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Chambres des représentants de Belgique
Séance du jeudi 14 novembre 1850

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1850-1851)

(Présidence de M. Verhaegen.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 7) M. de Perceval procède à l'appel nominal à une heure et demie.

M. A. Vandenpeereboom donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier et de celui de la séance du 29 mai dernier ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Perceval présente l'analyse des pétitions adressées à la chambre.

« Le sieur Louis-Benoît Colpaert, huissier à Meulebeke, né à Ypres de parents étrangers, demande la naturalisation. »

- Renvoi au ministre de la justice.


« Le sieur François-Barthélémy Ferrand, préposé des douanes à Neerpelt, né à Saint-Zacharie (France), demande à être relevé de la déchéance de la naturalisation et prie la chambre de l'exempter du droit d'enregistrement. »

- Même renvoi.


« Le sieur Jean Canen, brossier à Liège, né à Mheer (Pays-Bas), demande la naturalisation avec exemption du droit d'enregistrement. »

- Même renvoi.


« Le sieur Delesalle, directeur du collège libre de Renaix, né en France, demande la naturalisation. »

- Même renvoi.


« Le sieur Théodore-Hubert Cruwels, ouvrier poêlier à Liège, né à Vieux-Fauquemont (Pays-Bas), demande la naturalisation ordinaire. »

- Même renvoi.


« Le sieur Pierre-Joseph-Narcisse Caille, instituteur communal à Moustier, né à Rolsel (France), demande la naturalisation ordinaire. »

- Même renvoi.


« Le sieur Xavier Sornas, bottier à Namur, né à Romans (France), demande la grande naturalisation. »

- Même renvoi.


« Le sieur François-Joseph Mise, charcutier à Liège, né à Roberville (Prusse), demande la naturalisation ordinaire. »

- Même renvoi.


« Le sieur Frédéric-Guillaume Lydt, faisant fonctions de surveillant au chemin de fer de l'Etat, né à Pulfermuhl (grand-duché de Luxembourg) demande la naturalisation ordinaire. »

- Même renvoi.


« Le sieur Joseph Santlus, inspecteur surveillant à l'école centrale de commerce et d'industrie, prie la chambre de le relever de la déchéance de la naturalisation qui lui a été accordée. »

- Même renvoi.


« Le sieur Alexandre-Joseph Rops, soldat au 5ème régiment de ligne, prie la chambre de statuer sur sa demande en naturalisation. »

- Renvoi à la commission des naturalisations.


« Les membres d'une société littéraire, à Evergem, prient la chambre de voter au budget de l'intérieur une pension ou tout au moins un secours annuel en faveur de la veuve du poëte flamand Van Ryswyck. »

« Même demande des membres d'une société littéraire à Wetteren et à Gand. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le budget de l'intérieur.


« La dame Constance Menschaert prie la chambre de faire annuler le testament de son frère Constantin, décédé le 24 février 1849. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« L'administration communale de Barleduc demande que la grande route pavée que l'on propose de construire de Turnhout à Tilbourg ou à Bréda, passe par Barleduc. »

- Même renvoi.


« Le sieur Filleul Van Elstraete, cultivateur à Cuerne, prie la chambre d'ordonner une enquête sur les poursuites judiciaires dont il est incessamment l'objet. »

- Même renvoi.


« Le sieur Verstraeten, capitaine pensionné, prie la chambre de lui faire obtenir la révision de sa pension. »

- Même renvoi.


« Le marquis d'Auxi déclare ne pas avoir adressé à la chambre la pétition tendante à établir un impôt sur les titres de noblesse, qui a été présentéc comme venant de lui, et demande qu'on fasse rechercher le faussaire. »

- Même renvoi.


« Plusieurs propriétaires et fermiers à Halle demandent une loi qui interdise aux administrations communales d'établir un droit sur les engrais, et notamment sur les vidanges. »

- Même renvoi.


« Quelques habitants et membres du conseil communal de Hollogne-aux-Pierres déclarent protester contre la concession qui serait faite à une société industrielle d'un accotement de la route de Jemeppe à Hollogne-aux-Pierres et demandent que cette concession soit annulée. »

- Même renvoi.


« Le sieur Farcy prie la chambre de décider si l'aptitude du sergent-major de la garde civique à remplir ses fonctions, doit être jugée par la commission d'examen dont parle l'article 54 de la loi du 8 mai 1848, ou si elle doit être appréciée par le capitaine de la compagnie. »

- Même renvoi.


« Le sieur Decat demande une loi qui modifie les dispositions relatives à l'exercice de la médecine vétérinaire dans les campagnes. »

- Même renvoi.


« Les sieurs Verheyen et Geebels de Maeseyck réclament l'intervention de la chambre pour obtenir une indemnité du chef des pertes qu'ils ont essuyées par suite du débordement des eaux d'un aqueduc. »

- Même renvoi.


« Le sieur Gérard prie la chambre de faire retirer la résolution en vertu de laquelle il a été suspendu de ses fonctions d'instituteur communal à Engreux. »

- Même renvoi.


« Plusieurs habitants d'Hymiée demandent que ce hameau soit séparé de la commune de Gerpinnes et érigé en commune spéciale. »

- Même renvoi.


« Les époux Vraux, à Tournay, prient la chambre d'accorder un emploi ou une pension à leur fils Isidore, milicien congédié pour infirmités contractées au service. »

- Même renvoi.


Par messages en date des 28, 30 et 31 mai, le sénat informe la chambre, qu'il a pris en considération 25 demandes de naturalisation ordinaire ; et qu'il a donné son adhésion :

1° Au projet de loi approuvant la convention conclue entre le gouvernement et la ville de Gand, en date du 16 mars 1850 ;

2° Au projet de loi qui réduit des pénalités en matière de timbre, d'enregistrement, greffe, hypothèque et succession ;

3° Au projet de loi accordant la grande naturalisation à quelques habitants des hameaux Beersel de la commune de Molen-Beersel, province de Limbourg ;

4° Au projet de loi autorisant le gouvernement à réduire la largeur de l'entre-voie du chemin de fer concédé de Marchienne-au-Pont à la frontière de France et à proroger le délai accordé pour l'achèvement de ce chemin de fer.

5° Au projet de loi concernant les droits d'entrée sur les bois exotiques appliqués aux constructions navales, et sur les bois de construction importés directement du Zollverein par rivières et canaux.

6° Au projet de loi autorisant le gouvernement à aliéner des biens domaniaux.

7° Au projet de loi sur l'enseignement moyen.

8° Au projet de loi autorisant le gouvernementà instituer des conseils de prud'hommes à Dour et à Pâturages.

9° Au projet de loi contenant le budget de la dette publique pour l'exercice 1851 ;

10° Au projet de loi contenant le budget des dépenses pour ordre de l'exercice 1851 ;

11° Au projet de loi qui relève le sieur Louis Desmons de la déchéance de la naturalisation ;

12° Au projet de loi autorisant le gouvernement à renoncer à toute répétition à charge des provinces de Liège et de Limbourg, du chef des obligations restant à remplir par elles, concernant la construction du canal de Maestricht à Bois-le-Duc ;

13° Au projet de loi relatif à la séparation du hameau de Heppen et du bourg Léopold de la comme de Beverloo, province de Limbourg, et à leur érection en communes distinctes ;

14° Au projet de loi contenant le budget du ministère des finances, pour l'exercice 1851 ;

15° Au projet de loi contenant le budget des non-valeurs et des remboursements pour l'exercice 1851 ;

16° Au projet de loi qui approuve le traité d'amitié, de commerce et de navigation, conclu entre la Belgique et la République de Guatemala,, le 12 août 1849 ;

17° Au projet de loi autorisant le gouvernement à restituer les droits d'enregistrement acquittés par les sieurs Coyon, pour leur naturalisation ;

18° Au projet de loi qui accorde au sieur Lamborelle un nouveau délai pour accepter la naturalisation ordinaire et qui l'exempte du droit d'enregistrement.

19° Au projet de loi allouant au département des finances des crédits supplémentaires.

20° Au projet de loi qui alloue au département de l'intérieur des crédits supplémentaires pour dépenses arriérées.

21° Au projet de loi relatif à la déchéance en matière de consignation.

22° Au projet de loi relatif à l'établissement de télégraphes électriques sur les chemins de fer de l'Etat.

23° Au projet de loi relatif à des crédits supplémentaireset transferts aux budgets du département des travaux publics pour les exercices 1848 et 1849.

(page 8) 24° Au projet de loi qui ouvre au département des travaux publics des crédits complémentaires pour le canal latéral à la Meuse et les canaux de Selzaete à la mer du Nord et de Deynze à Schipdonck.

25° Au projet de loi qui alloue au département des travaux publics un crédit supplémentaire de $79,200 francs ;

26° Au projet de lui qui ouvre au département de l'intérieur un crédit supplémentaire de $151,560 francs 3 centimes ;

27° Au projet de loi autorisant le gouvernement à prêter une somme de 1,300,000 francs à la compagnie concessionnaire des chemins de fer de Liège à Namur et de Manage à Mons ;

28° Au projet de loi autorisant le gouvernement à modifier le cahier des charges de la concession du chemin de fer de Liège à Namur ;

29° Au projet de loi ouvrant au département de l'intérieur des crédits extraordinaires, pour travaux de voirie vicinale et d'hygiène publique.

- Pris pour notification.


Par dépêche du 11 novembre, M. le ministre de la justice transmet à la chambre les explications demandées sur les requêtes de bourgmestres et commissaires de police exerçant les fonctions d'officier du ministère public près les tribunaux de simple police, tendantes soit à obtenir une indemnité fixe ou un traitement à charge de l'Etat, soit à voir étendre leur juridiction sur toutes les communes du canton, ou à voir instituer des fonctionnaires spéciaux sous la dénomination de commissaires cantonaux.

- Dépôt au bureau des renseignements.


Par dépêche du 4 octobre, M. le ministre de la justice adresse à la chambre 108 exemplaires de la suite de la réimpression du mémoire qui accompagne le premier chapitre du projet du Code pénal.

- Distribution à MM. les membres de la chambre.


Par dépêche du 12 novembre, M. le ministre des finances adresse à la chambre 120 exemplaires du tableau général du commerce de la Belgique avec les pays étrangers pendant l'année 1849.

- Distribution à MM. les membres de la chambre et dépôt à la bibliothèque.


Par dépêche du 13 novembre, M. le ministre de l'intérieur adresse à la chambre 108 exemplaires du recueil des documents et instructions relatifs à l'assainissement des lieux insalubres, ainsi qu'un même nombre d'exemplaires de l'ouvrage de M. Schmit sur les moyens de recueillir et d'utiliser les engrais qui se perdent dans les grands centres de population.

- Distribution aux membres de la chambre.


Par dépêche du 7 octobre, M. le ministre des travaux publics adresse à la chambre deux exemplaires des tableaux contenant les résultats de la révision des franchises et contre-seings décrétée par arrêté royal du 25 février dernier.

- Dépôt à la bibliothèque.


M. le gouverneur du Luxembourg, au nom de la députation permanente de la province, adresse à la chambre 109 exemplaires de la partie du rapport qu'elle a public sur le chemin de fer luxembourgeois-rhénan.

- Distribution à MM. les membres de la chambre et dépôt à la bibliothèque.


M. le gouverneur du Hainaut adresse à la chambre 109 exemplaires du rapport annuel de la députalion permanente de cette province.

- Même décision.


La commission administrative de la caisse de prévoyance du Couchant de Mons adresse à la chambre 4 exemplaires du compte rendu de ses opérations pendant l'année 1849.

- Dépôt à la bibliothèque.


La Commission royale d'histoire adresse à la chambre 110 exemplaires du n°3 du tome XVI, et du n°1 du tome Ier, 2ème série, de ses Bulletins. »

- Distribution à MM. les membres de la chambre, et dépôt à la bibliothèque.


M. Houry fait hommage à la chambre de six exemplaires d'une brochure intitulée : Coup d'œil sur le commerce des États de l'Afrique septentrionale.

- Dépôt à la bibliothèque.


M. Chicora fait hommage à la chambre d'un exemplaire d'un ouvrage qu'il vient de publier sous le titre de : Jurisprudence du conseil des mines de Belgique.

- Même décision.


M. le président. - Le bureau a reçu la lettre suivante :

« Bruxelles, le 14 novembre 1850.

« M. le président,

« Je lis dans une lettre que M. L. Desmaisières vous a adressée le 13 de ce mois, et qui est reproduite dans les Annales parlementaires, p. 5, le passage suivant :

« Le 20 septembre, je suis allé au département de l'intérieur, où j'ai eu la faveur de pouvoir examiner le procès-verbal en présence de M. Bivort, chef de division. Après une inspection rapide de cette pièce, je demandai à M. Bivort s'il existait contre mon élection une autre opposition quelconque que celle consignée au procès-verbal par les quatre secrétaires du bureau principal. M. Bivort a répondu qu'il n'y en avait point. »

« Je dois à la vérité de déclarer, de la manière la plus positive, que M. Desmaisières ne m'a pas adressé la question qui précède ; niuis il m'a demandé quelle pouvait être la décision de la chambre. Je lui répondis que je ne me croyais pas autorisé à me prononcer sur ce point comme chef de division ; mais que, s'il tenait à connaître mon opinion personnelle, je ne voyais aucun inconvénient à la lui faire connaître.

« J'exprimai donc l'avis qu'à cause des irrégularités graves dont les élections étaient entachées, la chambre ne pourrait s'empêcher de les annuler. Là se bornèrent les observations qui furent échangées entre nous.

« M. Desmaisières quitta mon cabinet en me remerciant du bon accueil que je lui avais fait.

« Agréez, M. le président, l'hommage de mon profond respect.

« Le chef de la première direction au département de l'intérieur,

« Bivort. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du rapport sur les opérations électorales du district de Dixmude.

Composition des bureaux de sections

Les sections de novembre se sont constituées comme suit :

Première section

Président : M. Jacques

Vice-président : M. de Man d’Attenrode

Secrétaire : M. Coomans

Rapporteur de pétitions : M. Clep


Deuxième section

Président : M. de Renesse

Vice-président : M. Lange

Secrétaire : M. Dumon A.

Rapporteur de pétitions : M. Van Renynghe


Troisième section

Président : M. Rousselle C.

Vice-président : M. Deliége

Secrétaire : M. Van Cleemputte

Rapporteur de pétitions : M. Allard


Quatrième section

Président : M. de Baillet-Latour

Vice-président : M. de Pitteurs

Secrétaire : M. de de Wouters

Rapporteur de pétitions : M. de Perceval


Cinquième section

Président : M. Destriveaux

Vice-président : M. Dautrebande

Secrétaire : M. Van Iseghem

Rapporteur de pétitions : M. Lelièvre


Sixième section

Président : M. Delfosse

Vice-président : M. Cumont

Secrétaire : M. Julliot

Rapporteur de pétitions : M. de Royer

Nomination des commissions permanentes

Commission de la comptabilité

Les sections ont composé la commission de comptabilité de la manière suivante : MM. de Man d'Attenrode, Bruneau, Moreau, Osy, Lesoinne et Tremouroux.


M. le président. - En vertu de la mission que vous lui aviez donnée, le bureau a complété les sections centrales et les commissions devenues incomplètes.

Dans la section centrale chargée d'examiner le projet de loi sur la compétence en matière civile et commerciale, M. Toussaint est remplacé par M. Tremouroux.

Dans la section centrale chargée d'examiner le projet de loi allouant un crédit supplémentaire au département de la guerre, M. Toussaint est remplacé par M. Manilius.

Dans la section centrale chargée d'examiner le projet de loi relatif au timbre et à l'enregistrement des contrats d'assurance contre incendie, MM. de Luesemans et Toussaint sont remplacés par MM. Malou et Anspach.

Dans la commission chargée d'examiner le projet de loi relatif à la révision du Code pénal, MM. Van Hoorebeke, Tesch et de Luesemans sont remplacés par MM. Destriveaux, Moncheur et Adolphe Roussel.

Dans la commission chargée d'examiner le projet de loi apportant des modifications au Code pénal militaire, M. Van Hoorebeke est remplacé par M. Ad. Roussel.

Dans la commission chargée de l'examen du projet de loi relatif à la révision de la législation sur les faillites, banqueroutes et sursis, M. Tesch est remplacé par M. Ad. Roussel.

- M. H. de Baillet, dont les pouvoirs ont été vérifiés dans une séance précédente, prête serment.

Pièces adressées à la chambre

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - J'ai l'honneur de présenter à la chambre l'exposé de la situation du trésor à la date du 1er septembre 1850. Ce travail est à l'impression ; il pourra être distribué dès ce soir.

- Il est donné acte à M. le ministre de la présentation de ce document ; il sera distribué aux membres de la chambre.


M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - J'ai l'honneur de déposer sur le bureau un compte rendu de la situation des écoles d'agriculture.

- Il est donné acte à M. le ministre du dépôt de ce travail ; il sera imprimé et distribué.

Adresse au roi en raison du décès de la reine Louise-Marie

Projet

M. le président. - Messieurs, la commission s'est réunie hier et a nommé rapporteur M. Devaux. Le projet d'adresse a été présenté ce matin à la commission, qui l'a adopté. M. Devaux m'a prié d'en donner lecture à la chambre. Le voici :

« Sire,

« Dans une solennité récente, le Roi et les représentants de la nation, unis par une patriotique pensée, célébraient le bien-être de la Belgique, (page 9) ses libertés florissantes, son heureux et paisible progrès. Aujourd'hui, ce n'est, hélas ! pas une fête, ce n'est plus une pensée de réjouissance publique, mais c'est toujours la même communauté de sentiments qui nous appelle autour du Trône : les joies de la patrie sont les vôtres, Sire ; vos malheurs sont les siens.

« La nation a devancé ses représentants dans l'expression de sa douloureuse sympathie. Cette émotion profonde qui s'est répandue avec la rapidité de l'éclair, cette interruption spontanée du commerce, ces vêtements de deuil dont les populations se couvrent, ces prières qui, de toutes parts, s'élèvent vers le ciel ; enfin, le touchant spectacle d'une nation qui pleure avec son prince, ce sont là des témoignages du sentiment public qui parlent plus haut que notre voix.

« Qu'il soit permis cependant à la chambre des représentants, de venir s'associer à l'affliction de Votre Majesté. Qu'il nous soit permis d'honorer, de bénir à notre tour, la mémoire d'une Reine si regrettée !

« Elle était digne, Sire, d'unir sa destinée à la vôtre, celle qui vous fut si tendrement dévouée. Elle méritait d'être assise sur le jeune trône de la Belgique, celle qui, pendant dix-huit années, l'a orné de tant de vertus. Elle était née pour être la source d'une dynastie nationale, celle qui comprit si bien les devoirs de la maternité sur le trône.

« Le peuple n'a connu de l'illustre princesse que des grâces modestes, des vertus et des bienfaits. Dans l'humilité de son cœur, elle eût voulu les lui cacher ; mais il avait pénétré sa belle âme ; il l'avait si bien comprise, qu'il lui a, pour ainsi dire, gardé le secret de ses sympathies les plus vives, etne les a laissés éclater tout entières, que lorsqu'elles ne pouvaient plus blesser la modestie de personne.

« Sire, le malheur qui vous, frappe, est cruel et irréparable. Cependant, père et Roi, portez vos regards autour de vous ; portez-les sur le pays tout entier, vous y rencontrerez quelque soulagement et quelque consolation. Une jeune et noble famille, jalouse de recueillir tout un héritage de vertus et d'affections, vous entoure de son amour et vous demande de la guider par les conseils de votre sagesse. Autour d'elle se presse la grande famille belge qui, depuis un mois, semble vivre d'une seule âme et à qui cette commune douleur a montré de nouveau le progrès de l'unité nationale et toute la puissance du lien qui la rattache au trône. Les sentiments d'un peuple, appréciateur si sage et si reconnaissant des mérites de la royauté, ont droit de toucher votre âme attristée. Entendez-le saluer de ses bénédictions cette grande et magnifique oeuvre de votre règne, la triple fondation d'une nationalité, d'une constitution et d'une dynastie. Heureux les princes qui, loin des orages, au milieu de ïa reconnaissance et de la félicité publique, peuvent dévouer leur vie à de si hautes entreprises ! Elles affermissent le coeur contre les plus rudes coups du sort. Continuez, Sire, de présider à la consolidation de ce qui a été si bien fondé ; poursuivez, poursuivez longtemps encore une mission que déjà couronne tant de succès ; vous y trouverez, avec la paix de l'âme, le bonheur de vos enfants, la reconnaissance du peuple et la gloire de votre maison. » (Très bien ! très bien !)

Adoption par acclamation

M. le président. - Quand la chambre veut-elle passer à la discussion ?

- Plusieurs membres. - Immédiatement ! Le vote par acclamation.

- Personne ne demandant la parole, la chambre adopte par acclamation le projet d'adresse, à l'unanimité des membres présents.

Cette adresse sera portée au Roi par la chambre en corps.

Proposition modifiant le règlement de la chambre

Dépôt

M. le président. - Une proposition de modification au règlement vient d'être déposée sur le bureau par trois membres de la chambre. Je crois qu'une semblable proposition ne doit pas être renvoyée aux sections pour en autoriser la lecture.

M. Dumortier. - Toute proposition doit être renvoyée aux sections pour en autoriser la lecture.

M. le président. - Je soumets la question à la chambre. Si quelqu'un a des observations à faire, je lui accorderai la parole.

M. Dolez. - Messieurs, je suis un des auteurs de la proposition qui vous est soumise en ce moment, et je ne vois pas, pour mon compte, la nécessité de renvoyer cette proposition aux sections. Je ne crois pas que ce renvoi doive avoir lieu, d'abord parce que la disposition du règlement qui ordonne le renvoi aux sections n'est relative qu'aux propositions de lois, mais je ne le crois pas, surtout, messieurs, parce que, en pareille matière, le règlement a pour complément les antécédents.

Or, je puis citer à l'instant deux antécédents dans lesquels la chambre a voté séance tenante des modifications à son règlement : une de ces modifications a été faite sur la motion de M. de Theux, l'autre sur celle de M. d'Hoffschmidt. L'une et l'autre ont été prononcées dans la séance du 21 décembre 1844.

L'honorable M. Dumortier peut vérifier l'exactitude du fait que je signale en ce moment. C'est donc par voie de motion d'ordre, au besoin, que nous proposons la modification dont il s'agit.

Voici on quoi elle consiste. D'après l'article 82 de notre règlement, il existe une classification entre les deux vice-présidents que l'assemblée se nomme. La commission de comptabilité doit être, d'après cet article, présidée par le premier vice-président de la chambre ; d'autre part, l'article 6 du règlement porte que les deux vice-présidents sont nommés pas scrutin de liste. Vous comprenez immédiatement qu'il y a une véritable contradiction entre ces deux dispositions.

Nommer au scrutin de liste, je le conçois parfaitement quand il n'y a point de classification entre les élus, mais dès l'instant qu'il existe une différence de rang entre ceux qui sont nommés, le scrutin de liste empêche la manifestation de la volonté des membres de la chambre, non seulement la manifestation de la volonté de chacun de nous, mais la manifestation de la volonté de la majorité. Je pourrais citer un exemple frappant de ce qu'il y a de contradictoire entre l'article 82 et la disposition de l'article 6 dont nous demandons la modification.

Nous proposons donc, dans l'intérêt de la liberté du vote des membres de la chambre, qu'à l'avenir les deux vice-présidents seront nommés par deux scrutins séparés, qu'un premier scrutin ait lieu pour la nomination du premier vice-président et qu'un second scrutin ait lieu pour la nomination du second vice-président. Vous comprenez que ce mode ne peut léser aucun droit ; le but et la portée de cette modification, c'est de rendre à chacun la libre manifestation de son opinion.

Je ne pense pas qu'aucune opposition puisse s'élever contre une semblable proposition. J'ai donc l'honneur de demander, d'accord avec mes honorables collègues MM. Cools et Cumont, qu'il plaise à la chambre de voter séance tenante la proposition que nous vous soumettons.

M. Dumortier. - Messieurs, je concevrais que l'on passât au-dessus des formes qui nous sont imposées par le règlement, s'il y avait urgence ; mais la chambre a nommé hier son bureau, et dès lors je ne vois aucun motif pour statuer avec tant de précipitation sur la proposition dont il s'agit. Le vote de la chambre a eu lieu hier comme il a eu lieu depuis vingt ans. Depuis vingt ans, on a toujours su quel était le premier vice-président et quel était le second vice-président. Voilà vingt ans que le règlement est en vigueur, voilà vingt ans qu'il reçoit son exécution, et jamais il n'y a eu de contestation ; toujours le vice-président qui avait obtenu le plus de suffrages a été le premier vice-président, et celui qui avait obtenu le moins de voix a été le second. Il n'y a donc aucune difficulté ni aucune contradiction dans le règlement. Il y a d'autant moins de contradiction dans le règlement qu'en toutes choses il en est ainsi ; celui qui obtient le plus de voix est le premier nommé, celui qui obtient le moins de voix est le second. Il en est ainsi en toutes choses, et l'on n'a fait que suivre ici ce qui se pratique en toute circonstance.

Pour l'urgence, il n'y en a donc aucune ; pour l'utilité, il n'y en a pas ; le président et les vice-présidents ont été nommés ; demander l'urgence en pareil cas, cela friserait le ridicule, il faut bien le dire.

Je pense, messieurs, que la proposition qui nous est faite doit suivre toutes les formalités que suit nécessairement une proposition tendante à modifier le règlement.

Mon honorable collègue et ami, M. Dolez, voudrait amener cette modification par motion d'ordre. Mais je m'en rapporterai à lui-même, à lui qui aime tant les formes qui doivent sauvegarder les institutions : quel danger ne se rattacherait pas à la possibilité de modifier le règlement par motion d'ordre ?

Comment ! vous seriez à la veille de poser un précédent par lequel le règlement, qui, comme vous l'avez dit souvent vous-même, est la sauvegarde des minorités ; par lequel, dis-je, le règlement pourrait être dit gêner la majorité ; et la majorité, pour ôter cette garantie à la minorité, pourrait immédiatement modifier le règlement par motion d'ordre !

Voilà, messieurs, le précédent que vous poseriez ! il est excessivement dangereux d'établir des précédents qui, dans des cas donnés, peuvent amener des actes très irréguliers, et faire naître un véritable désordre dans une assemblée. Je ne puis assez le répéter : le règlement est la sauvegarde des minorités.

Il faut donc bien se garder de poser un précédent tel que, dans une circonstance donnée, une majorité qui voudrait agir despotiquement, comme cela s'est vu dans des assemblées délibérantes d'autres pays, pût venir immédiatement modifier le règlement, pour servir son intérêt du moment. Cela est excessivement dangereux.

C'est ce qu'on n'a pas voulu en 1831. Quand, en 1831, nous avons fait le règlement, l'honorable M. Devaux, qui était rapporteur, se fonda précisément (et il se le rappellera) sur le motif que je viens d'indiquer, à savoir que le règlement ne pouvait être modifié qu'en passant par ce que j'appelle les mille et une tribulations du règlement.

Il fallait que la proposition fût déposée sur le bureau ; que la lecture en fût autorisée par les sections ; que la proposition vînt ensuite à la chambre ; qu'il y eût une prise en considération, qu'il y eût un vote définitif.

Voilà ce que l'on a voulu alors, et on avait raison de le vouloir ; on avait raison, par le motif que j'ai indiqué ; car si l'on agissait autrement le règlement ne serait plus la garantie de la minorité, il n'y aurait d'autre règlement que le caprice momentané de la majorité ou sa colère.

(page 10) Je le dis encore une fois, il serait d'une imprudence excessive de modifier le règlement par motion d'ordre. Quel que soit le parti que la chambre prenne, je m'opposerai toujours, quant à moi, à des propositions de ce genre, parce que, je le répète, le règlement est la sauvegarde des minorités.

Maintenant, il n'y a réellement aucune urgence à voter la proposition qui nous est soumise. Nous avons nommé hier les deux vice-présidents ; ce sont les deux anciens vice-présidents.

Est-ce par hasard parce que nous avons réélu les deux anciens vice-présidents qu'on veut modifier le règlement ? Est-ce à cause que par le vote d'hier le premier de la session écoulée est devenu le second ? Il y a vingt ans que le règlement nous gouverne, et souvent un premier vice-président est devenu second vice-président ; cela s'est vu vingt fois ; c'est ainsi que l'honorable M. Vilain XIIII de premier vice-président est devenu second vice-président ; la même chose est arrivée à mon honorable ami M. Dubus ; or, ni l'honorable M. Dubus, ni l'honorable M. Vilain XIIII ne sont venus demander que la chambre modifiât le règlement pour n'être plus le premier.

Si un pareil motif pouvait amener un changement dans le règlement, il faut bien le dire, ce serait une puérilité indigne d'une assemblée délibérante.

M. Dolez. - Que l'honorable M. Dumortier se rassure. Ce n'est pas au nom d'un intérêt puéril que j'élève la voix dans cette chambre ; mais au nom d'un intérêt réel et sérieux, d'un intérêt que devrait comprendre l'honorable M. Dumortier lui-même.

Dans les pays de représentation nationale, il importe que la majorité puisse librement, sincèrement, nettement se prononcer. Il importe que la minorité ait ce même droit, mais qu'elle n'ait que ce droit. Et c'est afin d'introduire dans notre règlement cette protection du droit de la majorité, cette protection de la dignité de la minorité même, que je demande que le règlement soit changé. Il y a dix-huit ans qu'il dure ; mais que m'importe, s'il y a dix-huit ans qu'il est mauvais ? Ne suffit-il pas de prouver que le règlement est mauvais, qu'il ne permet point à la majorité de se prononcer comme elle le veut, pour que l'abus doive disparaître ?

Je demande à l'honorable M. Dumortier s'il est vrai ou non qu'avec le règlement tel qu'il est fait, la majorité de la chambre n'est pas maîtresse de déterminer quel est, des deux vice-présidents, celui qui doit être le premier, quel est celui qui doit être le second. Il doit répondre qu'en vérité la majorité de la chambre ne peut pas se prononcer nettement, mais il doit reconnaître que le règlement ne prouvait rien et qu'il tend au contraire à fausser le vote de la majorité de l'assemblée.

Je comprendrais que l'on fît quelques objections si notre règlement lui-même n'avait pas établi une classification entre les deux vice-présidents.

S'il n'y avait là qu'une question de dignité, de prérogative, je concevrais que l'on n'y attachât pas d'importance, mais quand le règlement attribue des fonctions spéciales au premier vice-président, il importe que la majorité de la chambre puisse décider quel est celui qu'elle entend investir de cette fonction.

Si l'on demandait qu'une commission fût nommée pour examiner ma proposition, je ne m'y opposerais pas ; mais ce à quoi je m'oppose, c'est à ce que ma proposition soit regardée comme une proposition de loi, et qu'on lui fasse suivre la marche d'un véritable projet de loi dû à l'initiative parlementaire.

Si on veut proposer la nomination d'une commission pour examiner ana proposition, je déclare que je ne m'y oppose pas ; mais je m'oppose à ce qu'en changeant son caractère on la considère comme étant une proposition de loi. J'ai cité tout à l'heure deux faits, je voulais en vérifier un troisième, mais le temps m'a manqué.

J'ai proposé la nomination, mais il m'a été assuré qu'en 1834 l'honorable M. Dumortier lui-même avait demandé une modification au règlement ; et je n'ai pas pu vérifier dans quelle forme la modification avait été proposée. Je regrette que le temps m'ait manqué pour faire cette recherche ; mais dans la séance du 21 décembre 1843 deux modifications ont été introduites, l'une qui émanait de l'honorable M. de Theux, et l'autre de M. Dumortier.

Je ne demande donc rien d'exorbitant.

M. Dumortier. - Je ne puis partager l'opinion de l'honorable préopinant. Suivant lui, le règlement aurait cet énorme défaut de ne point permettre à la majorité de se prononcer et de produire ses effets. Certes, messieurs, si nous examinons le vote d'hier, il est de la dernière évidence que le règlement a toute son importance, tous ses effets.

Qu'avez-vous fait, messieurs ? Vous avez nommé le bureau. Eh bien ! tel est l'effet da règlement, tel est l'effet de votre volonté que vous n'y avez pas admis à la dose la plus homéopathique la moindre apparence de l'ancienne majorité. Pas un seul membre de l'ancienne majorité n'a figuré dans le bureau, et vous viendriez dire que le règlement ne permet pas à la majorité d'exprimer son vote comme elle l'entend, alors qu'elle a émis hier son vote en toute liberté.

Ah ! l'ancienne majorité mettait un peu plus de réserve dans ses votes. Elle vous donnait presque toujours un président, un vice-président et deux secrétaires pris dans vos rangs. Vous étiez la minorité et vous aviez la majorité dans le bureau, la majorité dans la présidence. C'est un hommage que vous devez rendre à l'ancienne majorité, alors même que vous l'excluez d'une manière si impitoyable.

Eh bien, vous n'avez pas donné à la minorité l'apparence, l'ombre d'un secrétaire : et vous viendrez dire que le règlement no vous protège pas ! Mais qui protège-t-il donc, je vous prie ?

Voilà ce que vous avez fait ; je ne vous en fais pas de reproche, je n'aurais point fait comme vous, je ne l'ai jamais fait, mais vous avez usé de votre droit. Un membre qui l'année dernière était premier vice-président se trouve cette année être le second. Mais je ne ferai pas à l'honorable M. Delfosse l'injure de croire qu'il s'en trouve offensé, blessé au point qu'on doive introduire un changement au règlement pour satisfaire ce qui ne serait qu'une question de vanité. Et cependant, si ce n'est pas cela, quel but peut donc avoir la proposition ? Comment ! on vient de nommer tous les membres du bureau et il y a urgence de changer le mode de nomination des vice-présidents ; il faut faire cela tout de suite ; au risque de poser un précédent dont on pourra regretter soi-même les conséquences funestes, parce que le règlement ne donne pas assez de puissance à la majorité ! Il me semble que sa puissance est immense, et elle en use largement. Il est vrai que vous nous laissez le droit de parler…

- Un membre. - Et vous en usez !

M. Dumortier. - Oui, j'en use pour faire voir le ridicule, la puérilité de changer le règlement pour une question de vanité et cela immédiatement après le vote si digne et si sage que la chambre vient d'émettre à l'instant même. C'est tomber trop vite du grand dans le petit.

M. Delfosse. - Je prie M. Dumortier de croire que je ne suis nullement blessé du vote d'hier. J'en suis, au contraire, reconnaissant et fier.

M. Dolez. - L'honorable M. Dumortier a trouvé un moyen facile de me répondre. C'est de déplacer la question. Je n'ai jamais prétendu que la minorité put devenir majorité par l'effet du règlement. C'eût été une absurdité.

J'ai dit que le mode de nomination des premier et deuxième vice-présidents par scrutin de liste, mettait non pas cette nomination, mais la classification à la discrétion de la minorité ; qu'un tel résultat était contraire à toutes les règles des gouvernements de majorité, et qu'il convenait de faire cesser un mode de voter qui produirait un tel résultat.

Si j'appartenais à la minorité, comme j'y ai appartenu pendant longtemps, je ne me croirais point intéressé à combattre la modification qui vous est proposée, et je me joindrais de grand cœur à quiconque demanderait qu'on ne laissât pas subsister un pareil état de choses. Je ne voudrais pas usurper pour la minorité une influence qui ne lui appartient pas ; je voudrais que minorité et majorité eussent la responsabilité et l'honneur des actes qui émanent d'elles et que partout leur volonté respective pût se manifester sûrement.

Ce que je ne repousserais pas, si j'étais dans la minorité, j'ai le droit de le vouloir comme membre de la majorité.

En présence d'un règlement qui reconnaît un premier vice-président, qui lui confie des fonctions spéciales, mon droit, le droit de tous les membres de cette chambre doit être de se prononcer sur le candidat auquel ces fonctions seront confiées. Je ne puis vouloir qu'on puisse faire servir mon propre vote en faveur d'un second candidat pour me l'imposer comme premier vice-président quand je ne le veux que comme second.

Je ne veux pas mettre en avant des noms propres, c'est une manière peu digne d'argumenter, je ne l'ai pas produite, je ne l'imite pas, je me mets en présence des principes, et je dis qu'il est de l'intérêt de la majorité et de la minorité que toutes les décisions de la chambre soient l'expression libre de votre vote. (Interruption.)

Vous vous récriez, pour qui ? au nom de quel intérêt ? Je ne comprends pas que M. Dumortier, qui s'est toujours montré ami si sincère de toute liberté, puisse repousser une motion qui n'a d'autre portée que de rendre plus libre la manifestation de notre pensée.

Est-il vrai que l'émission de notre vœu quant à la classification des vice-présidenls ne soit pas libre ? Nul ne peut le contester. Si cela est vrai, je ne comprends pas que M. Dumortier combatte notre proposition.

Au reste, pour éteindre tout débat, je demanderai à la chambre que le bureau soit chargé de nommer une commission qui examinera la proposition et en fera rapport.

M. Dumortier. - Il n'y a pas urgence ; cependant je n'insiste pas pour le renvoi aux sections.

- La chambre, consultée, ordonne l'impression de la proposition, et la renvoie à l'examen d'une commission qui sera nommée par le bureau.

Nomination des commissions permanentes

Le scrutin donne le résultat suivant :

Nombre des votants, 69

Majorité absolue, 35.

Commission des finances

M. De Pouhon obtient 69 voix.

M. Osy, 68.

M. Veydt, 59.

M. Ch. Rousselle, 56

M. E. Vandenpeereboom, 47.

M. Anspach, 46.

M. de Man d'Attenrode, 45.

M. Cools, 45.

M. d'Elhoungne, 37.

M. Malou, 25.

M. Mercier, 24.

(page 11) En conséquence, MM. De Pouhon, Osy, Veydt, Ch. Rousselle, E. Vandenpeereboom, Anspach, de Man d'Attenrode, Cools et d'Elhoungne sont proclamés membres de la commission des finances.

Commission d'industrie

M. Manilius obtient 54 voix.

M. Loos, 54.

M. Lesoinne, 53.

M. Cans, 52.

M. David, 50.

M. Bruneau, 48.

M. Allard, 48.

M. Moxhon, 46.

M. de Bocarmé, 42.

Ils sont proclamés membres de la commission d'industrie.

Commission des naturalisations

M. Van Grootven obtient 52 voix.

M. Destriveaux, 51.

M. Peers, 51.

M. Moreau, 50.

M. A. Dumon, 46.

M. de Steenhault, 45.

Van Cleemputte, 43.

Ils sont proclamés membres de la commission des naturalisations.

Ordre des travaux de la chambre

M. le président (pour une motion d’ordre). - Messieurs, dans la dernière session, la plupart des budgets ont été examinés en sections. Il en est cependant deux dont l'examen n'a pas été terminé : c'est le budget de la guerre et celui des voies et moyens. Les sections de février avaient été chargées de cet examen. Comme nous sommes à une époque assez avancée de l'année, je crois qu'il y aurait lieu de les convoquer demain ou après-demain pour continuer leur travail.

M. Dumortier. - Je ferai remarquer que la chambre a été en partie renouvelée, qu'il s'y trouve des membres qui ne faisaient pas partie des précédentes législatures et qui doivent être aussi appelés à examiner le budget des voies et moyens. Je demanderai donc que ce budget soit renvoyé à l'examen des sections de novembre.

D'un autre côté, je demanderai à M. le ministre des finances s'il n'apporte aucun changement au projet de budget qu'il nous a présenté il y a huit mois. S'il se proposait d'en apporter, il serait utile qu'il les fît connaître avant l'examen en sections ; sans cela, cet examen ne serait pas sérieux.

Je pense donc qu'il faut purement et simplement renvoyer ce budget aux sections nouvelles, en invitant M. le ministre des finances, si tant est qu'il ait des changements à y apporter, de vouloir les signaler.

M. le président. - Voici l'état des choses : Quatre sections ont nommé leur rapporteur pour le budget des voies et moyens, et deux sections en ont fait autant pour le budget de la guerre.

M. Manilius. - Je pense, contrairement à ce que demande l'honorable M. Dumortier et conformément à ce que propose M. le président, qu'il faut conserver aux sections qui ont été saisies de l'examen de ces budgets, le droit de continuer leur travail. Quant aux nouveaux membres, ils prendront dans les sections la place des députés qu'ils ont remplacés. Ils ne sont d'ailleurs que sept. Si le travail n'est pas terminé dans leur section, ils pourront y prendre part ; s'il est achevé, ils sauront faire eux-mêmes l'examen des budgets et se mettre au courant.

M. Rousselle. - La section dont je fais partie n'a pas examiné le budget des voies et moyens. Elle a désiré attendre, pour faire cet examen, le dépôt de l'état de situation du trésor arrêté au 1er septembre. M. le ministre des finances a déposé aujourd'hui ce document qui nous sera prochainement distribué. Je ne vois donc pas de difficulté'à convoquer demain ou après-demain la section que j'ai l'honneur de présider.

M. Dumortier. - Je ne m'opposerai pas à ce que les sections de février continuent le travail qu'elles ont commencé, mais il est un point auquel on n'a pas répondu : c'est la question de savoir si M. le ministre des finances entend faire des modifications au projet de budget des voies et moyens. Des faits nouveaux se sont passés depuis huit mois ; nous ne savons pas si l'on maintient le système qui nous a été alors présenté.

Remarquez-le, nous nous trouvons en présence d'une chambre renouvelée, en présence d'un ministère renouvelé, nous ne sommes saisis d'aucun programme, par suite du malheur qui nous a privés cette année d'un discours du trône. Il est impossible que la chambre reste dans un pareil état d'incertitude.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - L'honorable membre demande que le budget des voies et moyens, déjà examiné dans les sections l'an dernier, reste dans les sections qui en ont été saisies. L'honorable M. Dumortier demande, au contraire, que le budget des voies et moyens soit renvoyé aux sections de novembre. Si le budget reste dans les sections qui s'en sont déjà occupées et dont la plupart ont nommé leurs rapporteurs, conformément aux usages constamment suivis, je ferai connaître à la section centrale les modifications de chiffres (car la chose n'a pas d'autre importance) qui peuvent être apportées aux articles du budget des voies et moyens, d'après les faits constatés dans le courant de l'exercice.

Si la chambre prononce le renvoi aux nouvelles sections, il se peut que je fasse connaître d'avance quelles sont ces modifications de chiffres. Voilà toute la portée de la question. Ce n'est pas dans le budget des voies et moyens que le gouvernement introduira des projets d'impôts à établir. 1Il s'agit de simples faits à constater d'après les résultats de l'année précédente.

M. Dumortier. - S'il est entendu qu'il ne s'agit que de simples chiffres à constater d'après les résultats de l'année précédente, je ne vois pas d'inconvénient à ce que les sections continuentl eur travail ; si, au contraire, le gouvernement voulait introduire des modifications quelconques dans les impôts, alors chacun de nous devrait être mis à même d'examiner ces modifications. Mais je demanderai au gouvernement quand il fera connaître sa pensée sur la question financière.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Le gouvernement est prêt à répondre à toutes les interpellations qu'on voudra bien lui faire. M. Dumortier veut connaître la pensée du gouvernement, à l'occasion du point de savoir si l'on renverra le budget à telles sections plutôt qu'à telles autres ; il me semble que le moment est fort mal choisi ; lorsque le budget des voies et moyens sera discuté par la chambre, l'honorable M. Dumortier pourra interpeller le gouvernement sur son système financier, sur les impôts qu'il a l'intention de proposer, et le gouvernement répondra. (Interruption.) Le gouvernement fera connaître ses intentions lorsqu'il s'agira de discuter le budget des voies et moyens.

M. le président. - Est-on d'accord pour que le budget des voies et moyens continue à être examiné par les sections qui s'en sont déjà occupées ?

M. de Man d'Attenrode. - Je ne demande qu'une chose ; je demande que les sections ne continuent l'examen du budget des voies et moyens que lorsque la chambre aura eu le temps d'examiner la situation du trésor. Ce document a été déposé aujourd'hui, il sera imprimé et distribué, mais je ne sais quand ; je tiens à ce que les sections ne continuent l'examen du budget que quand nous aurons pu examiner mûrement la situalion du trésor. Il est indispensable que l'examen de cette situation précède celle du budget des recettes.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - J'ai eu l'honneur de déposer aujourd'hui l'exposé de la situation du trésor, et en même temps j'ai déclaré qu'il est imprimé, et qu'il sera distribué ce soir. M. de Man aura donc parfaitement le temps de l'examiner avant la discussion du budget des voies et moyens.

M. de Man d'Attenrode. - Dès que j'acquiers la certitude que le temps nécessaire pour se livrer à l'examen de la situation du trésor nous sera donné, cela me suffit.

M. le président. - Il s'agit de savoir par quelles sections le budget des voies et moyens sera examiné.

M. Manilius. - Je ne ferai qu'une seule observation, c'est que les sections de février ont en partie terminé leur travail, il ya déjà quatre rapporteurs de nommés. Je le répète, le travail est presque terminé.

M. de Man d'Attenrode. - Il ne devrait pas être terminé. [Interruption.) On a eu tort de pousser aussi loin ce travail, quand on était dépourvu de pièces que je considère comme indispensables.

M. le président. - Ainsi les anciennes sections continueront à examiner le budget des voies et moyens, sauf à fixer la semaine prochaine un jour pour la reprise de cet examen.

M. Thiéfry. - Messieurs, le ministère de la guerre a changé de chef ; il serait bon de savoir si le budget de la guerre est maintenu par le nouveau ministre dans l'état où il a été présenté. (Interruption.) Mon observation tend à prévenir que la chambre ne fasse deux fois le même travail, car, après avoir examiné en sections le budget dont nous sommes maintenant saisis, nous pourrions être appelés, dans quelque temps, à examiner de nouvelles propositions. Je regrette que M. le ministre de la guerre ne soit pas ici.

M. le président. - Les observations que j'ai l'honneur de soumettre à la chambre ont pour but d'éviter des pertes de temps. Nous serons bientôt à la fin de l'année et certains budgets doivent nécessairement être votés avant le 1er janvier par la chambre et par le sénat, qui doit aussi avoir le temps de les examiner .Comme la chambre n'a rien de bien urgent à l'ordre du jour des sections, il serait désirable que l'examen des budgets pût continuer le plus tôt possible.

M. Malou. - Si M. le ministre de la guerre n'y voit pas d'inconvénient, je crois qu'il serait utile qu'il communiquât aux sections, et non pas seulement à la section centrale, les modifications qui pourraient être introduites dans le budget d'après les faits nouveaux. Les prix des denrées, par exemple, exercent une influence incontestable sur certains chiffres du budget de la guerre ; ces prix ont changé depuis la présentation du budget. M. le ministre pourrait sans inconvénient, je pense, faire connaître aux sections de quelle manière le budget serait établi pour l'année prochaine.

M. le président. - Ainsi, au commencement de la semaine prochaine, les sections de février pourront être convoquées pour l'examen des budgets.

M. Thiéfry. - Si nous ne recevons pas d'observations, nous devrons en conclure que le budget reste tel qu'il a été présenté.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Nous ferons connaître les modifications dont le budget peut être susceptible.

M. le président. - Voici la composition de la commission nommée par le bureau pour l'examen de la proposition de M. Dolez : (page 12) MM. Rolin, Bruneau, le comte de Muelenaere, Tremouroux, Dedecker et Charles Rousselle.

Nous avons à l'ordre du jour de demain, la discussion du rapport concernant l'élection de Dixmude, un feuilleton de pétitions, le budget des affaires étrangères et le budget de la justice.

Vérification des pouvoirs

Arrondissement de Dixmude

M. de Man d'Attenrode (pour une motion d’ordre). - Messieurs, j'ai lu attentivement le rapport de la commission qui s'est livrée à l'examen des opérations électorales de l'arrondissement de Dixmude, et j'y ai vu que la commission a puisé une partie des motifs de ses conclusions dans une enquête faite par le gouvernement à propos de cette élection. Je me suis rendu au greffe afin de lire cette enquête ; plusieurs de nos honorables collègues en ont fait autant et nous n'avons pas trouvé cette pièce. Je demanderai en conséquence que l'enquête soit déposée sur le bureau. Puisqu'elle a été communiquée à la commission, il me semble qu'elle est devenue la propriété de la chambre et que nous avons tous le droit et le devoir de l'examiner. J'insiste donc pour qu'elle soit déposée sur le bureau avec les pièces qui s'y rattachent.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, je ne veux pas discuter la propriété de cette enquête ; cette enquête a été faite en exécution du droit et des devoirs du gouvernement ; elle a été offerte à la commission, à titre de renseignement ; la commission a demandé le travail ; ce travail lui a été communiqué ; hier j'ai demandé, à mon tour, à M. le greffier, de me rendre cette enquête, afin que je pusse moi-même la revoir ; ce matin l'enquête a été remise entre les mains de M. le rapporteur de la commission.

Il n'y a aucun inconvénient à ce que l'enquête soit déposée sur le bureau.

M. Dumortier. - Ainsi que les pièces qui y sont annexées ; ce matin, je me suis rendu au greffe, et je n'y ai pas trouvé les pièces de l'enquête.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Il n'y a pas, à proprement parler, d'enquête ; il y a un rapport du gouverneur de la Flandre occidentale ; ce rapport est accompagné de certaines pièces ; je n'ai détaché du rapport aucune de ces pièces.

M. Dumortier. - Je répète que je n'ai trouvé aucune pièce au greffe.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je répète de mon côté que le rapport seul du gouverneur de la Flandre occidentale m'a été remis hier et qu'à mon tour j'ai restitué ce rapport à l'honorable M. Delehaye, à l'ouverture de la séance.

M. Delehaye. - Messieurs, ce que vient de dire l'honorable ministre de l'intérieur est parfaitement exact ; il est très vrai que ce matin M. le ministre de l'intérieur m'a remis le rapport de M. le gouverneur de la Flandre occidentale. Mais je pense qu'il est de toute nécessité que la chambre consulte les documents que la commission a eus à sa disposition ; il n'y a aucun inconvénient à ce que toutes les pièces soient déposées sur le bureau et qu'on remette la discussion à demain ; quelques-unes de ces pièces doivent être mûrement examinées, afin que les membres puissent bien apprécier les irrégularités qui entachent l'élection.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je le répète, aucune pièce n'a été détachée du dossier. Toutes les pièces relatives à l'élection de Dixmude sont renfermées dans un dossier ; c'est hier à la fin de la séance qu'un document, le rapport du gouverneur de la Flandre occidentale, m'a été remis, sans être accompagné d'aucune autre pièce ; toutes les pièces sont donc restées dans le dossier ; si on l'avait ouvert, on y aurait trouvé les pièces ; le rapport du gouverneur de la Flandre occidentale a été remis ce matin entre les mains du rapporteur de la commission.

M. de Man d'Attenrode. - Eh bien, puisque la pièce dont il s'agit n'est pas une enquête, peu importe le titre qu'on lui donne, je demande que le rapport du gouverneur de la Flandre occidentale soit imprimé avec le caractère de document de la chambre.

M. Malou. - Je demande qu'on imprime aussi les annexes qui sont jointes au rapport.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, avant d'appuyer, s'il y a lieu, cette proposition, je désire revoir le rapport de M. le gouverneur de la Flandre occidentale. Je ne veux pas dire pour cela que ce document n'est pas susceptible d'être imprimé ; mais je désire le revoir, avant de décider si j'appuierai la proposition qu'on a faite, de le livrer à l'impression. Des membres ont blâmé le gouvernement d'avoir fait une enquête, et ce sont précisément les mêmes membres qui demandent l'impression des pièces.

M. Malou. - Messieurs, il est tout naturel qu'un fait qui se produit pour la première fois, depuis que le gouvernement constitutionnel existe, cause de l'émotion : c'est la première fois, en effet, qu'à la suite d'une élection, il est fait une enquête à laquelle l'intéressé n'est pas appelé à prendre part. Loin donc qu'il y ait contradiction entre notre proposition et les observations critiques que nous pouvons faire contre la marche suivie par le gouvernement, il y a une parfaite harmonie entre les deux faits.

Nous demandons que l'enquête soit publiée, parce que l'enquête est un fait irrégulier, sans exemple ; nous demandons la publication, parce qu'alors la chambre pourra juger, dans sa justice, selon la saine appréciation des principes constitutionnels.

Par cela seul que le gouvernement a fait une enquête, en dehors et à l'insu de l'intéressé, n'est-il pas de toute justice que celui-ci soit appelé à se défendre, que la chambre ordonne une contre-enquête ?

Voilà pourquoi nous demandons l'impression, nous la demandons pour connaître les faits, pour constater si le vœu des électeurs est ou n'est pas douteux.

Je n'ai pas d'autre but en demandant l'impression ; je déclare que je n'ai pas d'opinion arrêtée sur l'élection de Dixmude, je désire uniquement m'éclaircr.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, je ne m'attendais pas à voir grossir une affaire aussi simple que celle qui nous occupe. On dit qu'il est sans exemple que, dans un pays constitutionnel, une enquête de ce genre ait été faite par le gouvernement.

D'abord, il n'y a pas eu d'enquête faite par le gouvernement ; le gouvernement aurait pu en faire une, et il eût été parfaitement dans son droit. « A l'insu de l'intéressé, » dit-on. Mais, messieurs, dans les faits qui ont été signalés au gouvernement, il n'était pas question de l'intéressé. On avait signalé au gouvernement des irrégularités qui auraient été commises par ses propres agents.

Des convocations avaient été envoyées tardivement ; il y avait même eu absence complète de convocation pour un électeur ; des décisions avaient été prises par la députation permanente, et n'avaient pas été notifiées aux intéressés. Voilà les faits qui ont été signalés au gouvernement et qui exigeaient de sa part des informations pour savoir s'ils étaient exacts, et pour blâmer, au besoin, les fonctionnaires administratifs qui se trouvaient en faute. Je crois, je suis même convaincu que dans de telles circonstances, si le gouvernement n'avait pas agi, ceux qui, aujourd'hui, lui reprochent son intervention, lui auraient reproché son inaction.

Voilà ce qu'a fait le gouvernement ; il était en droit de le faire, c'était même son devoir. Il aurait à recommencer, qu'il ferait absolument de même. Que s'est-il passé ensuite ? Le gouvernement a annoncé à la chambre qu'une information avait été faite par lui, qu'il tenait cettette information à la disposition de la commission ; la commission a demandé à en prendre connaissance. Communication lui a été faite du rapport du gouverneur de la Flandre occidentale. Maintenant veut-on l'impression du rapport du gouverneur de la Flandre occidentale ? Je n'y vois, en fait aucun inconvénient.

Ce rapport est assez long, on y traite dans des termes assez étendus la question de savoir si les billets blancs doivent être considérés comme valides ou non. Je ne crois pas que la chambre attache de l'importance à l'impression de cette dissertation.

Il y a encore d'autres pièces qu'il serait inutile d'imprimer ; mais si l'on veut avoir un demi-volume, je n'y fait pas opposilion. J'ai pleine confiance dans l'honorable gouverneur de la Flandre occidentale. Je suis prêt à consentir à l'impression de toute pièce émanée de lui.

Puisque la discussion est commencée, si on veut l'achever ce sera autant de gagné pour les débats.

J'attendrai que d'autres observations soient faites, mais je maintiens que le gouvernement n'a pas manqué à son devoir, qu'il a usé d'un droit, qu'il n'a pas posé d'acte extraordinaire en ordonnant une information administrative sur des irrégularités administratives signalées dans une pétition qui lui était adressée par un grand nombre d'électeurs de l'arrondissement de Dixmude.

Ces faits n'impliquaient en aucune manière pour le gouvernement la nécessité d'en référer aux intéressés. Je présume que les intéressés auxquels on fait allusion, dans cette circonstance, sont les candidats, mais je répète qu'il n'y avait pas lieu de leur en référer à eux.

Lorsqu'un des deux candidats a demandé la communication de tout le dossier, le gouvernement a répondu qu'il ne pouvait pas s'en dessaisir ; je crois qu'il aurait agi très imprudemment s'il s'en était dessaisi y mais il lui en a offert l'inspection dans les bureaux mêmes de l'administration. C'est ce qui a eu lieu. Tout le dossier a été soumis à M. Desmaisières. Il a pu prendre connaissance de toutes les pièces. Voilà ce qui a été fait ; rien n'a été caché à M. Desmaisières ; la plainte ne lui a pas été soumise, parce qu'elle faisait l'objet de l'information. Elle avait été renvoyée au gouverneur de la Flandre occidentale. D'ailleurs, les journaux d'alors avaient tous publié de cette réclamation. Chacun savait fort bien que l'élection de M. Desmaisières donnerait lieu à des réclamations.

M. Dumortier. - Il reste quelque chose de très étrange.

Une enquête administrative a été faite, on n'a pas eu peur de l'impression qu'elle pouvait produire sur la commission, mais de l'impression qu'elle produirait dans le public.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Ne dites donc pas de ces choses-là !

M. Dumortier. - C'est ainsi. Messieurs, je ne tiens pas à l'impression de ces pièces, mais je tiens à pouvoir les lire. (Interruption.)

Je suis allé ce matin au greffe pour voir l'enquête qui forme la base du jugement de la quatrième commission, je ne l'ai point trouvée. On m'a dit qu'elle n'y était pas, et qu'elle avait été retirée par M. le ministre de l'intérieur.

Puisque l'opinion de la quatrième commission s'est formée par cette enquête administrative, il est extrêmement important que nous puissions l'avoir avant la discussion.

M. le ministre nous dit qu'il veut l'avoir pour retrancher les passages non susceptibles d'être publiés.

(page 13) Décidez l'impression ou rejetez-là ; mais il n'appartient pas à M. le ministre de l'intérieur de supprimer une partie des passages d'un rapport signé par un gouverneur. Il fallait ne pas le communiquer à la commission, ou il faut le laisser tel qu'il est. Si vous croyez que ce rapport n'est pas de nature à être imprimé, je serai le premier à demander qu'on ne l'imprime pas, pour ne pas poser de précédent qui pourrait compromettre des positions administratives, et, dans ce cas, vous n'auriez pas dû le communiquer à la commission pour former son jugement. Mais il n'est pas permis à M. le ministre de l'intérieur d'apporter la moindre modification à la pièce qu'il a communiquée à la commission.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je n'ai rien dit de semblable.

M. Dumortier. - Vous avez dit qu'il y avait dans le rapport des passages qui n'étaient pas de nature à être imprimés, et que vous vous réserviez de supprimer.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Permettez, je vais dire un mot qui rendra inutile, je pense, la continuation de votre discours.

Je n'ai aucune espèce de motif pour m'opposer à l'impression du rapport ; seulement, je fais des réserves pour le principe. J'ai dit que si la chambre voulait imprimer une brochure, elle était libre ; mais, je le répète, je n'ai aucune espèce de motif pour m'opposer à l'impression de ce travail.

Je dois faire observer, au surplus, que la commission puise les motifs de ses conclusions ailleurs que dans le rapport.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Voici ce que je lis dans le rapport...

M. Dumortier. - J'ai la parole, je prie M. le ministre des finances de ne pas m'interrompre. Veuillez demander la parole au président et parler à votre tour.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je demande la parole.

M. Dumortier. - Vient maintenant le second point relatif à ce que vient de dire M. le ministre de l'intérieur ; il voudrait qu'on examinât la question de savoir si le gouvernement devait intervenir dans les élections au moyen d'une enquête ; il nous a engagés à continuer la discussion sur ce point ; ce sera, a-t-il dit, autant de fait.

Je ne veux pas aborder maintenant cette question ; c'est un point capital, je veux me réserver de le traiter dans la discussion générale.

La Constitution porte que chaque chambre vérifie les pouvoirs de ses membres, et en présence d'une semblable disposition, le gouvernement se permet d'examiner la validité des pouvoirs des membres envoyés aux chambres ! C'est là une chose très sérieuse ! Les électeurs envoient des députés pour contrôler les actes des ministres et non pour que leurs pouvoirs soient contrôlés par les ministres. Mais je n'entends pas examiner cette question maintenant. Je le ferai dans la discussion générale.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - On se fonde, pour demander l'impression de l'enquête administrative faite par le gouvernement, sur la communication qui en a été donnée à la commission. Il semble, à entendre les honorables membres, que la commission, s'appuyant sur cette enquête administrative, aurait déclaré que l'élection de Dixmude doit être annulée parce que le gouvernement en a jugé ainsi. Rien n'est plus inexact. La commission déclare formellement dans le rapport que nous avons entre les mains qu'elle a consulté l'enquête ordonnée par le gouvernement, mais qu'elle n'en a pas eu besoin pour déterminer sa conviction ; de telle sorte qu'aux yeux de la commission, ce document qu'elle a consulté n'a pour elle aucune espèce d'importance.

Maintenant, comme l'a dit mon honorable collègue, M. le ministre de l'intérieur, sur quoi porte cette enquête ? Sur des faits qui ont été dénoncés, sur les actes de certains fonctionnaires qui sont incriminés. Eh quoi, le gouvernement n'aurait pas eu le devoir d'examiner si les faits dénoncés étaient vraies, si les actes des fonctionnaires étaient justement incriminés, s'il devait les réprimander ? Est-ce sérieusement qu'on soulève une pareille question devant vous ? Examinez l'élection qui vous est soumise ; n'ayez aucun égard à l'enquête administrative, le gouvernement ne vous la présente pas comme devant faire autorité.

M. Malou. - Je n'aurais aucune objection à faire, si le gouvernement, par l'enquête administrative, n'avait eu pour but que d'apprécier la conduite d'un de ses agents, pour prendre les mesures qui sont dans son droit. Mais d'où vient la discussion qui nous occupe ? De ce que l'enquête a été communiquée à la commission qui vous propose d'annuler l'élection, non seulement à cause de la protestation d'un certain nombre d'électeurs, mais parce qu'elle a consulté l'enquête et qu'elle a cru y trouver la preuve des moyens de nullité qu'on faisait valoir dans la protestation.

On nous dit que la commission a puisé les éléments de sa conviction ailleurs que dans l'enquête administrative ; mais que nous a dit M. le rapporteur ?

« La commission vous propose, à l'unanimité, l'annulation de l'élection du district de Dixmude, pour les faits consignés dans la protestation et qui ont été trouvés constants à la suite d'une enquête faite par le gouvernement. ».

- Plusieurs membres. - C'est au Moniteur.

M. Malou. - Oui, c'est au Moniteur : il en résulte que la commission a consulté l'enquête et qu'elle y a puisé une partie des éléments de sa conviction. Cette enquête doit être publiée pour que nous puissions, nous aussi, y chercher les motifs de notre vote.

Ce n’est pas seulement contre les agents de l'administration, mais contre les ayants droit que les faits consignés dans l'enquête ont été recherchés et indiqués.

M. Delehaye. - La commission n'avait pas besoin, pour former sa conviction, de l'enquête administratif ; cependant elle l'a consultée, bien qu'elle n'émanât pas de la chambre ; mais nous n'avons admis les faits qui y étaient consignés qu'autant qu'ils étaient confirmés par des pièces officielles. Je comprends qu'on repousse le document fourni par le gouvernement comme ne présentant pas assez de garantie aux yeux de la chambre. Je comprends que les membres de la chambre n'aient pas une foi aveugle dans les allégations du gouvernement ; personne ne peut lui contester le droit de prendre des renseignements ; surtout quand dans les faits dénoncés ses agents sont en jeu. Si le gouvernement s'était tenu les bras croisés en présence de la dénonciation des électeurs, ne dirait-on pas qu'il a laissé passer le temps où les faits dénoncés pouvaient être contrôlés, vérifiés ?

Ce que le gouvernement a fait et devait faire dans l'intérêt de sa dignité, les parties pouvaient le faire de leur côté, elles pouvaient faire une enquête sur les faits articulés. Je m'étonne que les honorables citoyens intéressés n'ont pas produit une enquête sur cette affaire. Je comprendrais que la chambre ordonnât une nouvelle enquête, cela rentre dans ses attributions. Mais je ne comprends pas qu'on nie au gouvernement le droit de faire une enquête ; je le comprends d'autant moins qu'à mes yeux c'était un devoir pour lui de la faire. Du reste, je le répète, cette enquête n'a servi qu'à indiquer les faits, faits que nous n'avons accueillis que quand nous avons eu des pièces les mettant hors de contestation. Si la chambre pense qu'il faut imprimer toutes les pièces qui ont été renvoyées à la commission, elle ne pourra commencer la discussion que la semaine prochaine.

- Un membre. - Eh bien, soit.

M. Delehaye. - Permettez, je ne combats pas cette opinion ; j'en indique les conséquences, parce qu'il me semble que la chambre doit les connaître.

Je crois qu'il serait bon de ne prendre une résolution sérieuse que demain. Les pièces seront sur le bureau ; on pourra les consulter et vérifier aussi s'il est nécessaire de les imprimer.

M. Loos. - La discussion porte sur des pièces que nous ne connaissons pas. Je demande donc qu'elle cesse, et que la chambre adopte la proposition que vient de faire l'honorable M. Delehayc.

M. de Theux. - Je voulais faire une seule observation puisée dans la nature même des choses. Il y a un nombre assez considérable de documents à consulter ; ils seront déposés sur le bureau, à l'ouverture de la séance de demain. Je demande s'il est possible qu'un nombre suffisant de membres puisse prendre ainsi connaissance des pièces et s'en former une opinion exacte, après que les membres de la commission ont eu toute latitude pour en prendre connaissance. Je dis que la position ne serait pas égale, et qu'on ne peut attendre qu'une lumière complète jaillisse d'une telle discussion. Si les pièces étaient imprimées, toute objection disparaîtrait.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je prends la parole, comme, membre de la commission et pour rectifier une opinion que l'on vient d'émettre.

L'on semble croire qu'il y a une énorme quantité de pièces à consulter ; il n'en est rien. Quel est le fait principal sur lequel la commission s'est appuyée pour proposer l'annulation ? C'est que cinq personnes, bien que rayées de la liste des électeurs par la députation permanente, ont pris part au vote. C'est là le fait capital, qui a déterminé la conviction de la commission.

Pour démontrer la vérité du fait, et démontrer en même temps qu'il était à la connaissance de l'administration communale que ces électeurs avaient été rayés, quelles sont les pièces à consulter ? D'abord la décision de la députation permanente.

M. Malou. - C'est le fond.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Il faut bien que j'aborde les faits, pour démontrer qu'il y a peu de pièces à consulter, et que, par conséquent, leur impression n'est pas indispensable.

Il y a donc, je le répète, un fait capital : il ne faut pas le noyer dans la discussion d'autres faits sans importance et qui ne sont pas constatés par des pièces authentiques. Comment ce fait s'établit-il ? D'une part par la décision de la députation permanente ; d'autre part, par la liste des électeurs tenue au moment du vote, qui établit que ces individus ont pris part au scrutin. Il y a, d'un autre côté, la connaissance que l'autorité communale aurait eue de la radiation faite par la députation. Ce fait est établi par cette circonstance que l'administration communale de Clercken a convoqué le 31 mai tous les électeurs de cette commune, excepté ces cinq individus, et que ce n'est que par une liste subséquente, du 3 juin, que ces cinq individus, qui n'avaient pas été compris dans la liste du 31 mai, ont été convoqués. Ces deux listes se trouvent encore au dossier.

Il n'y a donc que quatre pièces qui peuvent déterminer le vote de la chambre.

Quant au rapport de M. le gouverneur de la Flandre occidentale, je m'en rapporte à la déclaration de mon collègue de l'intérieur pour savoir s'il faut ou non l'imprimer. Mais, à vrai dire, je n'en vois pas l'utilité.

(page 14) M. Malou. - S'il me manquait des arguments pour prouver la nécessité de l'impression, je les puiserais dans le discours que M. le ministre de la justice vient de prononcer. Comment ! voilà un membre de la commission qui est prêt à discuter, parce qu'il a eu toutes les pièces, et nous devrions combattre contre lui, avec des armes inégales !

Tantôt c'est une grosse enquête ; tantôt il ne s'agit que de quelques pièces. Mais s'il n'y a que quatre pièces à imprimer, la discussion ne peut être retardée à cause de l'impression.

Que les membres de la commission, après en avoir délibéré, veuillent bien nous dire si c'est une enquête, si c'est une grande enquête, ou une petite enquête. Que nous sachions à quoi nous en tenir.

Je persiste à demander l'impression de toutes les pièces.

Le gouverneur de la Flandre occidentale a pu faire une dissertation étrange sur les billets blancs. Qu'importe ?

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je n'ai rien dit de semblable.

M. Malou. - Si M. le gouverneur de la Flandre occidentale s'est trompe sur la valeur de billets blancs, je ne vois néanmoins pas grand mal à publier toutes les pièces.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je n'ai pas parlé d'une interprétation étrange du gouverneur de la Flandre occidentale. J'ai cité un passage de son rapport qui n'a pas trait à l'information qu'il était chargé de prendre. J'ai demandé à la chambre s'il convenait de faire imprimer cette dissertation ; mais je ne l'ai pas qualifiée. Je le répète, réserve faite de tous les droits du gouvernement, je n'ai aucune objection à faire contre l'impression du rapport.

M. Coomans. - On veut que le débat s'ouvre demain, MM. Delehaye et Loos viennent de le dire.

Or, nous sommes ici 108 membres ; chacun de nous a le droit de lire cette enquête ; à moins que l'on n'élève la prétention de choisir ceux des membres qui auront le bénéfice de la lecture ; nous devons la lire tous.

L'honorable M. Rogier demande la priorité, il veut la lire encore aujourd'hui.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Pas du tout.

M. Coomans. - Nous devrons tous la lire demain ; je trouve qu'il faudra que nous nous levions de bien bonne heure pour nous acquitter de ce devoir.

Je demande l'impression de toutes les pièces.

M. Dumortier. - Si M. le ministre ne s'oppose pas à l'impression des pièces, je renonce à la parole. Il est évident que cette impression pourra s'exécuter facilement cette nuit, et que nous pourrons prendre connaissance de ces documents demain matin.

M. de Theux. - Messieurs, nous sommes à peu près d'accord. Il n'existe de difficulté que quant à la réserve qu'a faite M. le ministre de l'intérieur de relire le rapport de M. le gouverneur, pour voir s'il convient au gouvernement de se dessaisir de ce document. Eh bien, laissons à M. le ministre de l'intérieur le soin d'examiner, quant au rapport de M. le gouverneur, s'il peut en autoriser l'impression. Mais quant aux autres pièces, aucune objection ne peut être faite.

Si, dans le rapport de M. le gouverneur, il y a une dissertation inutile sur les bulletins blancs, qu'on la supprime et qu'on fournisse à la chambre les autres renseignements contenus dans ce rapport.

Je crois que de cette manière la chambre entière peut adopter la proposition d'impression des documents.

M. Delfosse. - Il faut imprimer toutes les pièces qui peuvent être utiles à la discussion et à la solution de la question de savoir si l'élection est valable ou nulle. Mais comment pouvons-nous savoir, nous et ceux qui demandent l'impression, comment pouvons-nous savoir aujourd'hui quelles sont les pièces dont l'impression peut être utile ? Ce n'est que demain, lorsque chacun aura pris communication des pièces déposées sur le bureau, que nous saurons s'il convient de les imprimer.

Si, par exemple, demain il était démontré par une seule pièce, dont chacun pourrait prendre inspection en un instant, que des irrégularités graves entachent l'élection, à quoi servirait l'impression des autres pièces ?

N'est-il pas vrai, messieurs, que si de l'examen d'une seule pièce il résulte que des irrégularités graves ont été commises, cela suffira pour que l'élection soit annulée ? Attendons donc à demain pour décider ce qui devra être imprimé. Aujourd'hui, comme l'a très bien dit l'honorable M. Loos, nous déciderions sans connaissance de cause.

Si demain, lorsque la discussion aura été abordée, des scrupules restent à quelques membres, ils pourront les faire connaître ; et si un supplément d'instruction est nécessaire, nous serons les premiers à l'ordonner.

Nous accorderons demain ce qui sera nécessaire pour conduire à la manifestation de la vérité, mais si cette vérilé se manifeste par la discussion, si une pièce ou un raisonnement que personne ne pourrait réfuter démontre que l'élection est valable ou nulle, tout sera dit et nous pourrons nous dispenser de faire imprimer des pièces volumineuses.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, certaines insinuations m'engagent à ajouter quelques mots ; je déclare que le rapport de M. le gouverneur de la Flandre occidentale est entre les mains de l'honorable rapporteur de la commission.

L'honorable M. Coomans a paru insinuer que je désirais revoir ce rapport, de telle manière que les autres membres ne pourraient le voir qu'après moi. Eh bien, je renonce à revoir le rapport ; tel que je l'ai communiqué à la commission, tel il restera ; la commission décidera s'il doit être imprimé en entier, ou partiellement ; quant à moi, je ne le reverrai plus ; je n'en changerai pas une seule ligne.

M. le président. - Il faut que ce débat se termine. Veuillez me permettre de dire de quoi se compose le dossier, car on discute sans savoir sur quoi.

Le dossier se compose principalement : d'une protestation d'un certain nombre d'électeurs contre l'élection ; d'une décision de la députation permanente de la Flandre occidentale ; de listes électorales ; des procès-verbaux des différentes sections électorales et d'un procès-verbal du bureau principal.

Il y avait en outre un rapport de M. le gouverneur de la Flandre occidentale, ce rapport a été distrait par M. le ministre de l'intérieur pour les motifs qu'il vous a indiqués. Quelles sont celles de ces pièces dont on demande l'impression ?

M. Malou. - Je persiste à demander l'impression du rapport de M. le gouverneur, et de toutes les pièces qui sont les annexes de ce rapport.

M. Delfosse. - Je demande qu'on commence par déposer les pièces sur le bureau ; demain on verra s'il y a lieu de les faire imprimer.

M. Dumortier. - M. le ministre de l'intérieur me remet le rapport, il contient une huitaine de pages, il est évident qu'il pourra être immédiatement imprimé.

Quant au surplus, j'ai examiné ce matin le dossier avec tout le soin dont je suis capable, et je dois reconnaître qu'il contient peu de pièces, dont l'impression soit nécessaire.

Voici, suivant moi, ce qui devrait êlre imprimé : les deux procès-verbaux de l'élection, celui de la deuxième section et celui de la première, dans lesquels se trouve un des griefs signalés et la résolution du deuxième bureau ; le rapport que je tiens en mains et la réclamation. Je ne vois aucune autre pièce dont l'impression soit utile. Or celles que je viens d'indiquer peuvent être imprimées en très peu de temps. Quant au rapport notamment, c'est l'affaire de deux heures.

M. le président. - Il y a une première proposition : c'est de déposer toutes les pièces sur le bureau et de réserver pour demain l'examen de la question de savoir s'il y a lieu de les imprimer.

M. Malou. - Je demande qu'on mette immédiatement aux voix la demande d'impression ; si on la refuse je désire que ce soit constaté par un vote.

M. Delfosse. - Je demande que l'on vote d'abord sur la proposition de déposer les pièces sur le bureau, parce qu'elle ne préjuge pas la question d'impression. Nous ne pourrions voter en ce moment contre la demande d'impression, nous serons peut-être disposés à l'accorder lorsque nous aurons pris communication du dossier. Si on mettait aux voix la proposition de l'honorable M. Malou, nous ne pourrions nous prononcer, nous devrions nous abstenir.

La proposition que je viens de déposer est préalable. Nous devons prendre connaissance du dossier pour être en état de résoudre la question de savoir si les pièces doivent être imprimées.

Il est possible, messieurs, que je vote plus tard avec vous pour l'impression des pièces. Mais avant tout, je tiens à savoir quelles sont ces pièces. Ma proposition doit être mise aux voix avant celle de l'honorable M. Malou, parce qu'elle n'en est pas exclusive, tandis que la proposition de l'honorable M. Malou est exclusive de la mienne.

M. Roussel. - Messieurs, cette question me semble, non pas une question de parti, non pas une question d'amour-propre, mais une question de justice. Vous allez être responsables, messieurs, devant votre conscience et devant l'opinion publique de la décision que vous prendrez quant à l'élection de Dixmude. Il est donc juste que non seulement la chambre, corps souverain, responsable devant l'opinion publique, ait connaissance de toutes les pièces, mais aussi que le public puisse en prendre connaissance et contrôler l'acte de justice que nous poserons. Je demande donc la publicité des pièces, et je regrette infiniment, entré nouvellement dans la chambre, d'avoir vu refuser, d'abord, dans la première séance, la lecture des pièces, d'avoir vu ensuite publier le rapport sans les pièces qui y sont annexées et qui devaient y être annexées. Que nous font à nous, juges, magistrats, les raisonnements de la commission ? Ce sont des faits que nous devons avoir, sauf à raisonner ensuite nous-mêmes d'après ces faits.

Je demande donc la publicité, non pour favoriser tel ou tel parti, car le seul parti qui me touche, c'est le parti de la justice et de l'équité.

M. Coomans. - Messieurs, l'honorable M. Delfosse veut que sa proposition ait la priorité afin, dit-il, de ne pas le forcer à émettre un vote contraire à sa manière de voir ; mais il doit nous accorder le même avantage. Or, si la proposition de l'honorable M. Delfosse est mise la première aux voix, elle passera à l'unanimité, car nous ne pouvons pas refuser le dépôt des pièces sur le bureau. Mais nous voulons quelque chose de plus. Je m'oppose donc à ce que la proposition de M. Delfosse, pour laquelle je dois voter aussi, soit mise la première aux voix.

M. Lesoinne. - Je ne veux pas m'opposer à l'impression des pièces qui doivent servir à élucider la question de l'élection de Dixmude, mais il me semble inutile d'ordonner l'impression des pièces qui ne serviraient à rien.

(page 15) Je demanderai le renvoi du dossier à la commission, qui indiquerait les pièces qui doivent être imprimées et qui déposerait les autres sur le bureau. La chambre prendrait connaissance des pièces déposées sur le bureau, et si parmi ces pièces il s'en trouvait encore que l’on jugeât devoir être publiées, on en ordonnerait également l'impression.

M. Delfosse. - Pas plus que l'honorable M. Roussel, nous ne voulons faire de cette question une question de parti ; tout ce que nous voulons, c'est d'arriver à la manifestation de la vérité. Si nous ne nous prononçons pas aujourd'hui pour l'impression des pièces, c'est, comme j'ai eu l'honneur de le dire à la chambre, parce que nous ne savons pas quelles sont les pièces dont l'impression peut être utile. Demain, lorsque nous aurons pris communication du dossier, nous serons peut-être disposés à voter pour l'impression.

Un mot maintenant à M. Coomans. L'honorable membre pense que ma proposition ne peut pas avoir la priorité parce qu'il serait obligé de voter pour ; il veut bien le dépôt, mais il demande quelque chose de plus.

C'est justement, messieurs, ce qui prouve que ma proposition doit avoir la priorité ; nous serons, dit-on, tous d'accord sur cette proposition. Eh. bien, tant mieux : adoptons d'abord la proposition sur laquelle tout le monde est d'accord, et occupons-nous ensuite du point sur lequel il y a dissentiment aujourd'hui, mais sur lequel nous serons peut-être d'accord demain. Après avoir voté le dépôt sur le bureau, on pourra mettre aux voix l'autre proposition ; mais j'en demanderai l'ajournement à demain, afin que nous puission examiner les pièces. Nous devons tous vouloir la même chose ; nous devons vouloir que la vérité se fasse jour.

On a commencé par communiquer les pièces à la commission, qu'on les communique aussi à la chambre, la chambre en ordonnera ensuite l'impression si l'impression peut être utile. Je ne vois en vérité pas pourquoi l'on tient à ce que l'impression soit ordonnée dès aujourd'hui.

M. le président ; - Il y a maintenant trois propositions : celle de M. Malou, qui consiste à demander l'impression du rapport, avec les pièces y annexées ; celle de M. Delfosse, qui demande le dépôt sur le bureau de toutes les pièces du dossier, sauf à ordonner ultérieurement l'impression de celles de ces pièces dont la publication serait utile ; enfin celle de M. Lesoinne, qui a pour objet le renvoi de toutes les pièces à la commission pour qu'elle fasse un rapport sur l'utilité qu'il y aurait à publier ces pièces en tout ou en partie.

M. Lesoinne. - Avec autorisation de faire imprimer toutes les pièces dont elle jugerait la publication utile.

M. le président. - A laquelle de ces propositions veut-on accorder la priorité ?

M. Malou. - Si la proposition de M. Delfosse est mise aux voix, je l'adopterai ; je demanderai qu'on statue ensuite sur la mienne.

M. Delfosse. - Et moi, je demanderai l'ajournement à demain de la proposition de M. Malou.

M. le président. - On est d'accord sur un point, c'est le dépôt de toutes les pièces sur le bureau. Je considérerai donc ce dépôt comme ordonné. Ensuite, M. Malou demande qu'on ordonne dès à présent l'impression de toutes les pièces.

M. Malou. - Nous avons discuté cette question pendant une heure ; .pourquoi prendre une heure demain à la discuter de nouveau ? Demain je reproduirai ma proposition. Je demande que l'on vote dès à présent.

M. Delfosse. - Je répète que demain nous serons éclairés et que nous ne le sommes pas aujourd'hui.

- L'ajournement à demain est mis aux voix et adopté.

La séance est levée à 4 heures et demie.