Accueil Séances Plénières Tables des matières Biographies Livres numérisés Note d’intention

Chambres des représentants de Belgique
Séance du samedi 16 avril 1859

Séance du 16 avril 1859

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1858-1859)

(page 1004) (Présidence de M. Verhaegen.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. de Boe fait l'appel nominal à 1 heure et demie.

M. Vermeire donne lecture du procès-verbal de la dernière séance.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Boe présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.

« Des habitants de Beveren prient la Chambre de rejeter la proposition concernant le vote par lettre alphabétique et demandent :

« 1° le vote à la commune, sauf à réunir les communes rurales contiguës qui n'auraient chacune qu'un petit nombre d'électeurs ;

« 2° L'abolition de l'impôt sur le débit des boissons ou du moins de la loi qui admet cet impôt dans le cens électoral. »

« Même demande des habitants de Loo, Ouckene, Wynkel-Saint-Elo, Cachtem, Ledeghem, Sombrette, Oost-Nieuwkerke, Westroosebeke, Moorslede, Sichem, Malonne, Oostcamp, Bovesse, Bossières, Saint-Denis, Lonzée, Soiron, Oedelem, Tronchiennes. Rethy, Iseghem, Bruxelles, Caggevinne-Assent, Waenrode, Deurne, Flamierle, Schrieck, Oude-Cappelle, Zarren, Assebroeck, Locre, Vlamertinghe, Neyghem, Heyst-op-den-Berg. »

- Dépôt sur le bureau, pendant la discussion du projet de loi modifiant quelques dispositions de la loi électorale, en ce qui concerne les élections.


« Des habitants de Moignelée prient la Chambre d'introduite dans les élections à tous les degrés le vote par lettre alphabétique. »

M. Lelièvre. - Je demande que cette pétition soit déposée sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.

- Cette proposition est adoptée.


« Les membres de l'administration communale de Tourinnes-la-Grosse demandent le vote alphabétique de tous les électeurs de l'arrondissement. »

« Même demande des membres de l'administration communale de Beauvechain. »

- Même décision.


« Des habitants de Sotteghem demandent le rejet de la proposition relative à l'appel des électeurs par ordre alphabétique général pour l'arrondissement et le vote au chef-lieu du canton, »

- Même décision.


- « Des habitants de Wervicq prient la Chambre de rejeter la proposition relative au vote par lettre alphabétique, de faciliter l'exercice du droit électoral et d'abolir la loi qui admet dans le cens électoral l'impôt sur le débit des boissons distillées. »

« Même demande d'habitants de Moorslede. »

- Même décision.


« Des habitants de Laminne prient la Chambre de rejeter la proposition concernant le vote par lettre alphabétique et d'examiner quelle circonscription électorale il y aurait lieu d'établir afin de faciliter le vote des élections des communes rurales. »

« Même demande d'habitants de Comines, Bas-Warneton, Floreffe, Flamierge, Remicourt, Isnes, Hodeige, Gheel, Westcapelle, Saint-Pierre, Ramscapelle, Warnant, Anthée, Nieukerke. »

- Même décision.


t Des habitants de Testelt demandent le rejet de la proposition relative à l'appel des électeurs par ordre alphabétique, et le vote à la commune, sauf à réunir les communes contiguës qui n'auraient chacune qu'un petit nombre d'électeurs. »

« Même demande d'habitants de Russeignies, Amougies et Arroir. »

- Même décision.


« Des habitants de Pont-à-Celles prient la Chambre de maintenir les élections aux Chambres, et au conseil provincial dans les chefs-lieux d'arrondissement et de canton, et d'adopter le vote par ordre alphabétique des électeurs de la circonscription électorale. »

- Même décision.


« Des habitants d'Anvers demandent le rejet de la proposition relative au vote par lettre alphabétique. »

- Même décision.


« Des habitants d'Eghézée demandent que la loi fixant au chef-lieu d'arrondissement les élections pour les chambres soit maintenue et que ces élections se fassent d'après une liste alphabétique à former entre tous les électeurs de l'arrondissement.

« Même demande d'habitants de Raviers, de Rupelmonde. »

- Même décision.


« Des receveurs communaux demandent à participer à la caisse de retraite qui sera établie en faveur des secrétaires communaux. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi instituant une caisse centrale de retraite en faveur des secrétaires communaux.


« Les époux Antoine demandent que leur fils soit exempté du service militaire. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« M. le ministre de l'intérieur adresse à la Chambre des renseignements sur la pétition du conseil communal de Molhem-Bollebeek demandant une modification à l'article 2 de la loi du 7 ventôse an XII relative au roulage.

- Dépôt au bureau des renseignements.


Des habitants de Stave demandent un droit de sortie sur les mines équivalent à celui dont les fontes belges sont frappées à l'étranger, ou bien la libre sortie des mines de Sambre-et-Meuse. »

M. de Baillet-Latour. - Je demande le renvoi de cette pétition à la commission permanente d'industrie pour être jointe à d'autres pétitions sur le même objet, analysées dans une séance précédente et comprise dans le même rapport.

- Cette proposition est adoptée.


M. le ministre des travaux publics a adressé au bureau un amendement à son budget.

- Cet amendement sera imprimé et distribué.

Motion d’ordre

M. H. Dumortier (pour une motion d’ordre). - Plusieurs fois j'ai été chargé par la commission des pétitions de prier M. le ministre de l'intérieur de faire connaître les intentions du gouvernement relativement à la question de la langue flamande.

M. le ministre nous a dit qu'il désirait ajourner ses explications parce qu'il attendait des pièces des renseignements qu'il avait demandés aux gouverneurs des provinces ; si nos renseignements sont exacts, ces pièces, ces renseignements sont arrivés au département de l'intérieur, même livrées à l’impression et pourraient être distribués demain ou après-demain. S'il en est ainsi, je demanderai que M le ministre de l'intérieur veuille bien nous envoyer un exemplaire de ces pièces à domicile et après les vacances nous donner quelques explications sur les intentions du gouvernement, nous dire jusqu'à quel point il croit pouvoir faire droit aux griefs articulés relativement à la langue flamande.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - En réponse à l'interpellation qui vient de m'être adressée, je rappellerai que la Chambre m'a autorisé à faire imprimer les observations du gouvernement en réponse au rapport de la commission flamande L'impression est très avancée et je pense qu'elle pourra être terminée d'ici à quelques jours. La Chambre décidera si elle veut faire distribuer mon rapport pendant les vacances. C'est là un point qui ne me concerne pas.

M. le président. - Il n'y a aucun inconvénient à faire distribuer ce travail dès que l'impression en sera terminée.

Ordre des travaux de la chambre

M. Rodenbach. - Nous sommes dans l'habitude de ne pas siéger pendant la semaine sainte ; je propose donc à la Chambre, quand l'ordre du jour sera épuisé, de s'ajourner pour les fêtes de Pâques jusqu'au mardi 3 mai. Je pense que cette époque conviendra à tout le monde : on ne peut pas prolonger la vacance davantage, car des élections devront avoir lieu le 14 juin.

M. Orts. - Je n'en tends pas combattre la proposition de l'honorable M. Rodenbach ; elle est conforme aux précédents de la Chambre ; je demanderai, si elle est adoptée, que la Chambre autorise la section centrale chargée d'examiner le projet d'interprétation de l'article 84 de la loi communale à faire imprimer son rapport. Elle se réunit mardi pour en entendre la lecture. Ce rapport pourrait être envoyé aux membres à domicile et mis à l'ordre du jour pour la rentrée.

M. B. Dumortier. - J'admets la proposition de M. Orts en ce sens que le projet pourrait être mis à l'ordre du jour après notre rentrée, mais non que la discussion s'ouvrirait le jour de la rentrée.

M. Orts. - Je suis de l'avis de l'honorable M. Dumortier que nous ne pouvons pas discuter le jour de la rentrée le projet d'interprétation de l'article 84 de la loi communale ; mais ne pourrait-on pas dès aujourd'hui, pour que chacun soit préparé, déterminer le jour où on abordera cette discussion, par exemple le jeudi ou le vendredi qui suivra.

- La Chambre décide que, l'ordre du jour épuisé, elle s'ajournera au mardi 3 mai et que le projet de loi d'interprétation de l'article 84 de la loi communale sera mis àa l'ordre du jour du jeudi 5 mai.

Projet de loi supprimant les droits de sortie sur les charbons de bois et les écorces

Rapport de la section centrale

M. Orbanµ. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale qui a examiné le projet de loi, décrétant la suppression des droits de sortie sur les charbons de bois et les écorces.

(page 1005) - Ce rapport sera imprimé et distribué ; ce projet de loi sera mis à suite de l'ordre du jour.

Motion d’ordre

M. Malou (pour une motion d’ordre). - Messieurs, à la fin de la séance d'hier, je me suis borné à déclarer à la Chambre que je n'ai eu aucune intention blessante pour l'honorable M. Lelièvre. Au milieu du bruit, je n'avais pas saisi la portée des paroles de l'honorable membre, et j'ai cru devoir attendre jusqu'aujourd'hui pour m'expliquer.

Je ne parle pas des versions qu'ont données les journaux non officiels du sens des paroles de l'honorable membre. Il le reconnaîtra sans doute lui-même, ses paroles ont été singulièrement dénaturées. Je ne m'attacherai qu'à la version officielle, version qui a été écrite de la main de l'honorable membre, y compris même le mot interruption. Nous comprenons tous que, dans la vivacité d'une discussion, certaines paroles puissent échapper ; mais elles ont un tout autre caractère quand elles sont écrites de la main de leur auteur. Notre honorable président a bien voulu me procurer ce manuscrit. Voici, messieurs, les paroles de l'honorable membre :

« M. Malou n'a pas craint d'affirmer que j'ai voulu faire allusion à une question d'argent. M Malou, préoccupé de semblables questions, mesure les autres à son aune. Eh bien, je dirai que, quant à moi, ce sont les questions d'honneur t de dignité qui sont l'objet de mes préoccupations. (C'est ici que se trouve le mot interruption.) Ne m'appelez pas sur ce terrain ; je devrais vous dire des choses peu agréables et invoquer des souvenirs qui ne vous plairaient pas. »

Messieurs, ces paroles, tout le monde le reconnaîtra je pense, ne sont pas parlementaires ; ce sont des insinuations ; je demande donc à l'honorable M. Lelièvre de vouloir bien ou rétracter ses paroles ou les expliquer, mais les expliquer sans réticence et de telle sorte qu'il n'y ait plus d'insinuations.

M. Lelièvre. - L’interpellation que m'adresse M. Malou me paraît bien tardive. Hier, poussé à bout par un système qui date déjà de très loin, j'ai exprimé ma pensée en état de légitime défense. Je suis convaincu de n'avoir pas outre-passé les limites de cette défense légitime et d'avoir usé d'un droit en répondant comme je l'ai fait à M. Malou. Celui-ci a eu la parole pour me répondre. Le débat doit dès lors être considéré comme, terminé.

Toutefois, puisque M. Malou le désire, je ne crains pas de m'expliquer plus clairement. Je dirai donc que quand j'ai parlé de faits que pourraient ne pas plaire à M. Malou, j'ai entendu faire allusion à la pension de ce dernier, comme ministre, et aux circonstances dans lesquelles il l'a obtenue.

J'ai toujours pensé que la conduite de M. Malou en cette occurrence ne pouvait se concilier avec le rapport déposé par lui au nom de la section centrale sur le projet de loi relatif à la pension des ministres. Mon opinion n'est pas du reste nouvelle à cet égard. En 1849, j'ai déposé une proposition ayant pour objet l'annulation de cette pension.

Du reste, je souhaite que M. Malou parvienne à donner des explications satisfaisantes sur ce point ; je laisserai au pays le soin de les apprécier.

M. Malonµ. - Messieurs, je proteste contre l'accusation de l'honorable membre que j'aurais voulu le livrer au ridicule et que ce serait chez moi un système.

J'ai rappelé hier, le Moniteur en fait foi, une expression de l'honorable membre, tout à fait conforme à l'opinion que je soutenais moi-même ; et cela, messieurs, sans aucune espèce d'allusion blessante, sans aucune intention de ridicule.

L'honorable membre se trompe évidemment lorsqu'il dit qu'il n'a pas outre-passé les bornes de la légitime défense. En effet, messieurs, il suffisait à l'honorable membre, pour ne pas dépasser ces bornes, de répondre au fait personnel tel qu'il lui paraissait exister, sans se lancer contre moi dans les insinuations antiparlementaires qu'il est venu expliquer aujourd'hui. Je pourrais dire aussi que sa réponse se trouvait dans sa première interruption.

L'honorable membre rappelle un fait qui a été l'objet d'une discussion en 1849, à une époque où je ne faisais pas partie de la Chambre. Une proposition s'est produite alors et s'est produite sans succès. Elle a été soutenue par celui qui m'avait succédé dans cette enceinte. J'ai eu la bonne fortune, alors que je ne faisais pas partie de l'assemblée, d avoir pour défenseurs deux honorables amis, M. de Theux et M. Orts, qui ont parfaitement expliqués à cette époque, comment les choses se sont passées et qui ont fait justice de ces accusations misérables qui, après avoir traîné dans la presse du dernier étage, avaient été ramassées par un ou deux membres de la Chambre.

Je ne félicite pas l'honorable M. Lelièvre de les avoir ramassées de nouveau.

J'ai eu l'honneur d'être rapporteur de la loi relative aux pensions ; cette loi contenait en un seul texte les pensions ordinaires et les pensions de ministres. C'est une des plus grandes discussions auxquelles j'ai pris part, c'est aussi une des lois qui dans la pratique (je parle de la loi générale) ont le mieux réussi, ont été pour l'administration un grand bienfait. Nous y attachions tous, dans la section centrale, un grand prix.

Il y avait au contraire des opinions très divergentes sur le système des pensions à accorder aux ministres ; nous avons proposé, et la section centrale a admis la division du projet. Mon opinion personnelle, que j'ai très vivement défendue à la Chambre pendant le cours de cette discussion, était qu’il fallait faire une loi relative aux pensions des ministres, seulement pour les ministres qui avaient été en fonctions jusqu'en 1844, pour ceux qui avaient concouru jusqu'alors à fonder notre nationalité.

Il y avait alors certaines positions que chacun de nous comprenait. J'ai eu l'honneur de défendre toutes ces positions et d'anciens ministres dont plusieurs étaient mes adversaires politiques, m'ont tous remercié ; c'est pour moi un des plus précieux souvenirs de ma carrière politique.

J'ai combattu les pensions des ministres en principe par plusieurs raisons, notamment par cette raison qui sert aujourd'hui de texte aux accusations injustes qu'on élève contre moi.

J'en viens au fait qui me concerne personnellement et à l'explication de ce fait.

Je faisais partie d'un ministère homogène qui avait obtenu, dans le cours de deux laborieuses sessions, la majorité dans cette Chambre.

Les élections de 1847 avaient été contraires à ce cabinet ; cependant malgré les échecs que la majorité avait subis, elle existait encore ; elle existait faible, découragée. Voulez-vous que je dise : elle existait incertaine, on pouvait douter si elle existait. Le droit du cabinet dans cette condition était de dire : J'attends un vote des Chambres, je veux que la question de cabinet soit décidée par elles.

Dès le lendemain des élections, nous avons été unanimes et j'ai été un des premiers à soutenir que notre devoir, dans ces circonstances, était de donner immédiatement notre démission. Les élections, si j'ai bon souvenir, ont eu lieu le 10 ou le 11 juin ; notre démission a été donnée le 12 juin. Cette démission a été acceptée seulement le 12 août, c'est la date de la formation du premier cabinet où est entré l'honorable M. Frère avec l'honorable M. Rogier et..

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - L'honorable général Chazal.

M. Malou. - L'honorable général Chazal. Ayant donné ma démission, dépendait-il de moi qu'elle ne fût pas acceptée tel jour plutôt que tel autre ? Quelle a pu être la cause pour laquelle elle a été acceptée si tard ? Je vous avoue qu'aujourd'hui encore je l'ignore.

Est-ce une pensée de bienveillance du Roi ? le Roi a-t-il pensé que d'après les services que j'avais rendus dans ces fonctions et d'autres, pendant plusieurs années, il y aurait lieu d'attendre telle date ? Je l'ignore. Cela est-il possible, y a-t-il eu d'autres motifs politiques ?

Enfin, messieurs, quoi qu'il en soit, étais-je maître de faire que ma démission fût ou ne fût pas acceptée ?

Il y a plus, lorsque cette accusation a été produite à cette époque, lorsqu'on paraissait vouloir hâter la fin de la crise, lorsqu'on m'accusait d'être un obstacle à la réalisation de ce but, j'ai sollicité plusieurs fois, au mois de juillet, l’acceptation isolée de ma démission comme membre du cabinet.

Messieurs, suis-je blâmable, dans ces conditions, d'avoir usé d'un droit légal, d'un droit qui a été étendu depuis à des ministres par des considérations d'équité ?

Ma conscience me dit que je ne suis pas blâmable et je regrette beaucoup que l'honorable M. Lelièvre ait trouvé dans cet acte un prétexte d'accusation ; j'ai la conviction profonde qu'en aucune circonstance de ma carrière politique je n'ai cessé de mériter la sympathie de mes amis, à quelque opinion politique qu’ils appartiennent, et l'estime de mes adversaires.

Projet de loi, proposé par une section centrale, modifiant la loi électorale

Discussion générale

M. Devaux. - Messieurs, si quelqu'un a droit de s'étonner ou de se plaindre des propositions de la section centrale, ce ne sont pas les membres de la droite, ce ne sont pas leurs honorables chefs. Dans une séance du commencement de l'année dernière, une discussion s'était élevée précisément sur la matière que nous discutons aujourd'hui, sur les réformes à introduire dans la loi électorale, c'était à propos de quelques pétitions.

L'honorable M. Malou, à cette époque, émit l'axiome suivant qui m'a tellement frappé dans sa bouche que je l'ai retenu littéralement ; vous pouvez le trouver consigné au Moniteur, séance du 8 février 1858 :

« Dans tous les pays où le gouvernement repose sur des élections, disait l'honorable membre, l'examen des lois électorales est à l'état permanent. »

Messieurs, je ne dirai pas que c'est là un principe révolutionnaire ; je ne fais pas de ce mot le fréquent usage que commencent à en faire depuis un certain temps quelques membres de cette Chambre, à l'imitation de certains journaux ; ce langage a été importé de l'étranger, en même temps qu'une théorie politique en vertu de laquelle il n'y a plus en Belgique, comme en France, que les partisans de leurs doctrines, d'un côté, et des révolutionnaires de l'autre.

Mais j'ai peine à voir là un principe conservateur. Il me semble par (page 1006) trop étrange qu'un parti se donne le titre de conservateur, et qu'un des chefs de ce prétendu parti de la stabilité condamne à une mobilité perpétuelle les lois organiques les plus essentielles, je dirai presque les plus fondamentales de notre édifice politique.

L'honorable M. Malou aurait-il droit de s'étonner si un jour, dans des temps orageux, où les passions prennent le dessus, quelque main plus hardie encore que la sienne, s'autorisait de son principe pour écrire à côté le suivant :

« Dans les gouvernements qui reposent sur une Constitution, l'examen de la loi constitutionnelle est à l'état permanent. »

Messieurs, quand de si dangereuses doctrines sont professées dans cette Chambre, quand elles sont professées au milieu d'un parti qui prétend avoir pour lui le monopole des doctrines conservatrices, il ne faut pas se plaindre qu'elles produisent leurs fruits et que des modifications à la loi électorale soient sollicitées de plus d'un côté.

Nous sommes aujourd'hui en présence de deux systèmes de réforme. Il n'eût pas été extraordinaire qu'il s'en fût produit un plus grand nombre en vertu de la doctrine de l'honorable M. Malou.

Avant de parler de la proposition de la section centrale je vais m'occuper du système de MM. de Theux et Malou, etc., comme apportant à la loi électorale la modification la plus considérable.

Messieurs, la réforme proposée par MM. de Theux et Malou est une ancienne connaissance, mais qui a déjà changé plusieurs fois de costume ; elle a déjà eu six phases et subi six transformations.

D'abord on ne voulait pas faire voter seulement dans des localités différentes les électeurs d'un même arrondissement. Ou voulait fractionner l'élection elle-même et n'avoir que des circonscriptions électorales de 40,000 âmes ayant chacune un seul représentant.

Il y a eu même un premier pétitionnement dans ce sens.

On s'est aperçu, au bout de quelque temps, que cette réforme pourrait bien n'avoir pas tout à fait les effets qu'on en attendait. Il est vrai qu'en faisant des districts de 40 mille âmes on détachait les campagnes des grandes villes, et qu'on avait des arrondissements d'électeurs de campagnes à part.

Mais les petites villes qui forment aujourd'hui une minorité dans leurs districts, dès qu'on ne les entourait plus d'un nombre d'électeurs campagnards suffisant et qu'on réduisait l'arrondissement à 40,000 âmes menaçaient de l'emporter dans ces petites circonscriptions. On gagnait en démembrant les arrondissements des grandes villes, mais on risquait de perdre ceux où les petites villes allaient dominer.

On en vint alors aux circonscriptions électorales de 80 mille âmes ; il était naturel, disait-on, de faire des collèges de 80 mille habitants puisqu'il fallait 80 mille habitants pour un sénateur. De nouveaux calculs prouvèrent qu'on s'était trompé encore ; qu'on courait encore le danger de perdre plus qu'on ne gagnerait.

Une troisième combinaison fut inventée ; celle-là fut formulée, si j'ai bonne mémoire, par un honorable sénateur ; il proposait de conserver tous les districts électoraux ayant trois représentants à élire, et de diviser les autres. Ce système était plus net ; c'était contre les grandes villes qu'il était dirigé : Bruxelles, Gand, Liège, Anvers, Mons, Tournai. On reconnut qu'il était difficile de soutenir ce système qui faisait voir trop clairement ce qu'on voulait.

Il ne s'agit plus aujourd'hui de fractionner les arrondissements, mais de multiplier les lieux où l'on déposerait les votes. Là encore nous trouvons trois phases : d'abord celle du vote à la commune, il y a eu un pétitionnement à ce sujet ; je me rappelé avoir vu une pétition d'une commune de mon arrondissement, située à une demi-lieue de Bruges, qui se plaignait de la longueur de la route qu'avaient à faire les électeurs campagnards pour se rendre au chef-lieu d'arrondissement.

L'honorable M. Malou a reconnu depuis lors, dans cette enceinte, que le système est impraticable, qu'il n'y a pas moyen de voter à la commune à cause de la difficulté de former des bureaux et pour plusieurs autres raisons ; et il s'est prononcé pour le vote au chef-lieu de canton. Cependant l'honorable M. de Theux persistait à vouloir le vote à la commune.

Les deux chefs de la droite n'étaient pas d'accord ; pendant la présence de M. de Decker aux affaires, il était sans cesse menacé d'une proposition de réforme électorale ; c'était une espèce d'épée de Damoclès suspendue sur sa tête et qui lui a causé peut-être plus d'une insomnie. On n'avait pu se mettre d'accord dans la majorité ; on a été plus heureux dans l'opposition ; ces messieurs ont, comme on dit, coupé la différence en deux ; ce n'est plus le vote à la commune ni au canton, mais quelque chose d'intermédiaire, quoique chose d'indéterminé, et que les honorables auteurs de la proposition seraient fort embarrassés, je crois, de préciser davantage.

Ils nous proposent des circonscriptions nouvelles qui séparent les votants par petits groupes, et je crois qu'il leur serait fort difficile de dire, à quelques centaines près, combien leur projet créerait de ces circonscriptions dans le pays. La proposition, dont on avait tant de fois menacé, et qu'on avait osé mettre au jour depuis des années, la voilà donc lancée. Je ne suis pas de ceux qui regardent cette proposition comme chose peu sérieuse, parce que, partant d'une minorité, elle ne peut aboutir dans ce moment.

On a craint de la produire quand on était majorité ; pourquoi la met-on en avant quand elle ne peut réussir ? C'est que les majorités sont plus prudentes ; une majorité ne se serait pas réunie autour de cette proposition ; il y aurait eu des divisions, mais dans la minorité on est moins prévoyant et plus hardi. On s'y réunira autour d'une proposition pareille, dès lors le parti sera engagé et la mesure entre dans son programme.

Voilà le sens de la proposition ; c'est le programme de la droite pour le jour où elle reviendra au pouvoir. Aussi je la considère comme un fait très grave, parce qu'en adoptant ce programme, la droite décide que si elle remonte un jour au pouvoir, ce ne sera plus avec les principes du dernier ministère, mais avec une politique extrême ayant pour devise : Tout ou rien.

Messieurs d'ordinaire quand on produit un système si important et quand ce sont des hommes aussi graves, aussi considérables qui le présentent, on a soin de constater par des faits les abus auxquels on veut porter remède ; j'en cherche en vain les preuves.

J'ai entendu les honorables membres réclamer toute espèce de renseignements du gouvernement, pour la loi de répartition des représentants ; je n'en ai vu aucun produit par eux, à l'appui de leur amendement. Cependant il s'agissait d'établir en fait que la loi avait eu de mauvais résultats ; pour motiver une modification si grave, il fallait dans la législation des vices bien considérables. Nous avons été bien longtemps à nous apercevoir que la législation électorale du Congrès avait de si grands défauts.

Ils se sont révélés, prétend-on, quand le cens a été abaissé. C'est depuis lors, assure-t-on, qu'il a été évident pour tout le monde que les distances étaient trop grandes, que les électeurs des campagnes étaient gênés dans l'exercice de leur droit, qu'il y avait privilège pour les villes.

Messieurs, la droite paraît se plaindre beaucoup aujourd'hui de l'abaissement du cens, et ces plaintes me surprennent quelque peu. Je ne rappellerai pas que l'abaissement du cens n'a pas été une mesure de parti, mais une mesure prise par un ministère libéral, en quelque sorte sous la pression des événements politiques, et avec l'assentiment le plus complet, si ce n'est même sous l'inspiration de la droite.

Cette mesure si importante dans son origine a-t-elle favorisé le parti libéral aux dépens du parti contraire, ou les villes plus que les campagnes ?

Il y avait, avant l'abaissement du cens, 46,000 électeurs en Belgique ; il y en a aujourd'hui 90,000 ; différence, 44,000. Eh bien, quel a été le partage de cette différence entre les villes et les campagnes ? Du côté des campagnes, il y a eu augmentation de 23,000 électeurs ; du côté des villes, l'augmentation a été de 20,000. Ainsi, la différence qui existait entre les deux catégories d'électeurs a été augmentée.

Les campagnes ont obtenu plus d'électeurs que les villes. Ah ! j'entends l'objection ; on me dit : Mais, il y avait environ deux fois plus d'électeurs dans les campagnes et pour qu'il y eût répartition impartiale de l'augmentation, il eût fallu augmenter du double les électeurs des campagnes. Ah ! c'est ainsi que vous entendez l'impartialité ? Quoi ! est-ce que les élections se décident à la majorité proportionnelle ? Elles se décident, je suppose, à la majorité absolue. S'il y a, dans un district, dans un collège électoral, 90 électeurs libéraux et 100 électeurs catholiques, est-ce que je change quoi que ce soit à cet état de choses en donnant 20 électeurs de plus à chacun des deux partis ? Est-ce que je ne maintiens pas la supériorité de 10 voix ?

Si, dans une balance qui penche d'un côté, j'ajoute un poids égal à chaque plateau, le défaut d’équilibre ne reste-t-il pas le même ?

Mais, messieurs, ce n'est pas tout. On oppose les campagnes aux villes ; à part le côté politique, dont je m'occuperai tout à l'heure, y a-t-il un intérêt campagnard et un intérêt urbain ? Y a-t-il antagonisme entre les deux intérêts ? Parlerez-vous de l'intérêt agricole ? Mais, qui est-ce qui est le plus intéressé à l'agriculture si ce ne sont les propriétaires, et dans quelle proportion les propriétaires fonciers ne figurent-ils pas parmi les électeurs des villes ? Où est donc l'antagonisme, l'intérêt entre ces deux classes ?

Maintenant, sous le rapport politique l'opinion de nos adversaires à la vérité est plus forte à la campagne, la nôtre dans les villes. Qu'a produit l'abaissement du cens ? Il vous a donné plus de partisans qu'à nous dans les campagnes ; il vous en a même donné plus qu'à nous dans les villes ; pourquoi ? Parce que votre force gît dans deux classes de la société : dans la noblesse catholique peu nombreuse et dans les plus petits électeurs qui sont fort nombreux. Notre force à nous est dans toute la région moyenne de la société que l'abaissement du cens concerne peu.

Vous avez, en plus, de petits électeurs à vous dans les villes ; et dans les campagnes aussi, la classe d'électeurs qui a été augmentée est la plus dépendante, celle sur laquelle vous exercez le plus d'influence. Cela me paraît peu contestable. S'il en fallait une preuve, je citerais les arrondissements de campagne, tels que Alost, Audenarde et autres où nous étions parvenus à conquérir la majorité en 1847, avant l’abaissement du cens et où, depuis lors, nos adversaires ont eu une supériorité de plusieurs centaines de voix, notre nombre, à nous, restant à peu près ce qu'il était jadis et le leur s'augmentant de tout le surcroît des électeurs nouveaux.

M de Naeyerµ. - Vous avez eu la majorité après aussi ; vous l'avez eue et perdue.

(page 1007) M. Devaux. - Nous l’avons conservée en 1848 parce que nos candidats étaient en possession et qu'il n'y a pas eu de lutte ; mais pourquoi l'avons-nous perdue depuis dans ces arrondissements et n'avons-nous pas pu la reconquérir malgré les progrès qu'a faits d'ailleurs l'opinion libérale ? C'est que la composition des collèges électoraux était considérablement changée dans ces localités. L'honorable M.de Naeyer sait très bien qu'en 1848 il n'y a pas eu de lutte, que ce n'est pas cette année-là qui peut donner la mesure de la force des partis.

M. de Naeyer. - Il y a eu lutte.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Très faible ; vous étiez découragés.

M. Devaux. - Quand la lutte est éteinte ou attiédie dans les Chambres, les élections s'en ressentent infailliblement.

Mais, dit-on, les électeurs qu'a produits l'abaissement du cens sont moins riches, ont moins de ressources pécuniaires ; et dès lors il leur est plus difficile de se faire transporter au lieu de l'élection ; et les vices de la loi deviennent plus sensibles.

Eh bien, voyons les faits ; voyons ce qui est arrivé, voyons si les nouveaux électeurs ne se sont pas rendus comme les autres au scrutin électoral ?

En 1847, lors des dernières élections qui ont eu lieu sous le régime de l'ancienne loi, de l'ancien cens, en 1847, année de luttes électorales, de luttes très vives, quel a été le nombre d'électeurs des villes et des campagnes qui ont pris part aux élections ?

Le nombre des votants campagnards a été de 70 sur cent électeurs inscrits ; celui des votants des villes a été de 76 sur cent ; soit une différence de 6 p. c. en faveur des villes.

M. Malou. - Six sur 70 et non pas sur cent.

*1. Devauxµ. - Six sur 76 votants ou sur 100 électeurs inscrits. Vous allez voir qu'il importe peu pour l’usage que je veux faire de ces chiffres.

Voyons maintenant ce qui s'est passé aux dernières élections de 1856 et 1857. En 1856 il y a eu 70 électeurs pour les villes, par conséquent 6 de moins qu'en 1847 et 72 pour les campagnes, par conséquent deux de plus qu'en 1847 ; il y a eu, remarquez-le bien, non plus différence de six pour cent en faveur des villes, mais de 2 p. c. en faveur des campagnes ; il y a eu plus de votants des campagnes que des villes. Et l'on se plaint que, depuis l'abaissement du cens, les électeurs des campagnes ne peuvent plus se rendre aux élections.

Les dernières élections ont eu lieu en décembre 1857, en plein hiver. M. Malou avait prédit, dans cette Chambre même, que les électeurs des campagnes n'y viendraient pas ; eh bien, jamais, à aucune époque, il n'y en a eu davantage ; il y a eu pour les campagnes 83 votants sur 100 électeurs inscrits, tandis qu'en 1847, sous l'ancienne loi, il n'y en avait que 70 ; 15 p. c. de différence, tandis que, dans les villes, l'augmentation n'a été que de 9 p. c.

Ainsi, depuis l'abaissement du cens, loin que les faits aient prouvé en faveur de la proposition de l'honorable membre, les faits la condamnent de la manière la plus complète.

Il est vraiment incroyable qu'en présence de pareils faits on ose se plaindre des effets de l’abaissement du cens sur la présence des électeurs au vote.

Vous voulez le vote à la commune, vous voulez le vote au canton ! Nous avons des élections communales et cantonales.

Encore une fois, consultons les faits, ils sont concluants : d'après les documents statistiques contenant les résultats des élections cantonales de 1848 et de 1836, les seuls, je pense, qui aient été publiés, il y a eu pour l'une de ces années, au canton seulement 58 votante sur cent électeurs inscrits et pour l'autre 62.

Pour les élections communales il y a eu 75 votants sur 100 en 1836 et 77 en 1848.

Ainsi, loin que ces élections au chef-lieu de canton et à la commune aient été beaucoup plus suivies que celle du chef-lieu d'arrondissement, c'est dans celle-ci que le nombre des votants a été le plus considérable, preuve que l'intérêt qu'on porte aux élections des Chambres suffit bien pour compenser le prétendu obstacle de la distance du chef-lieu.

Vous aurez beau mettre le vote à la commune ; vous le mettriez même dans la chambre à coucher, comme on le disait hier, il y aurait toujours certaines abstentions dans beaucoup de districts. Dans celui qui m'a élu notamment, le nombre des votants campagnards dépasse celui des votants des villes.

Ainsi, aux dernières élections qui ont eu lieu à Bruges, il y a eu 91 votants campagnards sur cent et seulement 90 votants citadins sur cent. Dans beaucoup d'autres localités encore.

Je pense donc que les faits prouvent, de la manière la plus évidente, qu'il n'est pas nécessaire d'apporter de changement à la loi électorale, pour faciliter aux électeurs l'accès du scrutin.

Il serait difficile, je crois, de citer un autre pays constitutionnel, oh le nombre des électeurs prenant part au vote soit plus considérable.

Messieurs, on veut aujourd'hui des circonscriptions nouvelles, pour grouper les électeurs des campagnes des circonscriptions de deux lieues de rayon.

Je suppose que cela veut dire un rayon de dix kilomètres autour du lieu où l'on votera, car si c'était un rayon autour de la commune, on étendrait beaucoup la circonscription. Mais on ne s'est pas expliqué sur ce point ; ob n'a pas dit d'où partirait le rayon. Je supposerai donc que le centre de ce rayon serait le local de l'élection, c'est-à-dire la maison communale.

Eh bien, messieurs, si vous le prenez ainsi, quel est aujourd'hui le rayon moyen de nos arrondissements ? Il est de trois lieues à trois lieues et demie. Certainement cette distance n'est pas énorme. S'il y a quelques districts qui s'éloignent de cette moyenne, est-ce une raison pour les bouleverser tous ?

Ainsi dans mon arrondissement, par exemple, les communes les plus éloignées du chef-lieu en sont distantes de trois à quatre lieues, et il est le centre de trois chemins de fer venant du sud, de l'est et de l'ouest ; quant aux électeurs du nord, ils possèdent en grand nombre des chariots à deux chevaux et des cabriolets ; de sorte que dans cet arrondissement on a fort peu à s'occuper des moyens de transport. Sous quel prétexte viendrait-on y introduire cette innovation ?

Mais ce rayon de deux lieues, il faudra dans la plupart des cas le raccourcir considérablement, car son extrémité extérieure, c'est-à-dire la circonférence qu'il décrira tombera très souvent au milieu d'une commune et comme d'après votre principe, que les habitants d'une même commune doivent pouvoir se concerter, il n'est pas possible de séparer la commune en deux et que d'autre part vous fixez vous-mêmes le maximum de votre rayon à deux lieues, force vous sera de raccourcir le rayon chaque fois que la circonférence tombera au milieu d'une commune tantôt d'une demi-lieue, tantôt de trois quarts de lieue ou d'une lieue entière, et il vous est impossible de dire quels seront en réalité l'étendue et le nombre de vos circonscriptions, s'il y en aura 300, 400, 600 ou davantage.

C'est, messieurs, une méthode législative par trop commode de décréter ainsi d'une manière pour ainsi dire abstraite des circonscriptions administratives à tracer sur la carte au compas sans s'inquiéter de savoir ce qu'elles seront en réalité.

Il1 y a, messieurs, un effet que, dans toutes les transformations de ce projet de réforme, on a toujours obtenu ; c'est d'isoler complétement l'électeur campagnard, de l'isoler de l'électeur des villes, d'empêcher tout rapport électoral ou politique entre l'électeur des campagnes et l'électeur des villes On soutient, il est vrai, que ce n'est pas là ce qu'on a en vue, on a voulu seulement diminuer les frais de transport. Mais si c'est là le but, il n'est pas besoin d'une réforme électorale pour l'atteindre.

Si vous trouvez que le transport coûte trop, il y a à cela un remède fort simple, il n'y a qu'à transporter gratis les électeurs par le chemin de fer ; il n'y a qu'à dire au gouvernement de faire organiser des moyens de transport sur les autres voies partout où les électeurs sont à plus de deux lieues du chef-lieu d'arrondissement. Cela coûtera peut-être 50,000 fr. tous les deux ans. Si c'est là ce que vous voulez, il n'est pas besoin pour cela de remuer de fond en comble les lois électorales et d'ériger en principe leur instabilité perpétuelle.

Mais, dit-on, ce ne sont pas seulement les frais de transport, ce sont les dîners. Messieurs, les dîners ont tardé à s'introduire ; si vous fractionnez, vous aurez non plus des dîners au chef-lieu d'arrondissement, mais vous aurez, au bout de quelque temps, des dîners dans vos circonscriptions, quelles qu'elles soient. Ne sommes-nous pas la terre classique des kermesses de village ? Il y aura des « kermesses électorales ».

J'ai déjà dit un autre jour à quelle proposition pourrait se réduire la dépense des dîners si les associations électorales, les candidats ou leurs patrons le voulaient fermement. Nous savons tous combien il y a en moyenne d'électeurs pour un représentant : 600 ou 700 votants. Il y a deux concurrents pour une place, les votants se partagent donc entre deux concurrents, combien cela fait-il pour chacun ? 300 ou 400 électeurs à faire dîner. Est-ce ruineux ?

Dans beaucoup d'arrondissements les habitants du chef-lieu dînent chez eux. Cela réduit encore les frais. Faire dîner 300 ou 400 électeurs, on peut trouver que c'est une dépense qui ne devrait pas se faire, mais enfin ce n'est pas une dépense ruineuse, et il n'y a pas là de quoi crier à la corruption ou au scandale. Ce n'est pas ce qui éloignera un candidat de la représentation nationale.

- Un membre : Et le champagne ?

M. Devaux. - Si l'on fait davantage, ce n'est pas la faute du système électoral, c'est parce qu'on s'est laissé aller à une espèce d'émulation entre concurrents ; on a eu tort et il faut revenir de cet usage.

Messieurs, ce qui résulterait infailliblement d'une mesure semblable à celle qu'on propose c'est la séparation des électeurs campagnards des électeurs des villes, c'est qu'on séquestrerait en quelque sorte les électeurs des campagnes loin de ceux qui peuvent leur donner les renseignements les plus indispensables.

On a dit qu'on ne se concertait pas, aujourd'hui, puisque chacun arrive de la campagne avec son bulletin tout fait. Mais que de tromperies il y aurait dans les communes, si on ne savait pas que les électeurs arrivent à la ville et qu'ils peuvent y être détrompés d'un moment à l'autre, si on ne savait pas qu'à la ville l'électeur entre en rapport avec son propriétaire !

(page 1008) Ce sont ces rapports du propriétaire avec l'électeur qu'on supprime pour le laisser tout entier sous l'influence qui domine dans la commune.

Ne voyez-vous pas, si vous isolez les électeurs des campagnes, tout ce qu'on pourrait leur faire accroire de faussetés sur le compte des candidats ? Ne parlez pas du contrôle de la presse ; vous savez bien que dans la plupart des petites communes il n'y a qu'une seule presse, celle de l'opinion dominante et que, quand un autre journal y pénètre, on suit le facteur pour voir dans quelle ferme il le remet et pour aller l'enlever. S'il paraît dans une auberge on traque l'aubergiste, sa femme et ses enfants jusqu'à ce qu'où soit parvenu à le faire disparaître.

Comment les campagnards auront-ils des renseignements sur des candidats qu'ils ne connaissent pas ? Comment sauront-ils ce qu'ils doivent penser de ceux de l'un ou de l'autre parti ? Savez-vous ce qui se pratique déjà aujourd'hui dans certains arrondissements ? Pour empêcher les campagnards d'être éclairés par les habitants de la ville, on ne fait connaître les candidats pour lesquels on leur enjoint de voter que deux ou trois jours avant l'élection et on attend plus tard encore pour les faire connaître de la ville. Que sera-ce donc quand on n'aura plus à craindre le contact des habitants de la ville ?

On a cité encore une fois le système hollandais. Mais ce système a les plus détestables conséquences dans la pratique. Il détruit le secret du vote.

La transmission des urnes électorales détruit toute garantie contre l'introduction frauduleuse ou la soustraction des bulletins. Ensuite, comme les communes se trouvent partout isolées, il n'y a plus d'esprit d'ensemble, il n'y a plus d'esprit politique, et chaque commune tâche d'avoir le candidat qui se rapproche le plus possible de la localité. Les ballottages sont sans fin, dans ce chaos, les électeurs se découragent et l'élection perd son caractère le plus important.

Messieurs, les partis et leurs chefs ont quelquefois la mémoire ou la vue bien courtes. Nos adversaires étaient en majorité, il y a bien peu de temps. Nous les croyions, ils se croyaient eux-mêmes majorité pour longtemps. Il a suffi, messieurs, de bien peu de chose pour les renverser, il a suffi d'une loi qui trahissait des prétentions exagérées ; il a suffi de quelques autres imprudences, parmi lesquelles il faut ranger la menace de ces mêmes réformes sur lesquelles ou revient aujourd'hui.

Oui, ces projets ont certainement contribué à votre chute. A la suite de ce revirement de fortune, qu'avons-nous vu ? Je ne veux pas désobliger, aigrir nos adversaires, mais nous les avons vus se condamner eux-mêmes à une espèce d'abstention, pendant un an, ne plus prononcer ici un seul mot qui concernât la politique ; nous les avons vus se donner tous les airs d'impuissance ; sortir de la salle, quand nous voulions les provoquer à une discussion politique ; donner à entendre qu'au premier acte de notre part qui leur déplairait, ils s'abstiendraient dans les élections.

On vient enfin de quitter cette attitude ; on entre en discussion, et d'un coup, d'un seul bond, pour ainsi dire, ou passe de cet abattement extrême à une extrême témérité. On parle, et c'est pour menacer ; on parle et c'est pour nous dire : « Nous sommes impuissants ; mais voici ce que vous avez à attendre de nous si nous nous relevons. » Ne pourrait-on donc pas se tenir entre la fièvre d'un côté et l'atonie de l'autre ? Est-il donc si difficile d'adopter une politique qu'on puisse suivre dans la mauvaise comme dans la bonne fortune ? Que votre rôle serait différent si, au lieu de vos menaces irritantes, vous vous étiez associés aux principes de la proposition de la section centrale ; vous y auriez gagné énormément en force morale. Mes paroles vous étonnent ; vous les soupçonnez probablement de n'être pas sincères ; vous dites que cela arrangerait bien vos adversaires. Non, messieurs, votre parti y gagnerait considérablement.

L'un de vous nous parlait de la force morale des partis, dans une de nos dernières séances. Eh bien, vous n'y attachez point assez de prix ; vous tenez trop au succès matériel, au succès numérique. N'en avons-nous pas eu un exemple, il n'y a pas très longtemps, lorsque les voix se balançaient à peu près dans cette enceinte ? Vous êtes venus prendre, au milieu de nous, un des nôtres en lui offrant une dignité parlementaire ; vous avez cru qu'en faisant ainsi passer sa voix de votre côté, c'était un triomphe immense que vous remportiez ; celui qui l'aurait contesté, celui qui vous aurait dit : « Vous faites une faute », vous l'auriez soupçonné de vouloir vous tromper ; eh bien, à quoi vous a servi ce triomphe ? Pour combien ne doit-il pas compter parmi les causes de votre défaite ?

Messieurs, une des faiblesses de votre parti, c'est l'apparence cléricale qu'il a aux yeux de tous, non seulement par ses doctrines, mais par sa presse, par ses élections, par tout ce qui frappe les yeux dans un parti politique. Je prends ici l'expression cléricale dans une acception fort inoffensive ; je veux dire que ce qui éloigne le plus de votre parti, c'est qu'on croit que, pour diriger des affaires temporelles, il est sous l'influence d'hommes auxquels ou ne reconnaît qu'une mission spirituelle. Voilà ce qui vous nuit. C'était une magnifique occasion de vous montrer un parti laïque, un parti non plus clérical, mais conservateur.

Je le sais, vous auriez peut-être perdu momentanément quelques voix dans les collèges électoraux. Cette perte eût été un gain, parce que vous auriez regagné par la base, par ce qui fait la vraie puissance d'un parti, ce que vous perdiez à sa surface.

Messieurs, le gouvernement a pris le contre-pied de la politique que je reproche à nos adversaires, et je l'en approuve ; le gouvernement n'a pas eu foi dans des expédients, dans des moyens matériels, dans de petites ressources électorales ; mais il a eu foi dans sa modération, il a eu foi dans une politique large et généreuse.

Cette politique, messieurs, a été, de tout temps, celle que j'ai préférée ; vous nous provoquez, votre presse nous outrage ; nous vous répondons par le calme et par la modération.

Vous voulez innover, vous voulez bouleverser les lois électorales à l'improviste ; nous demandons, nous, qu'on réfléchisse avant de les modifier ; nous voulons qu'on ne montre pas d'impatience ; nous voulons que rien dans ces réformes ne puisse être soupçonné de passion et de légèreté.

Nous voulons calmer les populations, nous voulons prouver que ce n'est pas par surprise que nous sommes majorité et que ce n'est ni par surprise, ni par aucun moyen nouveau, quelque légitime qu'il soit, que nous voulons le rester. Nous avons confiance dans les électeurs, parce que nous croyons pouvoir nous honorer de la conduite que la majorité et le gouvernement ont suivie.

Le gouvernement a compris que, dans la position qui lui était faite, il devait pousser la modération très loin, il devait donner le démenti le plus éclatant à toutes les prédictions sinistres, à tous les outrages qui lui avaient été prodigués ; cette politique, il l'a suivie avec fermeté ; ces outrages, il les a glorieusement démentis ; ces prédictions ont été confondues par les faits.

Messieurs, je regarde les propositions de la section centrale comme ayant plus d'un côté utile et juste. Je rends hommage au sentiment qui les inspire.

Ce n'est pas une pensée de bouleversement, mais une pensée de moralité électorale ; mais à mon avis il ne suffit pas à une mesure politique d'être bonne, utile, juste en elle-même, il faut aussi qu'elle soit opportune. L'opportunité est une condition essentielle des mesures politiques.

Si j'avais à me prononcer définitivement aujourd'hui pour ou contre, s'il ne me restait pas d'autre parti, j'aurais de la peine à me prononcer contre ; mais une pareille matière a besoin, à mon avis, d'être préparée de plus longue main et introduite avec plus de maturité ; je désire rester complétement libre dans l'avenir et maître de me prononcer plus tard sur l'opportunité de l'introduction de cette mesure et sur les détails de son exécution.

(page 1015) M. Henri Dumortierµ. - Au point où est arrivé ce débat et après les remarquables discours que vous avez entendus, je n'abuserai pas des moments et de la bienveillance de la Chambre.

Je me bornerai à vous présenter quelques considérations et à rencontrer quelques arguments produits par l'honorable M. Devaux.

L'honorable député de Bruges a commencé son discours par un genre de raisonnement dont je ne puis que difficilement me rendre compte.

Quand nous avons gardé le silence dans cette enceinte, non par faiblesse, croyez-le bien mais par patriotisme, afin de laisser à l'opinion publique surexcitée et égarée le temps de se calmer, l'honorable membre blâme notre attitude peu militante. Maintenant, lorsque nous entrons résolument et courageusement dans l'arène, l'honorable M. Devaux y trouve également à redire.

Antérieurement à cette discussion certains membres de la droite ont développé plusieurs systèmes concernant la lo électorale. Ces systèmes offraient entre eux quelques différences, je le reconnais ; mais tous, cependant, étaient basés sur le même principe et tendaient au même but : l'abolition des corvées électorales et le rapprochement de l'urne de l'électeur. Eh bien, en présence de cette divergence d'opinions, non quant au but, mais quant aux moyens, l'honorable M. Devaux s'écrie avec une satisfaction marquée : Vous n'êtes pas même d'accord entre vous ; nous repoussons tous ces systèmes.

Enfin quand aujourd'hui nous nous sommes mis d'accord et que nous venons vous faire une proposition admise par tous ou par presque tous les membres de la droite, l'honorable député de Bruges nous adresse de sévères remontrances. J'avoue que, pour ma part, je le trouve difficile à contenter et que je ne sais comment il faudrait s'y prendre pour avoir quelque chance de le satisfaire.

Je ne répondrai rien à ce qu'a dit l'honorable membre sur les différents modes de transporter les électeurs au moyen des chemins de fier et d'autres genres de locomotion ; je ne relèverai pas non plus ce qu'il a dit concernant l'entretien des électeurs au moyen d'espèces de kermesses de village ; je ne veux pas répondre par des plaisanteries à un homme ordinairement aussi sérieux que M. Devaux.

Une autre partie de son discours m'a, je l'avoue, touché davantage, c'est celle où il nous a accusés de ne pas assez tenir compte de la force morale, de ne pas assez estimer les forces morales, et où il rejette sur nous la responsabilité de l'irritation que cette discussion produit dans le pays.

Mais est-ce bien sérieusement, messieurs, que l'honorable M. Devaux nous reproche de dédaigner les forces morales ? Qu'il veuille recueillir ses souvenir récents et qu'il nous dise, la main sur la conscience, qui, du parti libéral ou du parti conservateur, a dédaigné les forces morales pour faire appel à la violence et aux forces brutales ; je veux bien ne pas trop insister sur ce point.

Nous sommes responsables de l’agitation que ce débat jette dans les esprits!

Comment ! dans un moment où de graves événements extérieur prennent caractère de plus en plus grave, dans un moment où la patrie pourrait devoir faire un appel au dévouement de tous ses enfants, vous jetez ce nouveau brandon de discorde parmi les citoyens, vous créez une cause nouvelle d'agitation et de lutte, et c'est nous, nous qui sommes obligés de nous défendre ici contre vos agressions, c'est nous, dis-je, que vous rendez responsables des conséquences mauvaises d'une pareille discussion ! En vérité, messieurs, c'est à ne plus rien y comprendre.

La proposition de la section centrale est inopportune et imprudente à d'autres points de vue.

L'étude de cette importante question n'est qu'ébauchée ; le gouvernement lui-même déclare qu'il est complétement impossible de faire usage au mois de juin d'autres lois électorales que de celles qui existent actuellement, et en présence d'une déclaration aussi formelle, que faites-vous ? Vous mettez en discussion presque toute cette loi organique, qui forme la base de notre système électoral.

Croyez-vous, messieurs, qu'il n'y a pas quelque danger à ébrécher ainsi prématurément et sans nécessité aucune la force morale de cette loi, à lui enlever son autorité, son prestige aux yeux des populations ? Prenez-y garde, cette loi qui sortira amoindrie de cette discussion doit servir dans quelques semaines à interpréter la volonté nationale. Et qu'arriverait-il donc si le parlement, renouvelé conformé ment à cette loi défectueuse, était regardé comme ne représentant pas réellement la volonté et tous les intérêts de la nation ?

L'honorable M. Devaux se plaisait tantôt à relever certains axiomes qu'il attribue à notre parti ; y aurait-il quelque indiscrétion à lui demander ce qu'il pense de cet autre axiome professé par le sien : Qu'on dans telle ou telle circonstance la Chambre n'est plus l'expression de l'opinion publique?

Pour moi, je pense que cette discussion, inutile en ce moment, est en même temps fort imprudent e; mais puisqu'on nous y force, discutons.

A mesure que cette discussion avance, on découvre de plus en plus les défauts de nos lois électorales, et chose remarquable, contrairement à l'opinion émise par l'honorable M. Devaux, c’est surtout au détriment des intérêts agricoles qu’existent la plus grande partie de ces défectuosités.

Je vais tacher de le prouver : Avant la réforme électorale de 1848, il y avait 15 électeurs par mille habitants dans les villes, et 9 électeurs sur mille habitants dans les campagnes.

Depuis 1848, tandis que les villes ont 31 électeurs, les communes rurales n'en ont que 14 sur mille habitants.

La population des villes est à la population des campagnes comme un est à 3 et le nombre des électeurs des communes rurales comparé à celui des électeurs des villes est à peu près comme 6 1/-2 est à 15'.

A Bruxelles la proportion est comme 15 est à 42 ; à Anvers comme 15 est à 38 ; à Liège comme 11 est à 33.

Ajoutez à ces inégalités si choquantes le désavantage pour l'électeur des campagnes de devoir faire plusieurs lieues pour l'exercice de son droit électoral, et dites-moi s'il y a une équitable égalité entre les électeurs des villes et les électeurs des communes rurales.

Un pareil état de choses n’existe ni en Angleterre, ni en Hollande, ni dans aucun pays constitutionnel.

En Angleterre, chaque fois qu'il a été donné plus d'extension au nombre des électeurs des villes, chaque fois que l'on a donné plus de force à l'élément industriel, toujours on a augmenté dans une proportion plus ou moins considérable la catégorie des électeurs représentant les intérêts agricoles.

Le plus mauvais de tous les systèmes électoraux, disait lord J. Russell, est celui qui aurait pour résultat d'établir la suprématie, la domination des grandes villes sur les campagnes.

C’est, cependant, évidemment là ce que vous voulez faire, car toutes les réformes que vous avez introduites dans les lois électorales depuis 1848, comme celle que vous voulez improviser en ce moment, tendent toutes au même but et auront toutes ce résultat.

Dans une séance précédente, un honorable membre a parlé de la France, permettez-moi d'en dire aussi un mot. On l'a dit et on l'a écrit souvent, l'une des causes des bouleversements qui ont eu lieu dans ce pays, c'est la domination que Paris exerce sur les 86 départements français : il n'est malheureusement que trop vrai, qu'au point de vue politique, Paris a été trop souvent la France entière.

Or, où voulez-vous en venir, en Belgique ? Vous cherchez à fixer de plus en plus la prépondérance déjà trop considérable de 4 ou 5 grandes villes sur les neuf provinces belges.

C'est ce système que nous repoussons, parce que nous y voyons un grave danger.

Ne résulte-t-il pas de ces considérations qu'au lieu de nous tenir sur la défensive en matière de législation électorale, il nous appartient plutôt de prendre l'initiative pour réclamer énergiquement de justes réformes ?

L'honorable M. Devaux pense que les intérêts agricoles sont suffisamment représentés dans le corps électoral ; ignore-t-il donc, qu'il n'est pas rare de voir des fermiers locataires exploitant 20, 30 et même 40 hectares de terre, et n'ayant pas droit de voter aux élections générales ? Qu'on me permette de citer un exemple.

Je connais un fermier possédant des capitaux assez considérables employés dans son industrie, la ferme qu'il cultive a une étendue d'une vingtaine d'hectares, il n'est pas électeur.

Mais à la porte de la ferme, la femme d'un individu travaillant chez ce fermier a un cabaret et paye la double patente de cabaretière et de débitante de boissons alcooliques ; eh bien, messieurs, le mari de la cabaretière est électeur, tandis que le fermier ne l'est pas.

Il ne serait pas difficile de trouver d'autres exemples du même genre.

Et vous trouvez que la loi fait à l'agriculture une part assez large dans notre système électoral, et vous protestez de voire vive sympathie pour les paysans ? Dérision !

Oh ! sans doute, lorsqu'il s'agit de chanter les louanges de l'agriculture, mais vous ne tarissez pas d'éloges sur cette noble profession ; mais il en est tout autrement lorsqu'il est question de lui donner les moyens nécessaires pour faire valoir ses droits et pour sauvegarder ses intérêts.

Nous aimons les paysans, disait avant-hier l'honorable ministre de l'intérieur. Je, crois, moi, qu'on aime surtout les paysans lorsque au moyen de lourds impôts ils viennent remplir les coffres du trésor.

Lorsque j'entends l'honorable M. Rogier s'écrier : Paysans, je vous aime ! je me rappelle involontairement une proclamation de Napoléon adressée aux Lyonnais.

Lyonnais, je vous aime, disait aussi le grand empereur ; mais en même temps qu'il faisait cette déclaration sympathique, il leur apportait certains décrets concernant les grandes mesures qui ont assuré à leur industrie un si immense développement. Mais enfin, puisque vous dites que vous nous aimez - Je dis « nous » parce que je tiens à honneur d’appartenir à cette classe d’électeur des campagnes que vos journaux désignent si souvent sous la dénomination dédaigneuse de « bétail électoral », puisque vous nous portez tant d'intérêt, vous pourriez prendre en notre faveur plusieurs mesures qui nous seraient aussi utiles qu'agréables.

Dites donc à vos amis de la presse libérale de nous traiter moins souvent de stupides paysans, de bétail électoral, de charrues croyant en Dieu et autres aménités du même genre.

(page 1016) Mats vous pourriez nous témoigner votre vive sympathie d'une manière plus utile encore, ce serait d'introduire dans les lois électorales et provinciale une disposition analogue à celle du paragraphe de l'article 8 de la loi communale ainsi conçu :

« Le tiers de la contribution foncière d'un domaine rural exploité par un fermier compte au locataire sans diminution des droits du propriétaire. »

En présence de cette prescription de la loi communale, je dis que si pareille disposition ne reçoit pas d'extension, le législateur est inconséquent ou injuste.

Et, en effet, si cette disposition est équitable lorsqu'il s'agit des élections communales, pourquoi serait-elle injuste lorsqu'il s'agit d'élections provinciales ou d'élections générales ?

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Et la Constitution.

M. H. Dumortier. - Je sais que la question de savoir si le paragraphe 3 de l'article 8 de la loi communale pourrait être inscrit dans la loi électorale est sujette à quelque controverse. Mais aucune contestation n'est possible, au moins pour ce qui concerne les élections provinciales. Au reste, il s'agit ici bien plus de considérer la question au point de vue de l'équité qu'au point de vue de la controverse juridique.

El s'il était impassible d'inscrire cette disposition dans la loi électorale, qu'on prenne une autre mesure quelconque qui relève le fermier de la condition inférieure qui lui est faite par la législation actuelle, nous nous déclarerons satisfaits.

Dans les communes rurales, disait le rapporteur de la section centrale, lors de la discussion de la loi communale, il arrive souvent que tandis que tous les cabaretiers sont électeurs, la plupart des fermiers locataires, quoique payant en réalité de lourds impôts, ne jouissent pas de cette qualité attendu que la contribution foncière est comptée au propriétaire.

L’honorable M. Devaux a donc été mal inspiré eu venant soutenir dans plusieurs parties de son discours la thèse contraire à celle que je viens de développer, et je suis persuadé que, malgré l'autorité qui s'attache souvent à sa parole, il ne vous aura pas cette fois complétement convaincus.

Encore quelques mots et je finis. Je me borne à relever une phrase du discours qu'a prononcé hier l'honorable M. Orts :

Dans cette discussion on a beaucoup parlé, trop parlé peut-être, des dépenses électorales.

L'honorable M. Orts nous disait : Si on voulait supprimer les dépenses électorales, je proposerais que tout représentant nouvellement élu fût tenu, le jour de son entrée dans cette enceinte, d'affirmer sous serment qu'il n'a pas dépensé un centime pour obtenir son mandat ; et il ajoutait : Je désire, moi, que ceux qui ne pourraient pas faire un tel serment soient repoussés de cette enceinte.

J'aime à croire que l'honorable M. Orts ne fait personnellement aucune dépense pour être élu membre de cette Chambre et je suis persuadé qu'il pourrait en toute conscience prêter le serment dont il a parlé ; qu'il me permette cependant une simple observation sur la formule de ce serment. S, .au lieu de dire : M. Orts, jurez-vous que vous n'avez rien dépensé pour votre élection, on disait : M. Orts, jurez-vous qu'on n'a rien dépensé pour votre élection, qu'aucune association quelconque n'a rien dépensé pour votre élection ? Je crois que la question étant ainsi posée la Belgique serait exposée à perdre l'un des membres les plus distingués de son parlement.

(page 1008) M. Orts. - Pas le moins du monde.

M. Prévinaire. - Moi également.

- Plusieurs voixµ. - La clôture ! la clôture !

M. de Theux. - On dit que le parti conservateur a proclamé l'instabilité des lois électorales, et que de l'instabilité des lois électorales, on peut facilement passer à l'instabilité des institutions constitutionnelles.

L'argument me paraît un peu forcé ; mon honorable ami a eu raison de dire que les lois électorales sont toujours à l'état de question, nous sommes autant que possible partisans de la stabilité des lois électorales à condition qu'elles soient justes, car la justice doit l'emporter sur la stabilité.

De ce qu'on peut discuter les lois électorales, il ne s'ensuit pas que le pays soit disposé à discuter la base même de ses institutions constitutionnelles ; l’analogie n'est pas exacte.

Cependant la loi électorale a une très grande importance dans les institutions constitutionnelles, car si les lois électorales fonctionnent mal, on ne peut pas dire que les institutions constitutionnelles sont respectées parce qu'un des éléments est miné dans sa base. Donc les lois électorales méritent toujours un sérieux examen de la part de la législature ; elles doivent être examinées avec le plus grand soin.

Le programme de la droite, dit-on, sera à l'avenir : tout ou rien. Cette allégation est mal fondée ; nous avons articulé plusieurs griefs, nous n'avons demandé le redressement que d’un seul. J'ai signalé que dans tous les pays soumis au régime d'élections on avait aboli les grands collèges ; nous n'en demandons pas l'abolition, nous laissons les collèges dans leur forme actuelle, donc nous ne demandons pas tout ou rien.

J'abrège autant que possible mes observations ; la Chambre doit être fatiguée ; mais les considérations présentées par l'honorable M. Devaux ont un caractère très sérieux, je dois les rencontrer en très peu de mots.

Votre force, nous dit l'honorable membre, est dans les petits électeurs.

L'assertion n'est pas exacte, car un grand nombre de cultivateurs possèdent un capital supérieur à celui d'un grand nombre de patentables.

Le nombre des électeurs se détermine par l'impôt direct ; c'est par l'impôt direct qu'on crée la différence du nombre des électeurs entre les villes et les campagnes. Il est vrai que le parti conservateur compte sur les grands électeurs, mais il compte aussi sur les petits dont il est loin de dédaigner les votes.

Les grands électeurs sont ceux qui payent le cens le plus élevé ; et nous en trouvons beaucoup dans les villes qui nous appuient.

Existe-t-il un antagonisme absolu entre les électeurs des villes et ceux des campagnes ? Non, il n'existe pas, il ne doit pas exister ; mais il y a (page 1009) des intérêts distincts, des opinions différentes d-ns les villes et dans les campagnes ; dans tous les pays l'élément rural est plus calme, plus partisan du repos, de la tranquillité ; l'élément urbain, au contraire, est plus porté aux luttes politiques ; donc, il y a un intérêt distinct entre la population des villes et celle des campagnes.

Les intérêts matériels ne se confondent pas davantage ; il y a beaucoup de points sur lesquels les deux intérêts sont divergents ; les électeurs des campagnes se rendent, dit-on, en très grand nombre aux élections ? Parce que les électeurs des campagnes animés d'un esprit de dévouement et de sacrifice ne sont pas arrêtés par la position exceptionnelle, défavorable qui leur est faite, est-il juste de perpétuer cette situation est de maintenir un obstacle aux candidatures ? Je ne le crois pas.

L'honorable M. Devaux nous a donné des conseils ; nous les écoutons toujours avec plaisir ; mais ses paroles auraient plus d'autorité dans son parti que dans le nôtre, car nous sommes dans deux camps, pour le moment au moins, opposés.

On nous dit d'accepter la loi de la section centrale, qu'elle est bonne surtout pour la minorité. Les minorités se défient d'une protection qui doit leur arriver de la majorité ; les minorités sont susceptibles et très défiantes ; elles ont grandement raison.

En vous opposant au projet de la section centrale, dit-il, vous vous posez plus particulièrement en défenseurs, en mandataires du clergé. Nous défendons, dans cette enceinte, très librement sans aucune espèce de mandat, nos convictions ; ces convictions sont qu'il est nécessaire que dans tout pays les intérêts du culte aient des défenseurs aussi bien que les intérêts matériels ; si nous avons été souvent sur la brèche, c'est parce que nous n'avons pas voulu qu'on empiète sur les grands principes de liberté consacrés par notre Constitution. Je ne m'occuperai pas des questions de détail ; je remercie la Chambre de m'avoir accordé la parole une troisième fois.

M. Orts. - Afin de connaître les résultats acquis par la discussion qui peuvent influer sur les articles des deux systèmes en présence et aussi de connaître celui des deux systèmes en présence qui obtiendra la préférence, la discussion des articles devant être l'organisation pratique d'un de ces deux systèmes, pour ne pas nous lancer dans l'inconnu, je propose de clore la discussion générale et de passer au vote sur les deux questions de principe que voici :

1° La Chambre décide qu'il y a lieu de maintenir le principe que les électeurs se réunissent au chef-lieu du district administratif ;

2° La Chambre décide qu'il est utile d'introduire dans le système électoral en vigueur, le vote par ordre alphabétique.

Si la réponse est affirmative, l'amendement de M. Malou, qui est la mise en pratique du système contraire, tombe.

M. de Decker. - Je ne m'opposerais pas au vote par questions de principes si elles étaient bien posées. Je conçois qu'on vote, dans le sens de la réforme proposée par la section centrale, sur le principe en ces termes : Y a-t-il lieu d'adopter le vote par liste alphabétique, sauf à voir après comment ou organisera les détails d'application ? Mais la première question posée par M. Orts devrait être formulée dans un sens plus général. Je propose de la rédiger ainsi : « Y a-t-il lieu, oui ou non, de faciliter aux électeurs campagnards l'exercice de leur droit électoral ? » Voilà la question de principes. Je pars de là ; je n'ai aucune opinion fixée sur les limites des circonscriptions électorales proposées par mes amis. Mais je suis convaincu qu'il y a quelque chose à faire.

La rédaction large, que j'ai l'honneur de proposer, doit convenir à tous ceux qui croient qu'il est essentiel de faciliter l'exercice de leur droit aux électeurs ruraux.

L'honorable M. Devaux lui-même est de cet avis. Son système se rapproche beaucoup du mien ; c'est l'indemnité sous une autre forme. Au lieu de faire organiser par le gouvernement, ce que je crois peu convenable, des moyens de transport pour tous les électeurs ruraux du royaume, je propose le moyen déjà en usage pour les jurés, celui d'indemniser les électeurs campagnards, en leur laissant le soin de choisir tel mode de transport qui leur conviendrait le mieux.

Vous comprenez, messieurs, que, si l'on pose la question de principe dans les termes ou l'a formulée l'honorable M. Orts, il nous sera impossible de la voter, à moins de supposer que tout le monde ait une opinion parfaitement arrêtée sur l'amendement de MM. de Theux et Malou.

J'avoue que je ne suis pas dans ce cas ; je veux réserver l'avenir. Ce que nous pouvons dire aujourd'hui, c'est qu'il y a lieu d'apporter certaines modifications à la loi électorale dans le but de rendre l'urne électorale plus accessible aux électeurs autres que ceux du chef-lieu d'arrondissement, et de faire ainsi disparaître les inégalités, les injustices qui existent actuellement au détriment des électeurs des campagnes et au profit de ceux des villes. Si c'est là ce qu'on veut avec moi, si l'on veut entrer franchement dans cette voie, qu'on élargisse la question, comme j'ai l'honneur de le proposer. Mais il semble que ce n'est pas là ce que veulent nos adversaires ; ce qu'ils veulent, c'est une véritable loi de parti. Une telle loi, je ne pourrai pas la voter.

A mon sens, il n'est plus possible de maintenir l'état actuel des choses ; mais je dois déclarer que, avant de me décider à changer le lieu où le vote des électeurs ruraux devrait être déposé, je voudrais voir examiner et formuler convenablement un système consistant à indemniser, d'une manière convenable et suffisante, les électeurs obligés à de grandes dépenses pour se rendre au chef-lieu de leur arrondissement.

M. Malou. - J'ai remarqué bien des fois que les questions de principe, au lieu d'éclairer les débats, ne font que les embrouiller et occasionnent de grandes pertes de temps. Il en sera de même, je pense, si nous continuons cette discussion.

Je me permettrai de soumettre à la Chambre une simple observation. Nous savons tous ce que nous voulons ; la question est excessivement claire et il n'est pas besoin, pour la résoudre, d'y ajouter une question de principe. Ainsi, la disposition essentielle c'est le littera B de l'article 19, l'essence de la proposition, la question de principe se trouve dans un paragraphe de l'article 9.

Le commissaire de district formera pour toutes les listes électorales une liste générale des électeurs du district d'après l'ordre alphabétique de leurs noms, etc. Quelle difficulté y a-t-il, d'après le règlement, pour le vote de chacun du nous à mettre aux voix soit en premier lieu, soit en second lieu, le littera B de l'article 19, et ensuite la proposition de la section centrale ?

Le but que nous devons nous proposer, c'est que le vote de chacun soit facilité. Eh bien, je crois que nous gagnerions du temps en procédant comme je l'indique.

M. Orts. - Deux mots seulement, messieurs. Un d'abord à l'honorable M. de Decker pour le rassurer ; un second mot d'explication à M. Malou.

Une question de principe est proposée à la suite d'une discussion générale ; elle a pour but de permettre à la Chambre de trancher d'un seul coup plusieurs propositions, mais non pas de résoudre les questions qui ne sont pas posées sous forme d'amendement.

L'honorable M. de Decker n'ayant pas proposé formellement le système d'indemniser les électeurs, les idées de l'honorable membre ne sont donc pas, pour le moment, en jeu et il n'y aura pas lieu de s'en occuper quand il s'agira de se prononcer sur la première question de principe. Vola pourquoi j'ai posé la question de principe qui concerne seulement le système formulé dans l'amendement des honorables MM. Malou et consorts.

Maintenant, et quant à l'honorable M. Malou, je demande qu'on procède par questions de principe sur sa proposition, parce que, s'il est possible de la repousser sous une autre forme, ce dont je conviens volontiers, le rejet n'aurait pas alors le sens que l'on doit attacher au vote d'une question de principe. On peut, en effet, repousser l'amendement de l'honorable M. Malou, tout en désirant d'autres circonscriptions que celles qui existent actuellement ; on peut aussi préférer au système de M. Malou, c'est-à-dire au vote au compas, le vote à la commune ou le vote au chef-lieu de canton. Mais j'insiste sur ma question de principe, parce qu'il faut qu'il soit bien entendu que nous ne voulons ni du vote au compas, ni du vote à la commune, ni du vote au chef-lieu de canton ; que nous voulons le maintien de ce qui existe, c'est-à-dire le vote au chef-lieu d'arrondissement.

M. le président. - La discussion est close.

Vote des questions de principe

M. de Decker. - Il m'est permis, je pense, de poser aussi une question de principe ?

M. le président. - Certainement.

La Chambre a d'abord à se prononcer sur la question suivante...

- Plusieurs membres à droite. - M. de Decker a une proposition à présenter.

M. le président. - Elle viendra après. Il faut décider d'abord si l'on procédera par question de principe.

- Cette question est résolue affirmativement.

M. le président. - Maintenant M. Orts a proposé deux questions de principe. M. de Decker en soumet une troisième, il propose de demander à la Chambre : « Y a-t-il lieu de faciliter aux électeurs campagnards l'exercice de leur droit électoral ? » (Interruption.)

Je ne puis pas empêcher M. de Decker de proposer cette question.

Il y a donc trois questions, deux de M. Orts et une de M. de Decker. Pour simplifier la chose, je consulterai la Chambre sur le point de savoir si elle commencera par la question de M. de Decker ; c'est celle qui s'écarte le plus de la question principale. Ceux qui sont d'avis...

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je demande la parole sur la position de la question.

Je dois faire remarquer à la Chambre que la question posée par l'honorable M. de Decker n'est pas une question de principe. (Interruption.) « Y a-t-il lieu de faciliter aux électeurs campagnards l'exercice de leur droit électoral ? » Mais certainement ; nous sommes tous d'accord qu'il y a lieu de faciliter à tout le monde l'exercice du droit électoral ; je vais plus loin encore que l'honorable membre ; mais ce n'est là qu'une question d'administration, et je déclare que, dans les recherches auxquelles l’administration aura à se livrer pour assurer la liberté et l'indépendance de tous les votes, seront nécessairement compris les moyens de faciliter le vote aux habitants des campagnes comme aux habitants des villes. Je demande donc que l'on retranche le mot « campagnards » de la question posée par 'honorable M. de Decker.

Nous voulons rechercher les moyens de faciliter à tout le monde l'exercice du droit électoral.

(page 1010) M. le président. - Ceux qui seront d'avis que la question formulée par M. de Decker n'est pas une question de principe décideront qu'elle ne doit pas être posée.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Nous allons perdre inutilement beaucoup de temps.

M. de Theux. - Ce sera l'affaire d'un moment.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Permettez. Si l'on met aux voix la proposition de l'honorable M. de Decker, nous l'adopterons à l'unanimité, et tout sera dit sur cette motion. Nous aurons alors à voter sur les questions posées par l'honorable M. Orts.

Il est évident que personne ne peut songer à contester le principe de la proposition de l'honorable M. de Decker : personne ne peut vouloir qu'on ne facilite pas le vote à tous les électeurs. Cela n'est donc pas une question sérieuse à proposer à l'assemblée et si l’on persiste à la soumettre à un vote, si l'on fait naître de ce chef une discussion, nous perdrons inutilement notre temps.

- Un membre : Une nouvelle lecture, s'il vous plaît.

M. le président. - Y a-t-il lieu de faciliter aux électeurs campagnards l'exercice de leur droit électoral ?

M. Ch. Lebeau. - Je propose d'ajouter après le mot « campagnards » ceux-ci : « et à ceux des villes ».

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - J'ai dit que nous sommes d'accord pour faciliter l'élection à tous les électeurs, à ceux des villes comme à ceux des campagnes. Vous avez, en effet, des villes qui sont éloignées des chefs-lieux d'arrondissement ; est-ce que les électeurs de ces villes seraient exclus des avantages qu'on veut accorder aux électeurs campagnards ?

- Voix à droite. - Non, certainement !

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Vous voyez donc bien que la proposition doit être généralisée.

M. de Decker. - Je pense qu'une petite modification à ma proposition pourra nous mettre d'accord. Au lieu de dire aux « électeurs campagnards », on pourrait dire aux « électeurs éloignés du chef-lieu d'arrondissement ».

M. Orts. - De combien de kilomètres ?

- Plusieurs membres. - A tous les électeurs.

M. Vervoort. - Je propose de dire : « à tous les électeurs. »

M. le président. - M. de Decker se rallie-t-il à cet amendement ?

M. de Decker. - En tous cas la signification du vote sera comprise. Je ne veux pas de chose extraordinaire et impossible ; ce que je demande, c'est qu'on facilite aux électeurs éloignés les moyens d'arriver au scrutin, de façon à établir, autant que possible, l'égalité entre tous les électeurs, ce que nous devons tous vouloir.

M. Muller. - Messieurs, quant à moi, je ne puis pas consentir à voter des propositions qui n'ont rien de sérieux quant au résultat à atteindre. Votre question ne peut avoir qu'un résultat à votre point de vue, c'est de faire déclarer que les plaintes que vous avez fait entendre seraient fondées. Je ne reconnais pas que vous être l'organe des campagnards dans cette circonstance, et je demande la question préalable.

Je ne veux pas que vous puissiez vous étayer d'un vote qui n'a rien de sérieux et auquel participeraient les membres de la gauche.

M. le président/ - La question préalable est demandée, elle doit avoir la priorité.

M. B. Dumortier. - Messieurs, ce n'est pas sans un vif étonnement que j'entends l'honorable M. Muller demander la question préalable sur la proposition de l'honorable M. de Decker. Sait-il ce que c'est que la question préalable ? Aux termes du règlement, cette question signifie qu'il n'y a pas lieu à délibérer.

C'est un vote de mépris ; il n'a jamais eu d'autre signification dans une assemblée délibérante. (Interruption.) C'est un vote de mépris pour qui ? Pour tous les pétitionnaires. Vous êtes saisis d'une grande quantité de pétitions qui toutes réclament des facilités pour les électeurs de pouvoir arriver au scrutin. Vous ne pouvez pas accueillir de pareilles pétitions par la question préalable sans afficher un mépris profond pour le droit sacré de pétition.

M. Orts. - La question préalable n'est pas nécessairement un vote de mépris. La question préalable a cette signification, d'après le règlement, qu'il n'y a pas lieu à délibérer ? Or, il se peut qu'il n'y ait pas lieu à délibérer sur une proposition, parce qu'elle n'en vaut pas la peine, et alors, je le reconnais, c'est un vote de mépris. Mais aussi on peut prononcer la question préalable sur une proposition, quand cette proposition ne peut pas avoir un résultat sérieux et pratique, parce qu'elle ne se rattache à rien, ni à un article de loi, ni à un amendement, ni à aucune espèce de vote ayant une signification déterminée. Or, que propose l'honorable M. de Decker ? II nous propose de voter sans utilité aucune sur un principe qu'il ne formule en aucune mesure. Si l'honorable M. de Decker nous avait présenté un amendement tendant à faire indemniser les électeurs ou à leur faciliter le vote par un moyen pratique quelconque, il serait dans son droit. Mais l'honorable M. de Decker n'a rien proposé. Je crois donc que la question préalable peut être adoptée, tout en respectant les principes que l'honorable membre a défendus sans faire de proposition pour les appuyer.

M. de Decker. On trouve que ma proposition n'a pas d'utilité. Je ne suis pas de cet avis.

Quelle est la position que prend le gouvernement ? Il dit que, dans ce moment, il ne se rallie à aucune proposition de réforme dont on voudrait l'application immédiate, mais qu'il veut examiner dans un prochain avenir quelles sont les améliorations à apporter à notre système électoral. Eh bien, je demande que dans la série de ces améliorations, on comprenne les moyens de faciliter aux campagnards, aux électeurs, autres que ceux du chef-lieu d'arrondissement, l'exercice de leurs droits, de manière à faire disparaître des inégalités qui paraissent choquantes à tout le monde, qui donnent lieu, dans la pratique, à des manœuvres que tout le monde blâme, à des dépenses que tout le monde voudrait faire cesser. Ainsi, ma proposition a son utilité ; elle tend à renvoyer au gouvernement cette question comme toutes les autres questions dont il va s'occuper.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - La Chambre va avoir à voter sur deux principes.

Le premier est celui qui maintient la législation actuelle en ce qui concerne le lieu du vote. Nous demandons que la Chambre s'explique d'une manière formelle sur ce point : maintiendra-t-on la législation actuelle en ce qui concerne le lieu du vote ?

Quant à la seconde question, le vote par lettre alphabétique, voici la position que prend le gouvernement.

J'ai déclaré que le gouvernement se ralliait à ce principe, en ce sens qu'il le considérait comme une déclaration de la Chambre qu'il y avait lieu pour le gouvernement de rechercher tous les moyens d'assurer au vote la liberté, l'indépendance, la sincérité. Eh bien, en faisant cette nouvelle déclaration, je crois rencontrer la proposition de l'honorable M- de Decker.

Nous recherchons les moyens d'assurer aux élections la liberté morale et en quelque sorte la liberté matérielle. Je crois qu'en présence de cette déclaration, la proposition de l'honorable M. de Decker doit tomber. Sinon, il faudrait que tous les membres qui ont en vue une amélioration quelconque, vinssent la produire dans cette enceinte, afin qu'elle servît d'indication au gouvernement, et nous n'en finirions pas.

Si le gouvernement trouve les moyens de faciliter l'accès de l'urne à tous ceux qui doivent prendre part aux élections, il aura soin de les déposer dans un projet de loi.

L'honorable M. Devaux nous en a indiqué un très pratique.

M. de Decker. - C'est indirectement celui que j'ai signalé.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Eh bien, il figurera parmi les moyens que doit étudier le gouvernement.

Ainsi, messieurs, je considère la proposition de l'honorable M. de Decker comme parfaitement inutile. Je déclare que tous les moyens qui auront pour but de faciliter le vote, de donner à l'électeur une liberté complète, seront examinés par le gouvernement et en temps opportun soumis à la Chambre.

M. Devaux. - Je demande qu'on mette d'abord aux voix la première question de principe posée par l'honorable M. Orts, c'est-à-dire la question qui résume le système de MM. de Theux, Malou et de Naeyer. Si ce principe est adopté, la motion de l’honorable M. de Decker devient inutile ; s'il est rejeté, elle prend un tout autre caractère. Il y a eu, messieurs, deux projets de lois introduits, il est nécessaire qu'il y ait un vote. Je désire, moi, un vote précis sur la motion des honorables MM. de Theux et Malou. C'est ce que formule le premier principe proposé par M. Orts.

M. le président. - M. Muller maintient-il sa proposition comme question préalable ?

M. Muller. - Je la reproduirai plus tard, s'il y a lieu.


- La Chambre décide qu'elle votera d'abord sur la première question posée par M. Orts.

Cette question est mise aux voix par appel nominal et résolue affirmativement par 63 voix contre 33.

3 membres se sont abstenus.

Ont répondu oui : MM. Tesch, Thiéfry, A. Vandenpeereboom, E. Vandenpeereboom, Vanderstichelen, Van Iseghem, Van Leempoel, Vervoort, Wala, Ansiau, Coppieters 't Wallant, Dautrebande, de Baillet-Latour, de Bast, de Boe, de Breyne, de Bronckart, Ch. de Brouckere, H. de Brouckere, Dechentinnes, De Fré, de Lexhy, Deliége, de Luesemans, de Moor, de Paul, de Renesse, Devaux, de Vrière, d'Hoffschmidt, Dolez, Dubus, Frère-Orban, A. Goblet, L. Goblet, Godin, Grosfils, Jacquemyns, J. Jouret, M. Jouret, Lange, Laubry, C. Lebeau, J. Lebeau, Lelièvre, Lesoinne, Manilius, Mascart, Moreau, Muller, Nélis, Neyt, Orban, Orts, Pierre, Pirmez, Pirson, Prévinaire, Rogier, Sabatier, Saeyman, Savart et Verhaegen.

(page 1011) Ont répondu non : MM. Tack, Thienpont, Tremouroux, Vanden Brandon de Reeth, Vander Donckt, Van Renynghe, Verwilghen, Vilain XIIII, Coomans, de Liedekerke, de Man d'Attenrode, de Mérode-Westerloo, de Muelenaere, de Naeyer, de Pitteurs-Hiegaerts, de Portemont, de Ruddere de Te Lokeren, Desmaisières, de Smedt, de Terbecq, de Theux, B. Dumortier, H. Dumortier, d'Ursel, Faignart, Janssens, Landeloos, le Bailly do Tilleghem, Magherman, Malou, Moncheur, Notelteirs et Rodenbach.

Se sont abstenus : MM. Van Overloop, Vermeire et de Decker.

M. Van Overloop. - Je me suis abstenu parce que le maintien du principe dont nous nous occupons dépend, à mes yeux, des mesures qui seront proposées pour assurer aux électeurs éloignés du chef-lieu d'arrondissement de justes facilités pour l'exercice de leur droit électoral, ainsi que des mesures qui seront proposées pour assurer la sincérité réelle et complète des élections. Voilà pourquoi je n'ai voté ni pour ni contre.

M. Vermeire. - Je me suis abstenu parce que je crois que, dans les termes de la loi électorale actuelle, il n'y a pas lieu de changer les circonscriptions électorales. D'autre part, parce que dans ma manière de voir, si l'on changeait le mode d'émission du vote, on devrait également faciliter, aux électeurs, l'accès à l'urne électorale.

M. de Decker. - Je me suis abstenu par les considérations que j'ai eu l'honneur de présenter et par celles qu'a fait valoir l'honorable M. Van Overloop.


M. le président. - Nous avons maintenant la question posée par M. de Decker, amendée par M. Vervoort.

M. Orts. - Je demande la priorité pour ma deuxième proposition.

M. Malou. - La question posée par mon honorable ami M. de Decker se rattache à celle sur laquelle la Chambre vient de statuer.

- La Chambre décide qu'elle votera d'abord sur la deuxième question posée par M. Orts.

Cette question est mise aux voix par appel nominal et résolue affirmativement par 54 voix contre 36, 10 membres se sont abstenus.

Ont répondu oui : MM. Tesch, Thiéfry, Tremouroux, E. Vandenpeereboom, Vanderstichelen, Van Iseghem, Van Leempoel, Vervoort, Wala, Allard, Ansiau, Coppieters 't Wallant, Dautrebande, de Bast, de Boe, de Breyne, de Bronckart, Ch. de Brouckere, Dechentinnes, De Fié, de Lexhy, Deliége, de Luesemans, de Moor, de Paul, de Vrière, d'Hoffschmidt, Frère-Orban, A. Goblet, L. Goblet, Godin, Grosfils, Jacquemyns. J. Jouret, M. Jouret, Lange, Laubry, C. Lebeau, Lelièvre, Manilius, Mascart, Moreau, Muller, Nelis, Neyt, Orban, Orts, Pierre, Prévinaire, Rogier, Sabatier, Saeyman, Savart et Verhaegen.

Ont répondu non : MM. Tack, Thienpont, Vanden Branden de Reeth, Vander Donckt, Van Overloop, Van Renynghe, Vermeire, Verwilghen, Vilain XIIII, Coomans, de Decker, de Liedekerke, de Man d'Attenrode, de Mérode-Westerloo, de Muelenaere, de Naeyer, de Pitteurs-Hiegaerts, de Portemont, de Ruddere de Te Lokeren, Desmaisières, de Smedt, de Terbecq, de Theux, B. Dumortier, H. Dumortier, d'Ursel, Faignart, Frison, Janssens, Landeloos, Le Bailly de Tilleghem, Magherman, Malou, Moncheur, Notelteirs et Rodenbach.

Se sont abstenus : MM. A. Vandenpeereboom, de Baillet-Latour, H. de Brouckere, de Renesse, Devaux, Dolez, Dubus, J. Lebeau, Pirmez et Pirson.

M. le président. - Messieurs, les membres qui se sont abstenus sont invités, aux termes du règlement, à faire connaître les motifs de leur abstention.

M. A. Vandenpeereboom. - Messieurs, je ne pourrai me décider à modifier une de nos lois organiques les plus importantes, qu'à la condition qu'il me soit bien démontré que des modifications sont nécessaires, indispensables. La discussion actuelle ne m'a pas donné une conviction suffisante à cet égard ; je ne puis donc pas me prononcer sur le résultat des modifications qui nous sont proposées ; c'est pour ce motif que je me suis abstenu.

M. de Baillet-Latour. - Le projet qui émane de l'initiative de la section centrale contient des modifications utiles, je le reconnais. Mais il a, selon moi, l'inconvénient d'être inefficace. Sans doute, il importe extrêmement d'assurer l'indépendance et la sincérité du vote des électeurs ; mais le système improvisé par la section centrale est-il suffisant pour atteindre ce but ?

Le régime en vigueur, avec ses défauts et ses inconvénients, n'a pas empêché l'opinion du pays de se faire jour en sens divers et de donner alternativement la majorité aux deux partis qui se disputent le gouvernement. Il n'y a donc pas de danger pressant à le laisser subsister.

Voilà pourquoi je n'ai pas jugé à propos de donner mon vote à la proposition de la section centrale.

D'un autre côté, comme je crois qu'il y a des améliorations de détails à apporter à la loi, j'ai cru devoir réserver le principe, et c'est pourquoi

M. H. de Brouckere. - Messieurs, je n'ai pas reconnu jusqu'ici la nécessité de changer la loi électorale ; et je n'ai pas voulu engager mon vote, à l'occasion d'une question de principe.

M. de Renesse. - Je me suis abstenu pour les mêmes motifs.

M. Devaux. - Messieurs, j'ai déjà exposé les raisons qui motivent mon abstention : c'est que je ne veux pas m'engager dès aujourd'hui sur l’introduction de la mesure ; et sans la repousser en elle-même, je désire rester maître du choix de l'époque où son introduction pourra paraître suffisamment motivée où les détails de son exécution auront été assez mûris par le temps et par la réflexion.

M. Dolez. - Messieurs, je me suis abstenu pour les motifs développés par mon honorable ami, M. H. de Brouckere. Je me permettrai d'ajouter que ces motifs sont en harmonie avec les principes que j'ai défendus dans cette enceinte chaque fois qu'il a été question de toucher à nos lois organiques.

M. Dubusµ. - Je me suis abstenu pour les motifs énoncés par l'honorable M. H. de Brouckere.

M. J. Lebeau. - Messieurs, je pense aussi qu'il importe de maintenir autant que possible la stabilité de nos lois électorales, de n'y toucher que lorsque la discussion a rendu la nécessité do modifications évidente à peu près à tous les esprits. Or, la discussion n'a pas porté sur la question posée par la section centrale. Nous ne connaissons pas les objections qu'on peut y faire. Quel que soit mon désir de voir adopter des modifications, si elles sont nécessaires, je veux que ce soit après une discussion approfondie.

Du reste, les inconvénients auxquels on veut parer ne se sont pas révélés, au moins depuis longtemps, dans le district auquel j'ai l'honneur d'appartenir, et où la conduite du clergé est, sous ce rapport, véritablement exemplaire.

M. Pirmez. - Je me suis abstenu parce que j'ai voulu conserver entière ma liberté d'apprécier les propositions qui seront soumises à la législature, lorsqu'il pourra être voté sur un projet complet.

M. Pirson. - Messieurs, je me suis abstenu pour les motifs énoncés par l'honorable M. Pirmez.


M. Orts. - Je demande la parole pour une motion d'ordre.

M. Malou. - Mais il a été convenu qu'on mettrait aux voix en troisième lieu la question de principe qui a été posée par l'honorable M. de Decker.

M. Orts. - J'ai le droit de produire ma motion d'ordre.

M. le président. - Vous avez la parole.

M. Orts. - J'ai l'honneur de proposer à la Chambre d'ajourner à la session prochaine la discussion ultérieure du projet de loi actuel. Cette proposition, je la formule en ces termes : « La Chambre :

« En présence des deux questions de principe qu'elle vient de décider ;

« Attendu qu'il s'agit d'organiser l'un de ces principes ;

« Attendu que le gouvernement n'a pu, dès maintenant et dans l'état actuel de l'instruction administrative, se rallier aux mesures pratiques, proposées par la section centrale, pour l'application du système ;

« Invite le gouvernement à rechercher toutes les mesures tendantes à assurer le secret du vote, la sincérité, l'indépendance et la moralité des élections ;

« Et ajourne à la session prochaine les délibérations sur le projet de la section centrale. »

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, la proposition de l'honorable M. Orts est en parfaite harmonie avec le langage et l'attitude du gouvernement dans cette discussion. Je considère cette proposition comme une invitation adressée au gouvernement de rechercher tous les moyens propres à assurer la liberté, la sincérité du vote. A ce titre nous acceptons la proposition de l'honorable M. Orts, en ce sens que si parmi les moyens qui se présenteront au gouvernement, il en est qui lui paraissent plus efficaces, plus complets que celui dont on vient d'adopter le principe, le gouvernement n'hésiterait pas à leur donner la préférence.

Maintenant je me demande si la proposition de l'honorable M. Orts ne renferme pas, on ne peut pas renfermer celle de l'honorable M. de Decker.

La motion d'ordre de l'honorable M. Orts invite le gouvernement à rechercher toutes les mesures tendantes à assurer le secret du vote, etc.

On pourrait ajouter les mots : « la facilité » avant les mots : « le secret ».

M. de Decker. - Messieurs, la Chambre avait décidé qu'on mettrait aux voix la question de principe que j'ai eu l'honneur de présenter, immédiatement après le vote sur les deux questions de principe de l'honorable M. Orts. Je demande que la Chambre respecte le vote qu'elle a émis il y a cinq minutes.

J'ai donné à la Chambre et au pays la véritable signification que j'attache à la question de principe que je maintiens et sur laquelle je provoque de nouveau un vote de la Chambre.

M. Muller. - Messieurs, lors de la présentation isolée de la proposition de l'honorable M. de Decker, j'avais aussi soumis la question préalable et cette question préalable, je la soumettrai maintenant dans (page 1012) des conditions qui ne peuvent pas le moins du monde offenser l'honorable M. de Decker, puisqu'il résulte qu'au nombre des moyens sur lesquels on attire l'attention du gouvernement, les facilités sont comprises ; il y a une partie des membres de cette Chambre qui ont hâte de pouvoir quitter la séance ; je demande qu'on vote sur cette proposition qui renferme en substance la motion de l’honorable M de Decker.

M. Orts. - Je demande la parole pour un rappel au règlement. Aux termes de l'article 24, une proposition d'ajournement suspendant une discussion pendant un temps déterminé, prime toute autre question.

J'étais parfaitement libre de proposer l'ajournement, comme M. Muller s'était réservé de proposer la question préalable laquelle aurait eu la priorité sur la question d'ajournement, mais je l'engage à ne pas la reproduire et je demande qu'aux termes de l'article 24 du règlement, ma proposition d'ajournement soit mise aux voix.

M. de Decker. - Je demande que la Chambre respecte sa propre décision.

M. B. Dumortier. - Messieurs, ce qui se passe en ce moment est vraiment étrange ; il paraît qu'on agit vis-à-vis du règlement comment comme s'il n'existait pas. Il est positif que quand la discussion est close on procède au vote sur les diverses propositions sur lesquelles la discussion a porté ; il n'est plus permis pendant le vote d'introduire de proposition nouvelle ; à plus forte raison, une motion d'ordre ; c'est violer notre règlement que de procéder comme nous le faisons.

Quant à la proposition de M. Orts, il est impossible qu'elle soit discutée ; comment ! vous venez déclarer à la face de l'Europe que nos élections se font sans sincérité, et c'est vous, membre de la majorité, qui proposez à la Chambre de déclarer cela ! C'est par trop fort ; on n'improvise pas des formules de la sorte, sans examen, sans discussion ; je demande que le règlement s'exécute, je demande que la proposition sur la discussion de laquelle il y a eu clôture suive les phases prescrites par le règlement ; la proposition de M. Orts viendra à son tour et j'en demanderai la discussion.

La proposition de M. Orts est une atteinte à la droite ; nous ne voulons pas que par un système quelconque on fasse disparaître la proposition de M. de Decker. Comme elle a été faite dans les termes du règlement elle doit être mise aux voix ; il est interdit, je le répète, dans l'intervalle d'un vote, quand la clôture a été prononcée, d'introduire une proposition nouvelle ; je demande donc qu'elle soit mise aux voix.

M. de Theux. - Je crois que l'honorable préopinant est dans son droit quand il demande que la proposition de M. de Decker ait la priorité Je profite du moment où j'ai la parole pour démontrer à l'honorable M. Orts que sa proposition est conçue dans une forme insolite. Je comprends qu'il propose l'ajournement à la session prochaine, mais non qu'il invite le gouvernement à examiner la question dans tel ou tel sens. C'est là une injonction qu'il n'est pas dans les habitudes des Chambres d'adresser au gouvernement. Maintenant que les motifs de la proposition ont été développés dans la discussion, le gouvernement pourra y avoir tel égard que de droit ; mais je dis que ces motifs joints à la proposition contiennent une injonction et que la Chambre ne peut pas les voter.

M. Coomans. - Messieurs, les observations de mon honorable ami étaient de nature à vous frapper. D'après le règlement, quand la clôture est prononcée, on ne peut plus introduire de proposition nouvelle ; la raison de cette disposition est évidente, c'est que toute proposition doit être discutée. A quoi servirait la clôture si on pouvait discuter encore après ?

Aux termes du règlement, la Chambre doit voter d'abord la proposition de M. de Decker, sauf à voter ensuite la proposition de M. Orts sans ou après discussion.

M. le président. - Il n'y a pas eu de décision sur le point de savoir quelle question aurait la préférence quant à la mise aux voix ; c'est M. Devaux qui a dit : Après les questions posées par M. Orts, on se prononcera sur la proposition de M. de Decker ; depuis est venue la proposition d'ajournement de M. Orts ; aux termes de l'article 24 du règlement, elle doit avoir la préférence, sauf à revenir sur la proposition de M. de Decker, quand la question d'ajournement sera vidée.

La proposition d'ajournement peut être maintenant utilement discutée puisqu'elle vient d'être présentée. Je crois être dans les termes du règlement en donnant la préférence à la proposition de M. Orts sur laquelle la discussion va s'ouvrir.

Cela étant, la discussion sur la question d'ajournement est ouverte.

- Plusieurs membres. - Aux voix ! aux voix !

M. de Theux. - Je demandé la division de la proposition et des motifs.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Si l'on veut atteindre le but proposé, si on veut se livrer à une sorte de chicane, au lieu de satisfaire toutes les opinions, il semble que la proposition de M. Orts offre une occasion de se mettre d'accord. (Interruption.)

Qu'est-ce que la section centrale a demandé, qu'est-ce que la proposition de M. Orts demande ? Que le gouvernement recherche le moyen d'assurer la sincérité, la liberté, l'indépendance du vote des électeurs.

Qu'est-ce que veut M. de Decker ? Il engage le gouvernement à rechercher les moyens de faciliter le vote des électeurs. La proposition de M. de Decker se trouve renfermée dans celle de M. Orts ; si elle n'y est pas, en termes exprès, qu'on l'y mette. Le gouvernement s'engagera à rechercher les moyens d'assurer la liberté et la facilité du vote, il y aura satisfaction pour lotit le monde.

Il y aurait donc lieu d'amender la proposition de M. Orts en ce sens que le gouvernement serait invité à rechercher tous les moyens d'assurer à la fois la liberté et la facilité du vote.

M. H. Dumortier. - Je n’ai qu'un mot à dire ! Je m'étonne de la proposition qui est faite à la Chambre et du changement d’attitude des membres de la section centrale et de l'honorable M. Orts lui-même dans cette question.

Hier encore, lorsque nous disions que cette question n'est pas suffisamment (un mot illisible) ; que le gouvernement lui-même déclarait qu'elle n'est pas mûre, qu'il ne pouvait pas y donner son assentiment, on nous répondait qu'il était parfaitement possible de convertir en loi la proposition de la section centrale pendant la session actuelle. Et voici que tout à coup on déclare aujourd'hui que cela est devenu impossible, et l'honorable M. Orts demande l'ajournement à la prochaine session.

Dans une autre discussion, messieurs, qui a eu lieu en i 857 sur la question de la charité, un fait analogue s'est produit. On demandait alors à cor et à cris une grande enquête sur l'organisation de la charité. Des élections ont eu lieu depuis lors et il n'en est pour ainsi dire plus question.

L'honorable M. Frère disait alors qu'on jouait ici une indigne comédie... {Interruption.) Je ne veux pas qualifier de la même façon ce qui se passe ici en ce moment, mais je demande à l'honorable M. Frère comment il qualifiera la conduite des membres qui aujourd’hui soutiennent précisément ce que nous soutenions hier et ce qu'alors ils combattaient.

M. Orts. - Je vais donner en deux mots à l'honorable M. Dumortier l'explication de ce qui se passe et je m'étonne vraiment qu'il ne l'ait point trouvée à lui tout seul.

Nous avons insisté, nous partisans du vote par ordre alphabétique, pour qu'il y eût une décision qui nous assurât au moins le bénéfice du principe, et nous n'avons pas voulu d'un ajournement qui eût laissé cette question indécise et les intentions de la majorité de la Chambre douteuses. Mais, une fois ce bénéfice obtenu, vous comprenez que pratiquement, il nous était impossible d'aller au-delà ; non pas que, la Chambre ne pût parfaitement voter la loi ; mais il y a une autre assemblée qui doit délibérer après nous et qui n'eût pu s'occuper de lai lo qu'à une époque où, malgré l'adoption de nos propositions au Sénat, il eût été impossible de mettre la loi à exécution cette année.

Dès lors, et le gouvernement ayant déclaré qu’il désirait encore examiner la question, au point de vue des moyens pratiques, nous voulons laisser au gouvernement le temps de faire cette étude, au Sénat la faculté d'user de sa libre prérogative et nous nous contentons, pour le moment, d'avoir obtenu, au sein de la Chambre populaire, gain de cause sur la question de principe.

Reste la proposition de M. de Decker, consistant dans la question suivante : « Y a-t-il lieu de faciliter aux électeurs éloignés du district, l'exercice de leur droit électoral ? » M. Vervoort a proposé par amendement de dire « à tous les électeurs » au lieu de « aux électeurs éloignés du district. » Voilà l'état de la question. Je vais mettre d'abord aux voix la proposition de M. Vervoort.

M. Malou. - La proposition de l'honorable M. Orts est complexe. Puisque notre honorable président croit que, malgré le vote, comme nous l'avions compris tout à l'heure, l'ajournement doit avoir la priorité, je me bornerai à demander la division de la proposition de l'honorable M. Orts, c'est-à-dire que l’on vote actuellement sur l'ajournement à la session prochaine et qu'ensuite on statue sur la proposition de l'honorable M. de Decker, sur chacun des motifs du renvoi et sur le renvoi lui-même.

Je crois que c'est la seule marche rationnelle à suivre. On ne peut pas cou fondre dans le bénéfice de l'article 24 du règlement la proposition de renvoi au ministre, laquelle est une conséquence de l'ajournement et cet ajournement lui-même qui n'a pas le même droit de primer la proposition.

M. le président. - La division est de droit.

M. Vilain XIIII. - J'invite la Chambre à faire une très grande attention à la proposition d'ajournement qui lui est soumise. Non seulement il me semble que la minorité ne peut pas la voter, mais j'engage la majorité et le gouvernement à bien mesurer la portée de cette proposition avant de se prononcer.

La Chambre invite le gouvernement à rechercher toutes les mesures tendantes à assurer le secret du vote, la sincérité, l'indépendance et la moralité des élections. C'est-à-dire que la Chambre, par une simple motion d'ordre, va inviter le gouvernement à réviser toute la loi électorale. Dès aujourd'hui, la Chambre donnerait au gouvernement un blanc-seing pour remanier toutes nos lois électorales et lui présenter un nouveau projet à la session prochaine.

Par cette motion d'ordre encore, la Chambre viendrait dire que, jusqu'à présent, les lois électorales belges n'ont assuré ni le secret du vote, ni la sincérité, ni l'indépendance, ni la moralité des élections. Cela est absolument impossible. Je conjure l'honorable M. Orts de vouloir bien changer au moins les termes de sa proposition.

M. Orts. - Il y a dix ans que vous le dites.

(page 1013) M. Vilain XIIII. - Il y a une grande différence entre le langage d'un député qui n'engage que lui-même et une résolution de la Chambre qui engage la responsabilité de la Chambre tout entière et du pays même vis-à-vis de l'étranger. Nous ne pouvons pas, vis-à-vis de l'étranger, accepter les termes de cette proposition.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - L'honorable préopinant me semble donnera la motion de l'honorable M. Orts une signification qu'elle n'a pas. Et comment parvient-il à la caractériser comme il vient de le faire ? C'est par un argument a contrario qu'il arrive à une conclusion inadmissible. Tout ce qu'on demande au gouvernement, c'est de rechercher les moyens d'assurer le secret du vote, la sincérité, l'indépendance et la moralité des élections. L'honorable membre en conclut que la Chambre déclarerait par-là que jusqu'à ce jour les élections n'ont pas été sincères. (Interruption.) Cet argument a été produit par l'honorable M. Dumortier, je le sais ; mais il est sans valeur. Tout ce qu'on recommande au gouvernement, c'est d'assurer la sincérité, la moralité des élections, l'indépendance des électeurs ; mais pour apprécier le sens de cette recommandation, il faut nécessairement la rapprocher des discussions qui l'ont précédée.

Or, qu'a-t-on dit dans cette discussion ? On a signalé certains abus d'influence, qu'il serait désirable de voir cesser et qui n'ont été niés par personne. On a dit qu'il fallait prendre des mesures pour paralyser ces abus d'influence, et l’on a indiqué comme l'un des moyens d'arriver à ce résultat le vote par liste alphabétique. Voilà ce qui est exprimé de nouveau dans les motifs de la proposition de l'honorable M. Orts.

Au surplus, après les explications qui ont été données, après le langage qui a été tenu par le gouvernement, après les déclarations qui ont été faites et que nous réitérons, il me paraît très simple de se borner à l'ajournement pur et simple ; personne ne se trompera sur la signification, et l'on saura parfaitement quel est le véritable sens du vote qui vient d'être émis. Il n'est donc pas question d'une révision de toute la loi électorale.

M. Vilain XIIII. - D'après les termes de la proposition, il en serait ainsi.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - C'est que vous voulez lui donner une importance, une signification, un caractère qu'elle n'a évidemment pas ; mais, encore une fois, vous ne pouvez pas séparer la motion de la discussion qui l'a précédée ; c'est dans ces limites qu'il faut la renfermer. Ne permettons, d'ailleurs, à aucune équivoque de se produire ; votons un ajournement pur et simple, et cet ajournement comprendra également la motion de l'honorable M. de Decker. (Réclamations à droite.) Eh bien, alors elle sera soumise à un vote qui n'aura pas de signification.

M. le président. - La discussion est close.


M. le président. - Aux termes du règlement je dois donner la priorité à la proposition d'ajournement formulée par M. Orts ; mais de même aussi la division est de droit.

M. Orts. - Je me rallie à la proposition de M. le ministre des finances.

M. le président. - C'est donc l'ajournement pur et simple ; le reste est retranché. Nous statuerons tantôt sur la proposition de M de Decker.

- La proposition d'ajournement pur et simple est mise aux voix par assis et levé et adoptée.

M. le président. - En conséquent, la Chambre ajourne la question de détail à la session prochaine.


M. Muller. - J'ai demandé la question préalable. Messieurs, l'honorable M. Vilain XIIII vient de nous dire que si l'on votait la motion tendante à attirer l'attention du gouvernement sur la nécessité d'assurer la sincérité, la liberté et l'indépendance des électeurs, ce serait déclarer que les électeurs sont maintenant dépourvus de sincérité, de liberté, d'indépendance. Eh bien, par le même argument, si vous allez voter la motion de l'honorable M. de Decker, vous déclarerez que jusqu'ici les électeurs n'ont pas eu les facilités nécessaires pour aller voter au chef-lieu. Voilà sur quoi j'appelle l’attention de la Chambre.

M. le président. - La question préalable est proposée ; je la mets aux voix.

- L'appel nominal est demandé ; en voici le résultat :

94 membres prennent part au vote.

46 votent pour la question préalable.

48 votent contre.

En conséquence, la question préalable n'est pas adoptée.

Ont voté pour la question préalable : MM. Tesch, Thiéfry, Tremouroux, A. Vandenpeereboom, E. Vandenpeereboom, Vanderstichelen. Van Iseghem. Van Leempoel, Vervoort, Wala, Allard, Ansiau, Dautrebande, de Baillet-Latour, de Bast, de Boe, de Bronckart, H. de Brouckere, Deliége, Devaux, de Vrière, Dolez, Dubus, Frère-Orban, Godin, Grosfils, Jacquemyns, J. Jouret, M. Jouret, Lange, C. Lebeau, J. Lebeau, Lelièvre, Manilius, Moreau, Muller, Neyt, Orban, Orts, Pierre, Piratez, Pirson, Prévinaire, Rogier, Sabatier et Saeyman.

Ont voté contre : MM. Tack, Thienpont, Vanden Branden de Reeth, Vander Donckt, Van Overloop, Van Renynghe, Vermeire, Verwilghen, Vilain XIIII, Coomans. Ch. de Brouckere, Dechentinnes, de Decker, De Fré, de Liedekerke, de Man d'Attenrode, de Mérode-Westerloo, de Moor, de Muelenaere, de Naeyer, de Paul, de Pitteurs-Hiegaerts, de. Portemont, de Ruddere de Te Lokeren, Desmaisières, de Smedt, de Terbecq, de Theux, d'Hoffschmidt, B. Dumortier, H. Dumortier, d'Ursel, Faignart, A. Goblet, L. Goblet, Janssens, Landeloos, Laubry, Le Bailly de Tilleghem, Magherman, Malou, Mascart, Moncheur, Nélis, Notelteirs, Rodenbach, Savart et Verhaegen.


M. le président. - Reste la question de principe proposée par M. de Decker et amendée par M. Vervoort.

Je dois d'abord mettre aux voix l'amendement de M. Vervoort .

- Plusieurs membres. - L'appel nominal !

- Le sous-amendement de M. Vervoort est mis aux voix par appel nominal.

80 membres sont présents.

6 membres s'abstiennent.

74 membres votent pour le sous-amendement.

En conséquence, le sous-amendement est adopté.

Ont voté l'adoption : MM. Tack, Tesch, Thiéfry, Thienpont, Tremouroux, Vanden Branden de Reeth, A. Vandenpeereboom, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Iseghem, Van Leempoel, Van Overloop, Vau Renynghe, Vermeire, Vervoort, Verwilghen, Wala, Coomans, Dautrebande, de, Bast, de Boe, de Bronckart, Ch. de Brouckere, Dechentinnes, de Decker, De Fré, de Liedekerke, Deliége, de Man d'Attenrode, de Mérode-Westerloo, de Moor, de Paul, de Pitteurs-Hiegaerts, de Portemont, de Ruddere de Te Lokeren, Desmaisières, de Smedt, de Terbecq, de Theux, Devaux, de Vrière, H. Dumortier, d'Ursel, Frère-Orban, A. Goblet, L. Goblet, Godin, Grosfils, Jacquemyns, Janssens, J. Jouret, M. Jouret, Landeloos, Lange, Laubry, C. Lebeau, J. Lebeau, Lelièvre, Malou, Manilius, Mascart, Moncheur, Moreau, Notelteirs, Orban, Orts, Pirmez, Prévinaire, Rodenbach, Rogier, Sabatier, Saeyman, Savart et Verhaegen.

Se sont abstenus : MM. H. de Brouckere, de Naeyer, Dolez, Dubus, B. Dumortier et Pirson.

M. le président. - Les membres qui se sont abstenus sont invités à faire connaître les motifs de leur abstention.

M. H. de Brouckere. - J'ai donné les motifs de mon abstention.

M. Dolez. - Je me suis abstenu par les mêmes motifs qu'au vote précédent.

M. de Naeyer. - Je me suis abstenu parce que l'amendement, dans sa généralité, comprend même les électeurs des chefs-lieux d'arrondissement qui jouissent aujourd'hui de toutes les facilités imaginables pour exercer leurs droits. Or réclamer en leur faveur de nouvelles facilités en les confondant avec d'autres électeurs qui ont des motifs très légitimes de se plaindre, cela ne me paraît pas sérieux.

M. Dubusµ. - Je me suis abstenu par les mêmes motifs qu'au vote précédent.

M. B. Dumortier. - Je me suis abstenu parce que je n'approuve pas ces petits moyens qui ne me paraissent nullement parlementaires.

M. Pirson. - Je me suis abstenu par les motifs que j'ai donnés tantôt.


- La question de principe posée par M. de Decker et amendée par M. Vervoort, est mise aux voix et adoptée.

- La Chambre s'ajourne au mardi 3 mai.

La séance est levée à 5 heures.