qui donc peut-on blâmer du chef de cette omission ?

Le gouverneur avait le droit d'exercer son recours au Roi dans la huitaine du jour de la décision ; il n'a pas usé de ce droit ; je ne connais pas ses motifs ; mais, évidemment, le gouverneur ne mérite ni blâme direct ni blâme indirect pour n'avoir pas fait notifier, dans le délai de huit ou de dix jours, ce que la loi ne lui ordonnait pas de faire notifier.

M. Verhaegen. - Un seul mol en réponse à l'honorable M. Dellafaille. Il y avait d'abord beaucoup d'irrégularités. On les abandonne successivement...

M. de Theux. - Pas du tout !

M. Verhaegen. - On n'est même plus d'accord ; car, en définitive, que reste-t-il ? D'après l'honorable M. Van Overloop, il ne resterait qu'un manque de convenance. Il eût été convenable que l'on donnât connaissance de la décision de la députation aux intéressés. Cela n'est pas possible ; la loi s'y oppose. Donc il n'y avait pas convenance à le faire. Ainsi, ce qui était le plus grave dans l'opinion de l'honorable M. Dellafaille et de son honorable ami M. Osy, porte à faux.

Que reste-t-il donc ? Que l'on a omis de mentionner dans le procès-verbal les motifs de la désignation du commissaire spécial ; mais la loi ne l'exige pas ; elle exige seulement qu'il soit fait mention des circonstances dans lesquelles cette désignation a eu lieu. Or, la mention au procès-verbal de la présence d'un commissaire suffit pour satisfaire à la prescription de la loi.

Mais on réclame par ce motif : la députation qui avait de bonnes raisons pour maintenir sa décision ne se déjuge pas. Le gouverneur est là ; il assiste à la délibération, il concourt à la décision de la députation permanente. S'il y avait des motifs si graves pour attaquer cette décision, il devait le faire d'office, sans y être convié par les intéressés. Si une irrégularité si grave a été commise, c'est par le fait du gouverneur, qui présidait la députation, et qui devait, dans l'intérêt de la loi et de la chose publique, s'adresser au gouvernement pour faire annuler la décision. Si donc vous avez quelqu'un à blâmer, je n'en fais pas, moi, la proposition, ce vote de blâme doit s'adresser au gouverneur.

M. Malou. - Je ne veux pas prolonger ce débat ; cependant je ne puis admettre avec l'honorable préopinant qu'on abandonne successivement les irrégularités qui avaient été signalées et que l'on reconnaisse la régularité de tout ce qui a été fait.

Je m'étonne, lorsque la liberté des élections (la plus précieuse de toutes, parce qu'elle est la sanction et la garantie de toutes les autres) est en cause, que l'on cherche à amoindrir des griefs aussi sérieux, aussi réels que ceux qui se sont produits dans cette discussion.

A une autre époque, lorsqu'il s'agissait de donner à un fonctionnaire amovible le droit de faire examiner par une autorité élective si un électeur était dûment ou indûment inscrit, l'honorable M. Verhaegen y voyait une atteinte à la liberté électorale. Aujourd'hui, c'est une chose toute simple aux yeux de certains membres de la Chambre, que, malgré les dispositions de la loi électorale pour l'élection des membres des Chambres, et des lois provinciale et communale qui ont réglé la composition des bureaux électoraux, la députation permanente fasse (page 329) présider les élections par un substitut du procureur du roi, escorté de quelques gendarmes, pour que la liberté électorale soit pleinement garantie.

M. Verhaegen. - Je n'ai pas dit un mot de cela.

M. Malou. - Vous ne l'avez pas dit directement ; mais en vous expliquant sur les griefs, vous avez dissimulé, vous avez écarté du débat le véritable grief, l'atteinte portée à la liberté électorale. C'est sur ce point que le débat doit être rétabli.

M. Frère-Orban. - Je demande la parole.

M. Malou. - L'article 25 de la loi communale a-t-il, oui ou non, été violé ? Et dans un pays constitutionnel n'est-ce pas toujours une chose grave que la violation d'une loi ?

Je n'examine pas si la Chambre peut casser une décision semblable. Nous sommes tous d'accord qu'elle ne le peut pas. Mais lors même que la décision d'une autorité inférieure subsiste, la Chambre a un devoir à remplir, elle a un droit à exercer : c'est d'examiner si la loi n'a pas été violée. Or, je dis qu'elle l'a évidemment été.

La députation permanente pouvait envoyer un commissaire pour présider l'élection. Je n'examine pas pour le moment si un magistrat amovible pouvait être convenablement nommé. Mais à quelles conditions ? Ce droit n'est pas absolu. Il y a une condition légale pour l'exercice de ce droit, et cette condition légale, c'est que les circonstances extraordinaires, qui motivent l'envoi de ce commissaire, soient relatées dans le procès-verbal de l'élection, c'est qu'elles soient connues des électeurs auxquels on applique ce régime extraordinaire. Cela a-t-il été fait ? Non, de l'aveu de tous, cela n'a pas été fait ; et si cela n'a pas été fait, c'est une violation de la loi dont la Chambre a pu, a dû à bon droit se préoccuper.

M. Frère-Orban. - Messieurs, la discussion à laquelle nous assistons nous rappelle à tous involontairement une discussion qui a eu lieu au commencement de cette session, à propos de l'élection d'Anvers.

A cette époque on signalait à la Chambre des irrégularités extrêmement graves. Des individus sans aucun titre, des non-électeurs avaient pris part au scrutin. Des individus condamnés à des peines afflictives et infamantes étaient venus coopérer à l'élection ; des individus avaient voté deux fois. L'élection dépendait de 2 voix ! Qu'importait ? C'était peu de chose ; c'était insignifiant. Les honorables membres de la Chambre qui s'indignent aujourd'hui si fort, ont trouvé que des irrégularités de ce genre ne valaient pas la peine de s'y arrêter.

Mais aujourd'hui ils nous signalent une affaire extrêmement grave qui peut compromettre le sort des libertés communales ! Il s'agit de quoi ? Je le demande aux honorables membres eux-mêmes. Ils ne le savent pas.

L'honorable M. Dellafaille a fait un grief immense de ce que la notification de la décision de la députation permanente validant l'élection, n'avait pas été faite dans les dix jours, d'où il résultait que ces malheureux électeurs avaient été privés du droit de réclamer.... avaient été privés d'un droit qui ne leur appartenait pas.

Et bientôt l'honorable M. Dellafaille, qui a longtemps participé à l'administration de la province d'Anvers, comme il nous l'a appris, mais qui a oublié, dans le cours de ses longues études, de lire l'article 46 de la loi, est averti que ce grief n'est'pas soutenablce Il n'y avait pas de décision à notifier avant l'expitation du délai pour le recours au Roi par le gouverneur, et c'est précisément ce qui a été fait.

Un second grief, c'est qu'on n'a pas inséré au procès-verbal les motifs qui avaient engagé la députation permanente à nommer un commissaire spécial. Mais encore une fois, la loi n'exige rien de semblable. La loi se borne à dire que la députation permanente pourra, dans des circonstances extraordinaires, dont il sera fait mention au procès-verbal, nommer un commissaire spécial.

M. Malou. - Cela a-t-il été fait ?

M. Frère-Orban. - Un instant. Qu'entend la loi par ces mots : « circonstances extraordinaires dont il sera fait mention au procès-verbal » ? En quels termes cela se trouve-t-il mentionné au procès-verbal ?

Le savez vous ?

M. Coomans. - Il n'y a rien du tout au procès-verbal.

M. Frère-Orban. - Vous dites qu'il n'y a rien au procès-verbal. Eh bien, moi, sans avoir vu le procès-verbal plus que vous, je dis qu'il y a quelque chose. Il y a la mention que M. un tel, substitut du procureur du roi, vient présider l'élection en vertu d'une décision prise par la députation permanente du conseil provincial conformément à l'article 25 de la loi communale. Est-ce que cela satisfait, oui ou non, aux prescriptions de la loi ?

- Plusieurs membres. - Non ! non !

M. Frère-Orban. - Certainement, vous êtes à la recherche d'une irrégularité grave, d'une monstruosité, il faut bien tâcher de la saisir, je le comprends.

Mais nous nous adressons ici purement et simplement au sens commun : lorsque l'on mentionne au procès-verbal la décision en vertu de laquelle un tel est nommé pour présider aux élections en raison de circonstances extraordinaires, a-t-on satisfait au vœu de la loi ?

Supposons que cette question soit discutable, je veux vous faire cette concession. Mais il y a un juge naturel, désigné par la loi pour lever le doute : c'est la députation permanente. La députation, après avoir nommé un commissaire spécial à raison de circonstances extraordinaires, et les élections ayant eu lieu, on s'est pourvu en annulation precisément parce que mention des motifs de l'envoi de ce commissaire spécial n'avait pas été faite au procès-verbal ; et ce même corps a décidé souverainement sur ce point. Or, messieurs, les députations permanentes émanant du principe électif, sont aussi les gardiennes de nos libertés communales. La députation permanente a décidé qu'il avait été suffisamment satisfait aux prescriptions de la loi et elle a rejeté le pourvoi.

Voilà la monstruosité ; il n'y a pas autre chose.

Cependant, comme ces énormes griefs s'étaient successivement évanouis, l'honorable M. Malou en a découvert un autre. Celui-là n'avait pas encore paru sous cet aspect. On a nommé comme commissaire spécial un substitut du procureur du roi ! Voilà ce qu'il y a de grave. Un homme qui ne paraît que sous la forme d'un réquisitoire, comme le dit l’honorable M. Dellafaille, est arrivé dans la commune ; il a intimidé ces bons paysans d'une petite commune, où il y a un petit nombre d'électeurs probablement. (Interruption.) Permettez, messieurs ! il faut bien le dire : c'est ce qu'il y a de ridicule dans cette affaire. Dans une commune de 5,000 à 6,000 âmes, aux portes d'Anvers, les électeurs ont été épouvantés par la présence du substitut du procureur du roi !

Messieurs, cela est-il bien sérieux, et mérite-t-il que la Chambre, qu'un parlement s'occupe, pendant une séance tout entière, à discuter sur d'aussi misérables griefs ? La seule chose qui convienne à la dignité de la Chambre, n'est-ce pas de passer purement et simplement à l'ordre du jour ? J'en fais formellement la proposition.

M. de Theux. - La violation d'une loi n'a rien de plaisant ni de risible. Or, l'article 25 de la loi communale est formel ; M. le ministre de l'intérieur a eu la loyauté de le reconnaître sans détour au début de cette discussion, ce dont je le remercie, et j'espère que cette reconnaissance sera unanime pour que de pareils faits ne se produisent plus à l'avenir. L'article 25 doit être observé ponctuellement sous peine de voir nos libertés communales compromises.

Permettez-moi encore un mot de réponse sur un fait étranger au débat actuel, et qui a été rappelé par l'honorable préopinant. Lorsqu'il s'est agi de l'élection du district d'Anvers, j'ai pris part à la discussion,"et j'ai soutenu, comme je l'ai fait dans toutes les occasions, qu'en vertu de la permanence des listes il n'y avait pas à attaquer le résultat de l'élection d'Anvers. Mais il y a un autre fait, que l'honorable M. Frère a oublié : c'est qu'il a voté pour l'annulation de l'élection d'Anvers sur la simple allégation de faits qui n'étaient pas prouvés.

M. Devaux. - Ils étaient prouvés.

M. de Theux. - De faits au sujet desquels il n'a pas même demandé une enquête. Ces faits tendaient à annuler une élection qui lui déplaisait ; il les a admis pour constants.

M. Frère-Orban. - Ces faits ont été prouvés.

- La discussion est close.

L'ordre du jour est mis aux voix par appel nominal et adopté par 40 voix contre 33.

Un membre (M. Van Overloop) s'est abstenu.

Ont voté l'adoption : MM. Delehaye, de Moor, de Perceval, de Renessc, de Royer, de Steenhault, Devaux, Dubus, Frère-Orban, Goblet, Lebeau, Le Hon, Lesoinne, Loos, Maertens, Mascart, Moreau, Orts, Pierre, Prévinairc, Ch. Rousselle, Sinave, Tesch, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Vandenpeereboom, Van Hoorebeke, Van Iseghcm, Verhaegen, Vervoort, Veydt, Allard, Ansiau, Anspach, Calmeyn, Coppieters 't Wallant, Dautrebande, de Baillet-Latour, de Bronckart et Delfosse.

Ont voté le rejet : MM. Dechamps, de Decker, de Haerne, de Liedekerke, Dellafaille, F. de Mérode, de Mérode-Westerloo, de Naeyer, de Portemont, de Ruddere de Te Lokeren, Desmaisières, de Theux, de Wouters, Dumortier, Jacques, Lambin, Landeloos, Magherman, Malou, Matthieu, Mercier, Osy, Pirmez, Rodenbach, Tack, Thienpont, Vanden Branden de Reeth, Vander Donckt, Van Renynghe, Wasseigc, Boulez, Brixhe et Coomans.

M. Van Overloop. - Messieurs, je n'ai pas voté pour l'ordre du jour parce que, à mes yeux, il est évident que l'article 25 de la loi communale a été violé et que je ne voulais pas déclarer d'une manière implicite, en votant pour l'ordre du jour, que cet article n'a pas été violé ! Je n'ai pas, d'un autre côté, voté contre l'ordre du jour parce que l'adoption de l'ordre du jour aurait pu entraîner le renvoi à M. le ministre de l'intérieur avec demande d'explications et que les explications qui ont été données m'ont paru suffisantes.

Ordre des travaux de la chambre

M. le président. - Nous avons maintenant le projet de loi interprétatif de l'article 13 du décret du 20 juillet 1831 sur la presse.

M. le ministre des finances (M. Liedts). - Messieurs, la semaine dernière j'avais offert à la Chambre de remplacer mon honorable collègue M. le ministre de la justice, dans la discussion de ce projet ; depuis lors, l'honorable M. Orts a déposé sur le bureau une proposition de loi toute nouvelle, qui est l'inverse du projet du gouvernement. Cela me fait croire que la discussion prendra de grandes proportions. Dans tous les cas, nous n'avons plus aujourd'hui le même motif de ne pas attendre M. le ministre de la justice : la Chambre n'est plus exposée à avoir des séances blanches, puisqu'elle a à l'ordre du jour le budget des travaux publics.

Aux termes de la loi de comptabilité, les budgets doivent être déposés tous les ans au mois de mars, et il me semble que dès lors la Chambre doit, autant que possible, les voter avant la fin de l'année. On accuse quelquefois le gouvernement de ne pas aller assez vile, il ne faut pas qu'on puisse adresser le même reproche à la Chambre. Je demande donc que le budget des travaux publics soit mis à l'ordre du jour avant (page 330) le décret sur la presse. Si cependant la Chambre décidait le contraire, je suis à sa disposition.

- La proposition de M. le ministre des finances est mise aux voix et adoptée.

Rapports sur des pétitions

Vote sur les conclusions de la commission qui a examiné la pétition relative àn la boulangerie

M. le président. - La commission propose le dépôt au bureau des renseignements.

- Cette proposition est adoptée.


M. Allard, rapporteur. - « Par pétition sans date, le sieur Louis-Joseph Houssoy, milicien de la classe de 1843, prie la Chambre de lui faire obtenir son congé. »

Le pétitionnaire sollicite son congé pour pouvoir émigrer ; le gouvernement ne pouvant faire droit à pareille demande, votre commission vous propose en conséquence l'ordre du jour.

- Adopté.


M. Allard, rapporteur. - « Par pétition datée d'Ostende, le 21 février 1854, le sieur Dehaes, sergent au premier bataillon du septième régiment de ligne, réclame l'intervention de la Chambre afin d'être autorisé à prendre du service en Turquie, pour la durée de la guerre. »

Messieurs, le gouvernement ne pouvant sans violer notre neutralité qui a été garantie par la Russie, accéder à la demande du pétitionnaire, votre commission des pétitions a l'honneur de vous proposer l'ordre du jour. »

- Adopté.


M. Allard, rapporteur. - « Par pétition datée d'Habay-la-Vieille, le 1er mars 1854, le sieur Gilson, manouvrier à Habay-la-Vieille, réclame l’intervention de la Chambre pour que son fils, milicien de l’année 1851, qui a obtenu un congé illimité, soit autorisé à l'accompagner en Amérique où il va s'établir. »

La demande du pétitionnaire ayant déjà été refusée par le département de la guerre, votre commission a l'honneur de vous proposer l'ordre du jour. »

- Adopté.


M. Allard, rapporteur. - « Par pétition datée de Mons, le 17 mars 1854, la députation permanente du conseil provincial du Hainaut réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir la classification des routes et les indemnités qui sont dues à cette proovincc en compensation de la perte du produit de ses routes pendant les années les plus productives. »

Messieurs, la réclamation de la députaiion permanente du conseil provincial de la province de Hainaut a pour fondement le droit et l'équité. En effet, la classification des routes est prescrite par l'article 3 du décret du Congrès national, du 6 mars 1831, et par l’article 78 de la loi provinciale.

A diverses reprises la députation permanente a transmis au gouvernement les vœux exprimés par le conseil provincial, pour que le projet de cette classification soit définitivement élaboré, et a exposé en même temps les embarras financiers de la province.

La fâcheuse situation financière de cette province, messieurs, ne fait que l'aggraver depuis dix ans. A mesure que les charges s'y sont multipliées, qu'elle a dû pourvoir à de nouveaux besoins, supporter des dépenses obligatoires, s'imposer des sacrifices pour suivre et réaliser de nombreuses et importantes améliorations, ses ressources ont été successivement en décroissant ; et elle a vu jusqu'ici lui échapper la ressource sur laquelle elle n'a cessé de compter, la classification des routes, opérée suivant les règles d'une équitable justice.

Le gouvernement ne pouvant plus longtemps retarder l'accomplissement d'une obligation légale qui lui est imposée, votre commission a l'honneur, messieurs, de vous proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre des travaux publics, avec demande d'explications avant ou pendant la discussion de son budget. »


M. Allard, rapporteur. - « Par pétition datée de Gand, le 6 avril 1854, le sieur Bergmans, sous-lieutenant pensionné, prie la Chambre de lui faire délivrer un extrait authentique du livre de punitions, en ce qui le concerne. »

Messieurs, le département de la guerre refuse de faire droit à la demande du pétitionnaire, parce qu'il n'est pas d'usage de délivrer des documents de l'espèce.

Une circulaire émanée du ministre de la guerre, en date du 3 juin 1846, interdit à tous les chefs militaires de délivrer les extraits de punitions à aucune autorité étrangère au service militaire, ni aux intéressés eux-mêmes, sans autorisation du département de la guerre.

Cette circulaire, dit le pétitionnaire, pourrait jusqu'à un certain point justifier le refus de M. le ministre de la guerre, si, dans la pratique, elle n'était pas manifestement en opposition aux articles 839 et suiant du Code de procédure civile portant : « Condamnation est par corps, contre tout dépositaire d'actes ou registres publics, qui refuseraient d'en délivrer des copies ou extraits aux intéressés, etc. »

M. le ministre refusant de faire droit à la demande du pétitionnaire, votre commission estime, qu'il y a lieu de passer à l'ordre du jour sur cette pétition.

- Adopté.


M. Allard, rapporteur. - « Par pétition datée de Namur, le 8 juin 1854, le sieur Norduae présente des observations sur la nécessité d'augmenter la ration de vivres qui est allouée aux soldats. »

Le pétitionnaire expose à la Chambre que la ration de vivres allouée aux soldats ne suffit pas ; que le peu de solde qu'ils reçoivent, après déduction faite pour le payement des aliments, est trop faible prix pour qu’ils puissent obtenir une nourriture autre que celle qui leur est fournie par l'ordinaire de leur corps.

Votre commission, messieurs, est bien persuadée que si telle était la position de nos braves soldats, le département de la guerre n’hésiterait pas à s’adresser à la législature pour la faire changer ; toutefois, eu égard aux bonnes intentions du pétitionnaire, elle a l’honneur de vous proposer, messeurs, le rencoi de cette pétition à M. le ministre de la guerre.

- Adopté.


M. Allard, rapporteur. - « Par pétition datée d'Anvers, le 18 novembre 1854, la dame Vanderstappen demande que son fils Pierre-Augustin, qui appartient à la division de discipline, soit renvoyé dans ses foyers. »

La pétitionnaire invoque sa misère, et les bons et loyaux services de son mari, décédé sergent au deuxième régiment d'artillerie, pour obtenir que son fils, qui est depuis trois années incorporé dans la compagnie de discipline, soit renvoyé dans ses foyers. »

Accueillir une pareille demande, messieurs, ce serait encourager les infractions aux lois et règlements militaires.

Votre commission a l'honneur de vous proposer l'ordre du jour.

- Adopté.


M. Allard, rapporteur. - « Par pétition, datée de Zonnebeke, le sieur Accou demande que son fils Ivo ; qui a été incorporé dans la compagnie de discipline, soit renvoyé dans ses foyers. »

Le pétitionnaire expose à la Chambre, que son fils a eu le bras droit cassé, à l'âge de 13 ans, et que, sous prétexte qu'il s'est extropié lui-même pour étuder le service militaire, il a été envoyé à la compagnie de discipline. »

Aucune pièce ne justifie l'allégation du pétitionnaire ; toutefois, votre commission vous propose le renvoi de cette pétition à M. le ministre de la guerre.

- Adopté.

La séance est levée à 4 heures et demie.