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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 6 février 1855

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1854-1855)

(Présidence de M. Delfosse.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 663) M. Maertens procède à l'appel nominal à 3 heures.

M. Dumon donne lecture du procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. Maertens présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.

« Le sieur de Valkeneer propose des dispositions relatives au stage des aspirants aux fonctions de notaire et au grade de candidat notaire. »

- Renvoi à la commission qui sera chargée d'examiner le projet de loi concernant les jurys d'examen.


« Le sieur Bounal demande que les avantages accordés au transport des charbons destinés à l'exportation ne soient supprimés qu'à partir du 1er janvier 1856, ou tout au moins au 1er juillet prochain. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du rapport sur des pétitions concernant l'abaissement du prix des charbons.


« Les conseils communaux de Burght et de Schoore demandent qu'il y ait autant d'écoles vétérinaires, d'agriculture et d'horticullure dans les provinces flamandes que dans les provinces wallonnes, que l'enseignement y soit donné dans la langue maternelle et que si, pour l'une ou l'autre branche de l'enseignement, on n'établissait qu'une seule école pour tout le pays, les élèves y reçoivent les leçons dans la langue parlée dans leurs provinces. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur l’enseignement agricole.


« Le sieur Greefs demande qu'on lut fasse connaître la suite qui a été donnée à sa pétition dont la Chambre a ordonné le renvoi M. le ministre de la justice. »

- Renvoi à la section des pétitions.


« Plusieurs cultivateurs et marchands d'animaux domestiques à Coolscamp et dans les communes environnantes, demandent que le sieur Pierre Roode, vétérinaire non diplômé, soit admis à continuer l'exercice de ses fonctions. »

- Même renvoi.

Projet de loi accordant un crédit supplémentaire au budget des non-valeurs et remboursements

Rapport de la section centrale

M. de Renesse. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale sur le crédit supplémentaire de 47,851 fr. au budget des non-valeurs pour l'exercice 1854.

- La Chambre ordonne l'impression de ce rapport et le met à la suite des objets à l'ordre du jour.

M. de Renesse. - Par pétition du 29 janvier, l'administration communale d'OEudeghien demande que les habitants de cette commune, dont les récoltes on été détruites en juillet 1853, soient admis à participer au crédit supplémentaire destiné à payer des indemnités de ce chef.

Comme il est fait droit à la demande des pétitionnaires par le projet de loi sur lequel je viens de déposer le rapport, la section centrale conclut au dépôt sur le bureau pendant la discussion de ce projet et ensuite le renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Ces conclusions sont adoptées.

Projet de loi portant le budget des non-valeurs et remboursements de l'exercice 1856

Dépôt

Projet de loi portant le budget du ministère des affaires étrangères de l'exercice 1856

Dépôt

Projet de loi portant le budget du ministère des finances de l'exercice 1856

Dépôt

Projet de loi portant le budget du ministère des travaux publics de l'exercice 1856

Dépôt

M. le ministre des finances (M. Liedts). - Messieurs, la loi sur la comptabilité de l'Etat veut que les budgets soient déposés dix mois au moins avant l'ouverture de l'exercice. En exécution de cette disposition et d'après les ordres du Roi, j'ai l'honneur de déposer :

Le budget des non-valeurs et remboursements ;

Le budget du ministère des affaires étrangères ;

Le budget du ministère des travaux publics ;

Le budget du ministère des finances pour l'exercice 1856 ;

Les autres budgets seront déposés successivement.

- Il est donné acte à M. le ministre de la présentation de ces projets de loi.

La Chambre en ordonne l'impression et la distribution et les renvoie à l'examen des sections.

Pièces adressées à la chambre

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Conformément au désir qui en a été exprimé hier par la Chambre, j'ai l'honneur de déposer les pièces relatives à l'incident dont il a été question hier concernant la grande compagnie du Luxemhourg. Ces pièces consistent en :

1° La lettre qui a été adressée au public par l'un des principaux actionnaires, M. Charles Lyall ; on y a joint la traduction de la brochure ;

2° Une traduction du compte rendu du meeting (d'après le journal « Herapath »), qui a eu lieu à Londres le 19 décembre dernier ;

3° Un compte rendu, également traduit, du meeting qui a aussi eu lieu à Londres le 19, d'après le « Railway Times » ;

4° Un rapport adressé à l'assemblée des actionnaires qui doit avoir lieu le 13 février et les conclusions ainsi que les réflexions qui ont été faites à ce sujet par un journal de Londres, le « Railway Times ».

M. Malou. - Je demande que la Chambre ordonne l'impression et la distribution de ces pièces.

M. Coomans. - Dans les Annales parlementaires.

- Plusieurs membres. - Non ! non ! Comme pièces de la Chambre.

M. Coomans. - Si je ne me trompe, les pièces de la Chambre ne sont imprimées qu'à un nombre restreint d'exemplaires, tandis que les Annales parlementaires sont répandues en Belgique et à l'étranger.

M. Dumortier. - J'avais aussi reçu les principaux documents relatifs à cette affaire si sérieuse.

J'entends que la plupart de ces pièces ont été traduites par M. le ministre des travaux publics. Cependant je ne sais si dans ces traductions se trouve celle du compte rendu du « Railway-Reform ». Si elle n'y était pas, je demanderais qu'elle y fût jointe. Si M. le ministre n'avait pas reçu ce compte rendu, je pourrais le lui remettre.

Quant à l'impression, je viens l'appuyer de tous mes moyens. Je crois qu'il serait bon d’imprimer ces pièces et dans le Moniteur et comme pièces de la Chambre.

Mais je fais la motion formelle que dans les Documents parlementaires le texte anglais soit imprimé en regard de la traduction ; car dans la traduction il peut y avoir des expressions sur lesquelles on peut varier, et il importe que dans une affaire aussi grave, les personnes qui n'ont pas les documents que je possède, puissent aussi prendre connaissance des originaux, que j'ai sous les yeux. Quant aux Annales parlementaires, il deviendrait inutile d'y insérer le texte anglais, mais je tiens à ce que dans les Documents parlementaires on imprime le texte, indépendamment de la traduction qui nous est donnée par le gouvernement.

Messieurs, cette affaire est d'une gravité extrême et la Chambre aura à voir si elle n'a pas à ouvrir une enquête sur ce point et surtout si, lorsque cette même société viendra nous demander des prolongations de délai ou d'autres faveurs quelconques, nous ne devrons pas exiger des explications claires et positives sur les faits qui ont été allégués.

M. Coomans. - Messieurs, je n'ajouterai qu'un mot : je propose à la Chambre de prier le gouvernement de faire distribuer par l'intermédiaire de notre agent à Londres un millier au moins d'exemplaires dans la capitale de l’Angleterre.

Puisqu'il est évident qu'on a trompé et voté les actionnaires étrangers, il faut qu'on les mette à même de rechercher les coupables.

Cette proposition s'applique à toutes les publications que nous pourrons décréter au sujet de cette scandaleuse affaire.

- La proposition de M. Dumortier est mise aux voix et adoptée.

En conséquence, la Chambre décide que les deux textes seront imprimés dans les Documents parlementaires, et le texte français seul dans les Annales parlementaires.

Rapports de pétitions

M. Coomans. - Les membres des conseils communaux de Baelen et d'Echtel, ainsi qu'un grand nombre d'habitants de Beverloo et de Quaedmechelen, se plaignent de la charge des logements militaires qu'ils supportent illégalement depuis 1835, pendant trois mois de l'année. Ils demandent la suppression de cet impôt ou, tout au moins, une indemnité raisonnable, tant pour le passé que pour l'avenir. Les faits qu'ils allèguent à l'appui de leurs réclamations méritent de fixer toute l'attention de la Chambre.

Les manœuvres du camp de Beverloo coïncidant avec les travaux de la moisson, on comprend sans peine le tort que causent aux cultivateurs les cantonnements de la cavalerie. Forcés de mettre leurs demeures, leurs écuries et parfois leurs granges à la disposition des troupes, les cultivateurs doivent négliger une besogne urgente et consacrer à leurs hôtes le temps que la récolte réclame impérieusement.

Ensuite, ils ne reçoivent qu'une prétendue indemnité de 74 centimes par homme et par jour, soit 53 centimes pour la nourriture et 21 (page 664) centimes pour le logement. C'est à peine la moitié de la dépense qui leur est imposée. La cherté des vivres est telle que la quantité d'aliments déterminée par les règlements militaires coûte 1 fr. 25 cent, environ, sans y comprendre le café, le beurre, le lait, les œufs et autres menus objets que consomme le soldat, traité comme un membre de la famille.

Les officiers ne payent rien pour leur logement, en vertu d'un arrêté royal du 3 août 1814. Cependant ils occupent les chambres les mieux meublées et donnent lieu à des dépenses inévitables. L'abus est réel et nous jugeons urgent d'y mettre un terme.

La journée d'entretien des prisonniers et des vagabonds est officiellement évaluée à un franc et au-delà. Est-il juste de n'évaluer qu'à la moitié de cette somme la journée d'entretien d'un défenseur de la patrie ? Est-il équitable d'imposer pendant 50 à 90 jours aux habitants de quatre ou cinq communes une charge accablante dont toutes les autres communes belges sont délivrées ? La négative n'est pas douteuse, aussi estimons-nous que cet état de choses doit cesser immédiatement.

La Chambre a déjà renvoyé au département de la guerre, maintes réclamations de ce genre, en exprimant le vœu qu'il y fût fait droit. Nous avons l'honneur, messieurs, de vous proposer le même renvoi pour les pétitions, dont il s'agit, avec demande d'explications promptes et complètes. Les habitants des communes injustement frappées de logements militaires invoquent les principes les plus élevés de la législation belge. Vous ne resterez pas sourds à leurs plaintes et vous examinerez jusqu'à quel point ils ont droit à l'indemnité, qu'ils réclament pour les pertes qu'ils ont déjà essuyées.

- Les conclusions de la commission des pétitions sont mises aux voix et adoptées.

Projet de loi approuvant la convention d'échance d'un terrain avec la ville de Mons

Discussion générale

M. le président. - L'article unique du projet de loi est ainsi conçu :

« La convention provisoire, conclue le 9 novembre 1854, pour l'échange d'un terrain de l'Etat avec un terrain appartenant à la ville de Mons et destiné à faciliter le service de la maison de sûreté de cette ville, est approuvée. »

M. Lelièvre. - Il est incontestable que la convention qui est soumise à la Chambre est assez onéreuse pour l'Etat qui fait des sacrifices dont il ne reçoit pas la compensation. En 1851, le gouvernement a aussi arrêté avec la ville de Gand une convention par laquelle le gouvernement a fait des concessions importantes. Il en est de même à l'égard des villes d'Ypres, Mariembourg, Philippeville, etc. Or, lorsqu'on traite si largement avec certaines villes, il serait équitable d'agir dans les mêmes vues à l'égard des diverses cités du royaume. Cependant en ce qui concerne la ville de Namur, le département de la guerre entre autres, est loin de se montrer aussi bienveillant, puisqu'on veut ni plus ni moins la déposséder des terrains dont elle jouit depuis un temps immémorial.

Si donc je donne mon assentiment au projet de loi, c’est dans l’espoir que les divers départements ministériels ne traiteront pas certaines villes avec rigueur, alors qu'ils font à d'autres d'importants avantages.

- La discussion est close.

Vote de l’article unique

Il est procédé à l'appel nominal sur le projet de loi.

69 membres ont répondu à l'appel. Tous ont répondu oui.

En conséquence le projet de loi est adopté, il sera transmis au Sénat.

Ont répondu oui : MM. de Sécus, Desmaisières, de Theux, da T'Serclaes, Devaux, de Wouters, Dumon, Dumortier, Frère-Orban, Goblet, Jacques, Jouret, Julliot, Lambin, Lange, Laubry, le Bailly de Tilleghem, Lebeau, Lelièvre, Lesoinne, Maertens, Malou, Manilius, Mascart, Matthieu, Mercier, Moreau, Osy, Pirmez, Rousselle, Sinave, Tack, Tesch, Thiéfry, Thienpont, T’Kint de Naeyer, Tremouroux, Van Cromphaut, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Vermeire, Visart, Wasseige, Allard, Anspach, Closset, Coomans, Coppieters 't Wallant, Dautrebande, David, de Bronckart, de Haerne, de La Coste, de Liedekerke, Deliége, Dellafaille, de Naeyer, de Perceval, de Pitteurs, de Portemont, de Renesse, de Royer, de Ruddere de Te Lokeren et Delfosse.

Ordre des travaux de la chambre

M. le président. - D'après une lettre qui vient de parvenir au bureau, M. le ministre de l'intérieur, retenu près du lit d'un ami mourant, ne pourra être à Bruxelles demain. Nous ne pourrons donc aborder demain la discussion du projet de loi sur la police sauiluire des animaux domestiques.

Les autres projets à l'ordre du jour concernent aussi le département de l'intérieur.

- Un membre. - Et le projet de loi interprétatif du décret sur la presse ?

M. le président. - Le rapport de la commission chargée d examiner les amendements de M. Verhaegen et autres n'est pas prêt.

M. Malou. - On convoquera la commission dès que l'examen en section du projet de loi sur les jurys d'examen sera terminé.

M. le président. - La présence du ministre de l'intérieur étant nécessaire pour la discussion des projets de lois à l'ordre du jour, nous ne pourrons nous occuper demain que de pétitions.

Je prie la commission qui est chargée d'examiner les amendements au projet de loi sur la presse, à s'en occuper le plus tôt possible.

M. de Theux. - J'espère pouvoir convoquer après-demain la commission. Plusieurs sections n'ont pas terminé l'examen du projet de loi sur les jurys d'examen ; il est donc impossible que la commission se réunisse plus tôt.

- La Chambre fixe la séance de demain à 3 heures.

Rapports sur des pétitions

M. Julliot, rapporteur. - Messieurs, par pétition datée de Bruxelles le 21 mars 1854, les sieurs de Pitteurs-Hiegaerts et Ledocte, vice-président et secrétaire de la société centrale d'agriculture demandent :

1° Qu'il soit accordé une réduction de 50 p. c. sur les prix des transports par les chemins de fer de l'Etat des matières fertilisantes et des amendements spécifiés dans l'arrêté royal du 6 octobre 1850 ;

2° Que les tuyaux de drainage soient transportés sur nos chemins de fer avec une réduction de 25 p. c. au moins ;

3° Que les expéditions de tous ces objets puissent se faire au même prix, que la charge d'un waggon soit complète ou qu'elle ne le soit pas.

Messieurs, si les signataires de cette pétition s'étaient borné à demander qu'à l'occasion de la révision des tarifs des chemins de fer de l'Etat, on veuille rechercher, avec soinu, si, en transférant ces marchandises d'un tarif à un autre moins élevé, le trésor de l'Etat ne pourrait pas récupérer par la quantité croissante des transports ce qu'il aurait perdu par la diminution dans les prix, en faisant toutefois quelque démonstration à cet égard, la proposition aurait été beaucoup plus discutable qu'elle ne l'est dans les termes où elle se présente, car la pensée qui a présidé à la rédaction de cette pièce, la voici : L'intérêt qui s'attache à l'agriculture est tel qu'il doive prévaloir contre les intérêts de la généralité, si ce ne sont pas ces mots, c'est le sens.

C'est sur cette idée que pivote toute l'argumentation. Or, le principe étant erroné en lui-même, tous les raisonnements qui en découlent sont entachés du même vice.

On sait que le chemin de fer de l'Etat couvre encore assez mal ses intérêts et ses frais, la faveur avouée qu'on réclame est donc un transport à perte pour le trésor qu'on exige de la part de l'Etat au profit d'un intérêt particulier, sauf à recourir à l'impôt payé par tous pour remplir le vide que l'on aura fait dans la caisse publique au profit de quelques-uns.

Vouloir que ceux qui ne cultivent pas de terre parce qu'ils n'en ont pas, contribuent par leur impôt à payer les transports d'engrais et d'amendements pour ceux qui cultivent, c'est vouloir que les uns amendent et travaillent la terre des autres. C'est une imitation timide et surannée de ce que jadis on appelait la corvée, et si nous ne voulons plus de la corvée à visage découvert, nous devons aussi la repousser quand elle se présente voilée, et c'est le cas qui nous occupe.

Aujourd'hui tout le monde a assez de peine à travailler pour soi, pour qu'on n'oblige pas les uns à travailler pour les autres.

D'ailleurs cette idée n'est pas neuve ; je me souviens avoir vu dans les bureaux du ministre une proposition pareille pour le transport des fruits dont un très petit nombre aurait profité. C'étaient les grands propriétaires de vergers qui préconisaient ce progrès, et l'idée venait du Limbourg. La chaux à prix réduit dans le Luxembourg ne diffère nullement de l'objet de la pétition que je rapporte, car l'effet pour le trésor de l'Etat est le même, que l'Etat fasse un sacrifice soit pour l'achat soit pour le transport des amendements. Seulement la faveur qu'on demande ici ferait un vide beaucoup plus considérable que n'aurait fait la chaux. Nous avons repoussé le pauvre cultivateur du Luxembourg, nous n'aurons pas la faiblesse de mieux accueillir les forts parce que la force n'est pas le droit. Il y a plus : les fabricants de sucre de Tirlemont ont demandé 50 p. c. de réduction sur le transport des charbons, eux aussi avaient une foule de raisons spécieuses à donner pour arriver à leur but ; votre commission des pétitions du mois de novembre vous a proposé l'ordre du jour sur cette pétition, la Chambre l'a voté et votre commission ne se donnera pas le tort d'employer deux poids et deux mesures ni la Chambre, nous l'espérons, non plus.

Les pétitionnaires étayent leur demande sur la réduction qu'on accorde sur les péages des canaux et des routes, faveur sur laquelle je n'ai pas à m'expliquer pour le moment, mais, dans tous les cas, la comparaison n'est pas heureuse, car pour les voies de communications de cette espèce, l'Etat se borne à livrer passage, tandis que pour les transports par chemin de fer, l'Etat supporte les frais de traction et du personnel qui sont considérables.

Les pétitionnaires font valoir un dernier motif, à savoir que ce seront les petits cultivateurs qui profiteront le plus de cette faveur. Or, en examinant dans ses détails les statistiques officielles des cultivateurs, on reconnaît que les quatre cinquièmes des petits cultivateurs n'ont pas le capital nécessaire à l'achat d'engrais artificiels et d'amendements ; qu'une autre fraction considérable de cultivateurs est trop éloignée du chemin de fer pour profiter du privilège qu'on pétitionne ; ce seraient donc ceux qui n'ont pas de terre et ceux qui, en ayant, n'ont pas de capitaux, comme ceux qui, par éloignement, seraient privés de ces transports, qui payeraient en partie les frais de transports pour les cultivateurs qui ont des capitaux suffisants et sont à portée des chemins de fer.

Le même raisonnement est applicable au transport des drains ; il y a même plus, une fabrique de drains demande peu de savoir et peu de (page 665) capital, pour vulgariser le drainage ; il est à désirer qu'il s'établisse des fabriques dans tous les cantons, et cela se fera à condition toutefois qu'on ne contrarie pas le développement de cette fabrication par des transports à prix réduits. Or, en accordant la faveur que la pétition réclame, on irait à rencontre du but qu'on se propose, on paralyserait le développement du drainage au lieu de le favoriser.

Messieurs, votre commission des pétitions n'a pu appuyer le principe de solidarité forcée qui est préconisé dans la pétition, car son application se résumerait dans un subside à fournir par les petits cultivateurs aux grands, et vous ne permettrez pas qu'on dise que la Chambre accorde aux plaines fertiles de l'intérieur du pays, ce qu'elle refuse au sol froid et ingrat des Ardennes.

Propriétaire, agriculteur, moi-même, membre fondateur de la société centrale d'agriculture, je pense qu'il est de l'intérêt de la généralité de cesser le système des privilèges et des primes, au lieu de l'étendre, l'agriculture elle-même y est la plus intéressée ; nous avons été les derniers à recevoir ce qu'on appelle des protections, sachons aussi les premiers sortir de cette ornière où il n'y a qu'injustice et souvent défaveur.

Messieurs, votre commission aurait pu, par une déférence toute particulière, mal justifiée néanmoins par les précédents qu'elle a déjà posés, vous proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre des travaux publics, mais elle a pensé que c'était la recommander, et qu'étant appelée à examiner l'objet des pétitions et non les sources dont elles émanent, elle devait traiter les affaires pareilles dans un sens uniforme.

Elle est aussi d'avis, qu'en plaçant le ministre seul en face d'une société qui par son nombre comme par la qualité de ses membres a tant de prestige, le trésor de l'Etat aurait succombé dans la lutte ! Par ces motifs, considérant 1° que le même principe a été repoussé pour les cultivateurs du Luxembourg ; 2° que l'ordre du jour a été voté sur une demande analogue des fabricants de sucre de Tirlemont ; votre commission croit devoir prendre l'initiative dans la résistance et elle a l'honneur de vous proposer l'ordre du jour sur la pétition qui nous occupe.

M. Lelièvre. - Il m'est impossible de me rallier aux conclusions de la commission et je viens demander le renvoi de la pétition à M. le ministre des travaux publics. La pétition dont nous nous occupons touche à un intérêt sérieux ; il s'agit de savoir s'il doit y avoir réduction de 50 p. c., sur les prix de transport des matières fertilisantes ; on demande également que les tuyaux de drainage soient compris parmi les objets auxquels il est fait application de la loi du 25 mai 1850. Ces questions intéressent l'agriculture, et il est impossible d'en écarter l'examen par l'ordre du jour. Evidemment elles méritent l'attention spéciale du gouvernement qui appréciera le fondement des réclamations, et verra s'il n'y a pas quelque chose à faire dans la matière dont il s'agit. Je demande donc le renvoi au ministre des travaux publics de la pétition qui, à mon avis, est digne de l'attention des pouvoirs publics.

M. Vander Donckt. - Messieurs, je viens appuyer les conclusions de la commission. Comme l'honorable rapporteur l'a parfaitement bien dit, il faut une bonne fois en finir avec tous ces privilèges et toutes ces faveurs ; l'industrie n'a pas besoin de ces réductions sur les péages des chemins de fer, des canaux et des routes.

Il faut d'ailleurs faire une distinction essentielle entre la réduction des péages sur le chemin de fer et sur les canaux, et la réduction de ces péages sur les autres voies de communication. Car, n'oublions pas que, pour le chemin de fer, l'Etat est astreint à des sacrifices considérables, non seulement sous le rapport de la première mise de fonds, mais encore sous le rapport du combustible, du personnel et de tout l'atiirail qui cause des frais énormes à l'Etat. Tout le monde contribue dans les charges et l'on ne peut les augmenter par des faveurs.

La Chambre ne peut entrer dans la voie où on veut l'engager. Chaque fois que le budget des travaux publics est en discussion, sur tous les bancs de cette Chambre on dit que le chemin de fer ne rapporte pas assez, qu'il faut augmenter les prix de transport ; et par des privilèges inconsidérément accordés, par des faveurs imméritées, on voudrait réduire les revenus de cette entreprise.

On ne révoquera certainement pas en doute mes sympathies pour l'agriculture. Mais je ne veux pas de privilège, par plus pour l'agriculture que pour toute autre branche de l'industrie ou du commerce. Je veux que le chemin de fer produise ce qu'il doit produire. Lorsqu'on veut faire des faveurs, qu'on donne de l'argent ; mais qu'on n'accorde pas de privilèges qui ont l'air de n'être rien, et qui, en définitive, réduisent les revenus du chemin de fer et empêchent qu'on puisse établir un compte exact de ce qu'il nous rapporte.

M. Vermeire. - S'il s'agissait de créer un privilège en faveur de la société qui demande une réduction de péages pour le transport des matières fertilisantes de la terre, je me rangerais du côté de ceux qui demandent l'ordre du jour. Mais d'après les tarifs acttiellement existants, le gouvernement a le droit d'accorder des remises sur le transport des matières pondéreuses, lorsque ce transport à prix réduit lui laisse un bénéfice.

Il s'agirait donc d’examiner la question sous ce point de vue et de voir s'il est dans l'intérêt du gouvernement de transporter ou non ces marchandises. Sous ce rapport je viens proposer le renvoi de la pétition à M. le ministre des travaux publics sans rien préjuger.

Messieurs, cette demande nous démontre encore une fois qu'il est plus que temps de fixer par une loi le transport des marchandises sur le chemin de fer. Avant notre dernière séparation, je m'étais réservé de demander la mise à l'ordre du jour de ce projet sur lequel un rapport a ete présenté à la Chambre. M. le ministre des travaux publics nous a dit qu'il était prêt à entamer cette discussion. Comme notre ordre du jour est peu chargé, je propose de faire figurer ce projet à la suite des objets qui s'y trouvent déjà. Nous pourrions ainsi, dans quinze jours ou trois semaines, aborder cette discussion qui est attendue par le pays avec une grande impatience.

M. de Mérode. - J'applaudis aux conclusions de la section et aux principes professés par l'honorable rapporteur. Une seule observation peut être faite dans le cas actuel : il s'agit de savoir, si l'Etat trouverait un bénéfice à transporter aux prix réduits qu'on demande. Mais il est bien entendu que l'Etat doit chercher les bénéfices les plus élevés qu'il peut retirer de ces transports. Si en n'abaissant pas les tarifs, il ne transporte rien, et se prive ainsi d'un bénéfice qu'il pourrait faire, je crois que l'honorable rapporteur sera d'avis avec moi, qu'il vaudrait mieux abaisser les tarifs et transporter, toujours à condition que ces transports laissent un bénéfice.

Je suis, comme l'honorable rapporteur et bien d'autres, très grand partisan de la prospérité de l'agriculture, mais d'une prospérité qui ne soit fondée sur aucune prime, sur aucun moyen factice, sur aucun de ces moyens qui bouleversent l'ordre qui doit régner dans une administration comme celle du chemin de fer. L'ordre manquant dans cette administration, les finances de l'Etat sont compromises, et l'agriculture en paye sa part. Après qu'on lui a donné 6 francs, on lui en prend 60.

Je demande en conséquence que les principes que l'honorable rapporteur a fait valoir soient admis et que la pétition ne soit pas renvoyée au ministre.

Si le gouvernement trouve qu'il y a bénéfice à transporter plutôt qu'à ne pas transporter, qu'il accepte le bénéfice. Je ne pense pas qu'il ait besoin pour cela d'être influencé par le renvoi d'une pétition.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Je crois qu'en principe on peut affirmer que les tarifs pour le transport des marchandises sont extrêmement modérés. Les pétitionnaires devraient commencer par établir que les tarifs, pour les matières mentionnées dans la pétition, sont trop élevés. Ils n'établissent pas cette preuve. Ensuite, je ferai remarquer que le tarif autorise le gouvernement à réduire de 50 p. c. lorsqu'il s'agit d'amener au chemin de fer de l'Etat des transports qu'il n'a pas.

Ainsi, quand des pétitionnaires s'adressent au gouvernement, s'engageant à effectuer des transports à la convenance du gouvernement, quand l'administration du chemin de fer dispose d'un matériel suffisant pour ces transports, ou quand les réclamants s'engagent à effectuer des transports à des quantités données, je comprends qu'on admette des réductions de 30, 40, et 50 p. c. C'est ce qui a lieu presque toujours. Ainsi, lorsqu'il est démontré que des transports qui pourraient produire au chemin de fer des recettes de quelque importance ne sont pas effectués par l'Etat ou qu'ils sont faits par les voies navigables et y produisent une recette insignifiante, pour les attirer au chemin de fer on admet une réduction de 20 ou de 40 p. c, On n'hésite jamais à l'admettre.

Je crois que l'ordre du jour proposé par la commission n'enlève pas au gouvernement le droit d'examiner. Je prends de nouveau l'engagement d'examiner les réclamations qui m'ont été adressées par la société centrale d'agriculture.

En ce qui concerne l'observation présentée par l'honorable M. Vermeire, je me borne à déclarer que je suis à la disposition de la Chambre.

M. Julliot, rapporteur. - L'honorable ministre nous apprend que la société centrale d'agriculture s'est déjà adressée au gouvernement qui n'a pas fait droit à sa demande. On s'adresse à la Chambre pour qu'elle engage le gouvernement à accepter ce qu'il croit contraire à l'intérêt de l'Etat.

Devons-nous affaiblir le gouvernement ou le soutenir ? Je crois que notre devoir est de le soutenir, d'autant plus que déjà deux fois la Chambre s'est expliquée au sujet du transport à prix réduit ; concernant le Luxembourg où il s'agissait de 30,000 fr. notamment, la Chambre a pris des décisions identiques. Je crois que nous devons agir de même, bien que nous soyions en présence d'une société puissante. Je crois donc devoir persister dans les conclusions du rapport.

M. de Theux. - Ne conviendrait-il pas d'ordonner le dépôt de la pétition sur le bureau pendant la discussion du tarif du chemin de fer ?

- La discussion est close. L'ordre du jour est mis aux voix et prononcé.


M. Julliot, rapporteur. - « Par pétition datée de Bruges, le 28 février 1854, le sieur Vandierendonck demande qu'on soit tenu de faire usage de la langue flamande pour l'instruction et le commandement des armes, lorsque les miliciens ou les gardes civiques appartiennent aux provinces flamandes. »

Conclusions : Ordre du jour.

- Adopté.


M. Julliot, rapporteur. - « Par pétition datée de Liège, le 1er avril 1854, le sieur Guilbert demande que le gouvernement nomme une nouvelle commission de récompenses nationales. »

(page 666) Conclusions : Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Julliot, rapporteur. - « Par pétition, datée de Termonde, le 27 mars 1854, le sieur Bochart, sergent facteur au deuxième régiment de chasseurs à pied, ancien combattant de septembre, transmet une copie des certificats qui lui ont été délivrés par les autorités militaires et demande que ces pièces soient soumises à la commission qui serait chargée d'examiner les titres des blessés de septembre à l'obtention d'une récompense nationale. »

Conclusions : Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Julliot, rapporteur. - « Par pétition datée de Watou, le 24 mars 1854, des cultivateurs à Watou demandent que la moitié de la quantité de chaux que cette commune reçoit en franchise de droits puisse être introduite par le bureau de Watou. »

Conclusions : Ordre du jour.

- Adopté.


M. Julliot, rapporteur. - « Par pétition datée de Bruxelles, le 11 avril 1854, le sieur Lagneau, commissionnaire à Bruxelles, réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir les fonds provenant de la vente de sa propriété. »

Conclusions : Ordre du jour.

- Adopté.


M. Julliot, rapporteur. - « Par pétition datée d'Anvers, le 19 avril 1854, le sieur Schuyten, ancien sergent, blessé de 1850, demande une pension ou que le subside annuel dont il jouit soit augmenté. »

Conclusions : Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Julliot, rapporteur. - « Par pétition datée d'Ittre, le 1er mai 1854, la veuve Snep, à Ittre, réclame l'intervention de la Chambre pour être indemnisée des pertes qu'elle a subies dans ses récoltes en 1850 et 1851. »

Conclusions : Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Julliot, rapporteur. - « Par pétition datée de Molenbeek-Saint-Jean, le 10 mai 1854, le sieur Chansay, mécanicien à Molenbeek-Saint-Jean, demande un subside qui le mette à même de confectionner un appareil de gaz économique pour lequel il a obtenu un brevet. »

Conclusions : Ordre du jour.

- Adopté.


M. Julliot, rapporteur. - « Par pétition datée de Monceau-sur-Sambre, le 8 mai 1854, le bourgmestre de Monceau-sur-Sambre demande que les miliciens qui sont appelés au chef-lieu de la province, pour être incorporés dans un régiment, soient admis au transport par le chemin de l'Etat, avec réduction de 50 p. c. sur le prix ordinaire du tarif. »

Conclusions : Renvoi à M. le ministre des travaux publics.

- Adopté.


M. Julliot, rapporteur. - « Par pétition datée de Jambes-lez-Namur, le 5 septembre 1854, le sieur Dehal, blessé de 1830, demande à jouir de la pension de 250 fr. accordée à quelques décorés de la croix de Fer. »

Conclusions : Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Julliot, rapporteur. - « Par pétition datée de Papignies, le 1er octobre 1854, le sieur Baudelet, journalier à Papignies, demande à être exempté du payement de la contribution personnelle qui lui est réclamée. »

Conclusions ; Ordre du jour.

- Adopté.


M. Julliot, rapporteur. -« Par pétition datée de Bruxelles, le 12 novembre 1854, la dame Pépin, veuve du sieur Jaspar, décoré de la croix de Fer, demande une loi qui lui accorde une pension, ainsi qu'à toutes les veuves des décorés de la croix de Fer. »

Conclusions : Ordre du jour.

- Adopté.


M. Julliot, rapporteur. - « Par pétition datée de Bruxelles, le 7 mars 1854, le sieur Debruyn, blessé de septembre, prie la Chambre de lui accorder un secours et ce qu'il aurait pu réclamer pendant les quatorze dernières années. »

Conclusions : Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Julliot, rapporteur. - « Par pétition datée d'Ypres, le 25 février 1854, le sieur Verhaeghe-Liebart, pharmacien à Ypres, demande que les billets de contribution soient imprimés en langue flamande et en langue française. »

Conclusions : Renvoi à M. le ministre des finances.

- Adopté.


M. Julliot, rapporteur. - « Par pétition datée de Schaerbeek, le 25 février 1854, le sieur Barbier demande à jouir de la pension accordée aux blessés de septembre. »

Conclusions : Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Julliot, rapporteur. - « Par pétition datée d'Anvers, le 20 février 1854, le sieur Schuyten, à Anvers, demande à jouir de la pension accordée aux blessés de septembre, ou que le secours annuel de 40 fr. qu'il reçoit soit augmenté. »

Conclusions : Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Julliot, rapporteur. - « Par pétition datée de Liège, le 11 février 1854, le sieur Doubet demande à jouir de la pension attribuée aux décorés de la croix de Fer ou une indemnité équivalente. »

Conclusions : Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Julliot, rapporteur. - « Par pétition datée de Dour, le 15 novembre 1854, le sieur Haute-cœur, ancien officier, décoré de l'Ordre de Léopold, demande qu'on lui accorde la pension de 250 francs réservée aux légionnaires nécessiteux, ou celle de 100 francs dont jouissent quelques décorés de l'Ordre de Léopold, ou du moins une indemnité annuelle équivalente. »

Conclusions : Renvoi à M. le ministre de la guerre.

- Adopté.


M. Julliot, rapporteur. - « Par pétition datée d'Audenarde, le 11 mars 1854, la dame L'Hoir réclame l'intervention de la Chambre pour que le gouvernement restitue à son mari la retenue de solde qui lui a été faite pendant 15 mois, lorsqu'il appartenait à la 13ème de réserve. »

Conclusions : Renvoi à M. le ministre la guerre.

- Adopté.


M. Allard, rapporteur. - « Par pétition datée de Bruxelles, le 31 janvier 1854, le sieur Stevens, graveur lithographe à Bruxelles, demande que les annonces lithographiées soient exemptées du droit de timbre, ou bien que les annonces publiées dans les journaux soient soumises à ce droit. »

Le pétitionnaire expose à la Chambre que la presse quotidienne jouit du privilège de pouvoir donner, sans payer aucun droit, la plus grande pubiicité à toute espèce d'annonces et de circulaires, tandis qu'il y a obligation de faire timbrer les cartes d'adresse et les autres ouvrages lithographiques destinés à donner de la publicité à un commerce ou à une industrie.

Cette pétition méritant de fixer l'attention de M. le ministre des finances, votre commission, sans rien préjuger cependant, a l'honneur de vous en proposer le renvoi à ce haut fonctionnaire.

- Adopté.


M. Allard, rapporteur. - « Par pétition datée de Bruxelles, le 10 mars 1854, le sieur Van Hoegaerde demande le rétablissement du timbre sur les journaux. »

Le pétitionnaire expose que la situation politique de l'Europe exige des ressources financières pour les éventualités ; que la suppression duu timbre sur les journaux est un privilège en matière d'impôt sans motif justifiable, et qu'il y a lieu de le rétablir, comme l'impôt le plus juste, le plus populaire.

Votre commission, sans rien préjuger, a l'honneur de vous proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre des finances.

M. Lelièvre. - En ce qui me concerne, je crois devoir m'opposer à toute proposition ayant pour objet le rétablissement du timbre sur les journaux. Une concession qu'on a cru devoir faire à l'opinion publique dans certaines circonstances ne doit pas être retirée lorsque ces circonstances sont venues à cesser. La dignité de la Chambre et des pouvoirs publics ne permet pas de révoquer ce qui a été fait en 1848 librement et en connaissance de cause. En conséquence, je demande l'ordre du jour sur la pétition.

- L'ordre du jour est prononcé.


M. Allard, rapporteur. - « Par pétition datée de Bruxelles, le 5 avril 1854, le sieur Jiobdar réclame l'intervention de la Chambre pour que la famille Vander Marcken puisse rentrer dans la possession de ses biens. »

Les contestations qui ont pour objet les droits civils, étant exclusivement du ressort des tribunaux, votre commission a l'honneur de vous proposer l'ordre du jour.

- Adopté.


M. Allard, rapporteur. - « Par pétition datée de Hasselt, le 8 novembre 1854, la commission instituée par le conseil communal de Hasselt, dans le but de rechercher le tracé le plus avantageux du chemin de fer destiné à relier les provinces de Liège et de Limbourg, adresse à la Chambre quelques exemplaires des divers rapports qui ont été rédigés à propos des projets en concurrence, et demande que la préférence soit accordée au tracé direct. »

« Par pétition datée de Tongres, le 22 novembre 1854, un grand nombre de négociants de la ville de Tongres prient la Chambre de faire obtenir au sieur Benard la concession du chemin de fer liégeois-limbourgeois dont il a soumis le projet au gouvernement. »

Divers rapports, rédigés à propos des projets en concurrence, entrent dans de longs développements pour que la préférence soit accordée an tracé direct.

Votre commission, ne pouvant apprécier le tracé qu'il convient d'adopter, a l'honneur de vous proposer, messieurs, le renvoi de la pétition à M. le ministre des travaux publics.

- Adopté.


M. Allard, rapporteur. - « Par pétition datée de Liège, le 31 octobre 1854, la chambre des avoués près le tribunal civil de Liège demande une loi qui oblige le magistrat à se retirer, sous peine de nullité des sentences et autres actes de justice, chaque fois que l'un de ses parents, à un degré à déterminer, sera appelé devant lui à représenter les parties. »

« Par pétition datée de Liège, le 28 novembre 1854, le conseil de discipline de l'ordre des avocats près la cour d'appel de Liège déclare adhérer aux vœux exprimés dans la pétition présentée à la Chambre par les avoués près le tribunal de première instance de Liège, relativement à la récusation des magistrats pour cause de parenté avec les défenseurs des parties. »

Messieurs, les pétitionnaires s'adressent à la législature pour demander que dans la loi de révision de nos Codes, il soit introduit une disposition qui interdise d'une manière absolue à tous les magistrats de l'ordre judiciaire de connaître d'affaires dans lesquelles leurs parents à un degré à déterminer, représentent les parties soit comme avocats, soit comme avoués, soit même comme mandataires.

L'on ne peut dissimuler, messieurs, que la question soulevée par les avoués de Liège et dont les vœux sont bien certainement partagés par les praticiens du pays, présente un intérêt des plus vifs et mérite la plus sérieuse considération. Alors en effet que toutes les lois organiques qui nous régissent se sont longuement occupées des incompatibilités qui existent entre les magistrats soit de l'ordre administratif, soit de l'ordre judiciaire, alors qu'elles ont étendu le nombre de ces incompatibilités, de même que celui des récusations et qu'elles renferment de nombreuses dispositions tendantes à sauvegarder non seulement les intérêts, mais même les scrupules et les soupçons de ceux qui sont en contact avec ces magistrats, il pourra paraître étonnant que nulle part il n'ait été question de fixer leur position vis-à-vis de leurs proches, lorsque ceux-ci sans être parties directement intéressées, le sont cependant à un titre si puissant quand, en leur qualité d'hommes d'affaires, ils prêtent leur ministère aux justiciables ou aux plaideurs.

C'est là, il faut bien le reconnaître, une lacune qu'il importe de combler dans l'intérêt surtout de la dignité du juge et du prestige dont toujours doit être entourée la justice. Tout le monde reconnaîtra sans doute que la magistrature belge a constamment donné les preuves les plus (page 667) éclatantes non seulement d'un savoir et d'un dévouement dignes des plus grands éloges, mais encore d'une impartialité et d'une probité incontestables, mais il n'en est pas moins vrai que depuis longtemps l'opinion public s'émeut de voir dans un grand nombre de nos tribunaux des avocats plaidant devant leurs plus proches parents ; cela peut-être un préjugé, mais il est des préjugés qui sont respectables et que l'on ne doit pas braver. Il faut que la justice soit pure de tout soupçon, quelque peu fondé qu'il puisse paraître.

Pour ces motifs, et en se référant aux raisons développées dans la pétition et la mémoire qui l'accompagne, votre commission a l'honneur de vous proposer, messieurs, le renvoi de ladite pétition à M. le ministre de la justice.

M. Tesch. - Je propose le renvoi de la pétition à M. le ministre de la justice, à moins que M. le ministre, qui est présent, ne veuille donner des explications immédiatement.

M. le ministre de la justice (M. Faider). - En revoyant il y a quelque temps les rapports sur les budgets du département de la justice des années précédentes, j'ai lu le passage suivant d'un rapport déposé le 1er mai 1851 par M. Orts, sur le bureau de la Chambre :

Voici comment s'exprimait l'honorable membre :

« Un membre a émis l'opinion qu'il conviendrait d'attirer l'attention du gouvernement sur une amélioration introduite dans l'administration de la justice par un pays voisin, où une loi récente permet aux parties de récuser le juge parent de l'un des avocats plaidant en cause. La section centrale s'en remet à la sollicitude du gouvernement pour la dignité de la magistrature belge. »

J'ai recherché quelles étaient les lois des pays voisins qui s'étaient occupées de cette matière, et d'après les indications qui m'ont été fournies, j'ai acquis la preuve que cette matière était réglée dans le royaume des Pays-Bas par la loi d'organisation judiciaire et dans le Grand-Duché du Luxembourg par une loi spéciale du 2 décembre 1843.

J'ai communiqué un extrait de ce rapport, ainsi que le texte des lois de ces deux pays à la commission d'organisation judiciaire par lettres du 24 janvier 1854 ; la commission qui m'a récemment adressé son travail a cru qu'il s'agissait principalement ici d'une matière de récusation dont devait s'occuper de préférence le Code de procédure civile. Je crois que cette appréciation est un peu rigoureuse et que dans la loi d'organisation judiciaire, on peut fort bien, comme on l'a fait dans le royaume des Pays-Bas, donner place, dans le chapitre des incompatibilités à la matière dont il est ici question.

J'ai donc pris la résolution d'introduire dans le projet de loi sur l'organisation judiciaire que j'examine depuis quelques temps, qui est assez étendu, mais dont l'étude marche cependant assez rapidement ; d'y introduire, dis-je, des dispositions destinées à régler la difficulté dont nous nous occupons.

Au mois de mars dernier, j'avais été sur le point d'envoyer aux magistrats une circulaire, tendant à leur rappeler le passage du rapport de 1851, et à signaler à la magistrature en général, la convenance de s'abstenir de siéger dans les cas où de proches parents étaient chargés d'intérêts de clients. A la même époque, la presse s'était emparée du même sujet ; j'ai pensé dès lors que mon intervention officieuse perdait de son importance et que c'était une de ces matières où il fallait laisser agir l'opinion et à l'égard de laquelle il faut s'en remettre à la délicatesse des magistrats intéressés. J'ai donc renoncé à la pensée de cette circulaire.

Depuis lors, la question a fait beaucoup de chemin ; les journaux qui s'en sont occupés, ont produit des arguments nombreux et sérieux en faveur d'un régime nouveau sur la matière ; la Chambre est actuellement saisie d'une pétition, qui rentre tout à fait dans les vues exprimées par certains organes de la presse. Je crois que dans cette situation, ce que vous avez à faire, messieurs, c'est d'adopter les conclusions de la commission, de renvoyer la pétition à mon département (je déclare, du reste, que j'en ai déjà reçu directement copie des pétitionnaires) et de laisser à la loi d'organisation judiciaire le soin de régler législativement les obligations des magistrats dans le cas donc on s'occupe dans la pétition.

En attendant je suis persuadé que les inconvénients qui ont été signalés auront perdu beaucoup de leur importance, par cela même qu'ils auront été signalés d'une manière sérieuse par la Chambre.

Je m'associe de tout cœur à l'hommage rendu par votre commission des pétitions à l'indépendance et à l'intégrité de nos magistrats, et je suis convaincu qu'il suffira, pour le moment, d'avoir signalé les inconvénients qui résultent de certaines relations pour les voir cesser.

M. Tesch. - Messieurs, après les explications que vient de donner M. le ministre de la justice, je ne puis pas insister pour que la Chambre lui renvoie la pétition, dans le but d'obtenir les renseignements qu'il vient de nous fournir. Mais je constate avec plaisir que M. le ministre de la justice est de l'avis des pétitionnaires et qu'il proposera dans le projet de loi sur l'organisation judiciaire des dispositions de la nature de celles qui sont réclamées. Bien loin de moi la pensée de suspecter soit l'indépendance, soit l'intégrité de notre magistrature ; mais nous ne pouvons pas nous dissimuler, cependant, qu'il existe ici des préjugés qui affectent en quelque sorte la foi due à la chose jugée, la dignité de la magistrature, qu'il convient de faire disparaître dans l'intérêt dtr prestige dont l'administration de la justice doit être entourée, et je désire voir M. le ministre de la justice présenter le projet de loi en question le plus tôt possible.

M. Dumortier. - Messieurs, je ne pense pas qu'il convienne d'interdire aux personnes qui ont des parents dans la magistrature de prendre la parole comme avocats, lorsque ces parents siègent comme juges... (Interruption.)

M. Frère-Orban. - On veut qu'un magistrat se récuse, lorsque son parent plaide comme avocat.

M. Dumortier. - C'est toujours au fond la même chose. Je crois que c'est aller excessivement loin. Quant à moi, je déclaré franchement qu'une pareille question ne doit pas, selon moi, être tranchée incidemment et quelle mérite un mûr et sérieux examen.

- Un membre. - Rien n'est préjugé ; il s'agit de renvoyer la pétition à M. le ministre de la justice purement et simplement.

- Le renvoi de la pétition à M. le ministre de la justice est mis aux voix et ordonné.

La séance est levée à quatre heures et demie.