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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 26 janvier 1855

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1854-1855)

(Présidence de M. Delfosse.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 567) M. Dumon procède à l'appel nominal à deux heures et un quart.

M. Maertens donne lecture du procès-verbal de la dernière séance ; la rédaction en est approuvée

Pièces adressées à la chambre

M. Dumon présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.

« Des habitants d'Eecloo déclarent adhérer à la pétition du comité central flamand relative au projet de loi sur l'enseignement agricole. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.


« Le sieur Iweins, commissaire de police à Seraing, demande une indemnité du chef des fonctions de ministère public qu'il remplit près le tribunal de simple police du canton. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Lorge, ancien sous-lieulenant des douanes, demande la révision de sa pension. »

- Même renvoi.


« Des fermiers, cultivateurs, marchands de bestiaux gras et commerçants à Meulebeke, demandent que les artistes vétérinaires non diplômés soient admis à continuer l'exercice de leurs fonctions. »

- Même renvoi.


« Le sieur Dumout, commis des accises, de deuxième classe à Tcmpleuve, demande une amélioration de position. »

- Même renvoi.


« Le conseil communal d'Oosterzeele prie la Chambre d'accorder aux sieurs Moucheron et Delaveleye, la concession d'un chemin de fer de St-Ghislain à Gand, Eecloo et Terneuzen. »

- Même renvoi.


« Le conseil communal d'Ath demande la prompte exécution du chemin de fer projeté de St-Ghislain à Gand, dont les sieurs Moucheron et Delaveleye demandent la concession. »

- Même renvoi.


« Les commissaires de police de St-Trond et de Tirlemont demandent un supplément de traitement pour les officiers du ministère public près les tribunaux des chefs-lieux de canton. »

- Même renvoi.


« Le sieur Van den Broecke, facteur rural à Gaver, demande une augmentation de traitement. »

« Même demande des facteurs ruraux de la Louvière. »

- Même renvoi.


« Par dépêche du 24 janvier, M. le ministre de l’intérieur adresse à la Chambre 110 exemplaires du catalogue général des ouvrages de propriété française, publiés avant la mise en vigueur de la convention littéraire du 22 août 1852, et qui ont été déposés en exécution de l'article 2, paragraphe 5 de cet acte international. »

- Distribution aux membres de la Chambre et dépôt à la bibliothèque.


« Par dépêche du 25 janvier 1855, M. le ministre de l'intérieur adresse à la Chambre deux exemplaires des livraisons 10 à 12 du tome II des Annales de la commission royale de Pomologie. »

- Dépôt à la bibliothèque.


« M. de Renesse demande à la Chambre un congé de quatre jours. »

« M. Tesch, retenu chez lui par une indisposition, demande un congé. »

- Ces congés sont accordés.

Projet de loi accordant un crédit supplémentaire au budget des non-valeurs et remboursements

Dépôt

M. le ministre des finances (M. Liedts). - D'après les ordres du Roi, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre :

1° un projet de loi tendant à augmenter le fonds des non-valeurs de 47,000 fr. pour l'exercice 1853 ;

Projet de loi approuvant un échange de terrain avec la ville de Mons

Dépôt

2° Un projet de loi portant approbation d'une convention provisoire pour l'échange d'un terrain de l'Etat avec un terrain appartenant à la ville de Mons et destiné à faciliter le service de la maison de sûreté de cette ville ;

Projet de loi ouvrant un crédit de 400,000 francs pour venir en aide aux employés inférieurs de l’Etat

Dépôt

3° Un projet de loi tendant à ouvrir un crédit de 400,000 francs au gouvernement, à l'effet de venir en aide aux employés inférieurs de l'Etat dont le traitement ne dépasse pas mille francs.

- Il est donné acte à M. le ministre de la présentation de ces projets de loi ; ils seront imprimés et distribués.

La Chambre les renvoie à l'examen des sections.

Projet de loi portant le budget du ministère de l’intérieur de l’exercice 1855

Rapport de la section centrale

M. Rousselle. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale sur l'amendement proposé par M. le ministre de l'intérieur, à l'article 89 de son budget.

Rapports sur des demandes en naturalisation

M. Van Overloop. - J'ai l'honneur de déposer plusieurs rapports sur des demandes en naturalisation.

- Ces rapports seront imprimés et distribués.

Ordre des travaux de la chambre

M. le président. - Le projet de loi sur le jury d'examen a été imprimé et distribué. Pour donner à chacun le temps de se préparer, il serait bon de fixer le jour où ce projet sera examiné en sectious.

M. Dumortier. - M. le président, il est à désirer qu'un projet de loi de cette importance soit aussi examiné dans le pays. Vous comprenez que nous ne sommes pas des élèves d'universités, que par conséquent nous devons un peu nous éclairer des lumières des professeurs et des personnes que la chose conerne. Je pense donc qu'il ne serait pas sage de précipiter l'examen en sections, d'autant plus que, quand nous aurons reçu les lumières des personnes aptes à nous en fournir, l'examen marchera beaucoup plus vite en sections et en section centrale.

Je demande donc que le Moniteur reproduise le projet de loi dans le plus bref délai possible, afin que chacun puisse en prendre connaissance et qu'il s'écoule au moins une semaine avant que l'on ne commence l'examen en sections. Je crois, du reste, que cette demande rentre dans les idées de M. le président.

M. le président. - C'est parce que le projet de loi est important que j'ai demandé que l'on fixât le jour de l'examen en sections.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Je ne veux rien précipiter. La Chambre doit se réserver le temps nécessaire pour examiner mûrement ce projet Mais il est urgent que la délibération puisse s'ouvrir, et je prie la Chambre de fixer l'examen en sections dans le plus court délai possible.

M. de La Coste. - Je suis aussi d'avis qu'il faut laisser à la Chambre le temps d'examiner ce projet avec maturité et de recueillir toutes les observations qui pourront nous arriver par la presse ou par d'autres voies.

Dans ce moment nous sommes encore fort occupés de la loi du recrutement, nous sommes fort occupés de la discussion du budget de l'intérieur. Il est impossible que nous nous formions immédiatement uue opinion sur une question de cette importance.

Je ferai d'ailleurs remarquer que si nous devons rendre grâce au gouvernement d'avoir posé la question, il n'y a pas un grand degré d'urgence à ce qu'elle soit résolue ; ce qui importe surtout, c'est qu'elle soit résolue avec maturité, puisqu'il s'agit maintenant d'établir un régime définitif, tandis que nous avons été constamment dans le provisoire.

Eh bien, messieurs, il est beaucoup plus important que ce régime définitif satisfasse réellement aux grands intérêts engages dans la question qu'il ne serait fâcheux de- prolonger, au besoin, le provisoire encore pour une année. Il faut espérer que nous n'en viendrons pas là, mais enfin ce danger est beaucoup moindre que celui de procéder avec précipitation.

Je pense aussi, messieurs, avec M. le président, qu'il faut fixer un jour pour que tous ceux qui prennent intérêt à la question puissent être présents ; mais il me semble que ce ne doit pas être encore un jour de la semaine prochaine et qu'il en faudrait fixer un plus éloigné.

M. Lebeau. - Messieurs, je ne demande pas la discussion immédiate du projet dont on vient de parler, mais je désirerais que si on en retarde la discussion, le retard ne soit pas trop prolongé.

La Chambre, on en conviendra, donne depuis quelques semaines - ceci n'est pas un reproche, c'est on peut dire la force des choses - un spectacle qui ne doit pas trop se prolonger.

Je crois qu'il ne serait pas de nature à relever soit la dignité de la Chambre, soit le gouvernement parlementaire.

Il est de fait que, depuis plusieurs semaines, la Chambre ne siège en moyenne que 2 heures ou 2 heures et demie par jour. Je sais parfaitement, et il faut au besoin le rappeler au public, que là ne s'accomplissent pas tous nos travaux ; il est une partie de nos travaux qui sont plus modestes, moins aperçus et qui sont tout aussi utiles ; ce sont ceux qui s'accomplissent dans les sections ; mais il n'est pas moins vrai que depuis quelque temps nos séances publiques ne sont que des embryons de séances.

Pour en revenir à l'objet du débat, je demande que le délai qu'on réclame ne soit pas trop prolongé. Il ne s'agit pas d'une matière nouvelle et il ne s'agit pas non plus d'une révision radicale, c'est peut-être la dixième fois que la Chambre aura à s'occuper du jury d'examen.

Remarquez d'ailleurs, messieurs, que l'examen en sections sera nécessairement assez prolongé, et que pendant ce temps, l'opinion du dehors, dont j'appelle les lumières tout autant que l'honorable M. Dumortier, pourra se faire entendre.

Du reste, messieurs, l'opinion la plus compétente, celle des corps enseignants, s'est déjà fait jour par ce qu'on pourrait appeler leurs représentants naturels. C'est en grande partie à des membres du corps enseignant qu'on doit les travaux préparatoires qui sont venus se résumer dans le projet soumis à la Chambre.

Je demande donc que le délai soit tout au plus de 8 à 10 jours.

(page 568) - La Chambre décide que l'examen en sections commencera mardi en huit.

M. Dumortier. - Je désirerais que le projet de loi fût promptement imprimé au Moniteur. Le document qui nous est présenté se compose de deux parties : le projet de loi et un grand rapport ; je conçois qu'on ait de la peine à imprimer le rapport d'ici à demain, mais pour le projet de loi cela est très facile. Or, dès qu'on a le projet de loi sous les yeux, on peut se former une idée de la question.

M. le président. - Le bureau veillera à ce que le projet soit inséré au Moniteur le plus tôt possible.

Projet de loi portant le budget du ministère de l’intérieur de l’exercice 1855

Discussion du tableau des crédits

Chapitre XIV. Poids et mesures

Articles 76 à 78

« Art. 76. Traitement des vérificateurs et d'un aspirant-vérificateur des poids et mesures : fr. 53,400. »

- Adopté.


« Art. 77. Frais de bureau et de tournée : fr. 18,000. »

- Adopté.


« Art. 78. Matériel : fr. 2,000. »

- Adopté.

Chapitre XV. Enseignement supérieur

Discussion générale

M. le président. - La Chambre passe au chapitre XV (enseignement supérieur).

La discussion générale est ouverte. La parole est à M. Osy.

M. Osy. - Messieurs, la loi sur l'instruction moyenne autorise le gouvernement à créer des cours normaux, notamment à l'université de Liège.

M.Ie ministre de l'intérieur nous a demandé l'année dernière, et nous demande encore cette année, une augmentation pour ces cours normaux.

Je me suis occupé de la question de savoir si, à l'occasion de l'école normale, il n'aurait pas été possible d'accorder un traitement à quelques-uns des agrégés dont il a été beaucoup parlé l'année dernière ; un assez grand nombre d'agrégés attendent depuis longtemps la régularisation de leur position ; aux termes de la loi sur l'iustruction supérieure (article 14), ils ne peuvent pas, comme agrégés à l'université, toucher un traitement ; ils peuvent seulement toucher les rétributions des élèves qui suivent leurs cours.

J'avais espéré qu'en organisant l'école normale, le gouvernement aurait pu placer plusieurs agrégés et leur donner un traitement ; au lieu de cela, le gouvernement nous propose de donner des suppléments de traitement aux professeurs qui sont déjà chargés de cours à l'université. Je m'étonne de la marche qui a été suivie par le gouvernement ; je regrette qu'il ne cherche pas à tirer plus tôt les agrégés de la position précaire où ils sont maintenant.

On pourrait leur réserver les chaires à l'école normale.

Les professeurs chargés de cours à l'université, et auxquels on a cru devoir confier ces chaires, ne sont pas déjà si à plaindre ; on peut voir à l'article 9 de la loi du 15 juillet 1849 quel est le traitement qui leur est alloué ; ils ont, en outre, les rétributions payées par les élèves de leurs cours.

Le gouvernement a demandé une augmentation de 8,000 francs pour l'école normale ; elle est destinée à accorder des suppléments de traitement aux professeurs de l'université.

Je voudrais qu'en en fît profiter des agrégés ; de cette manière, quelques-uns d'entre eux auraient au moins un sort.

Je ne demande pas que tous les agrégés donnent des cours aux universités, mais seulement qu'on les charge des cours donnés à l'école normale de l'université.

De cette manière nous pourrions remplir le désir manifesté l'année dernière, d'accorder aux professeurs qui ne sont pas en titre un traitement.

Le nombre des professeurs, il faut en convenir, est déjà considérable.

L’article 12 de la loi sur renseignement supérieur autorise le gouvernement à nommer 32 professeurs dans chaque université et, en cas de nécessité, un ou deux de plus par chaque faculté.

Dans le tableau qui est à la suite du rapport de l'honorable M. Rousselle, j'ai pu voir combien il y avait de professeurs et d'agrégés aux universités de Liège et de Gand.

A l'université de Gand, il y a 42 professeurs, et à l'universilé de Liège 49. La loi autorise d'en nommer 32 et 1 ou 2 de plus par faculté en cas de besoin. Maintenant faut-il donner à ces professeurs qui jouissent d'un traitement élevé, une augmentation de traitement, quand vous avez là une occasion de venir au secours des agrégés en leur appliquant l'allocation de 8 mille francs ? Je demanderai s'il n'est pas temps de faire quelque chose pour ces personnes qui réclament depuis nombre d'années et attendent leur tour de devenir professeurs. Je sais que l'article 14 s'y oppose, mais il est facile de faire un ehangement, et de dire que cela sera affecté aux écoles normales.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Je demande la parole pour faire observer que l'honorable M. Osy a anticipé sur le chapitre XVI.

Il a présenté des observations sur l’enseignement normal des humanités auquel il veut faire servir les agrégés de l'enseignement supérieur.

C'est dans le chapitre XVI qu'il est question de l'enseignement moyen et nous n'en sommes qu'au chapitre XV.

Il vaut mieux épuiser la matière qu'il concerne et arriver ensuite l'enseignement normal qui est distinct. Nous aurons plus d'ordre dans notre discussion.

M. Osy. - Si M. le ministre veut jeter les yeux sur la page 44 du rapport, il verra qu'il y est fait mention d'une allocation de 6,500 francs destinée aux professeurs de l'université de Gand. Cela se trouve compris dans le chapitre de l’enseignement supérieur.

C'est bien à cette occasion que je devais en parler. C'est parce qu'on veut charger des professeurs ordinaires et extraordinaires des universités de cours de l'école normale avec traitement, et qu'on demande à cet effel une allocation de 6,500 fr., que je propose d'appliquer cette somme aux agrégés.

M. le président. - Le rapport déposé par M. Rousselle au commencement de la séance est relatif aux écoles normales attachées aux universités. On ne pourra s'en occuper que demain, quand il aura été imprimé.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Les renseignements sont donnés pour démontrer que le crédit de l’enseignement supérieur doi être augmenté ; mais il ne s'agit pas de l’enseignement normal. Je sui prêt, je le répète à entrer dans la discussion de l’enseignement normal, mais il n'en est pas question en ce moment.

L'honorable M. Osy demande que l'on s'occupe d'abord des agrégés dans leurs rapports avec l'enseignement normal. Or, il ne s'agit pas des agrégés dans l'enseignement normal. L'enseignement normal est organisé sur d'autres bases ; c'est avec le concours des professeurs des universités que cet enseignement est donné aux termes de la loi.

M. le président. - Le rapport sur le crédit pour l'enseignement normal a été déposé aujourd'hui, il n'est pas encore imprimé. Ce crédit ne pourra donc être discuté utilement que demain.

M. Osy. - La discussion a été ouverte sur la question de l'instruction publique en général.

M. le président. - Vous aviez le droit de faire vos observations. Aussi je ne vous ai pas ôté la parole.

M. Manilius. - Messieurs, il me semble que le chapitre XV sur lequel l'honorable M. Osy vient de prendre la parole, mérite quelques observations, et je crois que je resterai dans les règles du débat en m'attachant aux observations que M. le ministre a consignées dans le rapport.

Contrairement à ce que vous a dit l'honorable M. Osy, je trouve que le rapport nous donne la preuve d'un excès de modération, de la part du gouvernement, dans la demande de crédit qu'il nous a faite pour augmenter les traitements de quelques anciens professeurs, et pour nommer professeurs des agrégés qui, depuis longtemps, en remplissent les fonctions. Ainsi, je vois que pour les différentes modifications qu'il y aurait à apporter à la situation actuelle, il faudrait, M. le ministre le dit nettement, une somme de 38,350 francs, et cela indépendamment du crédit nécessaire pour payer les professeurs qui seront attachés à l'école normale. M. le ministre nous explique les six besoins principaux auxquels il s'agit de satisfaire, il indique qu'il lui faut 10,000 francs pour augmenter les traitements de quelques professeurs de l'université de Gand ; qu'il lui faut 10,000 francs pour la même destination en ce qui concerne l'université de Liège ; que pour les agrégés attachés à l'université de Gand qui restent à nommer professeurs il lui faut 6,500 francs ; que pour les agrégés de l'université de Liège il lui faut 4,500 fr., et ainsi de suite,

Il additionne tous ces besoins absolus et il trouve qu'il doit avoir une somme de 38,350 francs. M. le ministre explique tous ces points à la section centrale. Mais celle-ci a persisté sans doute à dire que l'on demande trop, et M. le ministre répond : Je suis d'une modération excessive. Il me faut 38,550 fr. et je ne demande que 28,000 fr.

Je demande à M. le ministre de nous expliquer comment, lorsqu'il nous indique avec le plus grand sérieux du monde, par les calculs les mieux établis, qu'il lui faut pour les deux universités une augmentation de 38,350 fr., il peut se laisser aller à cette modération excessive de faire bon marché de 10,000 fr.

Je demande surtout qu'il veuille nous dire sur lequel de ces besoins si parfaitement assignés, il compte faire l'économie de 10,000 fr. Est-ce sur l'augmentation à donner à quelques anciens professeurs qui ont jusqu'à vingt années de service et qui sont encore professeurs extraordinaires ?

D'après l'honorable M. Osy, il le paraît.

L'honorable M. Osy a fait partie de la section centrale.

Il aura trouvé, je suppose, là comme ici, qu'il ne faut pas augmenter le traitement de ces professeurs ; qu'ils sont trop payés, que non seulement ils ont 4,000 fr., mais qu'ils ont une large part dans le produit des inscriptions des élèves qui suivent leurs cours.

Eh bien ! si c'est sur ce point que M. le ministre veut faire une économie de 10,000 fr., je dois protester contre cette manière de voir.

(page 569) J'espère que M. le ministre me tranquillisera sur ce point, qu'il trouvera à faire d'autres économies que celles qu'il pourrait réaliser en ne payant pas les professeurs de nos universités comme ils doivent l'être.

Les professeurs des universités ont, dit-on, une belle position. Mais comment doivent-ils l'acquérir ? Il y a des agrégés qui, pendant douze à quinze ans. ont donné des cours comme les professeurs, et qui n'ont pas eu de traitement, qui reçoivent une malheureuse somme de l,000 à 1,500 francs par an. Et l'on viendra dire que c'est là une position heureuse !

Messieurs, je compte que l'instruction donnée au nom du gouvernement, que l'instruction légale sera organisée comme il convient, et qu'on payera nos professeurs comme ils doivent l'être. J'espère qu'on donnera à nos agrégés, à nos candidats professeurs, une position convenable, et qu'on ne lésinera pas sur 10,000 fr. alors qu'il est constaté, par les déclarations du gouvernement, qu'il faut 38,350 fr.

J'ajouterai que l'année dernière, nous avons discuté très longuement sur ce chapitre et que sur tous les bancs de la Chambre on a été d'accord qu'il ne fallait pas laisser pendant de longues années des hommes capables, des hommes à la hauteur de leurs devoirs, dans une position infime, dans une position qui ne cadre pas avec la dignité de ces institutions gouvernementales.

Cela a été dit sur les bancs de la droite comme sur ceux de la gauche.

Eh bien, qu'a répondu M. le ministre à ces instances ? Il vous a dit : Pour cette année je ne puis faire plus. Mais la voie est tracée ; les anciens agrégés seront nommés professeurs ; il y a une nouvelle organisation, elle recevra son exécution.

Or, d'après cette organisation l'institution des agrégés doit disparaître.

Or, pour la faire disparaître, quel est le moyen ? C'est d'allouer les fonds nécessaires.

Il se trouvait sans doute quelques membres de la section centrale à qui cela ne paraissait pas convenir. Voilà que l'opposition se reproduit ici. J'espère que M. le ministre saura y résister, qu'il soutiendra que j'ai raison, que s'il a indiqué la somme de 38,350 fr. comme nécessaire, c'est qu'il en avait besoin et que, s'il a diminué la somme de quelques milliers de francs, c'est sur les instances produites en section centrale. Mais je suis convaincu que s'il dit à la Chambre comme il l'a dit à la section centrale que 38,350 fr. lui sont nécessaires « pour faire face aux besoins réels des universités », il trouvera de l'appui dans cette assemblée.

M. le ministre nous dit qu'en réduisant sa demande à 28,000 fr., le gouvernement est resté dans les bornes d'une modération excessive. Mais il ne faut pas être modéré à l'excès ; il faut être modéré dans de justes bornes ; surtout lorsqu'il s'agit de deux institutions importantes de notre pays qui ont à lutter contre tant d'autres ? Faut-il laisser ces institutions dans une position inférieure ? Je ne le pense pas, et je n'ai jusqu'ici entendu que l'honorable M. Osy qui ne soit pas d'accord avec nous sur ce point.

Il ne suffit pas, pour cet honorable membre, que le ministre soit d'une excessive modération, qu'il s'en tienne aune somme inférieure aux besoins réels ; il veut aller encore plus loin ; il ne faut, selon lui, rien faire ; les professeurs sont assez heureux ; ils ont des minervalia et ils ont à attendre quantité de bonnes choses. Mais, messieurs, qu'ont-ils donc à attendre ? Ils ont à attendre une petite pension, à moins qu'ils n'aient le bonheur d'occuper assez longtemps leur chaire pour obtenir l'éméritat.

Ils n'ont donc rien d'extraordinaire à attendre ; ils sont dans une position digne de nos égards, et je suis certain que la Chambre aura assez le sentiment de sa dignité pour vouloir que l'on paye convenablement des fonctionnaires qui doivent conserver pendant toute leur vie la position qu'ils occupent, qui n'ont pas une autre carrière à poursuivre.

Je crois que M. le ministre ne montrera plus devant la Chambre le même excès de modération. S'il peut faire une économie de 10,000 fr. il la fera et il viendra nous dire l'année prochaine qu'il y a eu des vacatures, des déplacements qui lui ont permis de faire dix mille francs d'économie.

Mais il doit exécuter la loi, et si la somme de 38,550 francs n'est pas un besoin imaginaire, il doit y satisfaire. Il a été décidé que les agrégés seraient supprimés ; il faut exécuter cette décision et donner à ces agrégés une position convenable. Je dois supposer que les besoins que vous avez indiqués, M. le ministre, sont réels, que vous n'avez pas induit la section centrale en erreur.

Or, si cela est vrai, vous êtes certain d'avoir une majorité qui vous soutiendra. Quand vous proposerez une chose basée sur la vérité, conforme à la loi, personne dans la Chambre ne vous refusera un vote favorable. Ensuite, avec une modération qui ne sera pas excessive, vous pourrez peut-être faire une économie de quelques milliers de francs, ce sera tant mieux, mais commencez par demander ce qui est nécessaire.

J'espère que M. le ministre répondra favorablement à mes observations.

M. le président. - Je dois faire observer à M. Manilius que la section centrale n'a proposé aucune réduction. Elle a accordé pour l'enseignement supérieur tout ce qui a été demandé par le gouvernement.

M. Manilius. - J'ai lu le rapport, M. le président, et j'en ai tiré des conclusions.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - J'écoute avec beaucoup d'intérêt les provocations que l'on adresse au gouvernement à l'effet de demander des crédits nouveaux pour régler d'une manière satisfaisante la position des fonctionnaires de l'Etat ; nous ne sommes pas accoutumés à ces sortes d'avances.

Du reste, messieurs, le gouvernement n'a pas attendu ces provocations pour s'occuper avec sollicitude de la position des agrégés et des professeurs ordinaires et extraordinaires.

La discussion est placée maintenant sur son véritable terrain, c'est-à-dire sur le terrain des augmentations demandées par le gouvernement pour le personnel des universités de l'Etat. L'honorable M. Manilius s'étonne que la section centrale, contrariant sur ce point les intentions du gouvernement, ait cru devoir réduire le chiffre de 38,300 francs, qui était, selon lui, primitivement demandé, à 28,300 fr. ; messieurs, c'est une erreur ; la section centrale n'est point coupable de ce qu'on appelle une réduction, la réduction est due à l'initiative du gouvernement. Je vais expliquer dans quelles circonstances le chiffre de 28,300 fr. a été proposé.

Dans le courant de l'année dernière, la position des professeurs et des agrégés a été l'objet d'un commencement d'amélioration : des professeurs extraordinaires ont été promus au grade de professeurs ordinaires, et des agrégés ont été nommés professeurs ; d'autres agrégés ont reçu des indemnités supérieures à celles dont ils jouissaient. C'est dans cet état de choses que les propositions des universités sont arrivées au gouvernement. Ces propositions avaient en vue l'ancienne position du personnel, et ne tenaient pas compte des améliorations dont je viens de parler.

Le gouvernement a examiné les demandes d'augmentations faites par les universités, et il a reconnu qu'il pouvait faire immédiatement acte de justice dans une proportion convenable, tout en réduisant à 28,300 fr. le chiffre de 38,300, primitivement indiqué. Il est arrivé à cette conclusion en tenant compte, d'une part, de ce qui avait déjà été fait dans le courant de l'exercice, et en second lieu, de ce que l'avenir réservait au personnel.

Il y a, en effet, fréquemment des moyens d'améliorer dans une certaine mesure la position des professeurs ; lorsque soit par des mises à la retraite, soit par d'autres causes, une partie des crédits devient disponible et peut être employée à cet usage.

En résumé, messieurs, au moyen des 28,300 francs demandés, le gouvernement a la certitude de pouvoir faire immédiatement et dans une proportion équitable, justice à tous ceux qui ont droit à une augmentation.

Voilà, messieurs, la véritable origine de la réduction à 28,300 francs du chiffre de 38,300 francs qui avait été demandé pour les universités.

Dans le cours de la discussion, messieurs, je prouverai que la position des agrégés auxquels l'honorable M. Osy s'intéresse à si juste titre, a été également améliorée.

Mais j'indiquerai d'abord à la Chambre l'emploi qui a été fait du crédit de 20,000 fr. mis à la disposition du gouvernement l'année dernière. Ce crédit avait pour objet, conformément à la loi, d'accorder des avantages, indépendamment du traitement normal, à certains professeurs qui ont fourni une longue et belle carrière dans l’enseignement.

Le crédit ordinaire, auquel on avait emprunté la somme nécessaire pour payer ces suppléments de traitements, le crédit ordinaire a été rétabli dans son état normal par suite du vote des 20,000 fr. dont il s'agit.

Les mises à la retraite effectuées dans le courant de l'exercice 1854 ont produit d'autres sommes disponibles, et en dernière analyse le gouvernement a pu utiliser 31,000 francs pour faire, d'une part, des promotions et pour améliorer, d'autre part, la position des agrégés.

Il en est résulté que trois professeurs extraordinaires ont été nommés professeurs ordinaires, et que six agrégés ont été promus au grade de professeurs extraordinaires. Ces derniers ont obtenu une somme de 12,000 fr.

A Gand l'établissement d'un cours de littérature flamande a occasionné une dépende de 2,000 fr.

Le surplus a été consacré à des indemnités accordées surtout aux agrégés et aux employés de l’ordre administratif.

Ainsi les agrégés, dont on s'occupe avec raison d'une manière spéciale, ont obtenu cet avantage que les uns, au nombre de six, ont été nommés professeurs extraordinaires, et que les autres ont reçu des indemnités supérieures à celles dont ils jouissaient auparavant.

Voilà, messieurs, ce qui concerne le crédit affecté au personnel pour 1854.

Maintenant, voici l'emploi qui a été fait du fonds spécial de 20,000 francs, 10,000 francs par université, pour améliorer la position des professons ordinaires.

A Gand, la somme de 10,000 francs a été employée à concurrence de 5,000 francs ; il reste, par conséquent, 5,000 francs qui seront utilisés, quand le temps sera venu, pour accorder à certains professeurs des avantages spéciaux.

(page 570) A Liège les fonds se trouvent épuisés depuis assez longtemps, déjà, à concurrence de 9,200 fr. Là il reste par conséquent peu de marge pour faire des suppléments de traitement aux professeurs ordinaires.

Pour justifier la demande d'une augmentation de 28,300 francs au budget actuel, je soumets à la Chambre les observations suivantes :

Le personnel, à Gand comme à Liège, attend des promotions complémentaires depuis un temps assez long. Ainsi nous avons à Gand dix professeurs extraordinaires nommés, l'un depuis treize ans, les autres depuis dix-neuf ans, il en est même, je pense, qui sont nommés depuis vingt ans.

A Liège il y en a dix qui sont nommés depuis quinze ans, et plusieurs auraient déjà obtenu une promotion, si l'état des crédits avait permis d'y songer.

Il y a donc dans les deux universités, pour être équitable envers d'anciens fonctionnaires, quelques promotions à faire, dont j'ai indiqué le chilfre dans les développements joints à cet article du budget, et si dès l'abord on n'atteint pas, au moyen du crédit demandé, le chiffre indiqué pour chaque université, on satisfait cependant dans une juste mesure aux exigences de l'enseignement.

Quant aux agrégés, messieurs, à Gand il y en a trois qui sont en fonctions depuis 5 ans A Liège il y en a 5. Parmi ces agrégés il en est qui ont des titres actuels à une promotion. Il en est d'autres qui peuvent encore, pendant quelque temps, se contenter d'une augmentation d'indemnité.

L'instruction à laquelle toutes les demandes de promotions et de suppléments de traitements a été soumis, a donc révélé, d'après l'opinion des universités, qu'il fallait une somme de 38,300 francs. D'après le gouvernement, en tenant comple de ce qui s'est fait déjà dans le courant de l'exercice et de ce qui pourra se faire encore au moyen du crédit normal, une somme de 28,300 francs suffira pour rendre justice en ce moment.

Voilà les faits que je soumets à l'attention de la Chambre pour la déterminer à accorder le crédit demandé par le gouvernement.

Suit-il donc de cette réduction que le gouvernement reste au-dessous des véritables besoins de l'enseignement ? Je ne le pense pas ; je crois, au contraire, que les explications dans lesquelles je viens d'entrer auront convaincu, non seulement la Chambre, mais l'honorable M. Manilius lui-même, que les améliorations de position à faire répondront, en général, d'une part, aux intérêts de la science, d'autre part, aux justes droits que les professeurs peuvent invoquer, après tant d'années de service, à une améliotation de position.

M. Manilius. - Messieurs, après les explications que vient de donner M. le ministre, je comprends jusqu'à un certain point le revirement du gouvernement, quant au chiffre de la somme dont il dit avoir besoin pour le personnel universitaire ; je suis heureux que ces explications aient été données, car les documents de la Chambre ne sont pas seulement destinés à nous seuls, mais ils sont encore destinés à la publicité ; ils ont un grand retentissement ; si les explications que vient de donner M. le ministre avaient été connues du public, on aurait compris le revirement ; mais il est de fait que le rapport de la section centrale ne donne pas la clef de ce revirement ; pour ma part, je le répète, je suis satisfait des explications que M. le ministre nous a fournies. Il ne pouvait pas entrer dans mes internions de supposer que la section centrale, présidée par l'honorable M. Delfosse, n'eût pas été assez habile pour défendre l'intérêt des universités de l'Etat contre le ministre lui-même ; mais il y avait une explication à demander.

J'ai prié, en conséquence, M. le ministre de me faire connaître ce que je ne trouvais pas dans le rapport de la section centrale ; il a bien voulu s'expliquer, et je l'en remercie.

M. Osy. - Messieurs, alors que M. le ministre de l'intérieur déclarait à la section centrale qu'il pourrait pourvoir aux besoins du personnel universitaire avec 28,000 fr., il ne pouvait entrer dans les intentions de la section centrale de lui accorder 8,000 à 10,000 fr. de plus ; je ne comprends pas le reproche qu'adresse l'honorable M. Manilius à la section centrale.

J'ai anticipé sur la discussion du chapitre XVI ; j'avais à parler à la fuos de l'école normale ainsi que des professeurs, j'ai dit que le gouvernement, aux termes de l'article 14 de la loi, ne pouvait pas donner de traitement aux agrégés.

Tout en voulant améliorer le sort des agrégés, je ne voudrais pas sortir de la légalité, c'est sous ce rapport que j'ai engagé M. le ministre à profiter de la création d'une école normale à Liège pour faire une position à quelques-uns de ces abrégés. Si la Chambre trouve qu'on peut accorder un traitement aux agrégés en exercice à l'université même, j'y donnerais volontiers les mains, mais j'avoue que j'ai un scrupule. En tout cas, je recommande à M. le ministre de faire tous ses efforts pour faire donner les cours de l'école normale par des agrégés.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Messieurs, le scrupule de l’honorable M. Osy ne me paraît pas fondé. L’honorable membre croit qu’il est impossible d’accorder légalement aux agrégés en exercice un traitement sur le trésor.

Aux termes de l'article 14 de la loi du 15 juillet 1849, les agrégés peuvent, avec l'autorisation du gouvernement, donner soit des répétitions, soit des cours nouveaux, soit des leçons sur des matières déjà enseignées ; ils ne jouissent d'aucun traitement.

L'année dernière une discussion absolument identique s'est élevée dans cette enceinte ; alors il a été démontré, d'une manière évidente, à l'intervention de plusieurs honorables membres, et notamment de l'honorable M. Verhaegen, que la disposition de l'article 14, relative au traitement, n'est pas applicable aux agrégés qui donnent des cours obligatoires, agrégés qu'on a dû charger de ces cours, parce que les cadres du personnel enseignant des universités ne sont pas remplis ; l'article 14 s'occupe des cours nouveaux : les cours nouveaux qui sortent du programme de l'enseignement n'ont pas été jugés par la loi d'une nécessité absolue pour les études universitaires ; et l'on comprend que des agrégés chargés de semblables cours ne puissent pas être rétribués sur le trésor. Il en est autrement quand, à défaut d'un personnel effectif suffisant, des cours obligatoires restent en souffrance ; que fait alors le gouvernement ? Pour éviter une charge de plus au trésor, il confie ces cours à des agrégés qu'il juge aptes à les donner ; de cette manière, il pourvoit à toutes les exigences du programme, et il réalise en même temps une économie, car le traitement, accordé à l'agrégé chargé d'un cours obligatoire, est toujours inférieur au traitement dont jouissent les professeurs effectifs. Ce système est mis en pratique depuis un grand nombre d'années.

Il était donc fort équitable de donner un traitement quelconque à des agrégés qui font l'office de professeurs ordinaires ou extraordinaires, et qui rendent depuis longtemps de bons services à l'Etat ; telle a été votre opinion l'année dernière, et c'est ainsi qu'en 1854, tout en votant l'augmentation de crédit demandée pour le personnel universitaire, vous avez recommandé au gouvernement de chercher, an moyen de ces fonds, à améliorer le sort des agrégés ; cela est imprimé tout au long dans les Annales parlementaires ; et je crois être resté complètement fidèle à cette pensée, par la manière dont j'ai réparti les fonds disponibles au budget de 1854 pour le personnel des universités de l'Etat.

Ainsi sous le rapport de la légalilé, il n'y a nul scrupule à avoir, le gouvernement peut légalement accorder un traitement quand la Chambre aura fait les fonds.

La deuxième question est relative à l'enseignement normal. L'honorable M. Osy voudrait que le gouvernement au lieu d'employer les professeurs des universités pour donner l'enseignement normal à Liège ou à Gand, fît usage des agrégés qui n'ont pas de position définitive dans le cadre du personnel.

Cela est matériellement impossible. Le gouvernement est autorisé à faire servir le personnel des universités de l'Etat à l'enseignement normal.

Que doit faire le gouvernement pour donner à l'école normale les cours qui sont en rapport avec l'université ? II faut qu'il prenne les professeurs donnant les cours similaires ; en ne prenant que des agrégés cela serait impossible ; il ne peut pas prendre pour enseigner le grec et le latin un agrégé des sciences mathématiques. On ne peut prendre que des professeurs ou agrégés qui ont des cours similaires à donner ; c'est précisément ce que le gouvernement a fait.

Ainsi le seul agrégé qui est, à l'université de Liège, par la nature de son enseignement en rapport d'études avec l'enseignement de l'école normale a été désigné par le gouvernement ; tous les autres professeurs ont été pris parmi le personnel que la loi met à la disposition du gouvernement pour concourir à donner l'enseignement normal. Ce sont tous des professeurs de la faculté de philosophie et lettres.

Voilà les professeurs qui concourent à l'enseignement normal des humanités. Un seul agrégé était disponible, le gouvernement l'a employé. Il ne pouvait aller au-delà.

Le gouvernement avait ici un devoir essentiel à remplir. Il devait choisir de bons professeurs, et ce qui importe, c'est beaucoup moins de faire des économies, mais de donner un bon enseignement. Or, pour donner un bon enseignement, il prend les professeurs les plus aptes à enseigner.

Je pense que les observations que je viens de présenter répondent aux scrupules de légalité qu'on a manifestés et expliquent d'une manière satisfaisante la position du gouvernement vis-à-vis des professeurs ordinaires et extraordinaires ainsi que des agrégés.

M. Rousselle, rapporteur. - Dans la première partie de la discussion, l'honorable M. Manilius avait attaqué la section centrale en disant que c'était à ses vives sollicitations que le crédit nécessaire de 38 mille fr. avait été abaissé à 28 mille.

L'honorable président de la Chambre et l'honorable ministre de l'intérieur ont donné des explications tellement catégoriques à cet égard, que j'ai cru pouvoir renoncer à la parole quand mon tour est venu. Je pensais que l'honorable membre se serait contenté des explications qui ont été données, mais il revient à la charge, et cette fois il dit que la section centrale n'a pas été assez habile. Ce sont les mots dont il s'est servi.

L'habileté de la section centrale eût donc été de demander qu'on portât l'allocation à 38,000 fr. quand le gouvernement disait quc 28,000 fr. lui suffisaient. Je ne saurais comprendre autrement la chose. (page 571) Je laisse à la Chambre à apprécier ; la mission des sections centrales et la tâche de leur rapporteur sont assez ingrates déjà pour qu'on ne vienne pas leur adresser de pareils reproches,

M. Manilius. - Il ne peut entrer dans mes intentions d'adresser des reproches à une section centrale ou à un de ses membres. C'était un raisonnement hypothèque que je faisais ; je disais : Le rapport est ainsi fait, il faut que ce soit le résultat de telle ou telle chose. Mais je n'ai voulu attaquer ni la section centrale ni notre honorable président.

M. le ministre est venu expliquer le revirement du chiffre ; c'est sur ce point que je voulais avoir satisfaction, je l'ai obtenue. Quant à accuser la section centrale et notre honorable président d'inhabileté, jamais, jamais je ne dirai chose pareille !

Articles 73 à 83

« Art. 79. Dépenses du conseil de perfectionnement de l'enseignement supérieur : fr. 4,000. »

- Adopté.


« Art. 80. Traitement des fonctionnaires et employés des deux universités de l'Etat : fr. 579,165. »

- Adopté.


« Art. 81. Bourses. Matériel des universités : fr. 149,235. »

- Adopté.


« Art. 82. Frais de route et de séjour des membres du jury d'examen pour les grades académiques, et pour le grade de professeur agrégé de l'enseignement moyen de l'un et de l'autre degré, salaire des huissiers des jurys, et matériel : fr. 52,000. »

- Adopté.


« Art. 83. Droits de présence des jurys d'examen prémentionnés : fr. 71,500. »

Avec cette observation :

« Ce crédit n'est limité que par le produit réel des frais d'inscription des élèves. »

- Adopté.

Article 84

« Art. 84. Frais de l'agence de comptabilité des jurys : fr. 2,000. »

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - La section centrale propose d'ajouter à cet article les mots « dernière année. » Je pense que cette addition est pour le moins inutile. D'abord, que l'agent reste ou non, au ministère de l'intérieur, il n'en faudra pas moins 2,000 francs pour le travail qu'il fait.

Si l'agence spéciale est supprimée l'an prochain, et que l'agent rentre au département, l'article 2 (Personnel) devra être augmenté de 2,000 francs. Je ne pense donc pas qu'il faille admettre les mots qui préjugeraient à tort la suppression du crédit.

M. Rousselle, rapporteur. - Ce n'est pas l'intention de la section centrale. Elle veut seulement que l'agence spéciale soit supprimée et que l'agent rentre dans le service ordinaire du département de l'intérieur. Si le ministre ne peut pas pourvoir à ce service, au budget de 1856, avec le crédit alloué aujourd'hui pour le personnel, il demandera une augmentation, en en expliquant les motifs, et la Chambre statuera. Mais il est, ce me semble, important que la Chambre manifeste que ce service spécial doit cesser et que ceci doit rentrer dans l'administration générale.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Tout est dit. Legouveinement n'a pas d'autres explications à donner. Il est impossible que le gouvernement salarie un agent, s'il n'a pas de fonds à sa disposition. Pourquoi mettre les mots « dernière année » ? Si, l'an prochain, le gouvernement supprime l'agence spéciale, et s'il ne peut pourvoir à ce service avec le montant du crédit de l'article « Personnel », il proposera un transfert de 2,000 francs. De l'addition proposée par la section centrale, il pourrait résulter une espèce de préjugé contre la suppression même du crédit. Je crois que la Chambre fera bien de ne pa plus admettre ces mots ici qu'elle ne l'a fait pour le service du drainage.

M. Osy. - C'est tout différent. La section centrale proposait la suppression d'un service dont la Chambre a admis le maintien. Ici sa proposition n'a pas la même portée. Si l'on ne peut pourvoir à ce service avec le crédit de l'article « Personnel », le crédit ne sera pas supprimé ; il sera transféré à l'article 2.

- Les mots « dernière année » ne sont pas adoptés. L'article 84 est adopté.

Article 85

« Art. 85. Dépenses du concours universitaire et frais des Annales des universités de Belgique : fr. 10,000. »

- Adopté.

Chapitre XVI. Enseignement moyen

Articles 86 à 94

« Art. 86. Dépenses du conseil de perfectionnement de l'enseignement moyen : fr. 5,000. »

- Adopté.


« Art. 87. Inspection des établissements d'instruction moyenne ; personnel : fr. 17,500. »

- Adopté.


« Art. 88. Frais de tournées et autres dépenses de l'inspection des établissements d'instruction moyenne : fr. 7,000. »

- Adopté.


« Art. 89. Frais de l'enseignement normal pédagogique destiné à former des professeurs pour les établissements d'instruction moyenne (bourses) (article 38, paragraphe 3, de la loi du 1er juin 1850) : fr. 40,300. »

- Adopté.


« Art. 90. Dotation des athénées royaux (article 20, paragraphe 2, de la même loi) : fr. 300,000. »

- Adopté.


« Art. 91. Dotation des écoles moyennes (article 35, paragraphe premier, de la même loi) : fr. 200,000. »

- Adopté.


« Art. 92. Bourses à des élèves des écoles moyennes : fr. 15,000. »

- Adopté.


« Art. 93. Subsides à des établissements communaux ou provinciaux d'instruction moyenne : fr. 107,000. »

- Adopté.


« Art. 94. Frais du concours général entre les établissements d'instruction moyenne : fr. 17,000. »

- Adopté.

Article 95

« Art. 95. Indemnités aux professeurs de l'enseignement moyen du premier et du deuxième degré qui sont sans emploi : fr. 20,000. »

M. le président. - La section-centrale propose le chiffre de 17,718 fr.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Je demande le maintien du chiffre primitif qui figure au budget depuis un grand nombre d'années, et qui suffit à peine aux besoins.

On prétend qu'on a fait figurer, dans la colonne des indemnités accordées aux professeurs de l'enseignement moyen qui sont sans emploi, une indemnité pour un préfet des études qui a été mis en disponibilité. Remarquez d'abord, au point de vue légal, que le libellé de l'article est général : il s'applique aux professeurs de l'enseignement moyen des premier et deuxième degré « qui sont sans emploi ». Or, il m'a paru que quand, par des motifs plausibles, le gouvernement met momentanément un professeur en disponibilité, c'est un professeur sans emploi qui doit recevoir une indemnité sur l'allocation de 20,000 francs dont il s'agit.

Le préfet des études auquel on a fait allusion se trouve précisément dans cette position, et je ne sais comment on pourrait concilier les sentiments de justice qui doivent nous animer envers tous les professeurs avec la réduction du crédit de 20,000 francs.

Car le résultat de cette réduction serait de priver de son traitement d'attente ce professeur et de le mettre dans une position que l'équité ne nous permet pas de lui créer.

Le gouvernement peut avoir plus d'un motif de ne pas tenir pendant quelque temps en activité un professeur ou un préfet des études. Des considérations qui tiennent à la discipline peuvent exiger que pendant un certain temps ce professeur soit mis en disponibilité. De quelle manière voulez-vous que le gouvernement vienne en aide à un professeur qui se trouve dans cette position.

Il n'existe pas dans le budget de crédit spécial pour obvier à des situations de cette nature. Cependant il est de la dernière équité, selon moi, que lorsqu'on n'a pas de motifs suffisants pour renvoyer un professeur, et qu'on se borne à le mettre en disponibilité, on puisse lui accorder pendant quelque temps une légère indemnité. J'ai d'autant mieux pensé que l'on pouvait imputer cette indemnité sur le chiffre de 20,000 fr. qu'ainsi que je l'ai fait observer tout à l'heure, cet article est général et n'exclut personne. Dès lors, pourquoi voudriez-vous que l'on fît aujourd'hui une exception pour un professeur qui, je le dis avec conviction, n'a pas mérité d'être renvoyé, d'un professeur qui se trouve, par des circonstances particulières, dans la position de ne pouvoir être placé immédiatement, mais qui cependant le sera, je l'espère, dans le courant de cet exercice ; car le professeur auquel en fait allusion est un homme d'un mérite incontesté, qui, s'il n'a pas été maintenu comme préfet des études à la tête d'un établissement, peut rendre encore des services réels dans une autre position.

Je crois donc qu'il y a ici des considérations de droit et des considérations d'équité qui empêcheront la Chambre de réduire le crédit de 20,000 francs.

M. Osy. - Messieurs, lorsqu'on a porté pour la première fois ces 20,000 fr. au budget, c'était à l'occasion de la loi sur l'instruction moyenne. Plusieurs anciens professeurs des établissements communaux ne pouvaient être immédiatement replacés ; la somme de 20,000 fr. devait servir à leur donner des traitements d'attente.

(page 572) Cette somme est toujours restée la même, parce que le gouvernement, malgré nos vives recommandations, ne cherche pas à faire des économies en replaçant ces anciens professeurs lorsqu'il y a des vacatures.

Mais aujourd'hui le gouvernement va plus loin ; il impute sur ce crédit un traitement d'attente pour un fonctionnaire qui a été mis en non-activité depuis l'organisation nouvelle. Je dis que c'est agir contrairement aux intentions de la législature.

Il s'agit d'un fonctionnaire d'un mérite incontesté, dit M. le ministre. Cependant, il a été mis en disponibilité. Nous n'en savons pas la raison ; je ne veux pas la savoir ; mais il est certain qu'il ne peut recevoir un traitement d'attente sur l'article qui nous occupe ; la section centrale a été unanime pour le reconnaître.

Si l'on a eu des motifs assez graves pour mettre ce préfet des études en disponibilité après trois ans à peine d'exercice de ses fonctions, s'il a commis une faute de discipline, le gouvernement doit agir comme l'a fait l'honorable M. Frère, dans d'autres occasions, envers des fonctionnaires du département des finances ; il faut le mettre en disponibilité sans traitement.

Je me rappelle fort bien qu'un haut fonctionnaire du département des finances a été mis en disponibilité sans traitement parce que le gouvernement trouvait qu'il avait manqué à son service. Il doit en être de même ici. Tous les fonctionnaires de l'Etat doivent suivre les instructions du gouvernement. S'ils ne les suivent pas, le gouvernement ne doit pas leur donner de traitement d'attente.

Dans tous les cas, je le répète, la section centrale, à l'unanimité, a reconnu que le traitement d'attente dont il s'agit ne pouvait être imputé sur le crédit qui nous occupe. Si le gouvernement croit avoir besoin d'un crédit pour ce traitement d'attente, qu'il nous fasse une proposition spéciale, nous l'examinerons. Mais j'espère que la Chambre n'allouera que le chiffre qui a été admis par la section centrale.

M. Rousselle, rapporteur. - Messieurs, la section centrale, à la suite des observations qui avaient été faites par plusieurs sections, a cru nécessaire d'apporter une attention toute particulière sur l'emploi de la somme de 20,000 francs ; elles avaient fait observer avec raison que ce chiffre restait toujours le même.

Or, bien certainement il était de nature à diminuer a mesure des décès ou de la réintégration dans l'enseignement des professeurs qui avaient momentanément été mis en disponibiliié.

L'état qui nous a été remis comportait une somme de 19,000 et des cents francs.

Un des professeurs qui y figurait est décédé ; il touchait 250 francs.

Mais la section centrale s'est aperçue que M. le ministre imputait ou se proposait d'imputer sur le même crédit une somme de 2,000 fr. pour un traitement d'attente destiné à un préfet des études qui était entré dans l'organisation nouvelle et qui avait ensuite été mis en non-activité.

M. ic ministre nous dit : Mais le libellé de l'article porte : « Des professeurs qui sont sans emploi ». Messieurs, c'est la reproduction d'une formule qui remonte à l'exécution de la loi de 1850.

Ce à quoi M. le ministre n'a pas fait attention, c'est que la Chambre avait porté ce crédit dans la colonne des charges temporaires et extraordinaires, ce qui démontre clairement que la dépense était destinée à s'éteindre avec le temps.

L'observation de M. le ministre tendrait au contraire à faire allouer un crédit permanent sur lequel il payerait des traitements d'attente ou de disponibilité aux professeurs qui, pour un motif ou l'autre, seraient momentanément privés de l'exercice de leurs fonctions. Mais alors je ne vois pas pourquoi chaque département ministériel ne viendrait pas nous demander un crédit permanent de la même espèce ; car dans chaque département ministériel, il arrive certainement qu'on doit retirer leur service à quelques fonctionnaires. Il y a des règles qu'on suit en pareil cas, et ce sont ces règles que M. le ministre de l'intérieur doit appliquer aux fonctionnaires de l'enseignement.

Les fonctionnaires de l'enseignement ne doivent pas, à mon avis, se trouver dans d'autres conditions que tous les fonctionnaires de l'Etat.

M. Devaux. - L'honorable rapporteur vient de dire que les fonctionnaires de renseignement doivent se trouver dans les mêmes conditions que les autres fonctionnaires de l'Etat. Il se trompe ; l'enseignement est une administration toute spéciale, qui doit avoir nécessairement des conditions spéciales. Je suppose qu'un professeur se trouve n'être pas en bons termes avec le bureau d'administration, et je suppose que tous les torts ne soient pas du côté du professeur ; le ministre ne peut pas destituer le bureau d'administration, que doit-il faire ? Evidemment il doit écarter le professeur.

Eh bien, s'il ne se trouve pas une place vacante, il ne peut pas le replacer immédiatement ; que faut-il que le professeur devienne ? Il faut bien lui donner exceptionnellement, très exceptionnellement, les moyens d'attendre qu'une place s'ouvre pour lui.

Messieurs, l’enseignement est une administration bien autrement délicate que les autres administrations ; l'enseignement exige autrement de mesures de discipline, autrement de précautions. Dans l'administration proprement dite, un fonctionnaire est bon ou mauvais, mais dans l’enseignement il y a mille susceptibilités à ménager de la part des parents, de la part de l'administration, de la part de tout le monde.

Un professeur peut être excellent pendant de longues années et rencontrer tout à coup une difficulté toute locale, qu'il suffit d'enlever en le plaçant ailleurs pour lui rendre toute sa valeur.

Il faut donc que le gouvernement ait, sous ce rapport, certaines facilités et il ne faut pas être surpris que, exceptionnellement, se présente la nécessité d'allouer, pendant quelques mois, un traitement d'attente à un professeur qu'on doit déplacer et pour lequel il n'y a pas immédiatement de place vacante dans un autre établissement. Il n'est pas toujours facile de lui trouver une autre chaire ; on ne peut pas mettre un professeur dans une classe inférieure à celle où il se trouvait ; il faut attendre un emploi qu'il puisse accepter sans humiliation.

M. Van Overloop. - Messieurs, j'ai une seule observation à faire. Dans un tableau distribué à la Chambre, je vois figurer le nom de M. Bergeron, qui avait un traitement d'attente de 2,000 francs. Or, M. Bergeron est mort, et je désire savoir s'il n'y a pas de ce chef une réduction à opérer.

M. Rousselle, rapporteur. - L'honorable député de Bruges, dont la parole a toujours, à juste titre, tant de crédit à la Chambre, a contesté ce que j'avais dit tout à l'heure. Les considérations qu'il a présentées sont puissantes, j'en conviens ; mais elles ne sont puissantes que sous ce point de vue, que M. le ministre devrait avoir à son budget un crédit permanent pour les cas dont il s'agit. L'honorable membre n'a pas détruit ce que la section centrale a dit, à savoir qu'on veut faire une imputation contraire aux votes précédents de la Chambre : on impute un traitement qu'il est peut-être juste d'accorder, je n'examine pas cette question, on l'impute sur un crédit qui n'a pas cette destination. La Chambre a alloué un crédit avec une destination bien caractérisée.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - D'une manière générale.

M. Rousselle. - D'une manière générale ; mais toute la Chambre est là pour reconnaître que le crédit avait été alloué pour donner des traitements d'attente aux fonctionnaires de l'enseignement moyen communal qui n'étaient pas compris dans la nouvelle organisation ; eh bien l'imputation que vous voulez faire est contraire à ce vote de la Chambre.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - On convient généralement que des circonstances exceptionnelles peuvent autoriser l'allocation d'une indemnité, d'un traitement d'attente à un professeur de l'enseignement moyen. Eh bien, si cela est vrai, pourquoi se montrerait-on, sous ce rapport, d'une sévérité qui, selon moi, serait bien voisine de l'injustice ? Il y a nécessité de pourvoir au sort d'un professeur qui, par des raisons de discipline ou par des raisons de convenance, doit être mis pendant quelque temps en état de disponibilité ; veut-on que ce professeur soit complètement dépourvu de ressources ? Personne ne le soutiendra. Dès lors, sur quels fonds prendrai-je la somme nécessaire pour lui venir en aide ? On me dit qu'il faudrait demander à la Chaifibré un crédit spécial ; mais, messieurs, cela me semble inutile si nous pouvons, sans offenser la lettre de l'article en discussion, imputer sur cet article une allocation comme celle dont il s'agit, sauf à la Chambre à ratifier par son vote cette manière d'opérer.

M. Coomans. - Nous ne sommes pas seuls à faire la loi.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Certainement le Sénat a également à intervenir ; mais il n'en est pas moins vrai que vous êtes saisis de la question et puisqu'il s'agit, de l'aveu de tout le monde, d'une situation qui appelle de la part du gouvernement un acte d'équité, il est évident qu'on doit chercher un moyen de pourvoir à la position du professeur dont il s'agit, et lorsqu'on le peut sans demander un crédit spécial, pourquoi la Chambre ne ratifierait-elle pas ce que le gouvernement a fait ? Il me semble qu'il y aurait là une sévérité excessive, et qu'il n'y a pas lieu de recourir à une proposition spéciale pour un objet si peu important et pour un cas qui ne peut pas se représenter souvent. En effet, les situations de cette nature sont fort rares, heureusement, et il est inutile de mettre le gouvernement dans la nécessité de poser un acte regrettable, un acte que vous regretteriez tous s'il devait se consommer.

L'honorable M. Van Overloop a fait une observation relativement à la pension de feu M. Bergeron. Le montant de cette pension restera acquis au trésor. (Interruption.) Je ne sais pas la date du décès, mais au budget de 1856 on pourra régulariser cette affaire.

M. Vilain XIIII. - Vous en prenez l'engagement ?

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Certainement.

- Le chiffre de 20,000 francs est mis aux voix, il n'est pas adopté.

Le chiffre de 17,718 francs est mis aux voix et adopté.

Article 96

« Art. 96. Souscription à des ouvrages classiques : fr. 8,000. »

- Adopté.

Chapitre XVII. Enseignement primaire

Discussion générale

M. le président. - La discussion est ouverte sur le chapitre XVII (Enseignement primaire).

La parole est à M. Malou.

M. Malou. - Messieurs, je désire adresser à M. le ministre de fin féricur une interpellation qui se rattache au service de l'enseignement primaire.

Il existe, dans un grand nombre de communes du Borinage, des écoles dirigées par des frères de la Doctrine chrétienne. Plusieurs de ces communes ont rencontré des difficultés pour consolider en quelque sorte l'existence de ces institutions dont l'utilité dans cette partie de notre pays, comme partout ailleurs, du reste, est reconnue de toutes les opinions.

Je demanderai à M. le ministre de l'intérieur si, lorsque des (page 573) communes prennent une délibération par laquelle elles adoptent une école dirigée par des frères de la Doctrine chrétienne, en vertu de l'article 3 de la loi sur l'enseignement primaire, le gouvernement donne son autorisation à cette délibération des conseils communaux.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Messieurs, la première instruction de ces sortes d'affaires doit se faire par la députation permanente.

La loi sur l'enseignement primaire a prévu les cas dans lesquels des écoles peuvent être adoptées ; quand l'instruction est terminée et que le gouvernement est appelé à prendre une décision, il examine ce qu'il doit faire, en se renfermant dans les prescriptions de la loi ; il n'accorde ni ne refuse systématiquement l'adoption de ces écoles. Cela dépend des circonstances.

Le gouvernement doit veiller d'abord à ce que les communes ne sacrifient pas l'enseignement primaire communal par des mesures intempestives. Si, après qu'une commune a satisfait aux obligations que la loi lui impose, les besoins de cette localité exigent que d'autres écoles soient adoptées par elle, et si l'état financier de la commune le permet, la députation permanente qui est la première appréciatrice de l'affaire, ne manque pas de donner un avis favorable, et le gouvernement ne fait alors aucun obstacle à ce que l'école soit adoptée.

M. Malou. - Messieurs, j'avais posé une question très nette, et je regrette que les explications de M. le ministre de l'intérieur tendent à l'embrouiller.

La question que je posais est celle-ci lorsqu'un conseil communal, à l'unanimité, par exemple, déclare adopter une école dirigée par des frères de la Doctrine chrétienne, le gouvernement accordera-t-il, oui ou non, à la commune l'autorisation d'adopter cette école ?

On dit que le gouvernement n'a pas d'idées systématiques à cet égard. C'est une chose singulière cependant qu'aucune des écoles des frères de la Doctrine chrétienne, qui existent depuis un grand nombre d'années dans les communes du Borinage, ne soit encore parvenue à se dégager des « si », des « mais » et des « car » que vous venez d'entendre dans le discours de M. le ministre de l'intérieur ; s'il n'y avait pas d'idées systématiques pour empêcher l'existence légale de ces institutions, une ou deux au moins de ces écoles auraient échappé au malheur qui les poursuit jusqu'à présent.

J'insiste beaucoup sur ce point ; voici pourquoi :

Dans les communes du Borinage, les opinions, comme dans d'autres parties du pays, sont très divisées ; l'opinion libérale y prédomine, et cependant il n'y a qu'une voix dans cette partie du pays pour généraliser et consolider les écoles dirigées par les frères de la Doctrine chrétienne.

J'irai plus loin ; un membre du conseil communal de Quaregnon, qui appartient au culte protestant, est venu faire une démarche auprès de moi pour que le gouvernement autorise enfin la commune à adopter l'école des frères de la Doctrine chrétienne établie dans cette localité. (Interruption.) Maintenant une délibération a été prise ; cette délibération caractérise parfaitement l'utilité, la nécessité de l'institution, et j'espère que le gouvernement trouvera qu'il n'y a aucune difficulté à donner l'autorisation.

Faut-il, car je rencontre une objection, faut-il qu'il y ait insuffisance d'instruction primaire ? Tel n'est pas le sens de la loi. La loi dit à la commune, et c'est son premier principe : Il faut qu'il soit pourvu aux besoins de l’enseignement primaire, et la commune doit y pourvoir par elle-même. Lorsque la liberté y pourvoit, l'article 2 permet à la commune de ne pas établir une école communale.

Quel est le principe de la loi ? Ce n'est pas d'établir un antagonisme entre l’enseignement privé et l'enseignement communal, et de maintenir à tout prix ce dernier enseignement, même lorsqu'il est inutile ; le principe raisonnable de la loi, c'est qu'il soit convenablement pourvu aux besoins de l'enseignement primaire, soit par l'action de la commune, soit par le concours de l'action de la commune et de celle des institutions privées, soit par l'adoption d'écoles particulières qui viennent fortifier ou remplacer les institutions communales.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Messieurs, l'exemple de la commune de Quaregnon, que vient de citer l'honorable M. Malou, n'est pas bien choisi. Le gouvernement n'a rien refusé à cette commune ; elle n'avait pas demandé l'autorisation d'adopter une école privée. Mais la commune a eu une très grave difficulté avec la députation permanente ; elle voulait, d'une part, se dispenser d'adopter une école conformément à la loi, et de l'autre, avoir le droit absolu de disposer de ses fonds pour soutenir une école privée que d'autres dirigeaient. Ni la députation permanente, ni le gouvernement n'ont pu s'associer à cette fantaisie de la commune.

Ce qui est le droit des communes, c'est d'adopter une école, quand les besoins de l'enseignement primaire l'exigent. (Interruption.)

J'ai appris, en effet, que la commune de Quaregnon a pris maintenant une délibération, mais le gouvernement n'a pas encore officiellement connaissance de cette délibération.

Du reste, le gouvernement ne répond pas d'une manière dubitative, comme le suppose l'honorable membre. Il se renferme dans les prescriptions de la loi. Que dit la loi à l'article 4 ? Que la commune pourra être autorisée à adopter, dansla locailité même, une ou plusieurs écoles privées réunissant les conditions légales pour tenir lieu de l'école communale.

Aux termes de l'article 4, la députation permanente statue, sauf recours au Roi, sur les demandes d'autorisation.

Eh bien, que doit faire une commune qui désire adopter une école privée ? Elle doit soumettre une demandé motivée à la députation permanente qui prononce, et c'est seulement pour le cas où il y a contestation, que le gouvernement intervient. Je n'ai pas d'autre réponse à faire d'une manière générale que celle-là, si ce n'est que lorsque le gouvernement a été saisi de demandes de cette nature, il n'a été déterminé par aucun sentiment d'hostilité soit contre les écoles de frères, soit contre toutes autres écoles privées ; en prenant une décision, il ne s'est préoccupé que d'une chose, à savoir si l'on s'est renfermé dans les prescriptions de la loi. Voilà la règle qu'il a suivie et qu'il continuera de suivre.

M. Rousselle, rapporteur. - Messieurs, puisque l'interpellation de l'honorable M. Malou a eu pour conséquence de provoquer un commencement d'explications de la part de M. le ministre de l'intérieur, je crois que le moment est venu pour la Chambre de prendre une décision sur le dernier paragraphe du rapport de la section centrale. Ce paragraphe est ainsi conçu :

« La quatrième pétition enfin est de l'administration communale de Quaregnon, laquelle se plaint de ce que la députation permanente du conseil provincial du Hainaut, après avoir alloué, sans aucune observation ni restriction, dans le budget de cette commune pour l'exercice 1854, une somme de 4,900 francs, qui avait été proposée par le conseil communal pour ouvrir les frais de premier établissement d'une école de frères, a fait signifier, au receveur de cette commune, la défense de payer aucune somme sur cette allocation ; elle prie la Chambre de prendre les mesures nécessaires pour la conservation et la sauvegarde de ses droits. »

« Cette pétition et les pièces qui y sont jointes étant de nature à soulever des questions, toujours graves, de compétence administrative et de liberté d'enseignement, et l'administration communale de Quaregnon annonçant que pareille plainte a été adressée au Roi, la section centrale propose le renvoi du dossier à M. le ministre de l'intérieur, avec demande d'explications. »

Je demande que la Chambre prononce dès maintenant le renvoi du dossier à M. le ministre de l'intérieur avec demande d'explications. Quand les explications seront complètes, la Chambre pourra examiner cette question.

M. de Theux. - J'appuie la motion de l'honorable rapporteur de la section centrale ; mais j'ai demandé la parole pour répondre un mot à ce que vient de dire M. le ministre de l’intérieur.

L'expression dont il s'est servi : « pourvu que cette école fût indispensable », me paraît beaucoup trop restrictive ; il suffit qu'elle soit utile ; et qui est le meilleur juge de l'utilité d'une seconde école ? C'est assurément l’autorité communale. Les termes mêmes de l'article 15 se refusent à l'interprétation du ministre.

Cet article porte que la commune peut adopter une ou plusieurs écoles. En effet, il saute aux yeux que dans les grandes communes où la population indigente manufacturière industrielle est considérable, il peut y avoir la plus grande utilité à ce qu'il y ait plusieurs écoles ; c'est une chose que personne ne peut contester raisonnablement. Le gouvernement, qui use largement des fonds pour l'instruction publique, doit se montrer favorable à ces adoptions qui viennent en aide au budget des communes et de l'Etat et aux besoins des populations. Je demande que le gouvernement ne se renferme pas dans des limites restrictives, ne se borne pas à autoriser l'adoption quand le besoin est indispensable, mais se contente qu'il y ait utilité constatée.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Sur la demande de renvoi je n'ai aucune objection à faire, quoiqu'il soit devenu à peu près inutile, depuis que la commune, d'après ce qu'on me dit, a pris une mesure qui fait cesser l'ancien conflit, en déclarant adopter l'école dont il s'agit. Quand l'école est utile, c'est à la commune à apprécier le degré d'utilité ; mais c'est à la députation permanente qu'il appartient, d'après la loi, de statuer.

- Le renvoi est ordonné.

M. Van Overloop. - Je demande la parole. J'ai une question à adresser au gouvernement sur l'état de l'enseignemcnt primaire dans la Flandre orientale.

D'après des renseignements dans lesquels j'ai toute confiance, les fonds manquent dans cette province pour indemniser équitablement les instituteurs du chef de l'instruction gratuite qu'ils donnent aux enfants pauvres, pour donner aux enfants pauvres les fournitures de classe dont ils ont besoin, pour mettre en bon état les bâtiments d'école et le matériel. J'ai même appris que quelques instituteurs ne touchent pas les deux cents francs, minimum de leur traitement, ni l’indemnité de cent cinquante francs qui leur est allouée pour l'instruction gratuite.

Enfin plusieurs instituteurs-adjoints sont, me dit-on, à la charge des instituteurs. Vous comprenez, messieurs, que, dans ces conditions, il est impossible aux instituteurs de faire un bon choix d'adjoints.

Ce manque de fonds provient de ce que la province de Flandre orientale ne touche pas dans les subsides de l’Etat une part proportionnelle à celles que touchent les autres provinces. Je n'affirme pas que ce fait soit exact, mais je demande à M. le ministre un mot d’explication à cet égard.

Je suis convaincu que, si la plainte est fondée, M. le ministre y fera droit et que la Flandre orientale aura une part proportionnelle à celle des autres provinces. Je n'en dirai pas davantage pour le moment, j'attendrai les explications que voudra bien me donner M. le ministre de l'intérieur.

(page 574) >M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - La répartition, des fonds mis à la disposition du gouvernement pour l'enseignement primaire est faite d'après les besoins constatés des communes qui sont obligées de prendre à leur charge la plus grande partie des frais de l'enseignement. La province de Flandre orientale a reçu sa part proportionnelle.

Je n'ai pas entendu qu'on se soit plaint de l'insuffisance de la part faite à cette province. Si l'honorable membre a des faits particuliers à citer, je le prie de les faire connaître, je pousserai mes investigations plus loin. Ma's en l'absence de griefs articulés, je ne puis donner d'autre réponse, si ce n'est que la situation respective des provinces, sous le rapport des ressources des communes, étant établie, on leur alloue la part à laquelle elles ont droit dans le crédit général.

M. Van Overloop. - D'après la réponse que vient de faire M. le ministre il suffira qu’on le mette à même de reconnaître l'exactitude des faits que j'ai signalés pour que justice soit rendue. Si je n'ai pas pu immédiatement vérifier ces faits, la faute en est au gouvernement. Le gouvernement n'a pas rempli les obligations que lui impose le dernier paragraphe de l'art. 23 de la loi sur l'enseignement primaire.

Aux termes de ce paragraphe il doit être remis un tableau détaillé de l'emploi des fonds votés pour le service de l'enseignement primaire. J'espère que ce tableau nous sera fourni. Je reconnais, d'ailleurs, qu'il n'a pas tout à fait dépendu de l'honorable ministre que nous eussions ce tableau sous les yeux.

En attendant, je remercie M. le ministre d'avoir promis de rendre justice à la Flandre orientale, si mes griefs sont fondés. Je m'attendais à cette déclaration de sa part.

Article 97

« Art. 97. Inspection civile de l'enseignement primaire et des établissements qui s'y rattachent. Personnel : fr. 31,000. »

M. Rodenbach. - Si je suis bien informé, les inspecteurs ont envoyé aux écoles normales des jeunes institutrices une circulaire avec une formule d'engagement que doivent signer les jeunes personnes qui veulent s'adonner à l'enseignement.

Elles doivent prendre l’engagement d'exercer cette profession pendant plusieurs années. C'est à l’âge de 16 ans que ces jeunes personnes se présentent dans les écoles normales, et à cet âge on leur fait signer un acte par lequel elles s'engagent à se livrer à l'enseignement pendant un certain nombre d'années, ou à rembourser les subsides qui leur ont été accordés par le gouvernement.

Les trois quarts de ces jeunes personnes sont sans fortune ; on leur fait signer une obligation de rembourser les dépenses faites pour elles par le gouvernement, si elles renoncent à l'enseignement. De la part du gouvernement imposer à des personnes de 16 ans un engagement semblable, ne me paraît pas très constitutionnel.

De 16 ans à 23 ans on peut changer de vocation, ne plus se soucier d'entrer dans l'instruction, et vouloir s'établir. Vous les forcez de rester là si elles ont le malheur de n'avoir pas de fortune. Je ne pense pas que l'intention du législateur en votant des subsides pour encourager ceux qui voudraient entrer dans l’enseignement ait été d'user de cette rigueur à l'égard de ceux qui n'ont pas le bonheur d'avoir de la fortune.

On a critiqué les engagements qu'on fait prendre aux jeunes personnes qui entrent dans des couvents, parce qu'après quelques années on peut avoir d'autres idées, on peut vouloir entrer dans le monde ; je ne comprends pas, après cela, qu'on exige des jeunes personnes admises dans les écoles normales un engagement qui ne me paraît pas constitutionnel.

Je demande que M. le ministre veuille bien me répondre un mot. Mon opinion n'est pas arrêtée.

Je sais que quand on contracte un engagement, il faut y satisfaire Mais je ne suis pas d'avis qu'un acte aussi rigoureux puisse être exigé d'une jeune fille de 16 ans. Je ne pense pas que cela puisse être admis avec un gouvernement comme le nôtre.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Ce qui n'est pas de nature à être admis dans un gouvernement régulier, c'est que les crédits consacrés à l'enseignement normal soient dépensés en pure perte. Quel a été le but de la loi qui permet d'accorder des subsides pour favoriser l'éducation des jeunes personnes qui se destinent à l'instruction ? C'est d'obtenir des institutrices capables et d'avoir la certitude que les institutrices ne désertent pas au bout d'un an ou deux la vocation qui les appelle à l'enseignement ; c'est que l'Etat retire quelques fruits des sacrifices qu'il s'impose.

C'est pour s'assurer du concours des élèves que les parents ou tuteurs prennent, envers l'Etat, l'engagement de rembourser les subsides, si l’engagement pris par leurs enfants ou pupilles n'est pas rempli. Ce dernier engagement est surtout moral ; l'autre concerne les parents et tuteurs, et il n'a rien que de très légitime. C'est la surveillance de l'emploi des deniers de l'Etat, qui se fait d'une manière très modérée, puisque l'engagement ne s'étend pas au-delà de cinq ans.

L'honorable M. Rodenbach fait observer que beaucoup de parents ou tuteurs ne sent pas en état de rembourser les subsides. Je n'ai pas besoin de dire alors ce qui arrive ; chacun le devine. L'Etat a fait du moins ce qui dépendait de lui pour assurer la rentrée des fonds.

M. Rodenbach. - Je suis satisfait.

- L'article 97 est adopté.

Article 98

« Art. 98. Ecoles normales de l'Etat, à Lierre et à Nivelles. Personnel : fr. 70,200. »

- Adopté.

Article 99

« Art. 99. Traitements de disponibilité pour des professeurs des écoles normales de l'Etat ; charge extraordinaire : fr. 3,500.

« A porter dans la colonne des charges extraordinaires et temporaires. »

M. le président. - Cette proposition est adoptée par la section centrale, qui engage le gouvernement à replacer les professeurs dont il s'agit, autant et aussitôt que possible.

M. Dumortier. - Ces traitements de disponibilité, je les conçois dans des circonstances où ils sont utiles.

Mais je croîs que l'on en a quelquefois abusé. Quand on supprime des fonctions de professeur, qu'on mette le titulaire en disponibilité, c'est tout naturel.

Ainsi quand on supprimera plusieurs des écoles d'agriculture, il y aura peut-être des mesures de ce genre à prendre ; la Chambre avisera. Mais on a fait quelquefois un singulier usage des traitements de disponibilité.

Ainsi, j'ai entendu dire par un de nos collègues qui malheureusement n'est pas présent, qu'on avait donné un traitement de disponibilité à un maître d'équitation, parce qu'on en avait pris un autre.

C'est un véritable abus : un maître d'équitation n'est pas un fonctionnaire public. Il ne faut pas faire de tous ceux qui concourent à l'enseignement des fonctionnaires publics. Il y a des maîtres qui donnent des leçons dans toute la ville, et qui en donnent également au collège. Ce ne sont pas des fonctionnaires publics ; ce sont des auxiliaires.

D'un autre côté, je ne comprends pas les traitements de disponibilité pour les écoles normales, fondées depuis un très petit nombre d'années.

Il faut que les choix aient été bien mauvais pour qu'on doive au bout de quelques années mettre les professeurs en disponibilité. Si l'on persiste dans cette voie, les dépenses s'élèveront bientôt d'une manière disproportionnée avec les ressources du budget.

Je ne blâme pas d'une manière absolue les dépenses de l'enseignement de l'Etat, auxquelles j'ai souvent donné mon approbation. Mais, indépendamment de l'enseignement de l'Etat, il y a l'enseignement libre qui fournit son contingent et un contingent très important.

Je n'admets pas ce qu'a dit M. le ministre de l'intérieur à cette séance même, à savoir que l'enseignement libre peut être considéré comme une concurrence à l'enseignement de l'Etat. C'est là une inconstitutionnalité.

Oui, l'enseignement de l'Etat doit s'établir ; mais en matière d'enseignement, pas plus qu'en autre chose, l'Etat ne doit faire concurrence à la liberté.

Que ditiez-vous si l'Etat faisait des journaux en concurrence avec les journaux du pays ? Assurément vous n'admettriez pas cela.

Eh bien, il en est de la liberté de l'enseignement, comme de la liberté de la presse. L'enseignement de l'Etat, soit ! Mais pas de concurrence ! Il ne faut pas que le gouvernement nuise à la chose la plus sacrée de toutes, à la liberté.

Qu'on admette les traitements de disponibilité en cas de nécessité ; mais qu'on n'en fasse pas matière à ces abus, comme on en voit tant au ministère de l'intérieur.

M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Les critiques que vous venez d'entendre n'ont été faites que parce que l'honorable M. Dumortier ne s'est pas rendu compte de l'objet dont il s'agit. Il ne s'agit pas d'un maître d'équitation, mais de l'enseignement primaire et normal. La demande de crédit pour les traitements de disponibilité est motivée par des circonstances extraordinaires. Dans le courant de 1854, le gouvernement à procédé à la réorganisation des écoles normales.

Par suite de cette mesure plusieurs emplois ont été supprimés, et la dépense a été réduite de 70 mille à 60 mille fr. Six personnes qui avaient rendu de bons services ont perdu leurs emplois. Il est indispensable de venir momentanément en aide à ces positions. C'est pourquoi le gouvernement propose en leur faveur des traitements de disponibilité extrêmement minimes ; car ils s'élèvent à 3,500 fr. Un professeur de langue française qui a été mis à la réforme, et qui jouissait d'un traitement de 1,800 fr., a un traitement de disponibilité de 600 fr. Un autre professeur, qui avait un traitement de 2,500 fr., a un traitement de disponibilité de 800 fr.

Vous voyez, messieurs, que le gouvernement est resté dans des proportions excessivement modestes et qu'il y aurait véritablement injustice à ne pas tenir compte de cette situation.

- L'article est mis aux voix et adopté.

La séance est levée à 4 heures et demie.