Accueil Séances plénières Tables des matières Biographies Livres numérisés Bibliographie et
liens Note d’intention
Séance précédente Séance suivante
Chambre des représentants de Belgique
Séance du mardi 13 mars 1832
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre
2) Projet de loi portant le budget du
département de la guerre pour l’exercice 1832. Discussion des articles.
Matériel militaire (Goblet, d’Elhoungne,
Ch. de Brouckere, Brabant, Ch. de Brouckere, Osy, Delehaye, Destouvelles, Jullien, Leclercq, d’Elhoungne, Gendebien, Ch. de Brouckere, Lardinois,
Lebeau, d’Elhoungne),
traitements des officiers d’état-major (Gendebien, Ch. de Brouckere), traitements des officiers du génie
(Brabant, Ch. de Brouckere),
solde des troupes d’artillerie (Ch. de Brouckere, Brabant), garde civique (Ch. de
Brouckere), frais de route (Ch. de Brouckere, Brabant, d’Elhoungne, Gendebien, Lebeau, Osy,
Ch. de Brouckere, Gendebien,
Delehaye, (+officiers étrangers) (Lebeau,
Gendebien), A. Rodenbach, Lebeau, Destouvelles, Barthélemy), école militaire (Ch.
de Brouckere, Pirson, Gendebien,
Lebeau, d’Elhoungne, Leclercq, Destouvelles)
(Moniteur belge n°75, du 15 mars 1832)
(Présidence de M. de Gerlache.)
La séance est
ouverte à midi et demi.
Après l’appel
nominal, le procès-verbal est lu et adopté.
PIECES ADRESSEES A LA CHAMBRE
M. Lebègue analyse quelques pétitions, qui sont renvoyées à la
commission.
_______________
M. Dautrebande
demande un congé jusqu’àu 25 pour les affaires de son administration.
- Accordé.
_______________
Il est donné
lecture d’une lettre de M. Devaux, ainsi conçue :
« M. le
président,
« Une
indisposition qui m’interdit toute espèce d’occupation m’a émpêché hier, et
m’empêchera encore pendant quelques jours, de prendre part aux travaux de mes
honorables collègues. Veuillez, je vous prie, informer la chambre de la cause de
mon absence.
« Je regrette
d’autant plus vivement cette contrariété, que j’apprends qu’à la séance d’hier,
en mon absence, on a essayé de jeter du doute sur des faits que j’avais
allégués antérieurement et dont il m’aurait été extrêmement facile de prouver
la réalité et l’exactitude.
« Agréez, M.
le président, etc.
« Paul
Devaux. »
PROJET DE LOI PORTANT LE BUDGET DU DEPARTEMENT DE LA GUERRE POUR
L’EXERCICE 1832
Discussion des articles
M. le président. - L’ordre du jour est la discussion des articles du budget de la
guerre.
Chapitre premier. - Administration centrale
Article
3
« Art. 3.
Frais de route et de séjour : fl. 3,000. »
La commission ne
propose aucune réduction.
- L’article est
adopté.
Article
4
« Art. 4.
Matériel du ministère : fl. 31,500. »
La commission
propose de n’allouer de ce chef que 22,000 florins.
M. Goblet. - Messieurs, j’ai fait hier partie de la minorité
qui voulût s’opposer à la réduction de la somme destinée aux traitements des
employés du département de la guerre. Aujourd’hui encore je voterai contre la
diminution que l’on veut apporter dans les ressources matérielles que réclame
ce ministère.
Ce n’est sans
examen, messieurs, que j’adopte en cette circonstance les chiffres du budget
présenté, c’est après y avoir mûrement réfléchi ; et je crois qu’il est de mon
devoir de vous donner en très peu de mots les motifs de mon vote.
A la suite de la
séance d’hier, je n’ai pu me rendre compte de certaines réductions ; je n’ai pu
m’expliquer comment il était possible d’avoir assez de foi dans un ministre
pour voter de confiance, sur sa demande, un contingent d’armée aussi
considérable que celui de la Belgique ; je n’ai pu, dis-je, m’expliquer comment
on pouvait croire ce haut fonctionnaire sur parole, quand il s’agissait de
millions, et ne pas s’en rapporter à la véracité de ses assertions, quand elles
n’avait rapport qu’à peu de milliers de florins destinés à la solde de quelques
employés, dont l’état dans lequel nous nous trouvons rend la présence
indispensable au ministère.
Je me suis demandé
si peut-être la chambre n’avait pas perdu de vue que c’était un budget sur le
pied de guerre qu’elle discutait : et en effet, messieurs, je devais le
supposer en voyant qu’après avoir eu, dans les grandes choses, confiance dans
les capacités du ministre, on résistait à ce même ministre quand il déclarait
qu’il ne pouvait plus à l’avenir conserver la responsabilité si l’on persistait
dans des réductions sur les frais d’administration générale de son département.
Je concevrais,
messieurs, une telle résistance si c’était un budget de paix, un budget sur
lequel on pût faire des essais sans périls, un budget enfin qui dût être le
manuel permanent d’une administration pacifique. Mais non, messieurs, celui que
vous discutez n’aura probablement que deux ou trois mois au plus d’existence,
et vous refusez au ministre qui pendant deux ou trois mois encore veut bien
conserver une pénible responsabilité, vous lui refusez, dis-je, les faibles
sommes qu’il juge indispensables à la conservation et à la mise en mouvement de
forces imposantes, à l’organisation desquelles vous reconnaissez vous-mêmes
qu’il a tant contribué ! Oui, messieurs, je le répète, il faut que l’on ait
perdu de vue que c’est un budget de guerre que nous discutons.
Admettons un
instant que la chambre persiste dans ses réductions, qu’en arrivera-t-il ? Le
ministre pourra-t-il rester en place quand il vous a déclaré hier que vous lui
ôtiez tous les moyens d’une bonne administration ? J’en doute. Mais encore
supposons que son dévouement au pays surmonte les sentiments pénibles qu’il
doit éprouver : que fera-t-il pour subvenir aux besoins du service ? Ne se
verra-t-il pas forcé d’avoir recours à des officiers pour l’exécution du
travail de ses bureaux ? Oui, messieurs, il usera probablement de ce moyen ; il
attirera au ministère des officiers propres à remplacer les employés qu’il sera
forcé de renvoyez ; et croyez-vous qu’alors vos décisions seront une source
d’économies ? Non, messieurs. Je suppose que les cadres de notre armée ne sont
pas tellement complets que le ministre puisse se dispenser de créer de nouveaux
officiers pour remplacer dans les corps ceux que l’on y aura enlevés pour les
employer au ministère.
Mais a-t-on bien
réfléchi à ce que l’on fait en créant des officiers ? Ne sait-on pas que c’est
grever l’Etat de rentes viagères, presque toujours accordées à des jeunes gens
? Ainsi, pour opérer à l’instant même des réductions que vous pourriez obtenir
sans danger, lors de la discussion du budget de paix, vous allez obliger le
ministre, quel qu’il soit, à remplacer des employés temporaires et révocables
par des officiers, c’est-à-dire des employés à vie.
D’ailleurs,
messieurs, ne nous le dissimulons pas, s’il est certainement possible de
trouver dans des officiers autant d’intelligence que dans certains employés,
vous devez renoncer à y rencontrer cette assiduité de bureau qui s’éloigne si
fortement des habitudes militaires, et qui constitue le bon employé de
profession. Vous serez alors bientôt, et naturellement, conduits à vous récrier
contre le grand nombre de militaires occupés au ministère ; et c’est cependant
la chambre qui aura mis le ministre dans la dure nécessité de créer un tel état
de choses.
Telles
sont, messieurs, les considérations qui ont motivé hier mon vote négatif. Voilà
toutes les conséquences de la réduction adoptée ; mais au moins je viens de
vous indiquer un remède, tandis que, pour les articles qui restent à voter, je
ne sais quel moyen le ministre emploiera pour subvenir aux besoins matériels de
son administration, si toutefois vous lui refusez les sommes qu’il déclare être
indispensables pour y satisfaire. C’est ce qui me détermine encore plus
fortement qu’hier à m’opposer à la réduction proposée. Ma conscience me fait un
devoir de repousser ces économies chimériques et même quelquefois
préjudiciables, et de m’attacher à l’idée bien plus constitutionnelle de ne pas
refuser, dans des moments difficiles, les moyens d’administration à un ministre
loyal et consciencieux.
M. d’Elhoungne. - L’honorable préopinant s’étant placé tout à fait
hors de la question pour remettre en délibération ce qui a été décidé hier, je
crois pouvoir me borner à une seul observation. Il a dit que, puisqu’on croyait
bien le ministre de la guerre sur parole quand il s’agissait de millions, on
devait aussi avoir confiance en lui quand il demandait quelques milliers de
florins destinés à la solde des employés. Je ferai remarquer que c’est la même
tactique qu’on employait sous le gouvernement déchu. On entendait alors une
foule de personnes dire : « Nous devons avoir confiance dans les
ministres, dans le gouvernement, dans le Roi. » Mais, messieurs, s’il faut
s’en rapporter en tout à MM. les ministres, notre présence est inutile ici, et
les 1,500 fr. que coûtent chaque jour nos délibérations ne sont qu’un
gaspillage des deniers pubics. La commission a proposé une réduction de 9,500
fl. par des motifs très dignes de considération. Aussi longtemps que ces motifs
n’auront pas été refutés, je voterai contre l’allocation entière que demande M.
le ministre, qui, d’ailleurs, a été entendu au sein de la commission.
M. le ministre de la guerre (M. Ch. de Brouckere). - L’honorable membre a dit que j’avais été entendu
dans la commission. C’est une erreur, messieurs : le fait est que l’on m’a
seulement demandé quelques renseignements, après quoi la commisison est entrée
en délibéré. Quant aux motifs dont a parlé M. d’Elhoungne, je ne les trouve pas
dans le rapport ; il y est seulement dit qu’après un sévère examen la
commission a estimé que 22,000 fl. suffisaient.
Hier,
messieurs, vous m’avez retranché une partie des fonds pour le personnel. Je
conçois très bien que malgré cela l’administration puisse aller, en congédiant,
comme j’ai été obligé de le faire ce matin, quelques employés, et en disant aux
autres : « Vous travaillerez davantage. » Mais quant au matériel, où
rien n’est exagéré, il est impossible de le réduire sans arrêter le service
actuel. Dans le mois dernier, les frais du matériel se sont élevé à 5 mille et
quelques cents fl., ce qui fait annuellement 35,000 fl. Vous voyez donc que la
somme demandée n’est pas trop considérable. Si l’on y met trop de parcimonie,
je le répète, le service ne pourra plus exister tel qu’il est aujourd’hui.
M.
Brabant, rapporteur, explique
sur quels objets ont porté les réductions de la commission. C’est d’abord sur les
frais d’impression ; 2° sur le chauffage, qui a été estimé à 1,500 fl. au lieu
de 3,000 ; 3° sur l’éclairage, évalué à 5,000 fl. au lieu de 15,000 ; 4° sur
les achats de cartes, livres et instruments, à diminuer de moitié ; 5° et enfin
sur les dépenses pour ports de lettres, que la commission a été d’avis de
supprimer.
M. le ministre de la guerre (M. Ch. de Brouckere). - Je ferai remarquer que les impressions sont à part
du papier. On a imprimé 800 mille feuilles l’année dernière. Les impressions de
deux mois se montent à 2,600 fl., ce qui porte le total annuel à environ 17,000
fl. Voilà la base sur laquelle je me suis appuyé. Quant au chauffage, il y a 56
foyers : que l’on calcule, et l’on verra que ce que je demande n’est pas de
trop. Pour achats de cartes, de livres et d’instruments, on veut réduire de moitié,
et on a dit précédemment, pour motiver une économie sur cet objet, qu’il n’y
avait point de livres dans les bureaux du ministère. C’est justement à cause de
cela qu’il faut nous donner les moyens de nous en procurer. Relativement aux
ports de lettres, pour lesquelles on a dit qu’une allocation était inutile, je
ferai observer que ce n’est point pour mes relations à l’intéreur, mais pour
les lettres et surtout les paquets qui me viennent de l’extérieur, que cette
somme est nécessaire.
Parlent
encore pour la réduction : M. Osy, M.
Delehaye, M. Destouvelles, M. Jullien,
M. Leclercq,
M. d’Elhoungne, M. Gendebien,
et contre : M. le ministre de la guerre (M. Ch. de Brouckere), M. Lardinois
et M. Lebeau.
La réduction de la
commission est mise aux voix et rejetée.
Un amendement de M. dElhoungne, tenant à porter l’allocation à 24,000 fl., est également rejeté.
Chapitre II. - Soldes et masses de l’armée
Article
premier
« Art. 1er.
Etat-major-général au traitement d’activité : fl. 410,516 80 c. »
Cette allocation
est maintenue par la commission.
M. Gendebien. - Je ne conçois pas comment on peut donner à un
général 18 rations de chevaux, même en y comprenant ceux des domestiques. Il me
semble qu’il y a lieu de faire une diminution.
M. le ministre de la guerre (M. Ch. de Brouckere). - Les généraux de division (car il n’y a pas de
général en chef) reçoivent 12 rations de fourrages pour 12 chevaux, sur
lesquels il y en a 4 pour fourgons, 3 de main, c’est-à-dire pour les
domestiques, et les 5 autres pour lui. Je ne pense pas que ce nombre soit
exagéré. Les généraux de brigade en ont 8 : 2 pour fourgons, 2 de main, et 4
pour eux. Du reste, nous sommes plus économes sur cet objet qu’on ne l’est en
France.
- L’article est
mis aux voix et adopté sans diminution.
Articles
2 à 4
La chambre adopte,
également sans modification, l’article 2, relatif à l’état-major des places, et
s’élevant à 102,000 fl., l’article 3, relatif à l’intendance militaire, et
montant à 50,574 fl. et l’article 4, relatif à l’état-major et aux employés
d’artillerie à 77,124 fl. 40 c.
La commission
n’avait proposé aucune diminution sur ces divers objets.
« Art. 5.
Etat-major et employés du génie : fl. 137,198 fl. 40 c. »
La commission
propose de déduire de cette somme celle de 25,000 fl. affectée spécialement aux
traitements des ingénieurs civils à employer à l’armée.
M. Brabant, rapporteur, explique que la commission n’a regardé ces 25,000
fl. que comme supplément de traitement des ingénieurs, lequel devait être pris
sur les dépenses imprévues.
M. le ministre de la guerre (M. Ch. de Brouckere) combat cette diminution.
- Elle est mise
aux voix et adoptée. En conséquence le chiffre de l’article demeure fixé à
112,198 fl.
« Art. 6.
Troupes d’artillerie : fl. 2,284,413. »
La commission
propose de réduire cette somme à 2,237,511 fl.
M. le ministre de la guerre (M. Ch. de Brouckere). - Je ne me suis pas opposé à cette réduction, quand
on m’en a parlé ; cependant comme l’effectif des artilleurs a été augmenté de
1,252 hommes, je demande qu’on laisse subsister toute la somme.
- Sur la proposition
de M. Brabant, rapporteur, cet article, ainsi que l’article 7 relatif aux
troupes du génie, l’article 8 aux troupes de l’infanterie et l’article 9 aux
troupes de la cavalerie qui se trouvent dans le même cas, sont renvoyées à la
commission, à l’effet par elle de vérifier l’augmentation d’effectif de ces
divers corps.
Article
10
On passe à
l’article 10 relatif aux dépenses de la gendarmerie, qui s’élève à 736,455 fl.,
et sur lequel la commission n’a rien diminué.
- Cet article est
mis aux voix et adopté.
Article
11
M. le ministre de la guerre (M. Ch. de Brouckere) demande que l’article 11 sur les gardes civiques mobilisés,
montant à 1,934 fl., soit renvoyé aussi à la commission pour vérification,
attendu qu’il se trouve dans la même catégorie que les précédents.
Chapitre III. - Frais divers et indemnités
Article
premier
« Art. 1er.
Frais de bureau de l’état-major général, de l’intendance militaire, de
l’artillerie, du génie et de l’état-major de place : fl. 64,500. »
- Cet article, sur
lequel la commission ne propose aucune diminution, est mis aux voix et adopté.
Article
2
« Art. 2. Frais
de route et de séjour évalués par approximation à 80,000 fl. »
La commission
propose de fixer le chiffre à 25,000 florins seulement.
M. le ministre de la
guerre (M. Ch. de Brouckere). - Chaque jour, nous nous trouvons dans la nécessité
d’envoyer des officiers en mission pour des reconnaissances statistiques, et
trois sont encore partis récemment dans ce but. Il faut qu’à chaque instant
nous soyons au courant de l’état moral de l’armée. Cela est indispensable dans
les circonstances où nous nous trouvons. Je ne crois donc pas qu’il soit
possible d’admettre la rédaction de la commission.
M. Brabant.
- Je crois que nous nous sommes trompés dans la commission ; car nous avons calculé
cet article sur le pied de paix, au lieu de l’évaluer sur le pied de guerre.
M. d’Elhoungne propose, par amendement, de porter le chiffre à 60,000 fl.
M. Gendebien
propose un autre amendement, tendant à accorder 50,000 fl. seulement.
M. Lebeau. - Il me semble que la question est extrêmement
délicate. Ne perdons pas de vue, messieurs, que dans un moment où nous sommes
en état de guerre, il y a une grande part de responsabilité pour la chambre à
introduire au budget dont elle s’occupe des modifications et des réductions.
Remarquez bien que ces réductions, quand elles ont été combattues par le
ministre, dégagent une partie de sa responsabilité et engagent celle de la
chambre. Si M. le ministre de la guerre, calculant le nombre approximatif des
missions, croit que telle somme est nécessaire, il est de la plus haute
importance de la lui accorder ; car il faut qu’il soit à même de surveiller
jour par jour, ainsi qu’il vous l’a dit, le moral de l’armée. On ne doit
proposer de réduction qu’avec une extrême circonspection, afin de ne pas
compromettre le service. Je vote pour l’allocation entière.
M. Osy. - Il me semble que M. le ministre, en réduisant le
tarif des frais de routes, pourrait obtenir les mêmes résultats avec 60,000 fl.
qu’avec 80,000 fl.
M. le ministre de la guerre (M. Ch. de Brouckere). - Le tarif n’est pas trop élevé. Il n’y a de
différence que pour les généraux qui voyagent en poste. Tout officier qui n’a
pas ce grade ne peut le faire sans l’autorisation du gouvernement. (M. le ministre donne lecture de ce tarif
pour démontrer qu’il n’est pas exorbitant.)
M. Gendebien
croit qu’on pourrait le réduire de moitié pour les généraux et officiers
supérieurs, d’un tiers et d’un quart pour les autres. Il insiste pour le
chiffre de 50,000 fl., ou, dans tous les cas, pour celui de 60,000 fixé par M.
d’Elhoungne.
M. Delehaye. - Je crois, messieurs, que, si nous procédions
d’après la doctrine inconstitutionnelle émise par M. Lebeau, il faudrait
renoncer à toute réduction. Mais il n’en est point ainsi ; la responsabilité
pèse toujours sur le ministre ; seulement, si la décision de la chambre ne lui
convient pas, il peut se retirer ; mais la chambre n’engage en rien sa
responsabilité. Du reste, je voterai pour le chiffre de 50,000 fl. proposé par
M. Gendebien.
M. Lebeau. - Je ne crois avoir rien dit d’inconstitutionnel en
expliquant mon opinion. J’ai dit que, lors de la délibération du budget de la
guerre, il incombait à la chambre une responsabilité morale. Je crois que, si
les réductions sont trop fortes et ne sont pas approuvées par le ministre, son
devoir est de se retirer. Mais la chambre aurait sa part de responsabilité.
C’est ainsi que le congrès, en empêchant le gouvernement de puiser à l’étranger
un aussi grand nombre d’officiers qu’il voulait le faire, a commis une faute grave
et a assumé sur lui une grande responsabilité, puisque c’est à ce défaut de
prévoyance que nous devons en partie notre désastre. Evidemment, si les moyens
que l’on veut allouer sont insuffisants au point de compromettre le service
militaire, nous serions cause, en les adoptant, du mal qui en résulterait. A
part la responsabilité légale du ministre, il en est une aussi pour la chambre
quand elle réduit le budget en temps de guerre. Aussi je déclare que je ne
voterai de diminution que celles consenties par le ministre de la guerre. Je
n’entends attaquer les intentions de personne, mais c’est une question
consciencieuse que j’émets.
M. Gendebien. - La conséquence de la théorie de M. Lebeau, c’est que
nous devons clore la séance et que le budget n’est pas discutable. Ce n’est pas
ainsi, messieurs, que nous devons entendre notre mission. Nous avons le droit
de discuter et de proposer des réductions ; seulement le ministre pourrait se
retirer, et ce serait la seule leçon qu’il pourrait nous donner, si toutefois
il peut nous donner une leçon.
Maintenant
on a dit que le congrès avait commis une faute en empêchant d’engager des
officiers étrangers. Messieurs, je déclare que j’ai fait partie de ceux qui se
sont opposés à cette mesure quand j’ai su qu’on avait jeté les yeux sur un
général anglais, après que j’avais vu des envoyés de cette nation travailler,
pendant quatre ou cinq mois, en faveur de la famille déchue, et quand j’ai su
qu’on avait fait des démarches sans l’autorisation du régent, à ce que je
crois, pour notre réunion à la confédération germanique. Voilà les motifs pour
lesquels j’ai été un des opposants, et j’ai cru avoir fait mon devoir. Au
surplus, le congrès n’a pas refusé, mais accordé l’autorisation que le
gouvernement lui demandait.
M. A. Rodenbach. - Lorsque M. de Brouckere nous demande 28,400,000 fl.
pour une armée de plus de 80,000 hommes sur pied de guerre, je suis convaincu
que nous aurons cet effectif. Je ne confonds pas ce ministre avec ses
prédécesseurs qui se sont si scandaleusement joués de notre bonne foi. Ils
osèrent tromper le congrès, ces imposteurs officiels, en portant l’armée à
57,000 combattants. Ils eurent même l’impudence de demander des subsides pour
68,0000 hommes, tandis qu’il est avéré qu’il n’y avait pas 30,000 soldats
d’Anvers à la Meuse.
La patrie a été
mise à deux doigts de sa perte par la perfidie et l’ineptie de ces hommes, qui
ont su rendre inutiles le patriotisme et le courage du peuple et de l’armée.
Mais
brisons là-dessus en égard de la chambre, qui a décidé que le passé était
irrévocable.
Je demande pardon
à la chambre de revenir sur le passé ; c’est M. Lebeau qui nous a placés sur ce
terrain, en parlant sans cesse de cette responsabilité légale qui jusqu’à
présent n’a été qu’une mystification.
M. Lebeau. - Je demande la parole pour un fait personnel.
Messieurs, on a été jusqu’à dire de moi, qui ne me suis jamais mêlé de
l’administration de la guerre, que j’avais envoyé en Allemagne dans le but d’y
déterrer quelques notabilités militaires.
Plusieurs voix. - Non, on n’a pas dit cela.
M. Lebeau. - On a ajouté que c’était de mon chef et sans
l’autorité de M. le régent que j’avais fait cette démarche. Notez que les
pouvoirs de la personne qui a été envoyée pour cette mission ont été données en
conseil des ministres, et signés par M. le régent. Du reste, je ne crains pas
de publier le but que je m’étais proposé, c’était de faire entrer la Belgique
dans la confédération germanique sous le rapport commercial. Qu’on relise la
note qui a été imprimée à cet égard, et l’on verra quelle était mon intention.
Quant à l’allégation que j’aurais pu le faire sans l’autorisation de M. le
régent, je n’ai pas besoin de la repousser ; je crois inutile de descendre à
une pareille justification.
M. Destouvelles. - Je ne vois pas pourquoi, à l’occasion de frais de
routes et de séjour, on va voyager sur les bords du Rhin. (On rit.) Je demande qu’on en revienne au budget.
M. Barthélemy annonce qu’il votera pour le chiffre de M. d’Elhoungne.
- La discussion
est close.
L’amendement de M.
d’Elhoungne fixant l’allocation à 60,000 fl., auquel se rallie M. Gendebien,
est mis aux voix et adopté.
Articles
3 et 4
« Art. 3.
Transports généraux évalués approximativeent à 180,000 fl. »
La commission
propose 100,000 fl. seulement.
- Ce chiffre est
mis aux voix et adopté.
_________________
« Art. 4. Chauffage
et éclairage des corps de garde : fl. 80,000. »
- Cette
allocation, maintenue intégralement par la commission, est adoptée.
Chapitre IV. -
Service de santé
Article
unique
« Art.
unique. Service de santé : fl. 576,972. »
La commission propose
de fixer cette dépense à 520,172 fl. Seulement.
- Cette réduction
est mise aux voix et adoptée.
Chapitre V. - Etablissements militaires
« Art.
1er. Ecole militaire : fl. 38,552. »
La commission
propose de n’accorder que 18,552 fl.
M. le ministre de la guerre (M. Ch. de Brouckere) s’oppose à cette diminution parce qu’il est
nécessaire d’avoir une pépinière de bons officiers, et il annonce qu’une loi
relative à l’établissement d’une école militaire est déjà faite, et qu’en outre
le règlement organique de cette école est prêt également.
M. Pirson, M. Gendebien
et M. Lebeau
appuient l’allocation demandée.
M. d’Elhoungne, M. Leclercq
et M. Destouvelles soutiennent que ce n’est pas dans le budget qu’il faut consacrer en
principe la nécessité d’une école et qu’aussi longtemps qu’une loi n’aura pas
été votée sur cet objet, il n’y a pas lieu à accorder de fonds.
- La proposition
de la commission, réduisant le chiffre de 18,000 fl., est mise aux voix et
adoptée.
La séance est
levée à 4 heures 1/2.