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Chambres des représentants de Belgique
Séance du samedi 20 décembre 1851

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1851-1852)

(Présidence de M. Verhaegen.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 327) M. A. Vandenpeereboom procède à l'appel nominal à 1 heure et demie.

La séance est ouverte.

M. Vermeire donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. A. Vandenpeereboom communique l'analyse des pièces adressées à la chambre.

« Plusieurs marchands de bois d'ébénisterie et ébénistes demandent que les droits d'entrée sur les bois d'ébénisterie arrivant des ports d'Europe ne soient pas plus élevés que ceux auxquels sont soumis ces mêmes bois importés des pays de production. »

- Renvoi à la commission permanente de l'industrie.

« Plusieurs négociants, marchands tanneurs à Stavelot, prient la chambre de donner son assentiment au traité de commerce conclu avec les Pays-Bas. »

-Dépôt sur le bureau pendant la discussion du traité.


« Les sieurs Valériane et de Lathuy, sauniers à Gembloux, prient la chambre de ne pas donner son assentiment à l'article 5 du traité de commerce conclu avec l'Angleterre, relatif à l'assimilation du sel de source au sel de roche. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le traité.


« Le sieur Paquet, instituteur communal, réclame l'intervention de la chambre pour obtenir une augmentation de traitement ou son déplacement. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« La veuve Delchambre demande que le projet de loi relatif au renouvellement des titres des emprunts de 1848 contienne une disposition qui fixe un nouveau délai pour autoriser l'échange des récépissés qui n'ont pas été produits en temps utile. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi.


« Plusieurs habitants d'Enghien demandent l'exécution d'un chemin de fer de Braine-le-Comte à Grammont pour relier la ligne de Namur à celle de la Dendre. »

M. Ansiau. - Je demande le renvoi à la commission des pétitions avec invitation de faire un prompt rapport.

Cette proposition est adoptée.


« Le comice agricole du premier district de la province d'Anvers demande une augmentation de droit d'entrée sur le bétail hollandais, ou du moins l'assimilation, quant aux droits d'entrée, du jeune bétail au bétail gras. »

- Renvoi à la commission d'industrie et dépôt sur le bureau pendant la discussion du traité.


« M. le ministre de la justice adresse à la chambre divers rapports sur des demandes en naturalisation. »

- Renvoi à la commission de naturalisation.

Projet de loi prorogeant la loi du 30 juin 1842, sur la réduction des péages sur les canaux et rivières de l'Etat

Rapport de la section centrale

M. Rousselle. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale qui a été chargée d'examiner le projet de loi ayant pour objet de proroger la loi du 30 juin 1842, relative à la réduction des péages sur les canaux et rivières de l'Etat.

- Ce rapport sera imprimé et distribué ; la discussion en est fixée à lundi.

Rapport sur des demandes en naturalisation

M. Dumon. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission sur plusieurs demandes en naturalisation ordinaire.

- Ce rapport sera imprimé et distribué.

Projet de loi abrogeant l'article 68 de la loi du 26 août 1822

Rapport de la section centrale

M. Allard. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale chargée d'examiner le projet de loi portant abrogation de l'article 68 de la loi du 26 août 1822.

- Ce rapport sera imprimé et distribué.

La discussion en est fixée à lundi.

Projet de loi approuvant le traité de commerce conclu avec les Pays-Bas

Motion d’ordre

M. Malou (pour une motion d’ordre). - Je demande à la chambre de faire traduire le rapport de M. Vanhaelen aux états généraux sur le traité du 20 septembre et de le faire imprimer pour mardi matin dans las Annales parlementaires.

M. Delfosse. - Pour avoir la traduction que demande M. Malou, il faudra s'adresser à M. le ministre des affaires étrangères ; il n'est pas ici ; je propose d'attendre son arrivée.

- Un membre. - M. le ministre serait informé du désir de la chambre.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Je pense qu'il conviendrait d'attendre l'arrivée de M. le ministre des affaires étrangères, à moins de faire faire l'impression par la chambre.

M. Malou. - Je veux bien attendre la présence de M. le ministre des affaires étrangères, bien qu'elle me paraisse inutile. La traduction de ce document sera aussi utile à plusieurs des ministres, qu'aux membres de la chambre.

Cette publication est dans l'intérêt de toutes les opinions.

Que M. le ministre des affaires étrangères veuille bien faire traduire le rapport dont j'ai parlé ou que la chambre l'ordonne elle-même, cela m'est indifférent, pourvu que la publication ait lieu en temps utile.

M. le président. - Il n'est pas dans les habitudes de la chambre de faire traduire des pièces ; tout ce qu'elle peut faire, c'est d'inviter M. le ministre des affaires étrangères à faire traduire la pièce, la chambre en ordonnerait ensuite l'impression, de manière qu'elle figure dans les Annales parlementaires mardi matin. C'est dans ce sens que la proposition est faite.

M. Coomans. - La pièce est probablement traduite déjà, car M. le ministre des affaires étrangères a plus besoin qu'elle le soit que la plupart d'entre nous. Je demande qu'on se borne à ordonner l'impression de la pièce, que la traduction soit faite ou à faire.

- La proposition de M. Malou est adoptée.

Projet de loi portant le budget du ministère des travaux publics de l’exercice 1852

Discussion du tableau des crédits

Chapitre II. Ponts et chaussées, bâtiments civils, etc.

Section III. Service des canaux et rivières, des bacs et bateaux de passage et des polders.
Article 14 (Service de la Lys)

« Art. 14. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 28,500.

« Charge extraordinaire ; fr. 109,833 33. »

- La section centrale, d'accord avec M. le ministre, propose de diviser cet article en deux articles ainsi conçus :

« Art. 17. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 28,500.

« Charge extraordinaire ; fr. 75,500. »

« Art. 18 (nouveau). Reconstruction des quais de la rive gauche dans la ville de Courtray (troisième tiers de la part de l'Etat). Charge extraordinaire : fr. 34,333 33. »

- Ces deux articles sont adoptés.

Article 15 (Service de la Meuse, dans les provinces de Liège et de Namur)

« Art. 15. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 20,000.

« Charge extraordinaire : fr. 200,000. »

- Adopté.

Article 16 (Service de la Meuse, dans la province de Limbourg)

« Art. 16. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 60,000.

« Charge extraordinaire : fr. 60,000. »

- Adopté.

Article 17 (Dendre)

« Art. 17. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 10,534 56

« Charge extraordinaire ; fr. 17,000. »

- Adopté.

Article 18 (Rupel)

« Art. 18. Travaux d'entretien et d'amélioration ; fr. 8,000. »$

- Adopté.

Article 19 (Dyle et Demer)

« Art. 19. Entretien et travaux à faire pour obvier aux inondations de la Dyle et du Demer.

« Charge ordinaire : fr. 13,000.

« Charge extraordinaire : fr. 100,000. »

- Adopté.

Article 20 (Senne)

« Art. 20. Entretien d'ouvrages d'art, loyer d'une maison éclusière à Vilvorde : fr. 2,250. »

- Adopté.

Article 21 (Canaux de Gand à Ostende)

(page 328) « Art. 21. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 25,179.

« Charge extraordinaire : fr. 21,000. »

- Adopté.

Article 22 (Canal de Mons à Condé)

« Art. 22. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 10,000 »

« Charge extraordinaire : fr. 18,284. »

La section centrale, sur la demande de M. le ministre, propose d'augmenter le chiffre des charges extraordinaires de 11,300 fr.

- L'article ainsi modifié est adopté.

Article 23 (Canal de la Campine)

« Art. 23. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 50,100.

« Charge extraordinaire : fr. 8,000. »

- Adopté.

Article 24 (Service du canal d'embranchement vers Turnhout)

« Art. 24. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 9,650.

« Charge extraordinaire : fr. 3,000. »

- Adopté.

Article 25 (Petite Nèthe canalisée)

« Art. 25. Septième et dernière annuité à payer à la province d'Anvers : fr. 50,000.

« Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 35,400.

« Charge extraordinaire : fr. 11,500.

« Total : fr. 73,900. »

Le gouvernement, d'accord avec la section centrale, a proposé de diviser cet article comme suit :

« Art. 29. Septième et dernière annuité à payer à la province d'Anvers, charge extraordinaire : fr. 50,000. »

« Art. 30 (nouveau). Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 11,500.

« Charge extraordinaire : fr. 23,900. »

- Cette proposition est adopté.

Article 26 (Moervaert)

« Art. 26. Entretien et travaux de dévasement.

« Charge ordinaire : fr. 1,849.

« Charge extraordinaire : fr. 52,000. »

Le gouvernement, d'accord avec la section centrale, a proposé la division suivante :

« Art. 31. Entretien ordinaire, charge ordinaire : fr. 1,849. »

« Art. 32. Travaux de dévasement sur toute l'étendue de ce cours d'eau (deuxième moitié), charge extraordinaire : fr. 52,000. »

M. Cools. - Messieurs, lorsque des réclamations renouvelées périodiquement devant vous depuis plusieurs années ne parviennent cependant pas à se faire accueillir par la chambre ; lorsqu'elles viennent échouer devant une force d'inertie que rien n'a pu vaincre jusqu'à présent, une seule pensée peut soutenir les membres qui s'en rendent les interprètes, c'est la persuasion intime qu'ils poursuivent le redressement d'une injustice ou, du moins, d'un acte de grande partialité. C'est le sentiment, messieurs, qui m'anime lorsque je viens encore une fois vous entretenir pour quelques instants du canal de Stekene.

Deux mots me suffiront, messieurs, pour vous rappeler l'état de la question. Sous ce rapport, ma tâche a déjà été allégée par ce que vous a dit dans la séance d'hier l'honorable M. de Decker.

Il nous a fait souvenir qu'il existait très anciennement une ligne continue de navigation entre Gand et la mer, passant par Hulst. Cette ligne, qui a été creusée au commencement du XVIème siècle par les états de Flandre, se composait des voies navigables connues sous le nom de Moervaert, Stekenevaert et Langelede.

Les révolutions sont survenues ; la Hollande a été séparée de la Belgique, et peu à peu cette ligne a changé de caractère. Les parties situées sur le territoire hollandais ou près des frontières se sont ensablées successivement, et il n'est plus resté qu'une ligne de navigation intérieure dont les deux extrémités sont, d'une part, la ville de Gand, et d'autre part, le village de Stekene.

Qui doit être envisagé comme le propriétaire de cette succession de cours d'eau ? Ce serait assez difficile à dire. Vous savez, messieurs, que les cours d'eau, construits par les anciens états des provinces, ont subi plusieurs transformations : réunis au domaine de l'Etat à l'époque de l'empire, rétrocédés en partie aux provinces sous le roi Guillaume, repris ensuite par le gouvernement belge ; il serait fort difficile de dire qui est aujourd'hui le propriétaire de la totalité de ces voies navigables ou de chacune de leurs parties. Mais eu qui est certain, c'est que la ligne que je viens de vous indiquer, celle qui aboutit d'un coté à la ville de Gand, de l'autre au village de Stekene, se trouve sur tout son parcours dans des conditions identiques. A une époque que je ne puis pas préciser, le gouvernement a cependant cru pouvoir tracer une séparation ; Cette ligne de navigation, sur une partie de son parcours, emprunte le cours de la Durme. Le gouvernement s'est dit : Ce sera là le point de division ; tout ce qui est situé en deçà de la Durme sera réparé, entretenu, parfaitement soigné sous tous les rapports par l'Etat, et ce qui est situé au-delà de la Durme sera abandonné à lui-même. C'est cette inégalité de traitement, que rien ne justifie, qui constitue la cause unique des réclamations que malheureusement la commune de Stekene doit faire entendre depuis si longtemps.

Cependant le gouvernement aetuel a reconnu que cette situation ne pouvait pas continuer à subsister : il a fait des offres assez brillantes, je le reconnais, à la commune de Stekene ; si les renseignements que j'ai pu recueillir sont exacts, il lui aurait offert des subsides qui représentaient à peu près toute la dépense à faire. Mais il y avait ici un obstacle insurmontable : le gouvernement offrait le subside à la commune de Stekene, qui aurait dû agir seule et accepter, pour la suite, toutes les conséquences de son intervention. Or, pourquoi la commune de Stekene plutôt que d'autres communes ?

Cette voie fluviale, allant de Gand jusqu'à l'extrémité du district de Saint-Nicolas, est située sur le territoire de Stekene, cela est vrai ; mais elle profite directement, quoique à des degrés inégaux, à un ensemble de communes qui sont en relations directes avec ce canal, et qui ont même fait construire une chaussée, pour pouvoir se servir du canal.

Il y avait donc un autre système à adopter ; c'était de faire en quelque sorte une association entre ces communes, pour le partage des dépenses à faire. Vous voyez comme l'affaire se complique ; adopter ce système aurait été préférable à la position qu'on a prise, et cependant on n'en aurait pas moins été rigoureux à l'excès pour cette partie du pays, car un pareil système d'association n'existe dans aucune autre. Voilà l'obstacle qui s'est opposé à ce que la commune de Stekene acceptât les offres que lui a faites le gouvernement.

Cependant cette année-ci la commune de Stekene a voulu faire preuve de bonne volonté ; elle a voulu entrer dans un système de conciliation ; quoiqu'elle ne soit pas tenue à cela plus que les autres communes, elle offre de contribuer pour le quart dans les dépenses que ferait l'Etat. La dépense pour l'Etat devient ainsi réellement insignifiante, eu égard au résultat à obtenir. Il ne s'agit en effet que d'une dépense de 25 à 30,000 francs, somme dont la commune de Stekene prendrait le quart à sa charge.

Vous voyez, comme je le disais, que la commune fait preuve de bonne volonté. Je veux me placer sur le même terrain que la commune de Stekene, je ne veux pas examiner la question de droit, je ne veux pas prétendre que l'Etat seul devrait se charger de toute la dépense ; j'aurais eu cependant des arguments puissants à faire valoir ; je pourrais dire que la commune n'a jamais fait un seul acte qui l'obligeât en quoi que ce soit, tandis que l'Etat a continué à percevoir un droit de pêche, ce qui constitue bien un acte de propriétaire.

Il y a quelques années, le gouvernement a même reconnu implicitement qu'il devait faire la dépense entière à la décharge de tous autres. Vous vous rappelez qu'à la veille des événements de 1848, on nous a présenté un ensemble de travaux à faire dans tout le pays ; non seulement le gouvernement s'engageait à entretenir en bon état le canal de Stekene, mais il voulait même le prolonger jusqu'à Saint-Nicolas. Voici comment était conçu un des articles du projet de loi :

« Construction de canaux agricoles dans les Flandres et spécialement du canal de Stekene à Saint-Nicolas, etc., fr. 1,400,000. »

Si l'on veut faire un canal de Stekene à Saint-Nicolas, si l'on veut que ce canal puisse servir à quelque chose, il faut de toute nécessité qu'on commence par mettre le canal de Stekene en bon état de navigation. Je pourrais dire que le gouvernement s'est ainsi condamné lui-même ; mais comme je l'ai dit il n'y a qu'un instant, je ne veux pas traiter la question de droit, mais seulement la question d'équité et de bonne justice distributive.

Quand nous songeons à créer partout des travaux nouveaux, n'y a-t-il pas une chose qui est plus urgente encore que de faire du neuf ? C'est de maintenir en bon état les travaux qui existent déjà ; quand on distribue des millions dans toutes les parties du pays, à l'exception du seul district de Saint-Nicolas qui se trouve ainsi déshérité, comme on vient de le faire il y a quelques mois à peine, je demande si ce ne serait pas faire preuve de parcimonie extrême, de partialité réelle, tranchons le mot, que de marchander une malheureuse somme de quelques milliers de francs pour mettre en bon état de navigation un canal qui existe depuis des siècles ?

Les travaux à faire au canal dont nous sollicitons le dévasement n'engageraient guère l'Etat, car ce n'est pas le premier jalon d'un ensemble de travaux qui peuvent nous mener loin, c'est la dernière section d'une voie navigable eu bon état jusqu'au point dont je vous parle. Les fonds ont été votés pour mettre en bon état le Moervaert ; il s'agit uniquement d'achever jusqu'à Stekene ce qui est si bien commencé.

Pour le moment je ne ferai aucune proposition, je ferai seulement un appel au gouvernement, je le prierai de prendre un engagement conforme à l'équité, à la bonne justice distributive.

Le canal de Stekene n'est que la continuation du Moervaert, c'est le Moervaert portant un autre nom ; nous avons des fonds au budget pour achever les travaux à faire au Moervaert. Il suffirait de reconnaître que ce canal fait partie du Moervaert, pour que je me déclare satisfait.

Il est vrai qu'il y aurait un léger crédit à demander encore au budget (page 329) de 1853, mais le gouvernement pourrait toujours agir et la commune de Stekene et les villages environnants se regarderaient comme complètement satisfaits.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Je dois reconnaître qu'en ce qui concerne la proposition que l'honorable M. Cools vient de développer, la situation s'est un peu modifiée depuis l'année dernière.

L'année dernière, lorsque l'honorable membre a entretenu la chambre du canal de Stekene, j'ai fait observer que le gouvernement, en présence de l'inertie des communes, et de leur refus obstiné de se charger de l'exécution du travail, ou même de participer à la dépense, ne pouvait prendre aucun engagement.

Tout récemment, la commune de Stekene a adressé à la chambre une pétition dans laquelle elle prend l'engagement de contribuer pour une part quelconque dans l'exécution de ce canal, qui a, il est vrai, une utilité, mais une utilité restreinte aux localités qu'il traverse.

Le gouvernement, messieurs, ne pouvait admettre en principe qu'il était tenu de se charger de d'exécution de cette voie navigable. Ce principe, s'il était posé comme précédent, pourrait entraîner des dangers graves et des dépenses très considérables.

En 1847, le gouvernement s'est adressé à la province de la Flandre orientale, il a demandé si les communes intéressées surtout à l'exécution de ce canal voulaient contribuer pour une somme quelconque à son exécution. Les communes alors ont répondu qu'elles étaient dans l'impossibilité de rien faire ; et cependant en 1847, le gouvernement offrait un subside d'environ 10,000 francs pour l'exécution d'un ouvrage qui, je crois, n'entraînera pas une dépense supérieure à 25,000 ou 30,000 francs.

En présence de la proposition de la commune de Stekene, je prends l'engagement d'examiner avec bienveillance la proposition des honorantes députés de Saint-Nicolas et j'espère que, d'ici au budget prochain, je pourrai comprendre une somme pour satisfaire au désir qui est renouvelé par eux tous les ans au sein de la chambre.

M. de T'Serclaes. - En présence de ce que vient de dire M. le ministre des travaux publics, j'espère que nous aurons très prochainement une solution de cette question dont plusieurs fois nous vous avons entretenus.

J'appuie de tout mon pouvoir ce que vient de, dire mon honorable collègue de Saint-Nicolas. Je ferai remarquer, au surplus, à propos de la déclaration de M. le ministre des travaux publics, que le canal de Stekene a non seulement une utilité locale, mais qu'il résulte des renseignements que j'ai eu l'honneur de communiquer à la chambre, entre autres dans la séance du 25 août dernier, à propos du grand projet de loi sur les travaux publics, que cette voie fluviale présente un intérêt réel pour d'autres localités importantes. Le canal de Stekene sert assurément beaucoup au débouché des produits agricoles, mais encore il sert de communication entre tout un canton actif, industrieux et peuplé, avec Gand et avec les autres provinces, comme le Hainaut, pour le transport de la houille, etc.

- L'article est adopté.

Article 27 (Canal de Deynze à Schipdonck)

« Art. 27. Entretien : fr. 3,500. »

- Adopté.

Article 28 (Canal des eaux du sud de Bruges)

« Art. 28. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 9,000. »

-Adopté.

Article 29 (Canal latéral à la Meuse, de Liège à Maestricht »

« Art. 29. Travaux d'entretien : fr. 15,000. »

- Adopté.

Article 30 (Plantations)

« Art. 30. Plantations nouvelles le long des voies navigables : fr. 25,000. »

- Adopté.

Article 31 (Frais d'étude)

« Art. 31. Frais d'étude et de levée de plans : fr. 7,000. »

-Adopté.

Article 32 (Bacs et bateaux de passage)

« Art. 32. Entretien des bacs et bateaux de passage et de leurs dépendances : fr. 20,000 »

- Adopté.

Article 33 (Polders)

« Art. 33. Subside accordé à la direction du polder de Lillo. Charge extraordinaire : fr. 2,000. »

- Adopté.

Section IV. Ports et côtes
Article 34

« Art. 34. Entretien et travaux d'amélioration du port d'Ostende.

« Charge ordinaire : fr. 55,532 50.

« Charge extraordinaire : fr. 93,500. »

Sur la demande de M. le ministre, la section centrale propose d'augmenter le chiffre des charges extraordinaires de 20,000 francs.

- L'article, ainsi modifié, est adopté.

Article 35

« Art. 35. Entretien et travaux d'amélioration du port de Nieuport : fr. 18,000. »

M. Cools. - Messieurs, avant de passer à un autre article, je dois faire valoir une réclamation se rapportant à ce que nous venons de voter.

Je vois un chiffre porté pour les polders. Cependant il y a dans le libellé une certaine restriction, et il semble en résulter que la somme demandée, s'applique exclusivement au polder de Lillo. Mais je crois que l'article doit être entendu dans ce sens que M. le ministre n'a pas les mains tellement liées que s'il reconnaît que d'autres polders se trouvent dans une position parfaitement identique, il ne puisse pas disposer d'une partie du crédit pour ces autres polders.

S'il n'en était pas ainsi, je crois que les articles précédents dans lesquels des crédits sont accordés d'une manière générale lui offriraient la faculté de satisfaire à la demande et à une réclamation que je vais lui signaler.

Le polder de Lillo a énormément souffert après la révolution ; C'est cette circonstance tout exceptionnelle qui fait que presque tous les ans nous accordons des subsides en sa faveur.

Mais d'autres polders ont également souffert. Le polder de Lillo a beaucoup obtenu ; d'autres polders, également situés sur la rive droite de l'Escaut, ont aussi obtenu des subsides ; mais il y a des polders sur la rive gauche où il y a des travaux parfaitement identiques à faire. J'indiquerai notamment le polder de Borgerweert. Il existe là une écluse qui est sur le point de tomber en ruine, par suite du long séjour qu'y ont fait les eaux après la révolution et qu'il est urgent de réparer.

Je ne veux pas faire de proposition ; mais c'est un objet que je recommande à la sollicitude de M. le ministre des travaux publics.

Je crois, s'il était nécessaire, que le gouvernement pourrait trouver sur un article du budget les 3 ou 4,000 fr. nécessaires pour subvenir à cette demande.

- L'article est adopté.

Article 36

« Art. 36. Entretien et travaux d'amélioration de la côte de Blankenberghe.

« Charge ordinaire : fr. 78,000.

« Charge extraordinaire : fr. 20,000. »

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Il faut ajouter à cet article une charge extraordinaire de 25,000 fr., qui serait libellée ainsi : «Réparation des dégâts causés par la marée du 21 au 22 novembre dernier.» Après l'impression du rapport j'avais eu l'honneur d'adresser à M. le président de la section centrale la justificatioir de cette demande de 25,000 francs. Des dégâts considérables ont été causés aux dunes de Blankenberghe par la marée du mois dernier. Il est indispensable, il est urgent même de faire des travaux de réparation qui comporteront une dépense de 25,000 fr.

M. le président. - Le chiffre des charges extraordinaires serait ainsi porté à 45,000 fr.

- L'article ainsi modifié est adopté.

Article 37

« Art. 37. Entretien des phares et fanaux.

« Charge ordinaire : fr. 900.

« Charge extraordinaire : fr. 1,000 »

- Adopté.

Section V. Personnel des ponts et chaussées.
Article 38

« Art. 38. Traitement des ingénieurs et conducteurs des ponts et chaussées, frais de bureau et de déplacement.

« Charge ordinaire : fr. 498,710.

« Charge extraordinaire : fr. 50,499 98. »

M. David. - Messieurs, dans le but de mettre les provinces à même de destiner des sommes aussi fortes que possible à l'amélioration de la voirie vicinale, à l'occasion de la discussion de plusieurs budgets déjà, j'ai demandé à M. le ministre des travaux publics de vouloir examiner la question de savoir si certains conducteurs des ponts et chaussées ne pourraient pas être chargés de l’exécution et de la surveillance des chemins vicinaux. Par ce moyen, les traitements des commissaires-voyers d’arrondissement et de cantons pourraient être supprimés et servir à la construction des voies navigables, car je prévois, dans ma proposition, que les traitements des conducteurs des ponts et chaussées ne seraient pas augmentés.

D'un autre côté, messieurs, la mise en pratique de mon système ne serait pas difficile dans les provinces où la loi du 10 avril 1841 n'est pas encore en vigueur. Je pense que M. le ministre déciderait facilement les conseils provinciaux à nommer plutôt des conducteurs des ponts et chaussées que des commissaires-voyers, comme surveillants des routes vicinales. Pour les provinces où déjà il existe des commissaires-voyers d'arrondissement et de canton, je voudrais qu'ils ne fussent remplacés qu'à mesure de leur extinction, car il n'entre pas dans mes intentions de leur ravir leur emploi dès aujourd'hui.

Je rappelle cette demande à M. le ministre des travaux publics pour qu'il ait l'obligeance de la faire examiner.

(page 330) M. Dumortier - Je regarde cet article comme un des plus importants, comme le plus important peut-être de tous nos budgets. Il s'agit du traitement des ingénieurs et conducteurs des ponts et chaussées, de leurs frais de bureau, etc., crédit qui s'élève à plus d'un demi-million. Vous voyez déjà par ce chiffre, que nous avons à rétribuer une armée d'ingénieurs des ponts et chaussées. Eh bien, au point de vue des finances du pays, je considère cet article comme étant tout ce qu'il y a de plus déplorable dans nos budgets ; car c'est cette armée d'ingénieurs que l'on a créée et que l'on augmente chaque jour, qui entraîne le pays dans des dépenses et dans des travaux publics perpétuels, ce qui nous mettra un jour peut-être, si nous n'y prenons pas garde, dans l'impossibilité de couvrir les dépenses par les recettes publiques non impopulaires.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Il faut alors renoncer aux travaux publics.

M. Dumortier. - Il faut, me dit M. le ministre, renoncer aux travaux publics ; mais je lui demanderai, à lui qui revient d'Angleterre, s'il y a, dans ce pays, une armée d'ingénieurs rétribuée par l'Etat ? Et cependant il n'y manque certes pas de travaux publics. Il est évident que vous auriez des travaux publics sans une armée d'ingénieurs aussi bien qu'avec une telle armée ; mais il y aurait cette différence, c'est que, n'ayant pas une armée d'hommes payés par l'Etat, d'hommes jouissant de beaucoup de loisirs, d'hommes ayant l'ambition, très noble je le reconnais, d'attacher leur nom à quelque construction, vous vous arrêteriez enfin sur cette route qui vous mène de déficits en déficits.

En 1830, sous le Congrès, le budget de la Belgique ne s'élevait qu'à 57 millions ; il est aujourd'hui de 114 millions ; c'est-à-dire qu'il est doublé, dans l'intervalle de vingt ans.

Je sais que, dans ce budget, il faut faire entrer les dépenses que nous avons dû faire pour constituer notre nationalité, les dettes qui sont résultées du chef du traité conclu avec le royaume des Pays-Bas. Mais, pour quiconque a étudié les budgets, il est incontestable que les deux tiers de l'augmentation proviennent, en grande partie, de toutes les dépenses que nous faisons chaque année, notamment pour les travaux publics.

C'est au moyen de ce corps, de cette armée d'ingénieurs que nous sommes arrivés à faire naître en Belgique des besoins incessants, une véritable démangeaison de travaux publics. On trouve toujours le moyen d'exciter les populations à réclamer tel ou tel travail qui peut leur être utile ; et eussiez-vous en Belgique quatre fois plus de travaux publics, on trouverait encore moyen d'engager les localités à en demander de nouveaux. Il faut donc que l'on mette un terme à cette exubérance de personnes qui n'ont autre chose à faire toute l'année que d'endetter l'Etat de plus en plus.

Je respecte le talent de nos ingénieurs, je leur rends complètement hommage sous ce rapport ; j'admire les travaux qu'ils ont faits, tant dans le pays qu'à l'étranger, où ils ont honoré le nom belge ; mais je dis que nous ne devons pas continuer à absorber un mets qui ne peut pas aller à notre estomac, et qui finira certainement par nous donner une indigestion si nous n'y renonçons bientôt.

Il serait très sage que le gouvernement songeât à mettre un terme à la création d'ingénieurs des ponts et chaussées. Je réclame une bonne réduction sur le crédit qui leur est destiné, en vue surtout de notre situation financière à venir ; car le maintien du personnel actuel des ponts et chaussées amène chaque année la création de nouveaux travaux publics, qui entraînent naturellement de nouvelles dépenses.

Dernièrement encore nous avons voté une loi décrétant des travaux publics pour environ 130 millions, et l'on a eu soin de dire que ce n'était pas encore le dernier mot, qu'il y aura encore bien des travaux publics à exécuter ultérieurement. Cela va de soi : avec votre armée d'ingénieurs, je le répète, vous aurez constamment de nouvelles propositions de travaux publics ; mais avec quoi payerez-vous les dépenses qu'ils occasionneront ? Car c'est là qu'il faut toujours en venir. Rien n'est plus facile que de créer des dépenses sur le papier ; rien de plus facile que de décréter, par une loi, l'exécution de travaux publics pour 130 millions de francs ; mais quand arrive le quart d'heure du payement, on est forcé de recourir à de nouveaux impôts, à des impôts qui presque toujours sont odieux aux populations.

Eh bien, messieurs, après tout ce que la Belgique a fait depuis 20 ans, il serait sage qu'elle songeât à se reposer un peu ; il serait sage de veiller un peu plus qu'on ne le fait à sa situation financière, La question la plus grave qui se rattache à l'avenir d'un pays est, sans contredît, sa situation financière ; cette question domine toutes les autres ; mais malheureusement on ne s'en occupe guère en Belgique. Quand on parle ici dans l’intérêt du trésor, il semble qu'on n'ait d'autre but que de créer des embarras au gouvernement, taudis qu'on ne défend que ia nationalité elle-même ; car il n'y a pas de nationalité sans un système financier sage, modéré, et en harmonie non seulement avec les besoins du pays, mais encore avec ses ressources.

J'engage donc vivement M. le ministre des travaux publics à mettre un terme à cette création exubérante d'ingénieurs, qui n'aura, je le répète, d'autre résultat que de nous mener un jour à un budget tel que le pays ne pourra plus le supporter. Gare alors à votre nationalité ! elle sera gravement compromise, parce que vous n'aurez pas vu que la question des impôts est celle sur laquelle on doit le plus porter son attention quand on a l'honneur d'appartenir à la représentation nationale.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Je me bornerai à répondre quelques mots à l'honorable M. Dumortier. Il semblerait, en vérité, à entendre l'honorable membre, que la Belgique s'est ruinée en travaux publics depuis trente ans ; or, quelle est la vérité ? C'est que depuis 30 ans on a dépensé en travaux publics, en Belgique, pour environ 250 millions.

Ces 250 millions représentent en intérêt des capitaux, en frais de perception, en frais de personnel, en frais d'exploitation, représentent environ par an 22 millions, et les travaux exécutés au moyen de ces 250 millions produisent annuellement près de 20 millions. C'est-à-dire que pour 2 millions, quelque chose comme 50 centimes par habitant nous avons dolé la Belgique de 250 millions de travaux publics.

En ce qui concerne le personnel des ponts et chaussées, l'honorable membre doit savoir que, malgré l'extension qu'ont reçue les travaux publics dans ces derniers temps, malgré les travaux très utiles qui ont été exécutés, le personnel des ponts et chaussées a subi des réductions très notables. Les indemnités ont été réduites de près de moitié, le personnel lui-même a subi des réductions considérables, et aujourd'hui, si l'on veut comparer ce qu'est chez nous le personnel des ponts et chaussées à ce qu'il est en France, à ce qu'il est en Hollande, on verra qu'il est plus faible en Belgique que dans l'un et l'autre de ces deux pays.

Quant à l'intervention du gouvernement dans les travaux publics, est-ce que l'honorable M. Dumortier suppose qu'on pourra jamais faire en Belgique des travaux publics uniquement par la puissance du crédit privé, de l'industrie libre ? L'honorable membre doit se détromper : il se passera encore beaucoup de temps, avant que le gouvernement puisse s'abstenir complètement d'intervenir dans les travaux publics. Je comprends que les choses se passent ainsi en Angleterre : l'Angleterre est le pays des grandes fortunes, le pays de l'association.

Du reste je m'étonne que l'honorable membre revienne si souvent sur la critique de l'intervention de l'Etat, principe qui est appliqué partout dans une mesure plus ou moins étendue.

Qu'est-ce, en définitive, que des travaux publics ? Ils comprennent d'abord l’expropriation des terrains nécessaires, et je demanderai si, à cet égard, l'industrie libre ne se trouve pas dans la même position que l'Etat envers les intéressés. Est-ce que les propriétaires ne sont pas aussi à même de soutenir leurs prétentions contre les compagnies que contre l'Etat ? Quant à la probité des agents, est-ce que l'honorable membre s'imagine que les ingénieurs de l'Etat n'ont pas autant de probité que les ingénieurs civils ? J'ai ici une note de -mécomptes que les compagnies anglaises ont éprouvés lorsqu'elles ont confié l'exécution de leurs travaux aux ingénieurs civils. Ainsi, le chemin de fer de Londres à Birmingham était évalué à 62,500,000 francs ; il a coûté 148,846,000 francs. Le railway de Londres à Bristol était évalué à 62,500,000 francs ; il a coûté plus de 166,000,000 de francs.

Je pourrais, messieurs, multiplier ces citations ; j'ai une note détaillée de tous les mécomptes auxquels les compagnies anglaises ont été exposées quand elles ont confié l'exécution des travaux à des ingénieurs civils ; il en résulte qu'il y a injustice à rendre les ingénieurs de l'Etat seuls responsables des déceptions dans lesquelles l'imprévu joue toujours le principal rôle.

M. Dumortier. - Je commencerai par rencontrer le dernier argument de M. le ministre des travaux publics, celui qui concerne les mécomptes auxquels les ingénieurs civils auraient donné lieu. Eh bien, si M. le ministre connail les antécédents de son ministère, il doit convenir que nulle part il n'y a eu des mécomptes semblables à ceux que la chambre a éprouves par le fait des ingénieurs de l'Etat. En 1834, lorsqu'il s'agissait de décréter le chemin de fer, MM. Simons et Deridder, dans leur mémoire accompagné de plans.de devis, d'estimations détaillées, sont venus dire que le chemin de fer, depuis la station de Liège jusqu'à la Prusse, devait coûter 2,248,000 fr., et vous savez, messieurs, qu'il a coûté au-delà de 30 millions.

Si donc il y a eu des mécomptes, jamais il n'en a existé d'aussi considérables que ceux qu'a éprouvés l'Etat.

De même lors de la construction du canal latéral à la Meuse, il y a eu encore des mécomptes extraordinaires. Il serait impossible de citer une seule entreprise proposée au parlement où il n'y ait pas eu un mécompte de 25, 50, 50 p. c, 100 p. c, 1,000 p. c. (Interruption.) Mais, messieurs, quand le chemin de fer de la Vesdre est annoncé comme devant coûter 2,248,000 francs et qu'il coûte 30 millions, faites le calcul : vous verrez que c'est un mécompte non pas de 1.000 p. c. mais de 1,500 p. c. Vous voyez donc bien qu'il n'y a aucune garantie de ce côté.

Vous dites que l'esprit d'association n'existe pas en Belgique ; je le crois vraiment bien : comment voulez-vous qu'il existe, qu il puisse naître, lorsque l'Etat se fait exécuteur de tous les travaux ? Chaque fois qu'un travail est demande, l'Eyat dit : Pas du tout, c'est moi qui le ferai. L'esprit d'association, l'esprit d'entreprise ne se crée dans un Etat que peu à peu, par l'appât des bénéfices résultant des travaux exécutés. Depuis quand donc l'esprit d'association existe-t-il en Angleterre ? Il n'y existe que depuis 1750. C'est en 1750 que le canal de Bridgewater a été entrepris. Mais eu Belgique, il ne se développera jamais ; il ne peut pas s'y développer à cause du système du gouvernement qui veut tout faire par lui-même. Chez nous le gouvernement veut réaliser la fable de la grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf.

Mais, dit M. le ministre, on n'a dépensé que 250 millions depuis la révolution.

Ce n'est pas d'aujourd'hui, messieurs, que je démontre à la chambre (page 331) que M. le ministre a une arithmétique à lui, une arithmétique nouvelle comme l'a dit un jour l'honorable M. Malou. Il n'y a que 250 millions !

Mais le chemin de fer a coûté 225 millions ; les routes ont coûté 65 millions, les canaux que l'on a rachetés ont également coûté une somme considérable ; enfin, l'on a fait des dépenses sans nombre. Si vous examinez le budget avec attention, vous verrez que c'est la charge des travaux publics qui pèse le plus lourdement sur le pays.

M. le ministre dit que cette charge n'est que de 22 millions par an, et que nous recevons 20 millions. C'est encore ici un artifice de calcul qu'il est impossible de saisir au premier abord : mais la cour des comptes a démontré que la perte du chemin de fer seul est de 4 millions et demi. Faut-il que j'ajoute à cela ce que peuvent coûter au trésor les routes pavées, les dépenses énormes que nous subissons du chef des canaux ?

Nous avons acheté des canaux qui étaient une opération très lucrative quand nous les prenions ; mais il semble qu'on ait eu peur que la situation financière ne devînt plus favorable, et on n'a rien eu de plus empressé que de sacrifier les beaux revenus de ces canaux. C'est ce qu'on a fait surtout depuis l'inauguration de la politique nouvelle. On a dépassé, sous ce rapport, toute espèce de bornes. On a réduit les péages sur tous les canaux : sur le canal de Charleroy à Bruxelles, sur le canal de la Sambre, sur le canal de Pommeroeul à Antoing.

Ensuite, messieurs, on a eu le talent de reprendre des canaux qui ne rapportent rien, par exemple le canal du Limbourg, qui était très onéreux à la province de Liège, qui ne rapporte pas ses frais d'entretien.

Ainsi, messieurs, pertle sur le chemin de fer, perte sur les routes pavées, perte sur les canaux, perte sur toules les entreprises, voilà où nous marchons avec notre système de travaux publics.

Eh bien, pour mon compte, je vois, au-dessus de toutes les questions, la question de la nationalité, et je déclare que je ne puis voir marcher le pays dans ce système sans m'effrayer très vivement de l'avenir qu'il nous prépare.

Je ne sais vraiment où l'on veut aller en accumulant ainsi dette sur dette, charge sur charge.

Je sais bien qu'il est très honorable, quand on a été ministre pendant un certain nombre d'années, de pouvoir se dire : « C'est moi qui ai créé tel travail, tel canal, tel chemin de fer. » Tout cela est fort bien ; un ministre peut se glorifier de cela ; mais qui paye les frais de cette gloire ? C'est le contribuable ; c'est le pays, qu'on perd trop de vue, c'est lui qui doit faire face à toutes ces dépenses.

Oh ! si vos travaux publics rapportaient leurs intérêts, il n'y aurait qu'une dette simulée dans vos budgets ; mais il n'en est pas ainsi : vous êtes constamment constitués en perte ; et vous arrivez à devoir payer la différence au moyen d'impôts nouveaux prélevés sur le peuple. Pour mon compte, je ne veux pas de ces impôts ; je veux que la Belgique, après avoir produit pendant 20 ans une série énorme de travaux publics s'arrête enfin dans cette voie, en présence surtout des événements majeurs qui peuvent survenir en Europe. Si l'on continuait ce système de dépenses excessives, on désaffectionnerait les habitants du pays puisqu'on ne peut y faire face qu'au moyen d'impôts nouveaux qui finiraient par devenir odieux.

Nous avons l'expérience du gouvernement hollandais. Vous vous rappelez que l'une des causes les plus efficaces du desaffectionnement des Belges vis-à-vis du gouvernement hollandais, c'étaient les lourds impôls qui pesaient sur eux. Il est d'une bonne politique d'éviter, par tous les moyens possibles, ces lourds impôts, et l'unique remède, c'est d'arrêter le corps des ponts et chaussées dans les dépenses ; car, encore une fois, ce sont les dépenses du corps des ponts et chaussées qui constituent le chancre de nos finances, parce que ces dépenses aggravent nécessairement le chiffre de notre dette, ne donnent pas une rémunération suffisante, et nécessitent ainsi de nouveaux impôts pour combler la différence.

Je déclare que je protesterai toujours contre un pareil système.

Messieurs, je n'ai pas voulu laisser passer cet article, sans élever la voix en faveur du trésor public, dont je regarde les intérêts comme constituant une des principales nécessités d'un gouvernement constitutionnel et de notre nationalité.

- L'article 38 est adopté.

Article 39

« Art. 39. Traitement et indemnités du personnel subalterne des ponts et chaussées et des gardes-ponts à bascule, pontonniers, éclusiers, etc.

« Charge ordinaire : fr. 353,393 14

« Charge extraordinaire : fr. 11,351 34 ».

M. le président. - Le chiffre des charges extraordinaires doit être augmenté d'une somme de 5,700 fr., transférée de l'article 12 (devenu l'article 13).

- L'article 39, ainsi modifié, est adopté.

Article 40

« Art. 40. Frais de jurys d'examen et voyages des élèves de l'école du génie civil : fr. 12,000. »

- Adopté.

Chapitre III. Mines

Articles 41 à 47

« Art. 41. Personnel du conseil des mines. Traitement : fr. 41,700. »

- Adopté.


« Art. 42. Personnel du conseil des mines. Frais de route : fr. 600. »

- Adopté.


« Art. 43. Personnel du conseil des mines. Matériel : fr. 2,000. »

- Adopté.


« Art. 44. Subsides aux caisses de prévoyance et récompenses aux personnes qui se distinguent par des actes de dévouement : fr. 45,000. »

- Adopté.


« Art. 45. Impressions, achats de livres, de cartes et d'instruments, publication de documents statistiques, encouragements et subventions, essais et expériences : fr. 7,000. »

- Adopté.


« Art. 46. Traitements et indemnités du personnel du corps des mines.

« Charge ordinaire : fr. 131,333 67.

« Charge extraordinaire : fr. 5,633 53. »

- Adopté.


« Art. 47. Jury d'examen et voyage des élèves de l'école des mines : fr. 6,000. »

- Adopté.

Articles 48 et 49 (Commission des procédés nouveaux)

« Art. 48. Frais de route et de séjour : fr. 600. »

- Adopté.


« Art. 49. Matériel, achat de réactifs, d'appareils, etc. ; fr. 1,400. »

- Adopté.

Articles 50 et 51 (Commission des Annales des Travaux publics)

« Art. 50 Frais de route et de séjour ; fr. 1,100. »

- Adopté.


« Art. 51. Publication du recueil, frais de bureau, etc. : fr. 5,000. »

M. le président. - Nous arrivons au chapitre IV. (Chemin de ferà

Chapitre IV. Chemin de fer - Postes - Télégraphes

Première section. Chemin de fer
Article 52

« Art. 52. Traitements, indemnités.

« Charge ordinaire : fr. 1,042,626.

« Charge extraordinaire : fr. 72,613. »

M. Rodenbach. - Messieurs, il y a quelques jours, un individu s'est présenté chez moi, pour m'engager à demander pour lui à M. le ministre des travaux publics une place... (Interruption.) Laissez-moi achever... une place de changeur des monnaies à la station du chemin de fer à Bruxelles ; il s'offrait, en retour de cette place, à payer annuellement au gouvernement 3 à 400 francs ; il soutenait que si on établissait une place de ce genre, à de telles conditions, dans toules les stations, cela rapporterait un certain revenu au trésor.

Je demande à M. le ministre des travaux publics ce qu'il y a de fondé dans cette assertion. Je le répète, le fait est qu'un individu que je ne connais même pas, est venu chez moi, qu'il m'a dit avoir adressé plusieurs pétitions à M. le ministre des travaux publics ; il paraît que ce dernier n'a pas cru devoir lui répondre. Du reste, j'ignore complètement la moralité de cet individu ; mais il voulait fournir un cautionnement.

Il me semble que si de ce chef on pouvait réaliser un certain revenu pour le trésor public, par le temps qui court, ce serait une ressource qu'on ne devrait pas dédaigner. Ainsi je ne viens pas, comme on paraissait le croire au début de mon discours, pétitionner une place pour un individu ; il s'agit, au contraire de faire entrer de l'argent dans les caisses du trésor public.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Messieurs, dans aucun cas, le gouvernement ne pourrait prendre l'engagement d'établir dans chacune des stations un bureau de change. Il y a peut-être quelque utilité à établir un semblable bureau aux stations des frontières.

Du reste, en Allemagne on a pris une mesure qu'il conviendra peut-être d'introduire chez nous ; ce serait de faire faire le change par les employés, aux conditions les meilleures pour le commerce et l'industrie. On afficherait dans la station les conditions auxquelles le change devrait avoir lieu ; le tableau serait changé tous les mois. (Marques d'adhésion.)

M. de Theux. - J'ai demandé la parole pour adresser une question à M. le ministre des travaux publics. L'année dernière, je me suis plaint de l'inexécution des clauses et conditions du cahier des charges du chemin de fer du Limbourg. La compagnie n'a fait exécuter aucuns travaux aux stations, cela a causé un grand etonnement dans la province. M. le ministre avait promis de faire décider cette question, qui élyit alors soumise au conseil du contentieux. Aujourd'hui, nous n'avons pas encore appris qu'une décision ait été prise. Il serait temps de faire sortir le Limbourg de cette situation exceptionnelle, et que le gouvernement fasse exécuter le cahier des charges suivant son droit.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Il s'était élevé une contestation avec la compagnie sur l'interprétation d'une clause du cahier des charges ; cette difficulté n'est pas encore aplanie, j'espère que prochainement une décision favorable pourra intervenir. Il existe encore des difficultés qui pourront, j'espère, être levées prochainement.

(page 332) - M. David. Messieurs, dans la discussion du tarif des voyageurs j'avais demandé que les waggons fussent fermés par des rideaux ; mon amendement allait être adopté, et ce n'est que sur la promesse de M. le ministre de faire droit à ma demande que je l'ai retiré. Cependant rien n'a encore été fait, nous sommes dans la mauvaise saison et les voyageurs des voitures de troisième classe sont encore privés d'un abri indispensable en hiver surtout ; c'est cette classe de voyageurs qui coûte le moins à transporter et en même temps celle qui paye et rapporte le plus ; il y aurait équité et humanité à fermer convenablement les waggons au moyen de rideaux pour préserver les voyageurs des intempéries de la saison.

Maintenant je signalerai un objet d'une certaine importance pour le trésor public à M. le ministre des travaux publics, du moins dans les localités que je connais. Dans la vallée de la Vesdre il y a une quantité de terrains, reste des emprises, invendus. Ces terrains sont très recherchés, je ne sais pourquoi on a attendu aussi longtemps pour les exposer en vente ; il y a même parmi les propriétés appartenant de ce chef à l'Etat une usine avec cours d'eau qui se vendrait très bien dans une vallée aussi industrielle que celle de la Vesdre.

M. Allard. - Il paraît qu'on ouvre une discussion générale sur l'article relatif au chemin de fer ; je saisirai cette occasion pour adresser quelques observations à M. le ministre des travaux publics. Il y a nécessité de construire quelques voies d'évitement dans les petites stations, afin de faciliter le déchargement des waggons. Ce serait une dépense très minime à faire. J'engagerai M. le ministre à examiner les demandes qui lui ont été adressées à cet égard par un grand nombre de communes des environs de Mechin. J'appellerai aussi son attention sur le peu de temps qu'on donne pour le déchargement des waggons ; si cela continue les habitants de la campagne qui emploient le chemin de fer pour leurs approvisionnements devront avoir recours à d'autres moyens de transport.

On ne donne que six heures pour le déchargement d'un waggon de charbon, et le temps court du moment de l'arrivée.

Je connais des individus qui habitent une commune distante de trois lieues du chemin de fer et qui ont dû renoncer à s'en servir pour le transport de leurs approvisionnements. On leur envoyait un exprès pour leur annoncer l'arrivée d'un waggon à leur adresse ; ils se mettaient en route aussitôt, et quand ils arrivaient, les 6 heures étaient expirées, et on les mettait à l'amende de 5 francs par waggon. J'engage M. le ministre à faire cesser cet abus.

Je dois en outre signaler à M. le ministre les vols qui se commettent sur les vins qu'on nous envoie ; j'ai pu constater que les vins arrivent à Tournay avec 25 ou 30 litres de déficit. Ces vols se commettent en France, j'en ai la certitude ; je crois devoir les signaler à M. le ministre des travaux publics.

- Le chitfre de l'article 52 est adopté.

Article 53

« Art. 53. Primes des fonctionnaires et employés des diverses branches de service : fr. 140,000. »

- Adopté.

M. Dumortier. - Nous voici dans un système de primes pour les fonctionnaires et employés des diverses branches de service pour lesquelles on demande 140,000 fr.

Remarquez qu'il ne s'agit pas de primes destinées à provoquer l'économie du coke ; celles-ci sont portées à un autre article, à l'article 63, littéra B, de la section centrale, pour 30,000 fr.

On a réalisé de grandes économies par ce moyen et cependant la régularité des convois n'en a pas souffert, quoique ce ne soit pas par la régularité des convois que le chemin de fer se distingue. Il s'agit ici de primes pour des fonctionnaires et employés des diverses branches de service.

Si le gouvernement, pour stimuler le zèle des employés du chemin de fer, faisait comme les compagnies particulières qui assurent une part des bénéfices en primes aux employés de l'administration, je ne ferais qu'applaudir à ce système. Ainsi je désirerais que le dixième de tout le bénéfice produit par le chemin de fer, déduction faite des charges que le budget fait peser sur l'entreprise, fût alloué aux employés, sauf à être réparti par M. le ministre. Si nous avions depuis longtemps admis ce système, le chemin de fer couvrirait aujourd'hui ses dépenses, les employés auraient été les premiers intéressés à obtenir ce résultat.

Il serait à désirer qu'on fît en Belgique ce qu'on fait dans toutes les entreprises particulières, surtout qu'on accordât une part dans les bénéfices à ceux qui ont le plus gros mot à dire pour assurer la régularité du service et la prospérité de l'entreprise ; il serait très utile de les allécher par une part dans les bénéfices, vous obtiendriez des produits plus considérables.

Le côté fâcheux de notre administration, c'est que personne n'a intérêt à faire produire, comme dans les administrations particulières ; là c'est l'intérêt privé, ce grand aiguillon qui amène de bons résultats, de bons produits.

Je suggérerai donc à la chambre l'idée d'une proposition que j'abandonne, du reste, à son appréciation ; elle serait ainsi conçue :

« Le dixième des bénéfices produits par l'exploitation des chemins de fer, après prélèvement des dépenses de toute nature portées aux budgets de l'Etat, sera acquis aux employés de cette administration. Un arrêté royal en déterminera la répartition. »

- Un membre. - Nous sommes en perte !

M. Dumortier. - Je le sais bien ; mais c'est précisément pour sortir de cette situation que je donne l'idée de cette proposition ; la disposition que je viens d'indiquer aurait évidemment pour effet de stimuler le zèle des employés, et, par suite, d'accroître les recettes du chemin de fer. (Interruption.) Je sais que cela dépend souvent des tarifs ; mais croyez-le bien, quand les employés du chemin de fer qui, en définitive, tiennent les deux oreilles du ministre des travaux publics, sauront que leur position s'améliorera en raison directe de leur zèle, il s'établira une véritable croisade en faveur du trésor public.

Au reste, j'ai mis l'idée en avant ; je crois qu'elle fructifiera. La pensée c'est de faire faire par l'Etat ce que font toutes les sociétés. Aujourd'hui, messieurs, comment les choses se passent-elles ? Personne n'a intérêt à faire valoir les produits du chemin de fer , rendez-vous à un bureau du chemin de fer pour faire expédier un paquet, on vous y reçoit bien ou mal, peu importe ; mais si l'on vous reçoit mal, vous vous adressez à une exploitation particulière, où vous êtes toujours reçu avec infiniment de politesse.

En voici un exemple. Dernièrement j'avais un paquet d'imprimés à envoyer au conseil provincial du Hainaut ; le bureau de la poste était ouvert, les employés lisaient le journal ; je leur demande à pouvoir affranchir le paquet, un employé me répond que le bureau est fermé pour les imprimés autres que les journaux ; je lui fais remarquer qu'il pouvait recevoir mon paquet puisqu'il lisait ce journal.

M. Dolez. - Il était peut-être absorbé par la lecture d'un de vos discours.

M. Dumortier. - Je n'en sais rien ; toujours est-il qu'après avoir décliné mes noms et qualité, et prié de la manière la plus pressante, l'employé après m'avoir dit qu'il ne pouvait recevoir que les journaux se disposait cependant à prendre le paquet d'imprimés lorsqu'un autre employé (un de mes honorables collègues qui m'accompagnait pourrait certifier ce fait) se présente et fait brutalement défense de le recevoir. J'ai demandé le nom de cet employé qui m'a dit se nommer Hochstein, et je lui ai promis de signaler ici sa conduite. De là, je me suis rendu à l'entreprise Van Gend, où l'on s'est empressé de prendre mon paquet, avec la plus exquise politesse. Eh bien, voilà ce qui se présente tous les jours : vous n'avez pas beaucoup de revenus parce que vos employés n'y sont pas intéressés ; si, au contraire, les employés avaient une part dans les bénéfices éventuels de l'exploitation ; ils seraient très obligeants ; ils ne laisseraient échapper aucune occasion de faire des bénéfices, et personne ne serait excité à recourir aux entreprises particulières.

J'entends l'honorable M. Dechamps dire que le chemin de fer de Namur à Liège est constitué d'après ce principe ; celui de Paris l'est également ; une part de bénéfices est attribuée aux employés qui, par leur position, sont à même d'accroître les revenus du chemin de fer. Ce système offre cet immense avantage que les employés sont stimulés par leurs propres intérêts.

Ainsi, maintenant vous ne transportez presque pas de petits colis, parce qu'on n'a pas intérêt à les expédier par le chemin de fer ; cependant vous vous privez ainsi d'une recette assez considérable, 500,000 fr. d'après les uns ; un million d'après les autres. Ces petits colis sont expédiés par les messageries ; celles-ci les réunissent en un gros ballot ; elles les expédient par le chemin de fer et ce sonl elles qui réalisent le bénéfice. Tout cela n'arriverait pas, encore une fois, si les employés avaient intérêt à faire valoir les revenus du chemin de fer ; mais non, ils ont un traitement fixe, et que le chemin de fer fasse des pertes ou réalise des bénéfices, peu leur importe ; car leur traitement leur est toujours payé. C'est ainsi que nous n'utilisons nullement ce puissant levier, l'intérêt personnel, qui fait prospérer tant de sociétés particulières.

Cependant à côté de cela, j'ai vu il y a quelques jours un arrêté que je dois non pas combattre, puisqu'il est pris, mais regretter vivement ; je veux parler de l'arrêté tout récent qui frappe d'une manière si rude cette classe d'employés du chemin de fer si digne de la sollicitude du gouvernement, je veux parler des gardes-convois. Il est certain qu'il n'est pas d'employés dans toute l'administration dont la position soit plus malheureuse que la leur. Forcés d'être toujours en uniforme et obligés, par la nature de leurs fonctions, à faire des exercices gymnastiques ou acrobatiques, comme vous voudrez, ils sont astreints à des frais d'habillement plus considérables que les autres et chaque jour ils sont exposés à perdre la vie pour le service de l'administration. Et cependant, messieurs, que vient-on de faire ? On vient de réduire leurs traitements : ceux des gardes-convois de première classe sont réduits de 1,500 fr. à 1,100 et à 1,000 fr., ceux des gardes de deuxième classe, de 1,300 fr. à 900 et à 800 fr. et ceux des gardes de troisième classe de 1,200 fr. à 700 fr.

Voilà comment on agit : en réduit les traitements des petits employés, mais on a soin de ne pas toucher aux fonctionnaires supérieurs ; nous avons même vu qu'on réduisait les traitements des premiers pour augmenter ceux des derniers. Je ne dis pas que ce soit ici le cas ; mais toujours est-il que, pour mon compte, je dois déplorer des économies qui atteignent précisément les classes des plus malheureuses de l'administration.

On viendra me dire, sans doute, que par compensation, les gardes-convois auront un demi-centime par kilomètre ; mais parmi ces employés il en est qui ne parcourront nécessairement que de très courtes distances.

Ainsi, par exemple, ceux qui feront le trajet de Bruxelles à Braine-le-Comte ne gagneront certainement qu'une somme insuffisante pour vivre. Ici, je ne comprends plus le système des primes ; ce système est (page 333) rationnel et profitable lorsqu'il a pour effet de stimuler le zèle des employés au profit des recettes ; mais je ne le comprends plus alors qu'il ne dépend pas de la volonté des employés de parcourir une distance plus ou moins considérable.

Ce que vous appelez une prime ne sera donc, en définitive, qu'une véritable réduction de traitement. Le seul système de primes qui soit raisonnable, je le répète, c'est celui qui doit avoir pour effet de rapporter davantage au trésor. J'engage vivement le gouvernement et mes honorables collègues à bien réfléchir sur ce point et à se demander s'il ne serait pas sage d'introduire dans la loi une disposition qui promettrait aux employés une part des bénéfices que produirait le chemin de fer, après avoir couvert toutes les dépenses qui lui incombent au budget.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Je dois rectifier les faits que vient d'avancer l'honorable préopinant.

A en croire l'honorable M. Dumortier, la dernière résolution qui a été prise et qui a fait l'objet d'un arrêté royal récemment promulgué, aurait pour effet d'amoindrir la position des agents subalternes du chemin de fer. C'est le contraire qui est la vérité. Les cadres de ce personnel subalterne avaient été réglés par un arrêté royal, en date du 8 avril 1843, et, comme ces cadres étaient évidemment insuffisants, beaucoup de ces agents se trouvaient dans une position très irrégulière et n'avaient pas même le taux normal de leur traitement.

Qu'a fait le gouvernement ? Il a proposé de fixer leurs appointements, leur position au chiffre maximum, non pas de 1,200 fr., comme le dit l'honorable M. Dumortier, mais de 1,500 fr. pour une certaine classe d'entre eux, de 1,300 fr. pour une autre, etc., et le gouvernement, afin de ne rien changer au traitement dont jouissent les titulaires actuels, a réservé, par une disposition expresse, les droits de ces titulaires.

On n'a qu'à lire, à cet égard, l'article 8 de l'arrêté dont l'honorable M. Dumortier vient d'entretenir la chambre.

Par suite de l'application de cet arrêté, la position d'un grand nombre de ces agents subalternes sera améliorée, et d'autre part, il en résultera sur le budget une économie qui pourra aller de 20 à 30,000 fr.

Il y aura d'autre part une certaine somme pour prime ; mais je regarde cette mesure comme excellente, parce qu'elle aura pour effet d'assujettir à une responsabilité plus grande les agents subalternes.

- L'article 53 est adopté.

Article 54 (salaires)

Art. 54. Service général. Direction : fr. 16,400. »

M. de Perceval. - Messieurs, à l'occasion des salaires, je demanderai à l'honorable ministre des travaux publics s'il trouve quelque inconvénient à changer le système actuellement en usage pour le payement des salaires aux ouvriers employés dans les stations et dans les ateliers de l'administration des chemins de fer.

Aujourd'hui, ces payements se font par quinzaine. C'est là une mesure qui est très nuisible, très préjudiciable pour la classe ouvrière. Je demande que ce mode soit changé et que la direction paye hebdomadairement les travailleurs qu'elle emploie.

Dans la position qui leur est faite actuellement, ils sont obligés d'avoir du crédit chez les petits boutiquiers, chez les détaillants ; du crédit pour huit jours peut encore assez facilement s'obtenir, mais avoir du crédit pour quinze jours devient déjà une chose très difficile, et l'ouvrier l'obtient-il, il doit le payer très cher ; il tombe le plus souvent sous les griffes de l'usure, et l'on sait comment l'usure sait exploiter le malheureux ouvrier. Souvent elle absorbe à elle seule tout le salaire.

Je crois que payer hebdomadairement les ouvriers serait chose extrêmement utile, et qui ne saurait offrir dans son application aucun inconvénient.

Cela peut bien doubler les écritures, mais en présence des bienfaits que cette mesure est destinée à procurer aux ouvriers, le ministre ne saurait hésiter à l'adopter.

Je demanderai donc à l'honorable ministre des travaux publics s'il trouve des inconvénients à prendre la mesure que je lui signale. Déjà l'année dernière la section centrale a appelé l'attention du gouvernement sur la question dont j'ai l'honneur d'entretenir la chambre.

Je désire que cette année, conformément aux mêmes réflexions qui se trouvent dans le rapport de la section centrale, l'honorable ministre des travaux publics veuille bien modifier les règlements, et substituer le payement hebdomadaire au payement à la quinzaine.

Les ouvriers demandent l'adoption de cette mesure qui ne peut que leur être favorable à eux et à leurs familles, tant pour l'entretien de leur ménage que pour l'achat de leurs aliments et de leurs vêtements.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Je pourrai faire examiner la mesure que propose l'honorable M. de Perceval. Cependant dès à présent je dois lui faire observer que nulle part, dans aucun établissement on ne paye les ouvriers tous les huit jours, on les paye presque partout à la quinzaine, et tous les ans ont fait savoir par un tableau qui est connu de tous les débitants, de tous les fournisseurs, les jours de payement, de manière qu'à cet égard le crédit des ouvriers ne peut souffrir le moins du monde du mode qui est suivi.

Je ferai encore remarquer que si l'on adoptait la mesure que recommande l'honorable M. de Perceval, il en résulterait une perte de temps parce que tous les ouvriers doivent se rendre chaque jour de payement à l'arsenal et signer la feuille d'émargement. On leur ferait donc perdre tous les quinze jours un quart de jour de plus.

M. de Perceval. - Je pourrais, à la rigueur, accepter les motifs qui viennent d'être développés par M. le ministre des travaux publics ; mais je demande, en tous cas, que les payements se fassent d'une manière exacte et régulière, c'est-à-dire tous les quinze jours. C'est ce qui n'a pas lieu aujourd'hui, et c'est contre cette négligence, cet abus que je m'élève. D'ordinaire, ces payements de salaires qui doivent se faire, d'après les règlements, tous les quinze jours, ne s'effectuent pas aux époques fixées. Ainsi, le 15 du mois, on ne paye pas les ouvriers ; souvent ils ne touchent leur salaire que vers le 20 ou le 25 du même mois.

C'est là un très grave abus que le gouvernement ne peut tolérer davantage, car il est des plus nuisibles pour les ouvriers. J'ai entendu souvent des plaintes à ce sujet, et je les trouve très fondées. J'ose espérer que dans l'avenir les règlements seront exécutés, et que les salaires seront payés tous les quinze jours aux ouvriers employés dans les ateliers des chemins de fer de l'Etat.

- L'article est mis aux voix et adopté.

Articles 55 à 57 (salaires)

« Art. 55. Entretien, surveillance et police de la route ; fr. 1,120,000. »

- Adopté.


« Art. 56. Locomotion et entretien du matériel ; fr. 1,431,130. »

- Adopté.


« Art. 57. Litt. A. Transport et perception : fr. 615,600.

« B. Prime pour économie de coke et régularité des convois : fr. 30,000. »

- Adopté.

Articles 58 à 61 (travaux et forunitures)

« Art. 58. Impressions, papiers, fournitures de bureau, etc. : fr. 118,744. »

- Adopté.


« Art. 59. Entretien et amélioration des routes, stations, bâtiments et dépendances.

« Charge ordinaire : fr. 262,000.

« Charge extraordinaire : fr. 127,000. »

- Adopté.


« Art. 60. Renouvellement des billes et des fers de la voie : fr. 500,000.

« Charge extraordinaire : fr. 304,000. »

- Adopté.


« Art. 61. Approvisionnements - Combustibles - Objets de consommation, objets nécessaires pour l'entretien du matériel, redevances aux compagnies : fr. 2,014,000. »

- Adopté.

Article 62

« Art. 62. Renouvellement du matériel.

« Charge ordinaire : fr. 100,000.

« Charge extraordinaire ; fr. 200,000. »

M. David. - C'est ici l'occasion de renouveler mon amendement quant à la fermeture des waggons par des toiles. Je demande qu'aux charges extraordinaires soit comprise la dépense pour la fermeture des waggons par des toiles en coutil.

M. le président. - Ainsi on ajouterait au libellé : y compris la fermeture des waggons par des rideaux.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Je ne verrais pas d'inconvénient à adopter la modification proposée par l'honorable M. David. Cependant je dois lui faire observer que si on n'y a pas donné suite l'an dernier, c'est que le gouvernement s'est trouvé dans l'impossibilité d'y avoir égard.

Une loi a été votée portant la date du 12 avril 1851 et par cette loi on a introduit une tarification nouvelle qui doit être soumise à une épreuve régulière et loyale. Il est incontestable que si on adopte la mesure que propose l'honorable M. David, il en résultera un déclassement immédiat. Beaucoup de voyageurs qui surtout l'hiver vont en char à bancs, prendront des waggons s'ils sont fermés par des rideaux.

Si la mesure avait été mise à exécution l'année dernière, il aurait pu en résulter des modifications qui n'auraient pas permis de juger exactement l'essai que l'on faisait. C’est pourquoi il n'a pas été donné suite à l'idée émise par l'honorable M. David.

M. le président. - M. David insiste-t-il ?

M. David. - Oui, M. le président. Si j'avais insisté, lors de la discussion du tarif des voyageurs, mon amendement aurait certainement été adopté ; je ne l'ai retiré que parce que M. le ministre, au moment du vote, m'a promis que l'amélioration aurait lieu.

M. le président. - Je vais mettre aux voix l'amendement de M. David.

M. David. - Je m'en rapporte à la promesse qu'a faite M. le ministre. Je retire mon amendement.

- L'article est mis aux voix et adopté.

Article 63

« Art. 63. Camionnage, pertes et avaries, loyers et menues dépenses : fr. 220,000. »

- Adopté.

Section II. Postes
Article 64

« Art. 64. Personnel.

« Charge ordinaire : fr. 1,138,350.

« Charge extraordinaire : fr. 20,000.

(page 334) M. Van Grootven. - Messieurs, je viens appeler l'attention de M. le ministre des travaux publics sur la position précaire de plusieurs employés inférieurs de l'administration des postes, et notamment des facteurs des villes et des campagnes. Vous savez, messieurs, que ces agents acquittent de leurs pénibles fonctions avec un zèle, un dévouement auxquels les chefs de l'administration et le public ne cessent de rendre un hommage bien mérité. Cependant le traitement que l'on accorde à la plupart d'entre eux est loin d'être en rapport avec leurs besoins, et ne récompense pas suffisamment les services qu'ils rendent.

Il est vrai que depuis la réforme postale, qui a considérablement accru leur besogne, on a augmenté le nombre des distributeurs et amélioré la position de quelques-uns. Une somme assez importante a été affectée à cette fin ; mais je n'en persiste pas moins à croire que l'on doit faire davantage encore pour un très grand nombre de ces employés. Nous avons 503 facteurs dont le traitement est de 400, 500 et n'excède pas 600 francs ! Ce n'est pas avec un traitement aussi modique, et sur lequel on fait une retenue pour les pensions, que ces agents actifs et probes peuvent pourvoir à leur entretien et à celui de leur famille.

En France, il y a une masse d'habillement pour les facteurs, l'administration des pestes leur fournit tous les ans un équipement complet. Chez nous, au contraire, avec un traitement inférieur, l'employé doit, jusqu'à ce jour au moins, pourvoir à tout. Vous voyez que les positions sont bien différentes.

J'en dirai autant des adjoints commis des bureaux auxquels on accorde des appointements de 600, 900 et 1,200 francs. Les deux premiers chiffres sont insuffisants pour vivre dans des villes telles que Bruxelles, Gand, Liège et Anvers. Que l'on diminue le nombre de ces employés, si on le peut, je ne demande pas mieux que d'avoir le moins de fonctionnaires possible, mais que l'on rétribue convenablement ceux dont on a besoin pour la marche des services de l'Etat.

S'il faut, dans une administration honorable et importante comme celle des postes, un personnel de confiance, entre les mains duquel on puisse confier chaque jour des valeurs considérables, il faut aussi que le traitement de ces agents leur assure une existence honnête qui éloigne bien loin d'eux toute pensée de convoitise. Ne plaçons pas l'employé entre son devoir administratif et la nécessité de pourvoir à des besoins parfois cruels.

Je pourrais en dire davantage encore, messieurs ; mais j'aime à croire que l'honorable ministre des travaux publics fera tout ce qui dépend de lui pour améliorer la position des fonctionnaires que je recommande à sa bienveillance toute spéciale.

M. de Perceval. - Je manquerais à mon devoir si je n'appuyais pas les considérations très justes que vient de présenter l'honorable M. Van Grootven. Tous, je pense, dans cette chambre, nous sommes convaincus que la position des fonctionnaires dont il s'agit laisse énormément à désirer. Ils ont des courses très longues à faire chaque jour, leur responsabilité est très grande et, disons-le aussi à l'honneur de ces modestes agents, leur probité est à l'abri de tout reproche.

Je pense donc que la sollicitude du gouvernement doit être acquise à ces fonctionnaires zélés et dévoués qui ne sont évidemment pas assez rétribués eu égard aux services qu'ils rendent. Ce n'est pas avec un traitement de 400 ou 450 fr. qu'on peut récompenser, ou pour mieux dire payer un facteur continuellement en route, quelque temps qu'il fasse. De plus, nous ne devons pas perdre de vue que leur besogne a bien augmenté depuis la réforme postale. Ils ont aujourd'hui une très grande quantité de lettres à distribuer par jour. Et cependant toutes ces distributions s'opèrent avec beaucoup de régularité.

En Belgique le facteur n'a pas une masse d'habillement qui lui est fourni par le gouvernement, ainsi que cela a lieu en France.

Il importe donc qu'il obtienne une compensation d'une autre nature et qu'on lui élève son traitement. Je le repète, ces agents ont droit à toute la bienveillance de la législature et du gouvernement.

L'année dernière, messieurs, la chambre a émis le vœu que les traitements des facteurs des villes et des campagnes fussent augmentés ; je réitère ce vœu, et je demande que M. le ministre veuille bien porter son attention sur la position de ces fonctionnaires.

M. Rodenbach. - J'appuie les observations qui ont été faites par les honorables préopinanls, d'autant plus qu'on peut améliorer la position des agenls dont il s'agit sans augmenter le chiffre du budget. Je ferai remarquer qu'en France on a voté 100 mille fr. pour améliorer la position des facteurs ruraux ; on accorde à 2 mille facteurs ruraux une augmentation. Puisque le service est parfaitement bien fait, il faut aussi rétribuer les agenls aussi convenablement que possible.

Je n'en dirai pas davantage puisque M. le ministre annonce qu'il trouvera, sur les crédits alloués, de quoi indemniser les facteurs ruraux qui le méritent.

M. Moncheur. - Messieurs, puisqu'on a parlé des facteurs ruraux, je déclare que toute mesure tendant à améliorer leur position trouvera chez moi un vote favorable. Ces modestes fonctionnaires sont dans une position bien pénible, lorsque dans les saisons les plus rigoureuses ils ont à faire des courses vraiment forcées ; il faut au moins qu'ils trouvent dans leur rétribution, une indemnité de leurs fatigues.

Messieurs, j'ai demandé la parole pour signaler un abus à M. le ministre des travaux publics.

Le chemin de fer est un auxiliaire excellent pour la poste aux lettres partout où il existe : cela est incontestable, mais à la condition cependant qu'il y ait quelque régularité dans le service ainsi organisé.

Or, je dois, à propos de cet article, signaler à M. le ministre des travaux publics un de ces services où cette régularité n'existe en aucune manière ; je veux parler du transport des dépêches de Paris à Namur. Ces dépêches doivent arriver tous les matins à dix heures : eh bien, la règle générale, c'est qu'elles n'arrivent pas, et la très rare exception, c'est qu'elles arrivent.

M. le ministre des travaux publics comprend certainement trop bien quel dommage il en résulte pour le commerce et pour le public en général, pour ne pas prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à cet abus. S'il provient de l'administration du chemin de fer français, il y aurait à réclamer auprès de cette administration, ou bien à faire la part des retards possibles du chemin de fer français, et à fixer le départ de notre convoi de Braine-le-Comte, de manière à être à peu près assuré que les dépêches françaises y sont arrivées.

Dans tous les cas, il est impossible, messieurs, qu'un ordinaire qui nous est annoncé pour le matin ne nous arrive ordinairement que le soir.

M. de Mérode. - Je trouve extrêmement bien qu'on s'occupe de fonctionnaires peu rétribués et qui supportent beaucoup de fatigues ; mais il me semble que pour avoir les sommes nécessaires pour améliorer la position de ces agents, il faudrait mettre le prix du transport des lettres au chiffre où il est en France, c'est-à-dire à 23 centimes. Il est juste que l'augmentation soit payée par ceux qui profitent de la poste et de toutes les facilités qu'elle procure. De cette manière, la recette se trouverait augmentée en même temps que la dépense. Mais s'il ne s'agit que de faire des cadeaux sans obtenir en même temps de nouvelles recettes, je suis opposé à toute augmentation, car alors il en résulterait de nouveaux impôts comme les droits de succession ou comme ceux qu'on nous annonce encore. Il me semble qu'il est beaucoup plus juste, de faire payer les frais d'un service par ceux qui profitent de ce service.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Ill est à peu près certain, messieurs, que les résultats de la réforme postale dépasseront cette année de 135,000 fr. les prévisions. Les recettes de 1851 s'élèveront, suivant toute probabilité, à la somme de 3,335,000 fr. On peut donc affirmer qu'avant peu d'années la poste produira plus qu'elle ne produisait avant la réforme.

Le gouvernement a mis à profit les sommes qui restaient disponibles au budget pour améliorer la position des agents subalternes que les honorables préopinants ont recommandés à sa sollicitude.

En effet, messieurs, en 1849, les facteurs dont le nombre était de 262 avaient comporté une dépense d'environ 161,000 fr.

En 1850, le nombre des facteurs était de 307 et le total de leurs traitements s'élevait à environ 187,000 fr. En 1852, par suite des allocations votées par la chambre, il sera possible d'améliorer la position des facteurs ruraux ; leur nombre même pourra être augmenté et porté à plus de 830, chiffre actuel comportant une dépense d'environ 448,000 fr.

Si l'on prend en détail la position de ces fonctionnaires, on trouve que tandis qu'en 1850, 386 avaient un traitement de 600 fr., il y en a aujourd'hui 425.

Le nombre des tournées est de 871. Celui des facteurs ruraux de 832. Au mois d'avril de l'année dernière le nombre des tournées n'était que de 637 et le nombre des facteurs ruraux de 647.

M. de Mérode - Messieurs, j'ai une objection à faire sur l'accroissement de la recette despostes d'après ce qu'on appelle la réforme postale : c'est que, pendant plusieurs années, l'Etat a perdu la différence qu'il y avait entre la recette ancienne et la recette nouvelle, et que de plus il perd l'accroissement qui se produisait chaque année. On est obligé de suppléer à ces pertes par de nouveaux impôts.

M. Van Grootven. - Messieurs, je n'ai qu'un mot à dire. M. le ministre des travaux publics vient de déclarer que la moyenne du traitement des facteurs ruraux est de 500 francs ; mais je ferai observer que les facteurs du chemin de fer, qui certainement ont beaucoup moins à faire que les facteurs des postes, et qui ont une responsabilité moins grande que leurs collègues ; que ces facteurs, dis-je, touchent pour la première classe 1,500 francs ; pour la deuxième classe 1,200 francs,et pour la troisième classe 1,080 francs, alors que les facteurs des postes de la première classe touchent seulement 1,000 francs, ceux de la seconde classe 780 et ceux de la troisième 550.

Evidemment il n'y a pas de proportion entre les émoluments de ces deux catégories de fonctionnaires. Je ne dis pas qu'il faille diminuer les traitements des uns, mais ce n'est pas un motif pour ne pas augmenter les traitements de ceux en faveur de qui j'ai cru devoir prendre la parole.

- L'article 64 est adopté.

Articles 65 et 66

« Art. 65. Matériel : fr. 463,500 »

- Adopté.


« Art. 66. Frais de construction et d'entretien des voitures destinées au service des postes sur le chemin de fer :

« Charge ordinaire : fr. 20,000.

« Charge extraordinaire : fr. 20,000. »

- Adopté.

Section III. Télégraphes
Articles 67 et 68

« Art. 67. Traitement et salaire du personnel : fr. 44,000. »

- Adopté.


(page 335) « Art. 68. Entretien : fr. 9,000. »

- Adopté.

Section 4. Régie
Articles 69 et 70

« Art. 69. Personnel: fr. 36,500. »

- Adopté.


« Art. 70. Matériel : fr. 3,500. »

- Adopté.

Chapitre V. Pensions

Article 71

« Art. 71. Pensions : fr. 5,000. »

- Adopté.

Chapitre VI. Secours

Article 72

« Art. 72. Secours à des employés, veuves ou familles d'employés qui n'ont pas de droits à la pension : fr. 7,000. »

- Adopté.

Chapitre VII. Dépenses imprévues

Article 73

« Art. 73. Dépenses imprévues non libellées au budget : fr. 18,000. »

- Adopté

Second vote, vote des articles et sur l'ensemble du projet

M. le président. - Plusieurs articles du budget ont été amendés ; à quel jour la chambre veut-elle fixer le second vote ?

- De toutes parts. - Immédiatement.

- L'urgence est déclarée.

Les divers amendements, introduits dans le budget, sont successivement confirmés.


On passe au vote du texte du budget.

« Article unique. Le budget du ministère des travaux publics est fixé pour l'exercice 1852, à la somme de 16,103,083 fr. 13 c., conformément au tableau ci-annexé. »

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Je propose de reproduire le paragraphe 2 qui figurait dans la loi du budget, adoptée par la chambre l'année dernière. Ce paragraphe était ainsi conçu :

« Les crédits qui figurent au chapitre Ier (administration centrale) et au chapitre IV (chemins de fer, postes, télégraphes) pourront être réunis et transférés de l'un des articles sur l'autre, selon les besoins du service. »

- L'article unique, avec le paragraphe additionnel, est mis aux voix et adopté.


Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du budget des travaux publics.

Le budget est adopté à l'unanimité des 75 membres présents.

Il sera transmis au sénat.

Ont adopté : MM. Pirmez, Rodenbach, Rogier, Rolin, Roussel (Adolphe), Rousselle (Charles), Tesch, Thibaut, Thiéfry, Tremouroux, Van Cleemputte, Vandenpeereboom (Alphonse), Vandenpeereboom (Ern.), Van Grootven, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Renynghe, Veydt, Vilain XIIII, Allard, Ansiau, Bruneau, Cans, Clep, Cools, Coomans, Dautrebande, David, de Baillet (Hyacinthe), de Baillet-Lalour, de Breyne, de Brouwer de Hogendorp, Debroux, de Decker, de Haerne, de La Coste, Delescluse, Delfosse, de Liedekerke, Deliége, de Man d'Attenrode, de Meester, de Mérode (Félix), de Mérode-Westerloo, de Muelenaere, de Perceval, Dequesne, de Renesse, de Steenhault, Destriveaux, de Theux, de T'Serclaes, Devaux, de Wouters, Dolez, Dumon (Auguste), Dumont (Guillaume), Dumortier, Faignart, Frère-Orban, Jacques, Jouret, Lange, Lebeau, Lesoinne, Malou, Mascart, Mercier, Moncheur, Moreau, Orban, Orts et Verhaegen.

- MM. Landeloos, de Denterghem et T'Kint de Naeyer demandent un congé.

- Accordé.

Ordre des travaux de la chambre

M. le président. - Nous passons à un autre objet de l'ordre du jour.

- Des membres. - A lundi.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Nous avons pour mardi le second vote du projet de loi sur l'expropriation forcée.

Je demanderai qu'on mette à l'ordre du jour de lundi les modifications apportées par le sénat au projet de loi relatif à la juridiction consulaire.

M. le président. - Cet objet y figure.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je désirerais que ce vote et le vote définitif du projet de loi sur l'expropriation forcée précédassent la discussion du traité avec la Hollande.

M. de Muelenaere. - Je demanderai à M. le ministre de la justice s'il trouverait un inconvénient à ce que le projet de loi sur l'expropriation forcée fût aussi mis à l'ordre du jour de lundi ; il serait possible qu'on le terminât dans cette séance, on pourrait alors commencer mardi la discussion du traité avec la Hollande.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je n'y trouverais pas de difficulté quant à moi ; mais d'après ce que m'a dit M. le rapporteur, il serait empêché lundi et il ne convient pas de procéder au second vote de ce projet en son absence ; sans cette circonstance, j'aurais demandé moi-même qu'il pût mis être mis à l'ordre du jour de lundi.

M. de Muelenaere. - Je retire ma motion.

M. le président. - L'ordre du jour de lundi est suffisamment chargé.

- La séance est levée à 3 heures trois quart.