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Chambres des représentants de Belgique
Séance du jeudi 25 janvier 1849

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1848-1849)

(Présidence de M. Verhaegen.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 551) M. de Luesemans procède à l'appel nominal à 2 heures un quart.

M. T'Kint de Naeyer lit le procès-verbal de la séance précédente; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Luesemans présente l'analyse, des pièces adressées à la chambre.

« La chambre de discipline des huissiers de l'arrondissement d'Anvers présente des observations sur le projet de loi relatif à la compétence en matière civile et commerciale. »

- Renvoi à la section centrale chargée de l'examen du projet de loi.


« Le sieur P. Delcourt soumet à la chambre des document sur lesquels il appelle son attention lors de l'examen du projet de loi sur les faillites et sursis. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi.


« Le sieur André demande qu'à l'avenir les maisons de détention et les hospices soient érigés hors de l'enceinte des villes, et de préférence dans les localités les moins populeuses ou dans les parties du pays où il serait utile de former de nouveaux centres de population. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Les employés des douanes dans la province d'Anvers demandent à pouvoir être aurais à la pension à l'âge de 55 ans et après 25 ans de service. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« L'administration communale de Ledeghem prie la chambre d'allouer au budget de l’intérieur un crédit de 150,000 fr. destiné à accorder à quelques communes des districts liniers des prêts sans intérêts, remboursables au moyen de centimes additionnels à percevoir dans ces communes. »

M. Rodenbach. - Je demande que cette pétition soit renvoyée à la section centrale du budget de l'intérieur, avec invitation de faire un rapport; si cette section centrale avait terminé ses travaux, je demanderais alors que la pétition fût renvoyée à la commission des pétitions avec prière de présenter un rapport avant la discussion du budget de l'intérieur.

M. le président. - La section centrale du budget de l'intérieur a terminé ses travaux; je mets, en conséquence, aux voix la seconde proposition de M. Rodenbach.

- Cette proposition est adoptée.


« Le sieur Canivet soumet à la chambre des vues sur les causes du paupérisme et sur les moyens d'y porter remède. »

- Renvoi à la commission des pétitions.

Rapports sur des demandes en naturalisation

M. Ansiau. - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer des rapports sur diverses demandes en naturalisation.

- Ces rapports seront imprimés et distribués.

Projet de loi portant le budget du département de la justice pour l’exercice 1849

Discussion du tableau des crédits

Chapitre III. Administration des contributions directes, douanes et accises

Article 26

M. T'Kint de Naeyer. - Messieurs, la section centrale du budget des finances a examiné l'amendement qui a été présenté dans la séance d'hier par M. le ministre des finances dans le but de porter au budget, comme charge extraordinaire, une somme de 51,784 fr. 25 c. pour travaux d'appropriation des nouveaux magasins de l'entrepôt d'Anvers.

D'après les explications qui ont été données à la section centrale par M. le ministre, la somme de 200,000 fr. qui figure au budget des voies et moyens, sous le titre de droits de magasin dans les entrepôts, s'applique exclusivement à l'entrepôt d'Anvers. Les prévisions pour 1848 n'étaient que de 190,000 fr.; elles ont été portées à 200,000 fr. pour 1849, par le motif consigné dans la note préliminaire du budget des voies et moyens (page xxv), que l'on doit obtenir des produits plus élevés après l'exécution des travaux d'appropriation qui restent à exécuter à l'entrepôt d'Anvers.

La section centrale pense que dans les circonstances actuelles le gouvernement doit se borner à faire exécuter les travaux dont l'urgence sera bien démontrée et qui seront réellement productifs; elle vous propose, messieurs, l'adoption du crédit, en insistant toutefois auprès de M. le ministre des finances pour qu'il ajourne, si cela est possible, une partie de la dépense.

Projet de loi accordant un crédit supplémentaire au budget des dotations de l’exercice 1849, pour la chambre des représentants

Discussion des articles et vote sur l'ensemble du projet

M. le président. - La demande de ce crédit, faite par la commission de comptabilité de la chambre, a été discutée dans le comité secret d'hier ; il reste à voter sur les deux articles.

« Art. 1er. Il est ouvert à l'article unique du chapitre III du budget des dotations de l'exercice 1848, un crédit supplémentaire de 45,910 fr. 87 centimes, destiné à couvrir les dépenses de la chambre des représentants, pendant ledit exercice. »

- Adopté.


« Art. 2. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa promulgation. »

- Adopté.


Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi.

Le projet de loi est adopté à l'unanimité des 67 membres qui ont répondu à l'appel. Il sera transmis au sénat.

Ont répondu à l'appel : MM. Boulez, Cans, Cools, Coomans, David, de Baillet (Hyacinthe), de Bocarmé, Debourdeaud'huy, de Brouckere (Henri), de Brouwer de Hogendorp, Debroux, Dedecker, de Denterghem, de Haerne, Delehaye, Delescluse, Delfosse, Deliége , de Luesemans, de Man d'Attenrode, de Perceval, de Renesse, de Royer, Desoer , Destriveaux , de Theux , de T'Serclaes, d'Hont, Faignart, Frère-Orban, Jacques, Jouret, Jullien, Julliot, Lange, le Bailly de Tilleghem, Le Hon, Lesoinne, Loos, Mascart, Mercier, Moncheur, Moreau, Orts, Osy, Prévinaire, Reyntjens, Rodenbach, Rogier, Rolin, Rousselle, T'Kint de Naeyer, Toussaint, Vanden Berghe de Binckum, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom (Ernest), Van Grootven, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Renynghe, Vermeire, Veydt, Vilain XIIII, Allard, Ansiau, Anspach et Verhaegen.

Projet de loi portant le budget du ministère de l’intérieur de l’exercice 1849

Rapport de la section centrale

M. Prévinaire. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale qui a été chargée d'examiner le budget de l'intérieur. Ce rapport contient les conclusions de la section centrale sur les pétitions renvoyées à son avis.

Ordre des travaux de la chambre

M. le président. - Ce rapport sera imprimé et distribué, je propose d'en fixer la discussion à lundi.

M. Delehaye. - Nous n'aurons pas le temps de l'examiner, je propose mardi.

- Plusieurs voix. - Non ! non ! à lundi.

M. le président. - D'un côté on demande que ce soit lundi, de l'autre on propose mardi; je vais consulter la chambre.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je demande que la discussion du budget de l'intérieur précède la discussion du projet de loi sur les droits de succession, qui pourra nous conduire assez loin. Il est très urgent que les budgets de l'exercice où nous sommes entrés soient votés. Nous voici à la veille de présenter les budgets de 1850 et nous n'avons pas encore ceux de l'année courante. Je prie donc l'honorable rapporteur de presser l'impression du rapport de manière que nous puissions commencer lundi.

M. le président. - C'est pour cela que j'ai proposé la mise à l'ordre du jour pour lundi.

M. de Theux. - Il est donc bien entendu qu'on commencera la discussion du budget de l'intérieur avant d'aborder la discussion du projet de loi sur les droits de succession. Ce dernier objet est trop important pour être mis inopinément à l'ordre du jour.

M. Delehaye. - Je conçois parfaitement qu'on n'aborde pas la discussion du projet de loi sur les droits de succession avant la discussion du budget de l'intérieur. Mais avant d'aborder la discussion de ce budget, il faut bien qu'on ait le temps de l'examiner. D'après ce que m'a dit l'honorable rapporteur, le rapport est assez volumineux; il n'est pas certain qu'il puisse être distribué demain. Il nous faudra bien quelque temps pour l'examiner, d'autant plus que l'on a renvoyé à cette discussion plusieurs questions d'une haute importance et notamment la question des Flandres. Je désire vivement que cette question soit vidée. Je demande donc le renvoi de la discussion à mardi. Alors, chacun aura eu le temps d'examiner le rapport, le temps de se préparer à la discussion de l'immense question des Flandres.

Permettez-moi d'ajouter un mot. Quand nous commençons la discussion d'un budget, sans y être préparés, nous devons revenir le lendemain (page 552) sur la résolution que nous avons prise. C'est ce qui est arrivé pour le budget des finances.

J'insiste pour que la discussion soit fixée à mardi.

M. le président. - S'il en est ainsi, il n'y aura de séance ni samedi, ni lundi.

M. Delehaye. - Soit ! La chambre pourra s'occuper utilement en sections de l'examen du budget des travaux publies, sur lequel les renseignements viennent d'être distribués.

S'il est fâcheux, au reste, qu'il n'y ait pas de séance publique, il le serait bien plus que la chambre abordât, sans y être préparée, la discussion d'un objet aussi important que le budget de l'intérieur.

Je conçois qu'il soit très difficile pour le moment de fixer l'ordre du jour. On pourrait attendre, pour le fixer, que le rapport fût distribué. Il faudrait hâter la distribution du rapport. Je crois qu'il vaudrait beaucoup mieux ne pas fixer la discussion avant mardi.

M. de Man d'Attenrode. - Messieurs, il importe de se donner le temps d'examiner un rapport avant de le discuter.

Je me rappelle qu'au début de cette session, nous avons ainsi discuté le budget des voies et moyens le lendemain du jour où l'on avait distribué le rapport. Qu'en est-il résulté? Qu'il n'y a pas eu en quelque sorte de discussion générale et que nous avons été obligés d'ajourner la discussion de plusieurs articles.

J'insiste donc pour qu'on nous donne au moins deux jours francs entre la distribution du rapport et la discussion.

Ce que je demande, je le fonde sur le règlement. L'article 33 porte que la discussion d'un projet de loi ne pourra commencer que trois jours après le dépôt du rapport.

On tient à ne pas perdre de temps, et je suis de cet avis. On nous a distribué hier les développements du budget des travaux publics. L'étendue de ces développements est telle, qu'il faudra du temps pour les examiner, si l'on veut discuter le budget d'une manière sérieuse en section.

Si l'on veut avoir des séances publiques, je ferai remarquer que l'on nous a distribué le rapport sur le projet de loi relatif à l'uniformité des circonscriptions administratives et judiciaires. On pourrait le mettre à l'ordre du jour de demain.

Je demande, comme l'honorable M. Delehaye, que la discussion du budget de l'intérieur soit fixée à mardi.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Plus on examinera le budget de l'intérieur, plus on le discutera, et plus, pour ma part, je serai satisfait. Je ne veux donc pas priver le moins du monde les honorables membres des moyens d'examiner à fond le budget de l'intérieur dans toutes ses parties. Mais ce serait la première fois, me semble-t-il, que l'on aurait demandé plus de trois jours pour l'examen d'un rapport sur un budget.

Je répète que nous sommes dans l'obligation de présenter incessamment les budgets pour 1850. Il faut donc que les budgets de 1849 soient votés sans retard.

Voilà le motif principal qui me détermine à vous prier d'aborder enfin la discussion du budget de l'intérieur.

On vient de dire que beaucoup de questions avaient été renvoyées à l'examen du budget de l'intérieur, notamment la question des Flandres. Messieurs, la question des Flandres se présentera au budget de l'intérieur, comme toute autre question administrative ou politique peut s'y présenter; je n'en récuse aucune; j'accepte toutes les discussions qui se présenteront. Mais le rapport de la section centrale ne peut avoir aucune influence sur la discussion. La question des Flandres ne s'y trouve, je crois, traitée ni directement ni indirectement. Au surplus, l'honorable M. Delehaye est parfaitement au courant de cette question, qu'il a déjà traitée à maintes reprises devant la chambre. J'insiste pour que l'on mette le projet de budget de l'intérieur à l'ordre du jour de lundi.

Je fais observer, messieurs, qu'en demandant la priorité pour le budget de l'intérieur, je n'entends nullement engager la chambre à ajourner l'examen du projet de loi sur les successions, projet auquel nous attachons beaucoup d'importance. Mais le rapport même sur ce projet n'est pas encore imprimé. Il faudrait qu'il fût distribué, si l'on veut en aborder l'examen immédiat.

M. Delehaye. - Je dois répondre un mot à M. le ministre de l'intérieur. Je n'ai pas demandé la remise à mardi, pour le motif que je ne serais pas préparé à discuter la question des Flandres; je suis tout à fait préparé, et si la chambre veut aborder immédiatement cette question, je ne reculerai pas. Je n'ai fait que répondre à M. le ministre de l'intérieur qui a ajourné M. Sinave à la discussion de son budget ; ce n'est donc pas moi qui ai pris l'initiative à cet égard.

Je demande, messieurs, que nous ayons un temps moral pour examiner le budget de l'intérieur. On dit qu'il y a urgence. Mais ce n'est pas la faute de la chambre, si dès à présent le budget n'est pas voté. Il y a longtemps que je siège dans cette enceinte et je puis dire que jamais la chambre n'a autant travaillé que cette année, jamais les travaux des sections n'ont marché aussi bien, aussi rapidement.

Il me semble, messieurs, qu'il n'y a rien de plus raisonnable que la proposition de M. le président, c'est d'attendre jusqu'à demain pour fixer le jour de la discussion. Si le rapport est distribué demain, nous pourrions commencer la discussion lundi; mais si le rapport n'est pas distribué demain il faudra bien la remettre à mardi.

M. Delfosse. - Si le rapport doit être distribué demain soir, la discussion peut commencer lundi. Mais si le rapport ne doit être distribué que samedi, il me semble que la discussion devra être remise à mardi. Si le rapport n'est distribué que samedi soir, beaucoup de membres qui passent le dimanche dans leur famille, ne l'auront que lundi dans la matinée.

Je demande qu'on ne fixe le jour de la discussion que demain ; on saura demain quand le rapport sera distribué.

M. Jullien. - J'ai demandé la parole pour faire observer que l'honorable M. de Man verse dans l'erreur lorsqu'il prétend qu'il faut trois jours francs d'intervalle entre la distribution du rapport et la discussion du budget; l'article 55$ du règlement se borne à exiger un délai de deux jours. Il me semble, messieurs, qu'on pourrait fart bien commencer la discussion lundi si le rapport est distribué demain.

- La chambre décide qu'elle ne fixera le jour de la discussion que demain.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Nous prierons M. le président de vouloir bien soigner aussi la distribution du rapport sur le proc jet de loi relatif au droit de succession.

Projet de loi portant le budget du ministère de la justice de l’exercice 1849

Discussion du tableau des crédits

Chapitre III. Administration des contributions directes, douanes et accises

Article 26

M. le président. - Nous sommes arrivés à l'article 26 « Frais généraux d'administration de l'entrepôt d'Anvers : fr. 31,000 fr. »

M. le ministre des finances a proposé d'ajouter à ce crédit, comme charge extraordinaire, une somme de 51,784 fr. 25 c, ce qui porterait le chiffre total à 82,784 fr. 25 c.

La section centrale, dans le rapport supplémentaire qui a été fait tout à l'heure propose l'adoption de l'amendement.

M. Loos. - Messieurs, l'honorable rapporteur de la section centrale a conclu à l'adoption du chiffre proposé. Seulement il a adressé une prière à M. le ministre, c'est d'ajourner autant que possible l'exécution d'une partie des travaux. Je dois dire que je ne verrais pas la possibilité pour M. le ministre de se conformer à ce vœu de la section centrale, car tous les travaux à exécuter à l'entrepôt d'Anvers sont des travaux indispensables pour rendre l'entrepôt productif, c'est-à-dire que les magasins qui existent aujourd'hui ne pourraient être employés par le commerce, si tous les travaux n'étaient pas exécutés. Je ne comprendrais pas qu'on voulût rendre productif l'entrepôt d'Anvers et ajourner certains de ces travaux. Tous les travaux sont indispensables au même degré. Je ne vois donc pas moyen de satisfaire au vœu de la section centrale ; les travaux sont dans l'intérêt du trésor public; tant qu'ils ne sont pas exécutés, les magasins ne seront pas productifs. Le gouvernement doit donc s'attacher à les exécuter le plus tôt possible. Je regrette seulement que cela n'ait pas eu lieu plus tôt.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - On pourrait libeller le crédit extraordinaire comme suit :

« Travaux d'appropriation des nouveaux magasins servant d'entrepôt : fr. 51,784 fr. 25 c. ».

M. le président. - Je mets d'abord aux voix l'article 26, ainsi conçu :

« Art. 26. Frais généraux d'administration de l'entrepôt d'Anvers : fr. 31,000. »

- Adopté.

Le crédit extraordinaire de 51,784 fr. 25 c. est ensuite mis aux voix et adopté avec le nouveau libellé proposé par M. le ministre des finances. Ce crédit formera un article spécial.

Article 15

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, avant que la chambre passe au chapitre IV, je désire qu'on répare une omission qui a été faite dans l'impression.

Aux développements du budget on trouve, à la suite de l'allocation de l'article 15 pour remises proportionnelles et indemnités, cette mention-ci : « Le crédit figurant au présent article n'est point limitatif. » Lorsque cet article a été mis aux voix, on a indiqué cette mention ; mais comme on a omis de l'imprimer dans le tableau même du budget, je demande que cette énonciation y soit rétablie.

- Cette proposition est adoptée.

Chapitre IV. Administration de l'enregistrement et des domaines

Article 27

« Art. 27. Traitement du personnel de l'enregistrement.

« Charges ordinaires : fr. 325,790.

« Charges extraordinaires : fr. 14,210. »

M. T'Kint de Naeyer. - Messieurs, nous avons déjà fait remarquer dans une des dernières séances que rien n'avait été innové depuis dix-huit ans dans l'administration de l'enregistrement et des domaines. Cette administration a conservé dans les provinces ses 9 directeurs et ses 21 inspecteurs, c'est-à-dire un personnel supérieur, je pense, à celui qui existait sous le régime impérial.

Pour démontrer qu'il y avait quelque chose à faire dans cette administration, il suffit d'indiquer les réformes dont M. le ministre des finances vient de prendre l'initiative. Nous le félicitons d'avoir adopté un système qui a prévalu en Hollande et en France. La section centrale espère que le gouvernement, à mesure que des places deviendront vacantes, réduira successivement le nombre des inspecteurs à un seul par province.

On pourra nous objecter qu'il y a dans le Brabant 29 bureaux et dans le Hainaut 35 bureaux. Mais à cela nous répondrons que, dans le département du Nord, il y a plus de 50 bureaux, et nous n'avons jamais (page 553) entendu dire que l'inspection y fût moins active ou moins efficace qu'en Belgique.

La section centrale avait aussi engagé M. le ministre des finances a examiner si, sans adopter d'une manière absolue le plan qui lui avait été soumis par la cinquième section, il ne serait pas possible de réunir la direction de la province de Limbourg, composée de 9 bureaux, à celle de Liège qui en a 22, et la direction de la province de Namur qui a 18 bureaux à celle de Luxembourg qui en compte 14.

Messieurs, il est notoire que le directeur du Limbourg, par exemple, est chargé d'un service qui n'est comparable sous aucun rapport à celui des autres directeurs.

Ce qui indique principalement l'importance d'une direction, ce sont les affaires contentieuses.

Or, si le gouvernement communiquait à la chambre le tableau des instances qui se sont produites depuis 10 ans, dans cette province, nous pensons qu'il suffirait d'y jeter un coup d'œil pour prouver que l'opinion de la section centrale est parfaitement fondée, et mérite d'être prise en sérieuse considération.

Lorsque M. le ministre des finances s'est rendu dans le sein de la section centrale, il s'est engagé à persévérer dans la voie où il est résolument entré; la section centrale compte sur l'exécution de cette promesse.

M. Toussaint. - Je désire saisir l'occasion de la discussion sur le chapitre relatif à l'enregistrement pour appeler l'attention du gouvernement sur la nécessité de la révision de la loi de frimaire an VII, à l'effet de combler les lacunes qui s'y trouvent et d'empêcher les fraudes des droits établis par cette loi. Il a paru nécessaire de prendre des mesures pour prévenir la fraude en matière de droits de successions, la même nécessité existe en matière d'enregistrement.

L'expérience a révélé les moyens par lesquels on fraude le droit d'enregistrement, elle a également indique les moyens de prévenir la fraude.

L'honorable M. Lebeau a signalé une lacune très préjudiciable quant aux droits de transcription sur les soultes de partage. Suivant les textes, le droit n'est pas dû, mais logiquement et en équité il devrait l'être.

Il est notoire qu'on a évité très fréquemment le droit de mutation en faisant apport à des sociétés d'immeubles très importants. Il y avait mutation, par conséquent droit dû ; mais en présence du texte précis de la loi de frimaire, il a été impossible d'exiger le droit.

Dans les partages de succession, de très nombreuses fraudes se pratiquent. On porte à l'actif des sommes liquidés qui n'existent pas ; ce qui permet de faire des partages sans soultes, par conséquent de soustraire les soultes dissimulées au droit d'enregistrement dû pour la mutation. D'un autre côté, des partages sincères sur le rapport de la composition des lots ne peuvent éviter des contestations avec le fisc, et à ce sujet des discussions de jurisprudence occupent depuis 10 ans nos tribunaux et même la cour de cassation.

On fraude souvent une moitié du droit de mutation en déguisant les ventes sous la forme de l'échange, pour ne payer le droit que sur la différence de valeur vénale calculée sur le pied de 20 fois le revenu cadastral. Tel de ces échanges que je pourrais citer a eu lieu entre un bien de trois cent mille francs d'un côté contre un bien de deux mille francs de l'autre.

Il y aurait lieu d'examiner aussi, quant aux droits fixes d'enregistrement, s'il n'y aurait pas lieu d'en augmenter le produit en arrondissant les sommes et en supprimant les additionnels, comme on l'a fait pour le timbre. On arrondirait à la fois les sommes et les produits. Il y aurait donc lieu de faire une nouvelle loi du 31 mai 1854 sur les produits dont nous nous occupons.

J'appelle sur cet objet l'attention de M. le ministre des finances, pour qu'il fasse étudier ces différentes matières et présente dans le cours de la session actuelle un projet de loi qui, sans altérer les principes qui régissent les droits d'enregistrement et de timbre, aurait pour effet de diminuer les fraudes et de faire entrer annuellement au trésor 400 à 500 mille francs.

Cette somme, ajoutée aux économies que nous faisons et aux produits supérieurs que donnera la loi sur les successions, même en excluant le droit en ligne directe, permettra de passer l'année actuelle sans créer aucun nouvel impôt : résultat désirable et que chacun de nous ambitionne certainement.

M. Osy. - J'ai eu l'honneur de déposer une proposition dont vient de parler l'honorable rapporteur. Si on réunissait plusieurs directions, on pourrait faire une économie de plus de 50 mille francs. Ce n'est pas dans la discussion générale d'un budget qu'on peut improviser l'organisation d'un système d'administration. Mais il y a des directions tellement petites qu'on pourrait les réunir. Ainsi on pourrait réunir la direction d'Anvers à celle de Brabant, celle de Namur à celle de Liège. Je prie M. le ministre d'examiner le tableau qui m'a été remis par un des employés les plus entendus dans la partie, et de voir s'il n'y aurait pas lieu d'en tenir compte dans la formation du budget de 1850.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban) - Les observations présentées tout à l'heure, par l'honorable M. T'Kint de Naeyer, appuyées par l'honorable M. Osy, avaient été produites en sections, lors de l'examen du budget. On a déposé, puis on a soumis aux observations du département des finances un projet d'organisation pour l'enregistrement. Ce projet, d'après les affirmations de l'honorable M. Osy, émane d'un homme très compétent dans la partie. Cela se peut, mais il avait fait assurément une proposition inacceptable de tous points. Je soupçonne, à la manière dont ce projet a été formulé, qu'il doit émaner d'un vérificateur ; car les combinaisons imaginées semblent surtout avoir en vue de ménager la position à laquelle un vérificateur peut aspirer.

Pour faire comprendre le peu de soin apporté dans ce travail, il suffira de faire remarquer que l'auteur a imaginé une réunion de diverses provinces, sans même s'occuper de leur éloignement ou de leur contiguïté. Il n'est préoccupé que d'une chose, c'est de donner aux nouvelles directions un nombre de bureaux à peu près égal. Il trouve là le souverain bien, à tel point qu'il réunit la direction du Hainaut à celle du Luxembourg, sans s'arrêter le moins du monde à la considération qu'il faut traverser la province de Namur pour aller du Hainaut dans le Luxembourg. Cela lui avait paru indifférent, pourvu que la direction eût une quarantaine de bureaux.

Du reste, il maintenait une chose essentiellement vicieuse, le système actuel qui contient trop d'inspections et trop peu de vérifications. C'était le système de la loi de 1791 qui, depuis un grand nombre d'années, a été changé en France et avait été maintenu en Belgique; je l'ai modifié d'après les idées qui ont présidé à l'organisation de l'administration de l'enregistrement en France, qui, comme on sait, est l'une des meilleures qui existent.

Il se peut qu'il y ait lieu de réunir un jour diverses directions, qu'on décide que la direction du Limbourg sera annexée celle de Liège, et celle du Luxembourg à celle de Namur. Je ne me prononce pas d'une manière absolue; cependant la chambre comprendra que les faits signalés sont trop patents pour avoir échappé à mon attention, et que si j'avais dû me décider d'après l'importance relative de quelques directions, j'aurais prononcé la réunion ; mais il y a un autre aperçu qu'il ne faut pas négliger.

Si cette raison est bonne pour la direction de l'enregistrement, elle est bonne pour la direction des contributions ; elle est excellente pour la direction du trésor. Elle sera bonne aussi pour le gouvernement provincial. C'est-à-dire qu'on est conduit, à force de logique, à supprimer ces deux provinces, à les faire desservir par l'administration des provinces contiguës. Les raisons sont à peu près les mêmes dans tous les cas. Vous concevez que je ne puis montrer un grand empressement à prendre des mesures qui pourraient avoir de telles conséquences. Je ne me prononce pas d'une manière irrévocable dans un sens ou dans l'autre. Nous verrons dans quelques années ce qu'il sera possible de faire. Les réformes jusqu'ici proposées nous paraissent suffisamment radicales. La section centrale vient de le répéter par l'organe de son rapporteur, il y aura des réductions dans le personnel de l'enregistrement et une grande économie par suite des mesures que je propose.

M. de Mérode. - Messieurs, je suis loin de croire comme l'honorable M. Toussaint qu'il faille mettre plus de rigueur dans la perception des droits pour les soultes qui sont payées entre des copartageants dans une succession. L'égalité proportionnelle entre les contribuables dans la répartition des charges publiques est un des plus justes principes de nos institutions.

Or, il est évident que certains partages ne peuvent s'effectuer sans soulte, tandis qu'il y en a d'autres où une soulte n'est pas nécessaire. Cela dépend du nombre des propriétés, de leur disposition, de leur division en fractions plus ou moins considérables.

Ces droits perçus pour les soultes frappent en général les familles les plus nombreuses. L'héritier unique n'est jamais exposé à payer de soulte, puisqu'il reçoit seul la totalité de la succession, tandis que les héritiers qui sont en grand nombre, et dont la part est d'autant plus faible, sont exposés à la nécessité de payer une soulte à des copartageants.

Le gouvernement, lorsqu’il s'agit de succession, ne devrait donc s'occuper que des droits à percevoir en raison de la quotité de toute la succession, non de la manière dont les copartageants s'arrangent entre eux pour régler leurs parts respectives. Il y a souvent de grandes difficultés à vaincre. Et de l'obligation de payer des droits élevés à cause des soultes, résultent de doubles frais, lesquels pèsent précisément sur ceux qui sont soumis aux embarras des parcages les plus fractionnés et les plus compliqués.

J'invite ceux qui sont chargés de trouver des voies et moyens pour le trésor, à ne pas chercher à accroître les frais fiscaux que supportent les héritiers multiples, et qui subissent ainsi plus d'embarras avec moins de valeurs à recueillir.

Telles sont les observations que j'ai cru devoir présenter de nouveau afin de m'opposer aux rigueurs plus grandes que semblait solliciter l'honorable M. Toussaint, dans la perception des droits accessoires de succession, recouvrables sur plusieurs copartageants.

M. T'Kint de Naeyer. - L'amendement de la section centrale tombe par suite de la décision prise dans la séance d'hier.

- Sur la proposition de M. Delfosse, à laquelle M. le ministre des finances se rallie, le littera H de cet article est adopté avec le libellé adopté pour le littera A de l'art. 21 : « Traitements temporaires et employés non replacés. »

L'art. 27 est adopté avec le chiffre de 340,000 francs et avec une note ainsi conçue : « La partie du crédit concernant les traitements des seconds commis de direction pourra être transférée, jusqu'à concurrence (page 554) d'une somme de 8,000 fr., à l'article 55 paragraphe C, relatif au matériel et aux frais de bureau des directeurs. »

Articles 28 à 34

« Art. 28. Traitement du personnel du timbre : fr. 52,200. »

- Adopté.


« Art. 29. Traitement du personnel du domaine : fr. 93,560. »

- Adopté.


« Art. 30. Traitement du personnel forestier : fr. 341,900. »

- Adopté.


« Art. 31. Remises des receveurs. Frais de perception. (Ce crédit n'est point limitatif) : fr. 778,000. »

- Adopté.


« Art. 32. Remises des greffiers : fr. 48,000.

« (Ce crédit n'est pas limitatif). »

- Cet article, avec la mention qui l'accompagne, est adopté.


« Art. 33. Matériel : fr. 53,000. »

- Adopté.


« Art. 34. Frais de poursuites et d'instances : fr. 55,000. »

- Adopté.

Article 35

« Art. 35. Dépenses du domaine : fr. 85,000. »

M. David. - Messieurs, la section centrale a demandé des explications à M. le ministre des finances sur le littera E frais de culture et travaux d'améliorations. M. le ministre a donné quelques explications.

Il a partagé cette dépense en deux sortes d'améliorations. Les unes consisteraient en construction et entretien de certaines routes, celles-là je les approuve. Les autres consisteraient dans l'assainissement du sol et le repeuplement en grand, tant en semis qu'en plantations, etc. Celles-là je ne puis les admettre partout.

Les plantations, lorsque le sol leur convient, peuvent être favorables. Mais il y a quelques terrains qui déjà sont productifs, tels que les terrains à foins aigres et à herbages, et dans ceux-ci il me semble qu'il y a plutôt perte pour le trésor que bénéfice à y opérer des plantations.

Dans la forêt de Soignes, par exemple, les herbages ont toujours rapporté des sommes assez considérables. Sous le gouvernement autrichien, sous le gouvernement français, sous le gouvernement hollandais, et en dernier lieu lorsque la forêt appartenait à la Société Générale, on évalue que le rapport de ces herbages s'élevait à une trentaine de mille francs. C’est là un produit assez important.

L'honorable M. Verhaegen, actuellement notre président, qui est bourgmestre d'une des communes intéressées dans cette question, est à même d'apprécier la valeur de ces herbages. On m'a dit qu'aujourd'hui on pourrait en retirer une somme supérieure encore à 30,000 fr.

Un grand intérêt s'attache à la coupe de ces herbages; c'est l'intérêt de l'agriculture. Anciennement dans tous les villages voisins de la forêt de Soignes, les cultivateurs tenaient un bétail beaucoup plus nombreux que celui qu'ils peuvent aujourd'hui entretenir parce qu'ils ne jouissent plus.de ces herbages.

Je réclamerai donc en faveur de l'agriculture que la vente de ces herbages, recommence comme anciennement. Il ne peut en résulter aucun tort pour la forêt. C'est dans les coupes défensables que les habitants des environs vont couper ces herbages.

Quant à la forêt de Hertogenwald, on y fait des coupes régulières de foin. Mais on tend chaque année à rétrécir le terrain sur lequel ces coupes se font. On cherche à obtenir des défrichements dans cette partie du pays. Si l'on ne fournit pas de fourrage aux habitants de la localité, on entrave les défrichements, les fourrages y manquent déjà. Donc là encore, en favorisant le trésor, on favoriserait l'agriculture et les défrichements.

Je demanderai donc à M. le ministre qu'il examine seulement cette question, et qu'après l'avoir examinée, il donne des ordres à l'administration forestière pour que la récolte des foins et des herbages soit permise.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Les renseignements qui ont été communiqués par l'honorable préopinant sont complètement inexacts. Il suppose que l'administration de l'enregistrement néglige un produit qu'il estime à 30,000 fr. pour la forêt de Soignes, et que pourrait procurer la vente d'herbages et de foins aigres.

Or, messieurs, à aucune époque on n'a obtenu de la vente de ces herbages une somme qui approche de celle qui a été signalée. La Société Générale délivrait des cartes au prix de deux francs aux particuliers qui voulaient acquérir le droit d'aller à discrétion couper des herbes dans la forêt. Elle recevait de ce chef non pas 53,000 fr., mais 1,800 fr. environ; ce qui est un peu différent.

L'Etat, en 1845, a aussi délivré des cartes, à l'imitation de ce qui avait été fait par la Société Générale. Il en a vendu 1,227, ce qui a rapporté 2,454 francs. C'est là la recette la plus élevée, je pense, qui ait été opérée.

L'administration a pensé qu'elle devait supprimer cette faculté, qu'il y avait d'une part, un intérêt beaucoup plus grand pour l'Etat à repeupler les forêts qu'à y laisser croître des herbes et d'autre part, que concéder le droit à tout venant de s'introduire dans les forêts, c'était favoriser des délits de toute nature.

Ces délits sont très considérables dans la forêt de Soignes. Il résulte du relevé des procès-verbaux des délits forestiers, dressés pendant l'exercice 1845, qu'il a été commis dans la forêt de Soignes six fois plus de délits que dans l'inspection du Brabant et d'Anvers, six fois plus de délits que dans l'inspection de Tirlemont, six fois plus que dans l'inspection du Hainaut, neuf fois plus que dans l'inspection de Liège, neuf fois plus que dans l'inspection de Neufchâteau, huit fois plus que dans l'inspection de Dinant, et dix-sept fois plus que dans l'inspection des deux Flandres.

Il y avait nécessité d'empêcher des contraventions de ce genre et partant, il ne fallait pas faciliter les moyens de les commettre. Laisser introduire, sous un prétexte qui a l'air d'être l'exécution d'un contrat, une foule de particuliers dans la forêt, c'est par cela même y rendre la répression des délits pour ainsi dire impossible.

M. David. - Messieurs, le chiffre que j'ai eu l'honneur de vous indiquer tantôt, je dois le croire exact, puisqu'un ancien bourgmestre d'une commune voisine de la forêt de Soignes, me l'a indiqué, et il dit même qu'aujourd’hui on pourrait en faire beaucoup plus d'argent. Or, messieurs, remarquez bien que la futaie ne donne des produits qu'au bout de 100 ans, et calculez quel capital vous donnera au bout de 100 ans un revenu annuel de 30,000 fr.

(page 557) Il atteindra le chiffre de 39 millions à peu près, somme plus que double de la valeur actuelle de la forêt de Soignes qui, cependant, existe depuis plus d'un siècle. En présence d'une somme aussi considérable, et des grands intérêts de l'agriculture de localités spéciales, je vous demanderai, messieurs, si quelques délits forestiers insignifiants peuvent et doivent être pris en considération.

M. de Man d'Attenrode. - Messieurs, il est un motif dont il n'a pas été fait usage, me semble-t-il, pour ne pas permettre l'introduction du bétail dans les forêts de l'Etat (interruption), pour qu'on n'y autorise pas l'enlèvement des herbages, et ce motif ne peut être contesté : C'est que les jeunes plants destinés à repeupler la futaie disparaissent au fur et à mesure que l'herbe est coupée; on ne peut exploiter l'herbe qui croît dans les forêts qu'en portant un grave préjudice à la reproduction du bois. Je ne puis donc qu'approuver le système suivi par l'administration à cet égard.

D'ailleurs, messieurs, mon but, en demandant un tour de parole, n'a pas été de vous entretenir da la surveillance des forêts de l'Etat; mon désir est de demander quelques explications à M. le ministre des finances sur la manière avec laquelle l'administration remplit les engagements qu'elle a contractés lors de la discussion d'un projet de loi, qui tendait à permettre à l'Etat d'acquérir une vaste propriété bâtie, située rue du Nord, à Bruxelles. Cette discussion est intervenue dans cette chambre en février 1847. En voici les principales circonstances.

Il est bon que vous sachiez d'abord, messieurs, que les bâtiments des départements ministériels n'étant pas assez vastes pour contenir toutes les administrations qui y ressortissent, l'Etat est obligé d'acquitter le loyer de plusieurs maisons situées dans la ville de Bruxelles. Eh bien, le gouvernement, en février 1847, exposa à la législature qu'il serait avantageux et pour l'administration et pour le trésor d'acquérir un bâtiment, situé rue du Nord, et d'y concentrer plusieurs services épars dans diverses parties de la ville. Il s'agissait d'en faire une succursale des ministères. On devait y transférer aussi les archives du cadastre, et l'atelier général du timbre. Ces archives, qui ont une grande valeur, sont déposées dans l'ancien hôtel de la rue de la Montagne, et l'on fit valoir que de grands amas de matières combustibles, se trouvant réunies dans un magasin situé au-dessous, ce dépôt était sans cesse menacé d'incendie.

Enfin la destination du bâtiment, dont l'achat nous était proposé, était encore de recevoir les archives modernes des ministères, après un triage bien entendu ; car il paraît que les hôtels des départements ministériels sont encombrés de paperasses.

Le ministre des finances déposa par suite un projet de loi qui tendait à allouer une somme de 165,000 francs pour l'acquisition des constructions de la rue du Nord ; plus 10,000 francs pour appropriation. Ce dépôt fut fait en séance du 12 janvier 1847.

La section centrale chargée d'examiner cette demande de crédit (j'en faisais partie), en proposa l'adoption à la chambre, par l'organe de l'honorable M. Veydt; mais à une condition formulée dans les termes suivants; en voici le texte, je le trouve dans le rapport de la section centrale :

« Eu égard à tous ces motifs, la section centrale, par 6 voix contre une, adopte le projet de loi, tel qu'il a été présenté, mais sous une condition, à savoir que, lors de la discussion, le gouvernement prendra l'engagement précis de réaliser, dans le cours de 184S, sur les loyers mentionnés à l'annexe n° 1 de l'exposé des motifs, une économie au moins égale à la somme représentant l'intérêt du capital à employer à l'achat de l'immeuble et aux frais d'appropriation, intérêt calculé à 6 p. c. l'an. »

M. le ministre des finances s'empressa de répondre en ces termes à cette interpellation de la section centrale :

« (…) A mesure que des baux pourront être résiliés, nous les résilierons. Il sera très facile de résilier ceux des maisons rue des Sables, rue Royale et place des Barricades, ce qui donnera lieu à une économie de plus de 11,000 francs, et si plus tard nous pouvons résilier les baux de la succursale des archives rue de la Paille, et de la maison rue Notre-Dame-aux-Neiges ; l'économie s'élèvera à 17,000 francs. »

L'honorable M. Lebeau déclara que le prix d'acquisition lui semblait très modéré; sous le rapport financier, a-t-il encore ajouté, nous faisons une bonne affaire; l'opération est avantageuse, si l'on supprime divers loyers montant à 11,350 fr.

La grande majorité de la chambre, séduite par tous les motifs, adopta le projet de loi. L'honorable M. Delfosse lui-même, si grand partisan des économies, vota en faveur du projet, et, quant à moi, je lui donnai aussi mon vote approbatif.

Eh bien, messieurs, quel usage a-t-on fait de ce bâtiment? Comment l'administration a-l-elle tenu les engagements qu'elle avait pris en nous poussant à cette dépense ? Je m'en vais vous le dire.

On a d'abord partagé cette propriété deux parties; on a fait de l'une une caserne d'infanterie, et dans l'autre on a établi la direction du commerce qui était auparavant dans une maison rue Royale, cette direction ressortit au département des affaires étrangères; enfin M. le ministre de la justice y a envoyé la direction des cultes, qui se trouvait établie dans les dépendances mêmes de son département depuis nombre d'années.

Or, je ne puis saisir ce que cette combinaison a d'avantageux, à moins que ce ne soit dans le but de se mettre plus au large dans son hôtel, car au point de vue administratif, il doit être très désavantageux, pour un chef de département, de se trouver aussi éloigné d'un service aussi important; les communications ne peuvent être fréquentes, quand elles sont aussi peu faciles.

Voilà en somme à quoi a abouti la dépense des 175,000 fr., que la législature a accordés sous de tout autres conditions. Il faut ajouter, pour être juste, que le loyer de la maison rue des Sables a été supprimé, soit une économie de 3,500 fr.; c'est la seule compensation qui ait été obtenue.

Ces conditions, le gouvernement songe-t-il à les remplir? Mais si une administration se croit permis de décliner les engagements pris par celle qui l'a précédée aux affaires, qu'elle confiance pouvons-nous avoir dans ceux qu'elle prendra elle-même? Car enfin les administrations ne se perpétuent pas longtemps aux affaires, et celle qui la remplacera pourrait fort bien imiter son exemple. Au reste, c'est à la chambre à faire respecter les engagements qui ont été contractés ; il me suffit, quant à moi, de les lui avoir rappelés.

Je prierai, en terminant, M. le ministre des finances de vouloir nous donner quelques explications relativement à cette affaire, de vouloir nous dire quel usage il compte faire de ce bâtiment?

M. le président. - Si personne ne demande la parole, je vais mettre le chiffre aux voix.

M. de Man d'Attenrode. - M. le ministre des finances ne croit pas devoir s'expliquer à propos de l'interpellation que je viens de faire; je lui en adresserai une deuxième, car je tiens infiniment à un mot d'explication.

J'ajouterai donc que quelque temps après l'adoption du projet de loi, qui tendait à autoriser le gouvernement à acquérir les bâtiments de M. Hauman, l'on proposa à la législature l'adoption d'un autre crédit beaucoup plus considérable. Il était destiné à faire l'acquisition de deux hôtels rue de la Loi et d'une maison rue de l'Orangerie.

Il s'agissait de compléter le système des acquisitions faites depuis 1830, afin d’établir tous les ministères rue de la Loi. Mais comme le prix en était considérable (490,000 fr.), cette proposition souleva une très forte opposition, car cette dépense ne pouvait être couverte que par l'emprunt, c'est-à-dire par la dette flottante.

Ce fut à l'honorable M. Lebeau que la section centrale confia cette fois le soin de développer le résultat de son examen. L'honorable rapporteur conclut à l'adoption du projet. Lors de la discussion publique, il fit comprendre que MM. les ministres d'alors étaient complètement désintéressés dans cette acquisition, que le statu quo était même préférable pour eux, ce qui était fort exact d'ailleurs. Il fit valoir, que si l'on voulait se renfermer dans les idées les plus absolues du positif, on ne ferait plus rien pour l'embellissement du pays, qu'il s'agissait de saisir une occasion peut-être unique de compléter le beau système suivi depuis 1830, et qui consistait à réunir tous les départements autour du palais législatif; que l'opération n'était d'ailleurs pas mauvaise dans le sens le plus vulgaire, que le transfert des ministères de la justice et des travaux publics, rue de la Loi, rendrait disponibles deux hôtels d'une grande valeur, et quant à moi, j'adhérai entièrement non par mes paroles, mais par mon vote, à l'opinion émise par l'honorable M. Lebeau.

En effet, si le gouvernement voulait mettre quelque bonne volonté à exécuter ce projet, cette affaire ne serait pas onéreuse. Ce qu'il y a d'onéreux, c'est le statu quo, c'est de rester chargé de l'entretien de deux hôtels acquis, il y a deux ans, dont on ne fait pas un usage convenable.

Je viens de dire que cette opération pourrait se réaliser sans être onéreuse pour le trésor, et je m'explique. Le transfert des ministères de la justice et des travaux publies rue de la Loi, exigerait, il est vrai, l'achat de deux ou trois petites maisons rue de l'Orangerie, et la construction, dans cette rue, d'un bâtiment assez vaste nécessaire aux bureaux; mais il y aurait une large compensation, car les deux hôtels que ce transfert rendrait disponibles, pourraient être aliénés, et leur valeur est évidemment supérieure à la dépense qu'occasionnerait la construction des locaux destinés à des bureaux rue de l'Orangerie. Cette construction a été estimée à 300,000 fr., et je la crois suffisante; car une construction de ce genre ne demande aucun luxe d'architecture. Personne ne contestera qu'avec 300,000 fr. il est possible de pourvoir à de vastes constructions.

Je termine, messieurs, ces observations un peu longues, en ajoutant que la chambre adopta le projet de loi qui allouait 490,000 fr. au ministre des finances ; cette discussion eut lieu le 29 avril 1847, et je crois qu'elle fit bien, car il est possible que l'occasion qui s'offrait de compléter un des beaux ensembles qui existent en Europe ensemble qui tend à réunir tous les ministères autour de la législature, ne se serait plus représenté peut-être.

Maintenant, je le demande à M. le ministre des finances : Se bornera-t-on à y loger le service de surveillance de la caisse d'amortissement? Ce serait le plus onéreux de tous les systèmes ; c'est celui de ne pas tirer parti de la belle propriété qui a été assurée à l'Etat. J'insiste pour que M. le ministre veuille bien faire suivre ces observations de quelques explications.

(page 554) M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, l'honorable préopinant a eu tort de supposer que je ne voulais pas répondre à la première question qu'il m'a faite; il n'avait pas encore eu le temps de se rasseoir, lorsque, craignant.de ne pas recevoir de réponse, il m'a adressé une seconde question.

J'ai la meilleure intention de satisfaire aux désirs de l'honorable membre.

On demande pourquoi le ministère des travaux publics et celui de la justice ne se trouvent pas déjà transférés dans les bâtiments acquis rue de la Loi. C'est par la raison toute simple qu'il faudrait d'abord faire une dépense très considérable; j'ai ouï prononcer le chiffre d'un .million, .et j'ai de bonnes raisons pour croire qu'il faudrait une somme approximative d'un million pour installer les deux ministères dans ces bâtiments;, il faudrait exécuter de grandes constructions pour les bureaux, et, pour les établir, de nouvelles acquisitions vers la rue de l'Orangerie sont nécessaires.

Quant à l'acquisition du bâtiment de la rue du Nord, je ne sais si c'a été une bonne opération pour l'Etat, bien entendu; mais, jusqu'à présent : on n'a pu donner à ce bâtiment la destination qu'on avait en vue autrefois. Là aussi il faudrait faire des dépenses importantes pour y installer les administrations qu'on voulait y placer.

Je présume que c'est surtout à ces causes qu'il faut attribuer la non-exécution des engagements qui avaient été pris par les administrations précédentes. Du reste, les locaux ne sont pas inoccupés ; on en a converti une partie en caserne, comme l'honorable M. de Man d'Attenrode vient de le rappeler, et si je m'en rapporte à ce qui m'a été affirmé, il n'y avait peut-être rien de mieux à en faire que de les transformer en caserne.

M. Lebeau. - Messieurs, je laisserai à l'honorable M. Veydt, rapporteur de la section centrale sur le projet de loi tendant à autoriser le gouvernement à acquérir des bâtiments dans la rue du Nord, le soin d'expliquer, s'il le juge convenable, pour quels motifs cette section centrale, presque à l'unanimité, s'est prononcée pour l'homologation du projet de traité.

Je me suis borné, quant à moi, à motiver mon vote affirmatif, en présence des explications formelles et des engagements non moins formels que prenait le gouvernement, d'opérer, sur les frais de location des différents bâtiments affectés au service de plusieurs ministères, une économie au moins égale à l'intérêt du chiffre de l dépense qu'entraînait l'homologation du traité fait par le gouvernement.

Je me suis borné, dis-je, à voter pour le crédit, à l'exemple de plusieurs de mes collègues, et entre autres, de MM. de Man et Delfosse, comme on vient de le rappeler.

Ce que je sais, c'est que les terrains acquis rue du Nord occupent une surface considérable, que les bâtiments y sont aussi très considérables ; qu'à l'époque où la loi a été votée, tout le monde était à peu près d'accord, la discussion en fait foi, qu'au moyen de quelques dépenses d'appropriation, on pourrait débarrasser plusieurs des ministères, qui ne sont pas éloignés de la rue du Nord, d'une grande partie de leur trop-plein. Voilà quant au premier projet.

Quant au projet d'acquisition du bâtiment connu sous le nom d'hôtel Engler et du bâtiment qui y est annexé, et connu sous le nom d'hôtel d'Aubreme, il est évident que la plupart de ceux qui ont admis ce projet, ne séparaient pas, dans leur pensée, et l'adoption de la loi et l'utilisation à faire par le gouvernement de deux hôtels situés au centre de la capitale et dont la vente pouvait produire une somme très considérable; il s'agit de l'hôtel du ministère de la justice et de celui des travaux publics.

Pour mon compte, indépendamment des considérations qui avaient été mises en avant, j'ai été quelque peu séduit par l'idée d'avoir autour du palais de la Nation, dans la plus belle rue de Bruxelles, tous les hôtels ministériels, et de les avoir pour ainsi dire sans frais, grâce au parti à tirer des hôtels qui deviendraient vacants.

Je n'ai pas à m'enquérir des raisons pour lesquelles les conditions si solennellement acceptées dans cette chambre par l'ancien ministère, n'ont pas été exécutées. J'accueille cependant comme une objection sérieuse à l'exécution immédiate des engagements pris, celle qui est puisée dans les circonstances financières, au milieu desquelles nous nous trouvons.

L'avantage qu'il y aurait, si le chiffre de la dépense n'était pas un (page 555) obstacle en ce moment, ce serait d'isoler les hôtels ministériels de presque toute habitation, et de les soustraire ainsi en très grande partie au danger de l'incendie. J'ai toujours pensé que tôt ou tard, toute la ligne des habitations de la rue de l’Orangerie, attenant aux hôtels destinés aux ministères, devait finir par s'absorber dans ceux-ci ; de cette manière, et le palais de la Nation, et la plupart des ministères se trouveraient isolés, et seraient soustraits ainsi, je le répète, au plus grand danger, celui d'incendie.

L'acquisition des deux hôtels Engler et d'Aubremé n'a été que la continuation d'un système constamment poursuivi par les chambres et par le gouvernement, système qui a été inauguré par mon honorable ami, M. le ministre de l'intérieur, dès l'année 1833, si je ne me trompe, lorsqu'il a soumis alors aux chambres la ratification de l'acquisition de l’hôtel Torrington, actuellement occupé par le département de l'intérieur.

Cette acquisition, le hasard des circonstances l'a entourée d'un très grand avantage pour le pays. Grâce à la dépréciation momentanée des propriétés à Bruxelles, le ministre alors a fait une excellente affaire, non seulement au point de vue de da situation même de l'hôtel, mais encore sous le rapport financier.

Depuis on a, avec l'autorisation des chambres, acquis successivement l’hôtel de Galles et l'hôtel Jacquelaer; l'on a voulu rester conséquent, et acquérir, pour l'Etat, tous les hôtels qui forment la rue de la Loi.

L'ancien ministère avait pris l'engagement formel de transférer dans les hôtels acquis en dernier lieu les bureaux du ministère de la justice et du département des travaux publics; dès lors, ainsi que je l'ai déjà dit, on conçoit que dans la pensée de ceux qui ont voté l'homologation du traité, la conséquence de cette acquisition devait être la vente de deux locaux immenses d'une très grande valeur, surtout si, dans des circonstances favorables, on pouvait compter, sur les spéculations des constructeurs de bâtiments.

M. Veydt. - Messieurs, ce que vient de dire l'honorable M. Lebeau en faveur de l'acquisition des bâtiments de la rue du Nord suffit pour la justifier de nouveau, si c'était nécessaire. J'ajouterai cependant quelques observations, parce que je suis encore d'avis que la conclusion de cette affaire n'a pas été défavorable à l'Etat, bien entendu à la condition qu'on en tire tout le parti qu'on a eu l'intention d'en tirer, en achetant la propriété. Le motif déterminant était de se procurer un local pour le dépôt des archives, qui encombrent les ministères et qui y occasionneraient de grands désastres, si un incendie venait à éclater.

Il y a, à la rue du Nord, un emplacement très convenable pour cette destination et assez vaste pour y mettre toutes les archives après en avoir fait un triage. L'appropriation n'exige pas une forte dépense ; si je me rappelle bien la somme du devis, elle est de 30,000 francs et le bâtiment serait à l'abri du feu. Pour le moment, l'occupation du local par une partie de la garnison met obstacle à la translation des archives ; mais cette occupation, faite subitement au mois de mars dernier et à cause de circonstances, ne doit pas durer.

Le jour qu'elle viendra à cesser, le gouvernement a le moyen de pourvoir au transfert des archives, ce qui est, suivant moi, très désirable à et l'hôtel de la rue de la Montagne pourra être évacué et vendu ; car il n'y reste que l’atelier du timbre, qui sera bien dans la rue du Nord, aujourd'hui qu'une situation plus centrale n'est plus nécessaire.

Un autre résultat avantageux, c'est de parvenir à placer dans un même bâtiment des branches de l'administration publique qui se trouvent disséminées dans la ville. La propriété de la rue du Nord se prête à cet usage; la section centrale, avant de se prononcer, a fait une visite des lieux et elle en a jugé ainsi. En l'affectant à diverses administrations, on fait l'économie que l'honorable M. de Man a rappelée, et qui est la conséquence de la résiliation de plusieurs baux. Aujourd'hui ce but n'est atteint qu'en partie.

Il s'agit de faire plus, et de surmonter les difficultés qu'on rencontre, quand on cherche à éloigner l'un ou l'autre service de l'administration centrale où la place manque, ou de faire abandonner les locaux particuliers où il se trouve établi. Je pense encore qu'il y a possibilité de tirer bon parti des locaux de la rue du Nord, et de réaliser les économies qui ont été promises, lorsqu'on demandé et obtenu des chambres l’approbation de cette acquisition pour l’Etat.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Le ministère a fait ce qu'il a pu pour exécuter les engagements du cabinet précédent en ce qui concerne l'occupation du local ayant appartenu à l'ancienne société Hauman et Cie. Dès mon entrée au ministère, j'ai fait l'inspection des lieux ; je me suis convaincu qu'il était impossible que ce local reçût toutes les destinations que le projet lui avait assignées.

Cependant depuis un an, nous avons déjà renoncé à deux hôtels, et quelques administrations ont été placées dans ce local. Je pense qu'il leur offre peu d'attraits; mais cela n'a pas empêché de forcer les administrations de s'y rendre.

On avait songé à y réunir les différents jurys d'examen qui aujourd'hui occupent un hôtel place des Barricades ; mais il est matériellement impossible que cela soit.

Ma première impression a été peu favorable à cette acquisition. L'étendue du terrain est grande; en abattant les bâtiments et en vendant le tout on pourrait peut-être récupérer les sommes qu'on y a consacrées. Ce serait peut-être ce qu'il y aurait de mieux à faire.

En attendant on en a tiré parti le plus avantageux. J'ai donné l'ordre de renoncer à l'hôtel de l'état-major de la garde civique.

Si l'on voulait approprier ce bâtiment aux diverses destinations qu'on lui avait assignées, il y aurait des dépenses considérables à faire.

Certainement il y aurait utilité à y concentrer les administrations éparpillées dans les diverses parties de la ville ; mais les divisions des ministères, on ne peut pas les séparer pour les envoyer dans cet endroit éloigné du centre.

Si l'on peut approprier les deux hôtels Engler et Daubremé toutes les convenances seront remplies, tous les ministères seront réunis dans le voisinage de la chambre; la rue de la Loi sera occupée exclusivement par des hôtels appartenant au gouvernement; les relations des ministres entre eux et avec les chambres seront plus faciles. Tout le monde y trouvera avantage et convenance. Mais il y a des dépenses à faire; M. le ministre des finances vient de vous en donner un aperçu.

Les circonstances seules nous ont empêchés de demander aux chambres les moyens d'approprier ces hôtels aux besoins des deux ministères; quand les circonstances le permettront, nous le ferons. Il y aura peut-être avantage à vendre les hôtels occupés par les ministères de la justice et des travaux publics, situés sur des emplacements où l'on pourrait faire de très belles constructions et où les terrains pourraient se vendre à de très bons prix.

M. David. - Pour engager M. le ministre à répondre à la demande que je lui ai adressée tout à l'heure, je lui signalerai un fait qui m'a été attesté par trop de personnes pour que je n'y ajoute pas foi. Dans la forêt d'Hertogenwald, après les travaux d'assèchement, on a voulu faire des plantations ; elles n'ont pas été heureuses, car on a dû les abandonner. C'est à ce point qu'on a ordonné de faucher les pieds avec les foins de la coupe de l'année.

En refusant jusque-là de vendre l'herbe, on faisait tort au trésor d'abord et à l'agriculture ensuite, car on lui enlevait les moyens de nourrir le bétail qui devait lui procurer l'engrais nécessaire pour faire des défrichements.

J'engage M. le ministre à étudier cette question qui intéresse en même temps le trésor et l'agriculture.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je dois croire, si je m’en rapporte aux documents que j'ai sous les yeux, que l’administration des forets est très soigneuse des intérêts du Trésor. Les produits de la forêt de Hertogenwald étaient en 1834 de 28 mille fr.

M. David. - On a fait des routes.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Mais c'est là un acte de bonne administration.

En 1836 le produit a été de 41 mille fr., en 1842 il a été de 67 mille, en 1844 de 64 mille, en 1846 de 102 mille, en 1847 de 110 mille, et en 1848 de 115 mille.

Voilà quels ont été successivement, toujours en croissant, les produits de cette forêt.

Les produits de la forêt de Soignes ont été : en 1844 de 240,000, en 1845 de 337,000, en 1846 de 359,000, en 1847 de 483,000 et en 1848 de 412,000 francs/

Voilà des résultats qui sont dus assurément en partie, aux soins, à l’intelligence et au zèle des agents de l'administration des forêts. Ils prouvent que cette administration a surveillé avec le plus grand soin les intérêts de l'Etat.

Son attention sera d'ailleurs appelée sur les observations de l'honorable membre. Elles ne sont pas fondées en ce qui concerne les foins aigres, les herbages dont il a parlé. J'ai démontré que cela reposait sur une erreur. IL supposait que le produit était jadis de 30 mille fr., alors qu’il n'a été au maximum que de 2,400 fr.

S'il y a quelques renseignements utiles à tirer des autres observations de l'honorable membre, l'administration des forêts les mettra à profit.

M. de Mérode. — Puisque dans le chapitre que l'on discute figurent les forêts, je me permettrai d'en dire aussi quelques mots.

J'ignore pourquoi le célèbre forestier Hinner, qui vers 1785 dirigeait les travaux d'amélioration de la forêt de Soignés, y établit ou y maintînt spécialement l'essence du hêtre; mais ce bois, excellent pour chauffage, n'est pas très applicable à des usages de construction; et il semble que le mélèze serait beaucoup plus profitable par la rapidité de sa croissance, et le parti qu'on en pourrait tirer pour des billes de chemin de fer, dont la construction est si grande aux frais de l'Etat.

On en plante, il est vrai, dans les vides. Cependant le hêtre domine toujours, même dans les parties récemment exploitées, que l'on repeuple par la méthode de ce même forestier Hinher ; c'est-à-dire en laissant sur le terrain exploité un certain nombre d'arbres qui fournissent de la semence ; celle-ci fructifie plus ou moins dans certaines places, et là où elle a beaucoup produit, on extrait de jeunes plants pour les repiquer partout où elle a moins réussi. Je ne me permets pas de blâmer le mode de reproduction en lui-même; seulement je suis porté à croire que si l'on substituait le mélèze au hêtre, le revenu futur pour l'Etat serait de beaucoup supérieur.

Quant à la conservation de cette forêt, elle est plus difficile à cause de son entourage que relie des bois placés dans des lieux moins peuplés. Il est par conséquent très nécessaire d'y rendre le personnel des gardes plus nombreux qu'ailleurs; car du côté de Waterloo surtout on y commet beaucoup de délits et rien n'est plus mauvais que le maraudage converti en habitude. Là l'économie du personnel serait donc très nuisible aux intérêts financiers du gouvernement et même au bien-être des communes limitrophes où la coutume de la rapine s'introduit trop aisément ; (page 556) or, il y a lieu de penser, vu la fréquence des déprédations, que la force conservatrice n'y est pas suffisante. La réduction de dépenses sur ce point serait ainsi plus coûteuse que favorable au trésor. C'est ce qu'on m'a plus d'une fois assuré et si, tel est l'effet de l'état actuel des choses, il faut augmenter la garde qui serait au-dessous des vrais besoins.

M. de Man d'Attenrode. - Je tiens à ajouter un mot ; c'est que si l'acquisition du bâtiment de la rue du Nord constitue une charge onéreuse pour le pays, cela tient uniquement à ce que l'administration n'a pas mis assez de fermeté à exiger le transfert de certains bureaux. C'est ce qu'indiquent clairement les paroles prononcées par l'honorable M. Veydt. Il a engagé plusieurs services à s'y installer, et ils s'y sont refusés. Il y a eu manque d'énergie d'un côté, et insubordination de l'autre; cette conduite mérite le blâme.

Au reste, si l'on n'a pas su faire passer dans le local de la rue du Nord les bureaux logés dans des maisons disséminées dans Bruxelles, le ministère de la justice a su en profiter pour se mettre plus à l'aise; il y a logé une de ses directions, et ce n'était pas là l'intention de la législature.

Je me bornerai, en finissant, à demander une seule chose. Ce bâtiment contient des pièces nombreuses, construites avec la plus grande solidité. Elles étaient destinées à recevoir les archives des ministères. Des troupes les occupent momentanément, nous a-t-on dit; je demande que cette partie du bâtiment cesse de servir de quartier aux troupes, et qu'on lui donne la destination qui lui avait été assignée, afin de débarrasser les ministères des amas de papiers dont ils sont encombrés.

- L'article 35 est adopté avec le chiffre de 85,000 fr.

Chapitre V. Pensions et secours

Article 36

« Art. 36. Pensions et secours : fr. 1,357,500. »

M. Delfosse. - On m'a communiqué un arrêté royal qui doit avoir été pris le 20 juin 1847, quelques jours après les élections qui ont amené la retraite du précédent ministère, et qui ne paraît pas avoir été publié.

Cet arrêté ratifie un arrangement intervenu entre l'Etat belge et quelques personnes que l'arrêté royal ne désigne pas, par suite duquel l'Etat belge s'est chargé du service de sept pensions s'élevant à la somme de 4,204 fr. 23 centimes, moyennant la somme de 30,000 fr., prélevée, dit l'arrêté, sur les sommes et valeurs formant la part des Belges à l'époque du 1er octobre 1830 dans le fonds (dit Leges) des veuves et orphelins des employés appartenant à l'administration générale.

Les sommes sur lesquelles celle de 30,000 fr. a été prélevée, avaient été remises au gouvernement belge par le gouvernement hollandais, et elles avaient probablement passé des mains du gouvernement belge dans celles des personnes avec lesquelles l'arrangement est intervenu. Je désire savoir quelles sont ces personnes qui doivent être des fonctionnaires, et quel est le montant des sommes qui leur ont été remises. Si M. le ministre n'a pas connaissance de cette affaire, je le prie de prendre des renseignements et de les communiquer à la chambre.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je n'ai aucune connaissance de ces faits. Je m'en enquerrai.

- L'article 36 est adopté.

Chapitre VI. Dépenses imprévues

Article 37

« Art. 37. Dépenses imprévues non libellées au budget : fr. 14,000 fr.

- Adopté.

Second vote des articles et vote sur l’ensemble du projet

M. le président. - La chambre entend-elle procéder immédiatement au vote définitif?

- De toutes parts. - Oui ! oui !

M. Moncheur. - Ne conviendrait-il pas de statuer maintenant sur les conclusions prises par la section centrale au sujet de plusieurs pétitions qui se rattachent au budget ?

M. Delfosse. - Ces pétitions ne sont pas de nature à influer sur les chiffres du budget. Elles se rapportent à quelques articles qui ont été votés sans discussion.

M. le président. - On pourrait s'en occuper immédiatement après le vote du budget. (Adhésion.)


- La chambre, après avoir décrété l'urgence, adopte les amendements introduits dans les articles 25 et 26.


La chambre passe à la discussion du projet de loi :

« Article unique. Le budget du ministère des finances est fixé, pour l'exercice 1849, à la somme de douze millions six cent cinquante-trois mille quatre cent trente-quatre francs vingt-cinq centimes (12,653,434 fr. 25 c), conformément au tableau ci-annexé. »

- Cet article est adopté.


Il est procédé au vote, par appel nominal, sur l'ensemble du budget. 80 membres sont présents. 79 votent l'adoption, 1 (M. De Pouhon) s'abstient.

En conséquence, le budget est adopté ; il sera transmis au sénat.

Les membres qui ont voté pour l'adoption du budget sont : MM. Boulez, Bruneau, Cans, Cools, Coomans, Cumont, David, de Baillet (Hyacinthe), de Bocarmé, Debourdeaud'huy, de Breyne, de Brouwer de Hogendorp, de Chimay, Dedecker, de Denterghem, de Haerne, Delehaye, Delescluse, Delfosse, de Liedekerke, Deliége, de Luesemans, de Man d'Attenrode, de Mérode, de Pitteurs, de Renesse, de Royer, Desoer, Destriveaux, de Theux, de T'Serclaes, d'Hoffschmidt, d'Hont, Dolez, Dumont, Dumortier, Faignart, Frère-Orban, Gilson, Jacques, Jouret, Julliot, Lange, le Bailly de Tilleghem, Lebeau, Le Hon, Lesoinne, Liefmans, Loos, Mascart, Moncheur, Moreau, Orts, Osy, Peers, Pierre, Pirmez, Prévinaire, Reyntjens, Rodenbach, Rogier, Rousselle, Schumacher, Sinave, Thibaut, T'Kint de Naeyer, Toussaint, Troye, Van Cleemputte, Van den Berghe de Binckum, Vandenpeereboom (Ernest), Van Grootven, Van Iseghem, Van Renynghe, Vermeire, Veydt, Vilain XIIII, Allard, Ansiau, Anspach et Verhaegen.

Le membre qui s'est abstenu est invité à faire connaître les motifs de son abstention.

M. De Pouhon. - Il m'est impossible de voter un budget qui consacre un système d'économies que je condamne et dans lequel je ne puis voir de véritable progrès. Je ne donne pas un vote négatif, car personne n'éprouve plus que moi, de sympathie et de confiance pour l’honorable chef actuel du département des finances.

Rapports sur des pétitions

M. le président. - Nous avons à nous occuper de plusieurs pétitions sur lesquelles M. le rapporteur a fait rapport au nom de la section centrale :

En voici l'analyse :

« Les employés attachés à la direction du trésor à Bruges, à Namur, à Gand et à Bruxelles, prient la chambre d'assurer leur position et leur avenir. »

« L'administration communale de Florennes réclame l'intervention de la chambre pour obtenir la liquidation d'une somme que cette commune a versée, sous l'Empire, à la caisse d'amortissement et qui provenait de la vente de ses biens communaux, faite en exécution de la loi du 20 mars 1813. »

« Le conseil communal d'Oostvleteren demande que la recette des contributions directes établie dans cette commune soit maintenue. »

La section centrale conclut au renvoi de ces pétitions à M. le ministre des finances.

M. Moncheur. - Messieurs, au nombre des pétitions dont vient de parler M. le président et sur lesquelles rapport a été fait par la section centrale, il s'en trouve une de l'administration communale de Florennes qui réclame l'intervention de la chambre pour obtenir la liquidation d'une somme que cette commune a versée, sous l'empire, à la caisse d'amortissement et qui provenait de la vente de ses biens communaux, faite en exécution de la loi du 20 mars 1813.

Cette pétition, qui, je crois, a été distribuée à tous les membres de la chambre, concerne d'un objet tellement important qu'il me semble qu'un renvoi pur et simple à M. le ministre des finances ne peut pas suffire. Je proposerai à la chambre de demander en outre des explications. Je crois que l'honorable ministre des finances ne se refusera pas à nous donner ces explications.

Je me borne à cette proposition, sans entrer actuellement dans le fond de la question.

M. Osy. - Dans la discussion du budget des finances, j'aurais également interpellé le gouvernement sur plusieurs liquidations arriérées à l'égard desquelles il y a des réclamations ; mais la section centrale chargée d'examiner le projet de loi, présenté par l'honorable M. De Pouhon, a demandé au gouvernement de donner des renseignements sur toutes les liquidations qui sont encore en instance. Je crois qu'à cette occasion M. le ministre des finances pourrait également répondre en ce qui concerne la liquidation dont vient de parler l'honorable préopinant. J'appuie donc le renvoi à M. le ministre des finances, avec prière de donner tous les renseignements nécessaires à la section centrale qui est chargée d'examiner la proposition de M. De Pouhon.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - J'accepte le renvoi avec la mention proposée par l'honorable M. Moncheur. Je me charge de donner toutes les explications nécessaires à la section centrale.

M. Moncheur. - J'ai demandé, messieurs, qu'il fût ajouté à la conclusion de la section centrale : « avec demande d'explications »; mais dans ma pensée les explications devront être données à la chambre et non pas seulement à la section centrale. Je crois, du reste, que ces explications trouveront très bien leur place dans la discussion du projet de loi présenté par M. De Pouhon.

M. T'Kint de Naeyer, rapporteur. - La section centrale ne voit pas d'inconvénient à ce que l'on ajoute à ses conclusions : « avec demande d'explications. »

- Le renvoi à M. le ministre des finances avec demande d'explications est mis aux voix et adopté.

La séance est levée à 4 heures et demie.