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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 14 mars 1851

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentéants, session 1850-1851)

(Présidence de M. Verhaegen.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Ansiau (page 889) procède à l'appel nominal à deux heures et demie.

La séance est ouverte.

M. de Perceval donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. Ansiau présente l'analyse des pétitions adressées à la chambre.

« Les huissiers audienciers du tribunal de première instance d'Audenarde demandent une indemnité annuelle à raison de leurs vacations multipliées pour le service intérieur du tribunal et prient la chambre de rapporter la loi du 28 juillet 1810. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le budget de la justice pour 1852.


« Plusieurs propriétaires à Mons prient la chambre de modifier la loi sur les expulsions des locataires, en ce qui touche les locaux ou petites habitations d'un loyer inférieur à 10 fr. par mois. »

- Renvoi à la commission des pétitions,

M. Rousselle. - Messieurs, cette pétition renferme des considérations qui méritent d'être méditées touchant la forme et les dépenses en matière de déguerpissement. Je demanderai que la commission des pétitions veuille bien l'aire un prompt rapport sur cet objet.

- Approuvé.


Par dépêche, en date du 13 mars, M. le ministre de la justice transmet des explications sur la pétition de M. Van Dongen, qui sollicite l'exemption du droit d'enregistrement auquel est assujetti l'acte qui lui confère la naturalisation ordinaire.

-Renvoi à la commission des naturalisations.


M. le ministre de l'intérieur transmet à la chambre les explications qu'il a annoncées sur la pétition du conseil communal de Grammont.

M. Trémouroux, retenu par une affaire urgente, demande un congé d'un jour.

- Ce congé est accordé.

Orojet de loi portant le budget des dotations de l’exercice 1852

Rapport de la section centrale

M. H. de Baillet, au nom de la section centrale qui a examiné le budget des dotations pour l'exercice 1852, fait rapport sur cet objet.

Orojet de loi portant le budget des dotations de l’exercice 1852

Rapport de la section centrale

Il fait également rapport sur le budget de la dette publique pour le même exercice.

- La chambre ordonne l'impression et la distribution de ces rapports.

Composition des bureaux de section

Les sections du mois de mars se sont constitués comme suit :

Première section

Président : M. Mercier

Vice-président : M. Veydt

Secrétaire : M. de Steenhault

Rapporteur de pétitions : M. Ansiau


Deuxième section

Président : M./. Dautrebande

Vice-président : M. de Theux

Secrétaire : M. Van Cleemputte

Rapporteur de pétitions : M. Van Renynghe


Troisième section

Président : M. Lesoinne

Vice-président : M. Moreau

Secrétaire : M. Van Grootven

Rapporteur de pétitions : M. de Royer


Quatrième section

Président : M. Osy

Vice-président : M. de Renesse

Secrétaire : M. Jacques

Rapporteur de pétitions : M. H. de Baillet


Cinquième section

Président : M. Lange

Vice-président : M. Lelièvre

Secrétaire : M. Mascart

Rapporteur de pétitions : M. Allard


Sixième section

Président : M. Destriveaux

Vice-président : M. Cumont

Secrétaire : M. de T’Serclaes

Rapporteur de pétitions : M. Van Iseghem

Propositions de loi relatif à l’indigénat des individus nés en Belgique de parents étrangers

Discussion générale

M. Dumortier. - Messieurs, les deux projets de loi qui ont été déposés sur le bureau par mon honorable collègue M. Destriveaux et par moi, partent d'une conviction profonde ; c'est qu'il est nécessaire de régler la question de naturalité, et déjà, messieurs, vous avez pu voir, à propos de toutes les difficultés qui ont surgi dans cette enceinte à diverses reprises, combien il était nécessaire qu'une règle invariable fût enfin fixée sur la question de naturalité. Ces difficultês proviennent des diverses législations qui ont tout à tour dominé la Belgique, et qui, étant toutes tour à tour différentes, ont laissé beaucoup d'hésitation sur la question de naturalité.

Le projet de loi que j'ai eu l'honneur de déposer sur le bureau n'est rien autre chose que la consécration du principe qui régit encore aujourd'hui la Belgique et qui la régira jusqu'au 7 février prochain, époque où il faudra que les jeunes gens qui ont atteint leur vingt et unième année, fassent des déclarations que jamais on n'a dû faire en Belgique jusqu'aujourd'hui, s'ils veulent rester Belges, j'entends parler de fils d'étrangers, nés de parents domiciliés en Belgique.

Par le rapport de la section centrale, vous l'avez vu, la cour de cassation a décidé que tous les habitants nés en Belgique de parents étrangers avaient acquis la naturalité par le fait de la promulgation de la loi fondamentale.

Le rapport de la section centrale vous dit encore que tous ceux qui sont nés pendant la durée du royaume des Pays-Bas avaient, par le fait de leur naissance, acquis légalement l'indigénat conformément à la loi fondamentale.

La question donc ne se présentera que pour ceux qui sont nés le jour où la loi fondamentale a cessé d'exister, c'est-à-dire le 7 février 1831, jour de la promulgation de la Constitution nouvelle. Lorsqu'ils auront leur vingt et unième année, si une disposition nouvelle n'est pas introduite dans la loi, ils devront faire une déclaration d'option pour la Belgique.

Vous voyez donc, messieurs, par ce peu de mots que la loi que j’ai eu l'honneur de présenter à la chambre n'introduira pas l'exécution d'un principe nouveau. Ce serait son rejet qui introduirait dans l'exécution un principe nouveau en Belgique. Les conséquences de la suppression de la. loi fondamentale n'ont pas encore pu recevoir d'effet en Belgique ; elles ne commenceront à en avoir qu'à partir du 7 février 1852, quand la loi fondamentale aura cessé d'exister. Ainsi c'est dans l'exécution un principe nouveau qu'il s'agit d'introduire ; tandis que ma proposition n'est que la conservation d'un principe qui n'a cessé de gouverner la Belgique que pendant le temps très court qui s'est écoulé entre la promulgation du Code et l'établissement de la loi fondamentale, et ceux-ci n'ont même pas dù faire de déclaration, car la loi fondamentale a donné la qualité de Belge à ceux qui sont nés dans cet intervalle.

Il s'agit de savoir si, pour l'avenir, un principe nouveau va être exécuté dans la qualité de Belge. Permettez-moi de faire une remarque : cela est d'une importance excessive, non seulement pour ceux qui sont dans cette position, mais pour tous les actes authentiques ; car, quand un notaire appelle un témoin à un acte qu'il passe, il s'informe s'il est né en Belgique, de parents y domiciliés.

L'introduction d'un principe nouveau pourrait vicier une foule d'actes publics, tels que des testaments, etc. ; car ce principe nouveau n'étant pas dans les mœurs, il n'est pas présumable que les agents chargés de dresser les actes authentiques prendraient toutes les précautions nécessaires pour s'assurer que la validité de l'acte ne pourra pas être attaquée.

L'importance est donc très grande non seulement pour ceux qui sont nés de parents étrangers, mais pour ceux qui peuvent avoir des actes à passer. Si le fils d'un étranger né sur le sol venait à être témoin à un acte, cet acte pourrait être entaché de nullité.

La chose me paraît tellement grave que, quand j'aurai fini de parler, je demanderai l'ajournement de la discussion, afin que chacun puisse en peser les conséquences. Dans l'état actuel, la proposition n'est pas mûre pour être discutée ; il y a huit jours qu'elle a été déposée, le rapport a été fait il y a trois jours. Un objet d'une aussi grande importance doit être mûrement pesé par chacun de nous avant d'être discuté. Cela est incontestable.

Le régime du Code a été, en France, une innovation. Ainsi que le dit, dans son rapport, mon honorable collègue et ami M. Lelièvre, avant le régime du Code, la naissance en France donnait à l'étranger la qualité de Français. Tous les précédents sont en faveur du système que j'ai l'honneur de proposer, et qui n'est que la continuation de notre ancien droit public et de la loi fondamentale des Pays-Bas.

Ce système ne fut pas admis par le Code ; la raison en est simple : les descendants des Français qui avaient été bannis de France par la révocation de l'édit de Nantes venaient d'être admis à y rentrer. Il fallait qu'ils pussent jouir de la qualité de Français, ils n'avaient pour cela qu'à constater leur filiation de père en fils. Mais dans un pays borné de frontières comme le nôtre, cela peut prêter à d'immenses inconvénients, car rien ne prouve qu'un individu, né et résidant en Belgique, ne descend pas d'un bisaïeul étranger, et si de père en fils aucune déclaration n'a été faite, on se demandera où est sa qualité de citoyen.

Un de mes honorables collègues, qui habite comme moi l'extrême frontière et qui a rempli les fonctions de commissaire d'arrondissement, me disait tout à l'heure, dans la salle des conférences : « Vous ne vous faites pas une idée des difficultés auxquelles cela donne lieu dans les localités de l'extrême frontière. Chaque jour de telles questions sont soulevées par les bourgmestres, par les personnes intéressées, Un paysan vient vous dire :« Je ne suis pas Belge ; mon père et mon grand'père sont bien nés en Belgique ; mais ils étaient étrangers, et jamais je n'ai (page 890) régularisê ma position ; je ne suis donc pas Belge : je ne veux subir les charges ni de la milice, ni de la garde civique. » Il faut reconnaître que, dans l'état de la législation, ce refus est légal.

Ainsi il y a des difficultés qui surgissent chaque jour dans les localités qui bornent la frontière. A Bruxelles, il en est de même, parce que Bruxelles étant la capitale, un grand nombre d'étrangers y fixent leur domicile, y ont des enfants qui n'ayant jamais quitté le pajs, s'imaginent avoir la qualité de Belge.

C'est là ce que j'ai eu en vue dans les articles 1 et 2 de la proposition de loi que j'ai eu l'honneur de faire, et qui n'est que la continuation de la loi fondamentale.

Cependant, comme des objections ont été présentées, j'ai apporté à l'article premier de ma proposition un amendement en ce sens que le fils de l'étranger né en Belgique devra, pour être Belge, avoir continué de résider dans le pays.

Quant aux articles 3 et 4, ils ont pour but pour but de rendre à la Couronne le pouvoir qu'elle avait en vertu du Code civil de donner des lettres de relief aux Belges qui avaient perdu cette qualité par l'acceptation de fonctions publiques, ou par des services militaires à l'étranger sans l'autorisation du Roi. Aujourd'hui, par suite de l'article 5 de la Constitution, il faut, dans ces deux cas, l'intervention des trois branches du pouvoir législatif. Il en résulte que, pour un militaire (il y en a par milliers) qui, par amour pour le métier des armes, a été se battre en Algérie, il faut une loi qui lui rende la qualité de Belge. Il y a là quelque chose de regrettable. Nous sommes forcés d'accorder une faveur à un homme qui a violé la loi.

Et cependant, messieurs, nous n'avons jamais hésité à l'accorder dans de pareilles circonstances, même à des personnes qui avaient été condamnées pour le fait de désertion. Nous n'avons jamais hésité, par exemple, à l'accorder aux Belges qui étaient allés se battre en Algérie, et vous savez qu'à la suite des 24 articles il y en a eu beaucoup qui, n'ayant pu se battre contre les Hollandais, ont voulu aller se battre contre les Arabes.

Messieurs, il est regrettable que la chambre doive accorder des naturalisations à des personnes nées sur le territoire d'un père belge, qui n'avaient jamais quitté le pays jusqu'au jour où elles ont voulu aller se battre, et qui, à leur retour, ne demandent qu'une seule chose, c'est de reprendre leur service.

En vertu du Code, l'empereur pouvait relever. Mais ici comme le Code admet la suppression de la qualité de Belge, et que l'article 5 de la Constitution exige que la naturalisation soit donnée par les trois branches du pouvoir législatif, il en résulte qu'il faut une loi. Eh bien, je demande qu'il n'y ait qu'une suspension de la qualité de Belge pour ceux qui prennent du service chez les nations amies ; de telle manière que le gouvernement puisse relever de la déchéance conformément au Code, sans qu'il soit nécessaire de faire une loi dans un cas semblable. C'est là en effet un usage du droit de grâce réservé au Roi.

Voilà tout le mécanisme de ma proposition : c'est de rétablir d'une part le principe de nos anciennes lois, principe qui a toujours régi la Belgique jusqu'à notre époque. C'est en second lieu de rendre au gouvernement les attributions que le Code lui avait données relativement aux personnes qni avaient perdu la qualité de Belge.

Encore un mot.

Je sais bien qu'on argumente du désir de conserve le Code dans son entier. Mais permettez-moi de vous le faire remarquer, le 7 février dernier, l'assemblée législative de France vient elle-même de rectifier le Code civil précisément sur le point qui nous occupe. Il surgissait tant de questions de ce chef, qu'une loi vient d'être votée pour supprimer l'obligation de la déclaration des enfants nés en France de parents étrangers nés sur le sol.

Messieurs, ce système des déclarations à 21 ans n'est nullement dans nos mœurs. Si la déclaration devrait se faire, lorsque l'homme est appelé à prendre part aux affaires publiques, on en comprendrait alors l'importance. Mais on exige cette déclaration à 21 ans. Or, à 21 ans, l'homme est à l'âge des plaisirs, il ne comprend pas l'importance de la déclaration qu'il doit faire, et presque toujours il ne la fait pas.

Vous avez de plus tous les habitants du Limbourg et du Luxembourg cédés, qui sont venus se fixer en Belgique et qui y ont eu des enfants. Ces enfants ne sont pas Belges.

On est tellement étranger au système des déclarations en Belgique, que je pourrais citer le nom d'un ancien membre du Congrès national, qui a siège, dans cette enceinte, pendant quinze ans, qui est président de tribunal, et dont les enfants n'ont pas fait la déclaration.

Messieurs, je finirai par où j'ai commencé.

Le projet de loi que j'ai eu l'honneur de vous présenter n'est que la continuation du système qui nous a régis jusqu'aujourd'hui. Son rejet serait l'introduction d'un système nouveau. Je prie la chambre de bien peser ces observations. Je désire qu'on ajourne l'examen du projet, afin que chacun de vous puisse l'étudier et en comprendre toute l'importance, au point de vue des personnes intéressées et des transactions dont je vous ai parlé et qui pourraient être singulièrement compromises par le système qu'on veut adopter.

M. le président. - A quel jour proposez-vous l'ajournement ?

M. Dumortier. - Je propose l'ajournement à quinzaine.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, dernièrement nous discutions des questions de commerce ; nous discutions le système des primes, et l’honorable M. Dumortier nous disait que notre autorité, à nous, n’était d’aucune espèce d’importance dans la question, parce que nous n’étions que des avocats. Je ne ferai pas à l’honorable M. Dumortier la même observation, car je ne pense pas qu’il faille nécessairement un diplôme pour avoir le droit de s'occuper d'une question et de jeter quelque lumière dans la discussion. Cependant je pourrais la lui faire dans cette circonstance avec beaucoup plus de raison qu'il ne nous l'a adressée il y a quelque temps.

L'honorable membre a dit qu'il s'agit non pas d'introduire dans la législation un principe nouveau, mais de maintenir un principe qui était proclamé par la loi fondamentale. Je ne partage pas cet avis, et je vais indiquer une parenthèse de vingt et un ans, oubliée par M. Dumortier qui prouve que c'est tout à fait un système nouveau que l'honorable membre veut introduire.

Le système que l'honorable M. Dumortier veut rétablir a été introduit en Belgique par la loi fondamentale de 1815, qui a modifié le Code civil. Ce système était renouvelé de notre ancien droit. Son origine est toute féodale.

Du principe de la souveraineté sur la terre l'on a conclu à la souveraineté sur la personne. Le Code a changé de système et le système qui nous régit aujourd'hui a été en vigueur en Belgique de 1804 à 1815. Alors est venue la loi fondamentale qui a fait dépendre la qualité de Belge de la naissance sur le sol. Ce système a été en vigueur jusqu'au 7 février 1831 et depuis lors jusqu'au moment où je parle nous en sommes revenus au système du Code civil ; et c'est là la parenthèse de 21 ans dont je parlais tout à l'heure. C'est donc après un intervalle de 21 ans que l'honorable M. Dumortier veut rétablir le principe de la loi fondamentale.

Quel est le sort des enfants nés en Belgique depuis 21 ans, de parents étrangers, mais domiciliés dans ce pays ? Seront-ils régis par le principe nouveau que vous introduisez et que vous déclarez ne pas être nouveau ? Seront-ils régis par le Code civil ? Vous ne pouvez pas contester que nous sommes aujourd'hui sous l'empire du Code civil, et aujourd'hui vous venez demander, non pas le maintien de la disposition de l'article 9 du Code civil, mais la reproduction de l'article 8 de la Constitution. Cela est de toute évidence.

Maintenant, je dirai que la proposition de l'honorable M. Dumortier, en ce qui concerne l'article premier, n'est pas admissible ; si elle était adoptée, elle porterait atteinte aux droits du pouvoir judiciaire, et elle violerait un principe d'éternelle justice, celui de la non-rétroactivité des lois.

Vous n'avez pas aujourd'hui le droit de décider rétroactivement quelle est la qualité des individus qui sont nés sous l'empire de la loi fondamentale de 1815 à 1830.

Vous pouvez interpréter les lois rétroactivement ; mais dans quel cas ? Lorsqu'un conflit s'est élevé entre les autorités judiciaires ; ainsi, lorsque les cours d'appel ne sont pas d'accord avec la cour de cassation, dans ces cas, vous pouvez interpréter la loi ; mais, dans d'autres circonstances, vous ne pouvez pas interpréter les lois dans le passé, sans porter atteinte à des droits acquis.

Mais, dit-on, la proposition qui est faite, est conforme à la jurisprudence constante admise par les tribunaux. Mais de cela même que nous admettons que nous avons le droit de prendre une décision conforme à la jurisprudence, nous devons nous reconnaître le pouvoir de prendre aussi une décision contraire à la jurisprudence.

Ainsi tous les tribunaux seraient parfaitement d'accord sur l'interprétation à donner à une loi, et vous pourriez venir dire rétroactivement : Les tribunaux se trompent, et je déclare que la loi a tel ou tel sens. C'est là le système de l'honorable M. Dumortier, et je n'hésite pas à le déclarer inadmissible ; car l'on arriverait ainsi, d'un coté, à faire réformer le pouvoir judiciaire par le pouvoir législatif, et à faire des lois rétroactives sous prétexte d'interprétation des lois existantes.

Tout ce qu'on pourrait faire, et c'est encore un point à examiner, ce serait de déclarer qu'à l'avenir les individus qui sont nés de 1815 à 1830, en Belgique, de parents étrangers y domicilies, seraient considérés comme Belges ; mais on laisserait aux tribunaux le soin d'apprécier la valeur de tous les actes dans lesquels ils sont intervenus jusqu'à présent, de tous les faits qui se sont accomplis à leur égard depuis 1815 jusqu'à 1830.

Il n'appartient à la législature de régler que l'avenir. Quant au passé, la loi interprétative ne peut rétroagir que dans un cas déterminé, quand il s'agit d'aplanir un conflit entre les tribunaux ; le passé ne vous appartient pas ; l'interprétation des lois appartient aux tribunaux, et, je le répète, c'est seulement quand les tribunaux ne peuvent se mettre d'accord, quand il est constaté qu'il existe des doutes sur une loi, c'est seulement alors que le pouvoir législatif peut intervenir.

Les observations que je viens de présenter s'appliquent principalement à l'article premier de la proposition de l'honorable M. Dumortier. Quant à l'article 2, je ne sais pas quel est le but que s'est proposé l'honorable membre par cette disposition.

Dans l'article 2, il déclare que « tout enfant né d'un Belge, à l'étranger, pendant une absence de ses parents, momentanée ou pour service public, jouit des mêmes droits », c'est-à-dire qu'il jouit de la qualité de Belge.

Eh bien, je trouve à l'article 10 du Code civil la disposition suivante :

« Tout enfant né d'un Français en pays étranger est Français. »

Quel est donc le but de l'article 2 de la proposition qui ne fait que reproduire l'article 10 du Code civil ? Si l'honorable M. Dumortier a voulu améliorer la rédaction du Code civil, il a été très malheureux ; car, par l'article 2, l'auteur de la proposition déclare que « tout enfant né (page 891) d'un Belge, à l'étranger, pendant une absence de ses parents, momentanée ou pour service public, jouit des mêmes droits ; or, l’article premier ne parle d’aucune espèce de droits.

Quant à l'article 3, où l'on parle de la suspension de la qualité de Belge, elle seraît encore une suspension difficile à définir.

L'article 17 du Code civil porte :

« La qualité de Français se perd :

« 1° Par la naturalisation acquise en pays étranger ;

« 2° Par l'acceptation non autorisée par le Roi de fonctions publiques conférées par un gouvernement étranger ;

« 3° Enfin, par tout établissement fait en pays étranger sans esprit de retour. »

L'honorable M. Dumortier n'a donné aucune bonne raison pour modifier, sous ce rapport, le Code civil.

Quant à l'article 21, il déclare que, sous l'empire du Code civil, c'était l'empereur, c'était le roi qui pouvait relever de cette déchéance.

Mais l'article 21 déclare de la manière la plus explicite que les individus qui, pour un des cas prévus par cet article, auront perdu leur qualité de Français ne pourront récupérer cette qualité qu'en remplissant les conditions imposées à l'étranger pour devenir citoyen, c'est-à-dire qu'il est assimilé à l'étranger, et que pour obtenir l'indigénat il doit remplir tout à fait les mêmes formalités qui sont imposées à l'étranger. Ce n'est pas là seulement une disposition de droit civil, c'est une disposition politique, et je ne vois aucune bonne raison pour la modifier. Il est évident que c'est une chose très grave que de permettre de prendre du service en pays étranger ; celui qui prend du service chez une nation étrangère se trouve exposé un jour ou l'autre à servir une puissance qui peut être en guerre avec le pays auquel il appartient ; il s'expose à combattre les alliés de son pays ; à combattre contre les intérêts de son pays, et c'est là chose assez grave pour chercher à l'empêcher par la perte de la qualité de Belge,

L'honorable M. Dumortier nous a dit que récemment en France l'on avait modifié la législation dans le sens qu'il indiquait. Cela n'est pas exact. En France une disposition a été votée récemment à la date du mois de février, je pense, mais elle n'a pas du tout la portée que l'honorable membre lui attribue, elle n'a pas été votée dans le sens que l'honorable M. Dumortier donne à sa proposition.

En France on a été frappé de ce fait qu'il y avait des étrangers qui étaient nés sur le sol français de parents déjà nés sur le même sol et qui ne faisaient pas la déclaration prescrite par l'article 9 du Code pour échapper aux obligations que la qualité de regnicole impose et au nombre desquelles il faut compter celle de la milice ; et c'est pour éviter cet abus que la disposition a été prise. On a fait une loi de recrutement, une loi de conscription, si je puis m'exprimer ainsi, on n'a pas modifié l'article 9 du Code civil autrement que je ne viens de le dire.

L'article 9 exigeait à la vérité la déclaration de l'individu né sur le sol belge qu'il revendiquait la qualité de citoyen belge ; la loi française a modifié cette disposition sans toutefois exclure, comme veut le faire M. Dumortier, l'assentiment, le consentement de celui qui se trouve dans le cas prévu par cet article 9.

Au lieu d'exiger une déclaration pour acquérir la qualité de Français, on déclare Français celui qui n'aura pas fait une déclaration contraire.

Si on contestait les motifs que j'ai donnés de la disposition adoptée en France, il me suffirait de donner lecture du passage du rapport fait sur cette proposition par M. Benoit-Champy, que voici :

« N'y avait-il pas de graves inconvénients à tolérer l'établissement sur notre territoire, d'individus destinés, quel que fût le nombre des générations qui se succéderaient, à rester indéfiniment étrangers à la grande famille française ? L'expérience a bientôt démontré que ces craintes n'étaient pas chimériques. La plupart des fils d'étrangers nés en France pour se soustraire aux charges qui pèsent sur les Français, et particulièrement à celle du recrutement, s'abstenaient de faire la déclaration prescrite par l'article 9 du Code civil. Il y a plus : si, par erreur, ils étaient portés sur la liste du contingent cantonal, et désignés par le sort, ils se bornaient alors à réclamer la qualité d'étrangers, et cette tardive réclamation suffisait, et suffit encore, pour les exempter du service mililaire, mais en condamnant à ce service de jeunes Français qui devaient en être exemples par leurs numéros.

« Ces privilèges sont d'autant plus odieux que, généralement, ces étrangers prennent leur part dans les affouages, dans les pâtis communaux, et qu'ils jouissent des droits civils, quelquefois même des droits politiques les plus importants. Confondus avec les Français, possédant seuls le secret de leur extranéité, ils sont Français ou étrangers suivant leur convenance ; Français, s'ils ont à recueillir le bénéfice de nos lois ; étrangers, s'ils ont à remplir les devoirs qu'impose la nationalité.

« Leur situation a paru si avantageuse à la population française elle-même, que, dans nos campagnes, des pères de famille, lorsqu'il s'agit de l'établissement de leurs filles, donnent à ces étrangers la préférence sur les Français, parce que les enfants qui naissent de ces unions deviendront étrangers, et, par suite, se trouveront affranchis des obligations qui pèsent sur nos nationaux. »

M. Dumortier. - C'est la même chose en Belgique.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Erreur encore une fois. Ce n'est pas la même chose en Belgique. En Belgique vous avez la loi sur la milice qui déclare tous les étrangers assujettis au service de la milice à moins qu'ils n'appartiennent à une nation qui dispense nos nationaux du service militaire.

Pourquoi faut-il condamner la proposition ? D'abord parce qu'il ne faut pas faire des Belges malgré eux, et en second lieu parce que nous ne devons pas avoir des Belges malgré nous. (Interruption.)

Votre proposition mène à cela : Vous allez déclarer Belges des individus sans leur laisser la faculté de manifester leur volonté de rester étrangers ; par conséquent, vous faites des Belges malgré eux ; d'un autre côté, ceux que vous déclarez Belges peuvent avoir une double patrie, ils pourraient quitter la Belgique, et, s'ils ne posent pas d'acte de nature à faire perdre la nationalité, après être devenus étrangers à nos habitudes, à nos institutions, venir réclamer une nationalité que vous ne seriez pas disposé à leur reconnaître. Ainsi, je le répète, nous ferions des Belges malgré nous.

L'honorable M. Dumortier nous dit que sa proposition a été adoptée en France ; la commission l'a condamnée à la presque unanimité. Voici ce que je lis dans son rapport :

« Les raisons qui précèdent suffirent pour expliquer comment votre commission a repoussé, à la presque unanimité, une proposition qui avait pour objet de revenir aux principes absolus de notre ancien droit, et de déclarer Français tout individu né en France ; nous ajouterons seulement que votre commission n'a pas voulu détruire l'article 9 du Code civil, parce qu'il lui a paru que ce n'était pas sans de graves motifs que l'on devait abolir une disposition fondamentale de notre Code, et qu'elle a trouvé que la proposition de MM. Raulin et Benoît-Champy, si elle était adoptée en principe, remédiait, dans une juste mesure, aux inconvénients de la législation actuelle. D'ailleurs, l'Assemblée législative s'était déjà nettement prononcée sur cette question, en rejetant, lors de la discussion de la loi du 3 décembre 1849 sur la naturalisation, un amendement dont le but était précisément le retour à l'ancienne législation. »

Voilà comment la France a accepté la proposition de M. Dumortier.

Je conclus au rejet de la proposition.

M. le président. - Vous vous opposez à l'ajournement ?

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Puisque la discussion est commencée, mieux vaut la terminer.

Au reste, M. Dumortier est parfaitement à même de discuter dès maintenant sa proposition ; il lui a donné des développements très étendus ; il peut donc dès maintenant en continuer la discussion. D'un autre côté, l'honorable M. Lelièvre et les membres de la commission qui ont étudié la question, pourront à leur tour éclairer la chambre sur cette question.

M. Dumortier. - J'ai fait une proposition sérieuse après l'avoir mûrement méditée, convaincu que c'est le seul moyen de nous tirer des embarras où nous nous trouvons. Si la chambre la repousse, sa décision ne me touchera, en aucune manière.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - On n'a aucunement l'intention de vous toucher ; on discute votre proposition en elle-même comme toutes celles qui se produisent ici.

M. Dumortier. - J'aurai le regret de voir abandonner le droit qui nous régit encore aujourd'hui.

Dans une occasion récente, j'avais dit qu'il était étonnant que les questions de primes en matière d'industrie fussent mieux comprises par des avocats que par des industriels. En rappelant ces paroles, M. le ministre de la justice a donnés entendre que je n'aurais pas dù m'occuper d'une question que cependant nous devons tous connaître, d'une question de nationalité. Singulière manière d'argumenter ! S'il s'agissait d'une question d'hypothèques, je comprendrais que M. le ministre s'étonnât que je prisse part à la discussion ; mais il s'agit d'une question d'Etat à nous, elle est de notre compétence.

C'est une question d'existence ; il s'agit de savoir si nous sommes ou ne sommes pas Belges. En entrant dans cette enceinte, c'est une chose que nous devons savoir, même quand nous n'avons pas l'honneur d'être avocats.

L'idée qui a présidé à la présentation de ma proposition est une idée féodale !

Je regrette que M. le ministre de la justice, qui connaît si bien son droit, ne connaisse pas mieux les institutions du pays. M. le ministre aurait pu voir que dans nos communes de Belgique la féodalité n'existait pas ; il est possible qu'elle existât dans le Luxembourg.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Le Luxembourg était un pays de terre allodiale.

M. Dumortier. - Le principe et le but de tous nos actes était la liberté, la lutte contre la féodalité. Le principe admis était que l'enfant né en Belgique de parents y domiciliés avait la qualité de citoyen. C'est là un principe de liberté, un principe libéral ; loin d'être un principe féodal, c'est l'opposition de la féodalité.

J'ai eu l'honneur de dire que le rejet de ma proposition serait l'introduction d'un principe nouveau, et son adoption la conservation du principe qui nous régit.

Mais, dit M. le ministre, vous omettez une parenthèse de 21 ans. Je n'ai rien omis. Je le prie de se rappeler ce que j'ai dit.

La loi fondamentale des Pays-Bas a cessé d'être en vigueur le 7 février 1831 ; ceux qui sont nés avant cette date n'ont donc pas de déclaration à faire ; mais ceux qui sont nés après cette date auront à leur majorité une déclaration à faire, si le régime qui existe encore en Belgique et qui existera jusqu'au 7 février 1852, n'est pas modifié. La parenthèse dont parle M. le ministre de la justice n'existe donc pas puisque vingt et un ans ne s'étant pas écoulés depuis le 7 février 1831, (page 892) il n'y a pas eu jusqu'à présent, je le répète, matière à déclaration dans le sens de l’article 9 du Code civil. Ce sera donc un régime nouveau, et par cela même nul ne peut dire quelles en seront les conséquences,

J'aborde une autre question : celle de la rétroactivité. D'après M. le ministre de la justice ma proposition serait entachée de rétroactivité, et serait une loi interprétative, alors qu'il n'y a pas lieu à en porter une. D'abord, ce n'est pas une loi interprétative ; c'est une loi de fait, une loi qui proclame un principe. Si c'était une loi interprétative, la Constitution eût été absurde en disant dans son article 4 : La qualité de Belge s'acquiert, se conserve et se perd d'après les règles déterminées par la loi civile.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Pour l'avenir !

M. Dumortier. - Il ne s'agit pas d'autre chose. La loi aurait un effet rétroactif, s'il s'agissait de donner une valeur à des actes posés par des étrangers avant la publication de la loi. Mais évidemment, il n'y a pas de rétroactivité à dire : Les personnes qui, dans l'état de la législation devraient, à partir du 7 février 1852, faire une déclaration pour acquérir la qualité de Belge, seront considérées comme Belges, sans remplir cette formalité. C'est évidemment le règlement des droits civils dans le sens de l'article 4 de la Constitution. C'est tellement vrai que la disposition de la loi fondamentale dont je ne fais que reproduire le texte, a été considérée comme une loi civile, bien qu'elle se trouvât dans une loi politique.

Ainsi ma proposition n'est ni entachée de rétroactivité, ni une loi interprétative par voie d'autorité.

Vous avez à opter entre deux systèmes : celui qui nous a régis et qui nous régit encore aujourd'hui ou celui qui nous régira à dater du 7 février prochain. Si vous donnez la préférence cà ce dernier système, vous aurez un système entièrement nouveau, et qui n'est pas dans nos mœurs.

Nous ferons, dit M. le ministre, des Belges malgré eux et malgré nous ! Avons-nous fait des Belges malgré eux et malgré nous, parce que nous sommes restés sous l'empire de la loi fondamentale ? Non, nous ne ferons pas des Belges malgré eux et malgré nous. Mais ce qui arrivera, c'est qu'avec votre système vous aurez une quantité de personnes nées en Belgique et n'ayant cessé de résider qui ne feront pas la déclaration, formalité dont vous voulez faire dépendre la qualité de Belge, et qui ne seront ni Belges ni étrangers.

On conçoit que ces inconvénients soient de peu d'importance dans un grand pays comme la France, où le nombre des étrangers est relativement bien moins considérable qu'en Belgique ; mais en Belgique, affluent de tous les pays voisins, il y aura toujours un grand nombre d'étrangers qui se fixeront dans le pays, et auront des enfants, lesquels, ne faisant pas la déclaration, ne seront pas Belges et se soustrairont ainsi au service de la garde civique, et aux autres obligations qui pèsent sur les nationaux.

J'ai dit tout à l'heure que la France avait fait une loi pour modifier le Code civil, je n'ai pas dit quel était le but de la loi ; je me suis borné à dire, ce qui n'est pas contesable, qu'elle modifie le Code civil.

C'est le régime du Code renversé. Dans le Code on exigeait qu'à l'âge de 21 ans, il eût fait une déclaration. Maintenant on le considère comme Français, si à l'âge de 21 ans il n'a pas fait de déclaration.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Et si ses parents sont nés sur le sol français ?

M. Dumortier. - Je sais bien qu'il y a un degré de plus. Mais à un degré de différence, c'est le régime du Code qui est supprimé. C'est la suppression du régime du Code, vous ne pouvez le contester.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - L'intervention de la volonté de l'individu est toujours là.

M. Dumortier. - L'intervention de la volonté de l'individu est dans l'absence de déclaration. Eh bien ! admettez ce système en Belgique, et je crois que vous aurez supprimé une énorme quantité de difficultés. Voulez-vous de ce système ? J'y consens. Mais je demande que l’on sorte de la fausse position où l'on se trouve vis-à-vis des enfants qui naissent en Belgique d'étrangers.

Il est hors de doute que le Code n'existe plus dans son entier par le fait de la loi votée dernièrement en France, puisque auparavant les fils d'étrangers, nés en France, devaient, pour devenir Français, faire une déclaration, tandis qu'aujourd'hui ils sont censés Français s'ils ne font pas de déclaration. C'est donc l'absence de déclaration qui constitue en France le citoyen français, tandis que chez nous cette absence de déclaration donnera à des enfants nés en Belgique le caractère d'étrangers.

Messieurs, je suis très opposé à toutes les naturalisations que nous accordons souvent. Je n'en ai pas beaucoup voté. Je n'en ai pas beaucoup sur la conscience. Mais d'un autre côté, je dois déclarer que je considère l'homme qui est né sur le sol belge, et qui ne l'a jamais quitté, comme aussi bon patriote que moi-même.

Peu m'importe que son père soit étranger ou Belge. Je ne vois pas pourquoi lorsqu'une personne est née, lorsqu'elle n'a jamais quitté le pays, lorsqu'elle n'en connaît pas d'autre, vous l'excluriez, vous en feriez un paria !

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Elle n'a qu'à faire sa déclaration.

M. Dumortier. - Elle n'a qu'à faire sa déclaration ! C'est une chose facile à dire, lorsqu'un est assis au banc des ministres. Mais fait-on des déclaraliuns à l'âge de 21 ans ? Quel est le jeune homme qui pensera à 21 ans a faire une déclaration pour conserver sa position d’indigènes ? A 21 ans le jeune homme est occupé à faire toute autre chose que des déclarations politiques. (Interruption.)

- - Un membre. - Il en fait d’autres.

M. Dumortier. - Supposez que cela soit ; ce genre de déclaration lui fera perdre de vue celle qu'il doit faire pour sa naturalisation politique.

Il est certain qu'exiger d'un jeune homme de 21 ans qu'il pense à son avenir politique, c'est exiger de lui une chose qu'il oubliera presque toujours. Si l'on avait exigé cette déclaration à l'époque où il devient électeur, à l'époque où il est en âge d'entrer dans la vie politique, je le concevrais, mais le jour vient où il est en âge d'entrer dans la vie politique et ce jour-là, comme il n'a pas fait sa déclaration, il n'est plus rien ; et cependant il est né sur le sol belge, il ne l'a jamais quitté, il ne connait pas d'autre pays.

Eh bien, je dis que c'est là un système monstrueux, un système qui n'est pas en harmonie avec nos mœurs.

En France, les déclarations sont très peu nombreuses, et il faut qu'elles le soient très peu pour qu'on ait porté une loi décidant que l'abstention de déclaration sera suffisante pour obtenir la qualité de citoyen français.

En Belgique, ces déclarations ne se sont jamais faites, elles ne se feront pas davantage, et vous arriverez à ce résultat qu'entrant dans un régime tout à fait nouveau, celui des déclarations politiques à faire à l'âge de 21 ans, vous aurez une foule de personnes nées dans le pays, qui n'en connaissent pas d'autre, qui y sont attachées comme nous, et qui ne seront pas Belges.

Messieurs, je ne veux pas d'un semblable système ; je crois que les personnes qui sont nées dans le pays et qui ne l'ont jamais quitté sont d'aussi bons patriotes que nous et ont le droit d'occuper des fonctions politiques.

M. Lelièvre. - La proposition deM. Dumortier n'a pas été adoptée par la commission, et le rapport reproduit les motifs qui appuient la résolution.

On comprend d'abord qu'il est dangereux de toucher à la législation du Code civil sans de graves motifs.

Or, messieurs, nous avons pensé que lorsqu'il s'agit de déterminer la nation à laquelle l'enfant appartient, c'est le lien du sang qui doit l'emporter de préférence au lieu de la naissance.

Quoi de plus naturel d'abord que l'enfant suive la condition de son père ?

C'est la conséquence presque nécessaire de l'existence de la famille.

Comment attribuer à l'enfant une nationalité différente de celle de l'auteur de ses jours ? Ne convient-il pas mieux de maintenir le principe du Code civil qui permet à l'enfant de l'étranger né sur notre sol d'accepter ou de répudier la qualité de Belge dans l'année de sa majorité ?

Cette disposition n'est-elle pas préférable à celle de la proposition qui lui donne de plein droit une nationalité contraire à celle de ses parents, une nationalité qu'on lui impose forcément en l'isolant de son père et en compliquant les relations qui existent entre eux ?

Le principe de la famille n'exige-t il pas que l'enfant ait la nationalité de son père tant qu'il n'est pas à même d'émettre légalement une volonté contraire ?

Ce n'est pas tout. Dans le système de la proposition, l'enfant né sur notre sol de parents étrangers qui y étaient domiciliés, serait Belge de plein droit, et il continuerait de l'être, alors même que, peu de temps après sa naissance, son père aurait abandonné notre territoire. L'on considérerait donc comme Belge un individu qui aurait été élevé à l'étranger, et depuis sa naissance n'aurait plus eu rien de commun avec le sol qui l'a vu naître.

Pareil système est inadmissible.

Ce n'est pas tout, ce système pourrait encore donner lieu à des collisions fâcheuses entre les diverses législations. Ainsi les dispositions du Code civil étant encore en vigueur dans plusieurs pays voisins, l'enfant de l'étranger né sur notre sol serait considéré comme appartenant à la nation qui est celle de son père, tandis que d'après la proposition il serait envisagé comme Belge. Cet individu appartiendrait donc à deux patries à la fois.

Maintenons le principe consacré par les lois romaines ; c'est le lien du sang qui détermine la nationalité. Seulement lorsque l'enfant de l'étranger est né sur notre sol, autorisons-le, au moment où il devient capable d'émettre légalement sa volonté, d'opter pour la qualité de Belge. Nous concilions ainsi tous les intérêts, et ce qui est décisif, nous laissons à l'enfant une liberté qui, en réalité, ne peut lui être ravie. Un fils est présumé vouloir être de la condition de son père, la nature des choses le veut ainsi, tant qu'il ne manifeste pas une intention contraire.

Ce sont ces motifs qui ont engagé la commission à préférer les dispositions du Code civil.

Quant aux articles ayant pour objet d'apporter des modifications au Code civil, à l'égard de ceux qui, dans le cas prévu par l'article 17, ont perdu la qualité de Belge, nous les considérons comme inadmissibles, parce que le Belge qui a abdiqué sa qualité ne peut appartenir à deux patries à la fois, et dès lors ayant posé un fait qui, par la nature des choses, entraîne la perte de la nationalité, il ne peut y avoir simple suspension, mais privation réelle du droit de cité résultant de l'acte anti-national émané de lui.

(page 893) Il en est de même du Belge qui prend du service militaire chez l'étranger ; il n’est digne d'aucune faveur. Au lieu de consacrer ses bras à la défense du pays, il a préféré mettre son épée au service d'une puissance étrangère. Eh bien, la conséquence d'une pareille conduite, c'est la peine comminée par l'article 21 du Code civil, et il n'existe aucun motif sérieux de l'atténuer. Agir autrement, ce serait favoriser des spéculations qui n'ont rien d'honorable ; ce serait encourager des actes contraires a l'honneur national, et aux devoirs d'un bon citoyen. Le patriotisme de mon ami M. Dumortier m'est un sûr garant qu'il est le premier à flétrir des procédés de ce genre, et, en conséquence, il ne saurait être question de mitiger les pénalités établies par la législation en vigueur.

Toutefois je pense qu'il y a quelque chose à faire, et sous ce rapport, il me semble qu'on pourrait admettre des dispositions analoges à celles admises dernièrement en France dans les termes ci-après :

« Art. 1er. Est Belge tout individu né en Belgique d'un étranger qui, lui-même, y est né, à moins que dans l'année qui suivra l'époque de sa majorité telle qu'elle est fixée par la loi belge, il ne réclame la qualité d'étranger par une déclaration faite soit devant l'autorité communale du lieu de sa résidence, soit devant les agents diplomatiques ou consulaires accrédités en Belgique par le gouvernement étranger.

« Art. 2. L'article 9 du Code civil est applicable aux enfants de l'étranger naturalisé, quoique nés en pays étranger, s'ils étaient mineurs lors de la naturalisation. »

Ces dispositions me semblent fondées en justice et en raison, et on pourrait, si la chambre est de cet avis, les substituer au projet de M. Dumortier.

M. de Theux. - Messieurs, mon intention était de demander à la chambre l'ajournement de la discussion, en suite de l'amendement proposé par l'honorable M. Lelièvre. Cette question mérite véritablement un sérieux examen au point de vue indiqué par cet honorable membre ; en voici les motifs.

Jusqu'à présent il y a eu une réciprocité parfaite entre les Belges et les Français quant à l'obligation du service militaire. Je sais que, d'après notre loi sur la milice, le Français domicilié en Belgique est obligé de contribuer au tirage au sort et même de servir. Mais il n'en est pas moins vrai que la France a toujours réclamé contre notre loi sur la milice et que celle-ci ne reçoit pas d'exécution.

Lorsqu'un Français a concouru au tirage au sort et qu'il est appelé sous les armes, s'il a recours à la voie diplomatique, le gouvernement intervient et le gouvernement belge suspend l'incorporation. Voilà ce qui se pratique ; et ainsi, de même que les Belges qui habitent la France n'y sont pas assujettis au service militaire, de même les Français habitant la Belgiqu en'y sontpas assujettis au service militaire.

Je ne parle pas de la loi ; je parle du fait, de ce qui se passe.

Mais à l'avenir il n'en sera plus ainsi. D'après le système que l'on vient d'adopter enFrance,le fds d'un père belge,né lui-même en France,sera considéré comme Français, à moins qu'il n'ait réclamé sa qualité de Belge. Ainsi des familles belges établies en France devront le service militaire à la seconde génération. Mais les familles françaises établies en Belgique depuis deux, trois et quatre générations, n'y devront pas le service militaire.

Le gouvernement français continuera de demander diplomatiquement l'exemption du service militaire de ses nationaux, et je crois que vous aurez beaucoup de peine à la refuser, parce que la France s'oppose toujours à ce ce que ses nationaux doivent la prestation du service militaire dans les autres pays. C'est là une question diplomatique d'un ordre très élevé, et qui ne sera pas du tout assoupie, quant aux familles françaises établies en Belgique, par suite de la nouvelle loi votée en France.

Par ces motifs, je crois que pour qu'il y ait égalité de position, égalité de charges pour les familles françaises établies en Belgique et pour les familles belges établies en France, la proposition de l'honorable M. Lelièvre mérite d'être prise en très sérieuse considération.

D'autre part, je conçois très bien les objections qu'on peut faire au système de notre ancienne loi fondamentale reproduite par l'honorable M. Dumortier.

Moi-même, dans le sein de la commission, j'ai voté contre le rétablissement de l'ancienne loi fondamentale.

Mais, dans le système de la nouvelle loi française, c'est un tout autre ordre d'idées. Le fait du domicile peut être une question difficile à constater. Mais les faits de la naissance successive du père et du fils sur le sol de la Belgique sont faciles à constater, puis qu'ils le sont par l'état civil, et on peut dire que lorsqu'une famille est établie dans un pays depuis aussi longtemps que le père et le fils y sont nés, c'est une famille réellement indigène. Ce système peut être très bien compris ; mais le système de la loi fondamentale, je n'en ai jamais été partisan, et je ne voterai certainement pas pour son rétablissement, parce qu'il favorise les solliciteurs d'emplois.

Si l'on voit qu'il a surgi en Belgique une chance d’arriver à la chambre ou à quelque autre fonction pour laquelle l'indigénat est nécessaire, lors même qu'on aurait quitté le pays sans esprit de retour, on abandonnera sa véritable patrie et on viendra se présenter ici pour obtenir la fonction qu'on aurait en vue. Un tel système, je n'en veux pas. Mais lorsque le père et le fils sont nés en Belgique et que le pays n'a pas été abandonné par la famille, on peut dire que la Belgique est bien la patrie de cette famille. Toutefois, je laisserais à celui qui est né en Belgique d'un père étranger la faculté de réclamer sa qualité ancienne.

De cette manière on parerait à tous les inconvénients et on établirait une parfaite réciprocité entre la Belgique et les pays étrangers.

D'après cela, messieurs, je conclurai à l'ajournement de la discussion pour que le gouvernement ait le temps d'examiner, d'autant plus que l'intention de M. le ministre de la justice est, je pense, de demander également l'ajournement du projet présenté par M. Destriveaux.

M. Delfosse. - Si l'honorable M. Lelièvre dépose la proposition qu'il vient d'annoncer, je crois, comme l'honorable M. de Theux, qu'il convient qu'elle soit examinée en sections ou en commission ; mais cela ne doit pas nous empêcher de statuer aujourd'hui sur la proposition de l'honorable M. Dumortier et d'en déblayer le terrain parlementaire ; nous savons à quoi nous en tenir sur la proposition de l'honorable M. Dumortier ; nous pouvons, dès à présent, nous prononcer en connaissance de cause.

La proposition annoncée par l'honorable M. Lelièvre ne pourrait pas être considérée comme amendement, ce serait une proposition nouvelle.

M. Lelièvre. - Je veux bien déposer ma proposition mais alors il faudrait ou que la chambre statuât sur la proposition de M. Dumortier ou que M. Dumortier la retirât.

M. le président. - Tout cela est contraire au règlement. Si M. Lelièvre veut déposer une proposition nouvelle, il faut qu'il observe les formalités prescrites par le règlement.

M. de Theux. - M. Lelièvre peut déposer sa proposition comme amendement à la proposition de M. Dumortier. En effet, M. Lelièvre propose une modification à l'article premier. C'est une modification fort importante, j'en conviens, mais c'est toujours une modification au système de M. Dumortier.

M. le président. - M. Lelièvre, déposez-vous un amendement ou une proposition nouvelle ?

M. Lelièvre. - Une proposition nouvelle.

MpV. - Alors votre proposition doit suivre la filière ordinaire.

Il n'y a donc pas d'amendement à la proposition de M. Dumortier.

M. Delfosse. - Je persiste à demander qu'on statue aujourd'hui..

M. le président. - M. de Theux a proposé l'ajournement.

M. de Theux. - Puisque M. Lelièvre ne dépose pas sa proposition comme amendement, je n'insiste pas.

M. Dumortier. - M. le président, la proposition que j'ai eu l'honneur de déposer sur le bureau n'a pas, à mes yeux, les inconvénients qu'on lui attribue : elle nous a régis, et elle nous régit encore ; mais puisqu'elle n'a pas de chance d'être adoptée, je la retire.

M. le président. - Reste la proposition de M. Destriveaux.

M. Destriveaux. - Messieurs, des observations très sérieuses m'ont été faites, non pas tant sur la proposition en elle-même que sur les conséquences qu'elle pourrait entraîner. Dans cet état de choses et pour ne rien précipiter sur ce sujet excessivement grave, j'aurai l'honneur de proposer le renvoi de ma proposition au gouvernement, qui pourra s'entourer des lumières nécessaires et peut-être donner à ma proposition le complément dont elle aurait besoin.

M. de Theux. - Ce mode de procéder me paraît irrégulier : on' peut demander l'ajournement de la discussion, le renvoi à une commission, le renvoi aux sections ; mais il n'est pas dans les usages de la chambre de renvoyer au gouvernement un projet dont un membre a pris l'initiative. Si M. le minstre de la justice demande un délai pour examiner la proposition, certainement je ne m'y opposerai pas ; mais je désire que la chambre ne dévie pas de la marche tracée par son règlement.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Le gouvernement ne demande pas de délai pour aviser ; je suis prêt à discuter la proposition : si l'honorable M. Destriveaux la maintient, je la combattrai en partie ; mais, quant à moi, je n'ai pas non plus d'opposition à faire à ce qu'elle soit renvoyée au gouvernement, si la chambre croit devoir suivre ce mode.

M. Destriveaux. - Je demanderai un ajournement à terme fixe pour que, dans l'intervalle, le gouvernement puisse prendre une connaissance approfondie de ma proposition.

M. Lelièvre. - La chambre n'a pas admis l'ajournement en ce qui concerne la proposition de M. Dumortier. Il n'y a pas de motifs particuliers qui justifieraient cette mesure à l'égard de la proposition de M. Destriveaux.

La commission n'a pas cru devoir accueillir le projet, bien qu'elle se rallie au point de jurisprudence que la proposition tend à consacrer.

Le motif qui nous paraît décisif pour justifier cette résolution, c'est que la proposition tend à régler des intérêts et des droits acquis antérieurement.

Or, le pouvoir législatif ne peut en général s'occuper de dispositions ayant un effet rétroactif et de nature à régler un ordre de choses antérieur.

Ainsi, messieurs, la question soulevée par la proposition peut donner lieu à de graves contestations concernant des intérêts privés très importants. L'individu que l'on prétend être Belge peut avoir figuré dans des testaments, des donations, des contrats d'hypothèque et d'autres actes solennels. En accueillant la proposition, nous déclarerions ainsi valables des actes passés antérieurement au projet dont nous nous occupons.

Ce serait évidemment une usurpation des prérogatives du pouvoir judiciaire, à qui la Constitution a déféré la connaissance des contestations ayant pour objet les droits civils.

(page 894) Mais, messieurs, si l’on pouvait même penser que le pouvoir législatif a le droit de sanctionner semblable mesure, ce ne serait au moins que dans des circonstances graves qui en justifieraient la nécessité. Or dans l'espèce la cour de cassation et les autres cours du royaume n'ont cessé de résoudre la question dans le sens de la proposition.

A quel titre dès lors devrions-nous nous préoccuper d'une question qui en réalité n'offre aucune difficulté sérieuse ? Il n'existe donc aucun motif justifiant dans l'espèce l'intervention de la législature dans une matière où sont agités des droits acquis.

M. le minisire de la justice a déduit des motifs péremptoires à cet égard. Il me paraît par conséquent certain que la proposition de M. Destriveaux ne peut être admise ; dès lors l'honorable membre doit retirer sa proposition, ou bien la chambre doit y statuer. Un renvoi à M. le ministre de la justice ne peut conduire à aucun résultat, puisqu'il s'agit d'une question de principe que le gouvernement a résolue dans le sens du rapport de la commissun dont j'ai l'honneur d'être l'organe.

M. Destriveaux. - L'honorable rapporteur vient de discuter la question du fond. Je n'ai pas compris que la chambre repoussât d'une manière positive l'ajournement. Je proposerai l'ajournement à quinzaine puisqu'on paraît ne pas vouloir renvoyer au gouvernement. Si l'ajournement est adopté, j'examinerai si je dois modifier ma proposition ou même je dois la retirer.

- L'ajournement est mis aux voix ; il n'est pas adopté.

M. Destriveaux. - Je retire ma proposition.

Projet de loi qui sépare le hameau de Daelgrimby de la commune de Mechelen, et le réunit à celle d'Opgrimby (Limbourg)

Vote de l’article unique

L'article unique du projet est ainsi conçu :

« Article unique. Le hameau de Daelgrimby, dépendant actuellement du territoire de la commune de Mechelen, province de Limbourg, en est séparé et réuni à la commune d'Opgrimby, même province. Les limites séparatives sont fixées conformément au liséré rouge indiqué par les lettres A, B, C, D, E, F, G, H et J sur le plan annexé à la présente loi.

« La ligne de démarcation est tracée sur le terrain à partir du point A, formant, à l'extrémité nord, le point de contact avec les communes de Sutendael, de Genck et d'Asch, par la limite du bois dit Heywyck et la bruyère de Mechelen, laissant, par conséquent, les parcelles n°907, 906 et 898 de la section E du cadastre sur le territoire d'Opgrimby, et celles n°917, 913, 912 et 909 de la même section sur la commune de Mechelen, jusqu'au chemin de Sutendael à Stockheim, point indiqué sur le plan par la lettre B.

« De ce point, la ligne de démarcation suit un rayon visuel coupant la bruyère n°908, section E, se dirigeant en ligne droite sur le point formant la jonction des 3° et 6° feuilles du plan de la section E du cadastre, et venant aboutir à la limite des parcelles n°931 et 840, même section, point indiqué par la lettre C.

« Du point C, la ligne de démarcation est formée par la limite des 3° et 6° feuilles du plan de la section E prémentionnée, laissant les parcelles n°840, 682, 680, 606, 603 et 585, section E, sur le territoire d'Opgrimby et celles n°931 et 932, même section, sur la commune de Mechelen jusqu'à la limite qui sépare la propriété dite de Halfbunders de celle appelée Schuttenhoef, et aboutissant à la limite des parcelles n°581 et 585 de la section E du cadastre, point indiqué par la lettre D.

« De ce point, la limite suit la ligne qui sépare les deux propriétés précitées jusqu'au chemin appelé de Oudebaen, ou vieille route de Maestricht à Maeseyck, puis, passant entre les parcelles n°1877 et 1845 de la section C, elle est tracée par la ligne qui sépare, d'un côté, les lieux dits op de Hondshoef, de Vliegert, Bremakker, Takmorgens et aen hel Kruiske, et, de l'autre côté, ceux dits aen hel Groothoef de Lintherbosch, aen de Raefeiken, de Grimbyer Zavel et op de Heerstraet, laissant ainsi les parcelles n°1843, 1846, 1870, 1778, 1777, 1716, 1720 et 1506, section C, sur le territoire d'Opgrimby, et celles n° 1877, 1876, 1875, 1871, 1712, 1715, 1685, 1562 et 1505, même section, sur la commune de Mechelen, et aboutissant au chemin dit Heerenweg, point indiqué sur le plan par la lettre E.

« De ce point, la ligne de démarcation est tracée par l'axe de ce dernier chemin, en allant vers le nord jusqu'à la limite de la parcelle n°1339 section C, puis par la limite séparative entre les propriétés dites de Tekker et Klein-Leem, et celles nommées het Steenbunder aen de Ryser, aen Ramackersweide et Cromme Loosgraef ; jusqu'à la grande route de Maestricht à Maeseyck, point indiqué par la lettre F ; les parcelles n°1306, 1309, 1327, 1334, 1225 et 1218, section C, appartiennent, par conséquent, au territoire d'Opgrimby, et celles n°1339, 1337, 1347, 1365, 1376, 1808 et 1217 à celui de Mechelen.

« Du point F, la ligne de démarcation suit la grande route de Maestricht à Maeseyck jusqu'au cours d'eau formant limite entre les parcelles n°1024 et 1313 ; section B, du cadastre, point indiqué par la lettre G.

« La ligne de démarcation est tracée ensuite par l'axe de ce cours d'eau jusqu'au marais dit Breedwater, situé entre les n°1292 et 1297, section C, point indiqué par la lettre E.

« A partir de ce point, elle est tracée par la limite qui sépare ce marais et le lieu dit Achtbunders des propriétés nommées de Veeweidcn et tegen de Veeweiden, laissant les parcelles n°1306, 1299 et 1455, section B, sur le territoire d'Opgrimby, et celles n°1287, 1292, 1297, 1459 et 1456 sur le territoire de Mechelen.

« La limite séparative entre les communes de Mechelen et d'Opgrimby aboutit ainsi au territoire de la commune de Doorsheîm, au point indiqué sur le plan par la lettre J. »

- Personne ne demandant la parole, il est procédé au vote par appel nominal sur l'article unique du projet de loi.

Le projet de loi est adopté à l'unanimité des 64 membres présents.

Il sera transmis au sénat.

Ont voté : MM. Bruneau, Cans, Clep, Cools, Dautrebande, de Baillet (Hyacinthe), de Baillet-Latour, de Bocarmé, de Breyne, de Brouwer de Hogendorp, de Decker, de la Coste, Delehaye, Delescluse, Delfosse, Deliége, de Meester, de Mérode (Félix), de Perceval, de Pitteurs, De Pouhon, Dequesne, de Renesse, Destriveaux, de Theux, de T'Serclaes, Devaux, Dumont (Guillaume), Dumortier, Frère-Orban, Jacques, Jouret, Julliot, Lange, le Bailly de Tilleghem, Lelièvre, Lesoinne, Malou, Manilius, Mascart, Mercier, Moncheur, Moreau, Moxhon, Osy, Peers, Pierre, Pirmez, Rodenbach, Rousselle (Charles), Tesch, Thiéfry, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom (Alphonse), Vandenpeereboom (Ernest), Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Renynghe, Vermeire, Veydt, Allard, Ansiau, Anspach et Verhaegen.

Rapport sur une pétition

M. de Bocarmé, rapporteur de la commission permanente d’industrie. - Messieurs, vous avez renvoyé à votre commission de l'industrie une pétition par laquelle plusieurs habitants de Bruges demandent que les bois de construction soient prohibés ou soumis à des droits élevés à la sortie.

Ils demandent aussi que l'on accorde au bois de sapin, servant à la construction des navires, les avantages dont jouissent les courbes et les espars pour mâture.

« La première de ces faveurs serait doublement exorbitante ; elle établirait une sorte de monopole inusité, au détriment de la production nationale, en même temps qu'elle porterait atteinte aux idées progressives et libérales que signalent les tendances de notre époque dans les relations commerciales.

Quant à la deuxième partie de cette demande, nous pensons qu'elle doit être prise en considération.

Organe de la commission, nous avons l'honneur de proposer à la chambre de ne point donner suite à la première partie de la pétition, et le renvoi, pour la seconde, à M. le ministre des finances.

M. de La Coste, rapporteur. - Messieurs, s'il s'agissait de traiter la question au fond, alors je pense qu'il y aurait lieu à discussion ; mais comme il ne s'agit que d'un renvoi à M. le ministre des finances, j'appuie les conclusions.

M. de Bocarmé. - Messieurs, la première partie de la pétition dont il s'agit, analysée dans le rapport de votre commission d'industrie, ne donnera vraisemblablement lieu à aucune observation. Quant à la deuxième partie, qui consiste à demander l'assimilation des droits sur les bois de sapin destinés à la construction des navires, à ceux des courbes et des espars pour mâture, votre même commission vous demande qu'elle soit prise en considération par M. le ministre des finances ; le droit sur les courbes et espars est, par navires nationaux et étrangers, d'un franc par tonneau, donc la moitié de ce que les bois de sapin ordinaires payent par navires nationaux, et le quart seulement pour ceux introduits en Belgique par les navires étrangers. Comme ce changement de tarif pourrait compliquer les investigations de la douane, M. le ministre des finances, meiux que la commission, pourra apprécier la portée de cette demande.

M. Osy. - Je regrette que cette pétition vienne également de la Flandre occidentale. On a, pendant de nombreuses années, demandé la défense de la sortie du lin ; aujourd'hui on nous demande la défense de la sortie des bois dans la première partie de la pétition de Bruges.

Je suis charmé, messieurs, de voir que la commission rejette cette première partie de la pétition et qu'elle propose l'ordre du jour.

La commission demande également le renvoi de la seconde partie de la pétition à M. le ministre des finances ; je ne m'y oppose pas, mais là on demande une protection pour acheter du bois à l'intérieur, et on demande également l'introduction du sapin étranger en réduisant les droits d'entrée. Ce sont là deux demandes différentes. Je ne m'oppose pas au renvoi de la seconde partie à M. le ministre des finances, qui pourra l'examiner ; mais, pour ma part, je suis contraire à ces deux demandes.

M. Bruneau. - Messieurs, la commission d'industrie a proposé le rejet de la première partie de la pétition qui demandait un accroissement de droit à la sortie, mais elle a appuyé la partie de la pétition qui demandait une diminution de droits à l'entrée.

Cette diminution de droits se justifie très facilement. Les pétitionnaires demandent que le bois de sapin employé pour la mâture et pour la construction des navires, soit placé dans les mêmes conditions à l'entrée que le bois de chêne employé aux courbes des navires ; et la commission d’industrie ne voir pas pourquoi on devrait frapper d’un droit plus élevé l’introduction du sapin, qu’on ne trouve pas même dans le pays, d’un droit plus élevé que le bois de chêne employé pour les courbes des navires.

(page 895) C'est dans ce sens que la commission d'industrie a appuyé la seconde partie des conclusions de la pétition ; elle a cru qu'il serait important de favoriser autant que possible l’introduction du sapin destiné à la mature des navires ; sapin qui, je le répète, ne se trouve pas dans le pays et qui ne fait donc aucune concurrence à des produits indigènes. C'est dans ce sens que la commission d'industrie a appuyé le renvoi de la pétition à M. le ministre des finances. Je pense qu'il y a lieu de classer ces bois dans la même catégorie que ceux qui servent à la construction.

M. de Theux. - Messieurs, je ne m'oppose pas au renvoi de la pétition à M. le ministre des finances, mais bien entendu sans rien préjuger ; car la question n'est pas du tout discutée ni examinée par la chambre.

- Les conclusions de la commission d'industrie sont mises aux voix et adoptées.

Ordre des travaux de la chambre

M. Delehaye. - Messieurs, l'ordre du jour de la chambre est à la veille d'être épuisé ; plusieurs sections doivent se réunir demain, je convoquerai une section qui aura probablement pour deux ou trois heures de travail ; je crois qu'il serait convenable de fixer la séance à 2 heures.

M. Malou. - On a mis à l'ordre du jour de demain le second vote de la loi relative aux tarifs des voyageurs sur le chemin de fer si on commence à deux heures on ne pourra pas en finir demain avec ce projet de loi. Je crois qu'il vaudrait mieux de fixer la séance à une heure.

- La chambre décide qu'il y aura séance demain à une heure.

La séance est levée à cinq heures.