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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 27 janvier 1857

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1856-1857)

(Présidence de M. de Naeyer, vice-président.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 571) M. Crombez procède à l'appel nominal à 1 heure et quart.

Il donne ensuite lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est approuvée, et communique l'analyse des pièces adressées à la Chambre.

Pièces adressées à la chambre

« Des meuniers à Schoorisse demandent que le gouvernement envoie dans leurs moulins un fonctionnaire chargé de vérifier les faits sur lesquels ils s'appuient pour obtenir le retrait de l'arrêté royal du 9 octobre 1855, en tant qu'il prescrit d'une manière absolue l'usage des balances romaines. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Les membres du conseil communal de Grune demandent que la compagnie concessionnaire du chemin de fer de Luxembourg établisse une station à Marloye et que le gouvernement construise une route de raccordement entre le pont de Harsin et le village de Jemeppe. »

« Même demande des membres du conseil communal de Bande. »

- Même renvoi.


« Des habitants de la Hulpe demandent l’établissement d'un bureau de poste dans cette commune. »

- Même renvoi.


« Le sieur Van Bellinghen, soldat au 11ème régiment de ligne, demande l'autorisation de contracter mariage. »

- Même renvoi.


« Le sieur Wauthier demande que le docteur en droit qui se présente à un examen de candidat notaire soit dispensé de subir une nouvelle épreuve sur les matières comprises dans l'examen pour le doctorat en droit. »

M. Lelièvre. - J'appuie cette pétition et je demande qu'elle soit déposée sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur le jury d'examen.

- Adopté.


« Des négociants en tourteaux et des agriculteurs dans les deux Flandres demandent la libre entrée des tourteaux oléagineux. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi portant révision du tarif des douanes.


« Des habitants de Bande présentent des observations sur la situation que font à l'agriculture les droits sur les houilles et sur les fontes. »

« Mêmes observations d'habitants de Clermont, Fallais, Ousselghem, Braibant, Melin, Herenthals, Beauvechain, Lillois-Witterzée, Ebben-Emael, Marche-lez-Ecaussinnes, Waeken, Wéris, Tirlemont et des conseils communaux d'Ittre et Sars-la-Buissière. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi portant révision du tarif des douanes.

Projet de loi sur les jurys d’examen universitaire

Discussion des articles

Titre premier. Des grades académiques et des jurys d'examen

Chapitre premier. Des grades
Article 2

M. de Naeyer. - M. Lelièvre vient de proposer un amendement ainsi conçu :

« Les docteurs en droit, aspirant au grade de candidat notaire, sont dispensés de l'épreuve prescrite par le présent article. »

M. Lelièvre. - L'amendement que j'avais proposé à l'article 8 me paraît plus convenablement placé à l'article que nous discutons. Il se justifie, du reste, par des motifs irrécusables. Celui qui a obtenu le grade de docteur en droit a fait preuve de capacité, il a subi des épreuves multipliées, de sorte que quand il aspire au grade de candidat notaire, il est impossible de l'astreindre encore à une épreuve préparatoire. A mon avis, un docteur en droit pourrait même sans inconvénient être nommé notaire sans devoir subir aucun examen ultérieur ; à plus forte raison, doit-il être dispensé de l'épreuve préparatoire dont s'occupe notre disposition. Les examens qu'il a subis donnent pleine garantie à la société.

M. Moreau. - Messieurs, je ne viens pas m'opposer à l'amendement des honorables MM. Lelièvre et Tack, qui tend à dispenser de certains examens les docteurs eu droit qui veulent obtenir le grade du candidat au notariat.

Au contraire, je désirerais que la Chambre fît un pas de plus, car je voudrais que, dans un temps à déterminer, et sans enlever, bien entendu, à personne des droits acquis, nul ne pût être nommé notaire s'il n'était docteur en droit.

La loi de ventôse, comme vous le savez, n'exigeait, pour être nommé notaire, qu'un certificat de moralité et de capacité délivré par la chambre des notaires ; on reconnut les inconvénients que présentait ce mode de s'assurer de la capacité des candidats et la loi de 1849 remplaça ce certificat par un examen subi devant un jury spécial. On croit aujourd'hui que cet examen n'est pas encore suffisant, puisque le projet de loi actuellement en discussion y ajoute encore quelques garanties de plus.

Eh bien, je convie la Chambre à aller encore un peu plus loin. Si en 1849, on n'a pas exigé des conditions aussi rigoureuses, c'est probablement parce qu'on a trouvé des inconvénients à passer subitement d'un régime à un autre si différent.

Mais maintenant le temps, ce me semble, est venu d'entourer ces fonctions si importantes de plus fortes garanties et même d'une plus haute considération.

Il importe que le notaire connaisse autre chose que les éléments du droit civil, si l'on veut qu'il mérite la confiance du public ; comme conseiller des familles, il faut qu'il puisse les éclairer, les instruire sur les conséquences des actes qu'il est appelé à recevoir, et il est nécessaire qu'il soit capable de résoudre la plupart des difficultés qui se présentent et au besoin de les prévoir pour éviter des procès souvent ruineux aux parties.

Je pose, messieurs, en fait que si les notaires avaient fait tous des études complètes de droit, le nombre des procès diminuerait considérablement, car il suffit de fréquenter les tribunaux pour être convaincu que souvent des actes notariés incomplets et faits avec peu de soin donnent lieu à des difficultés que les tribunaux doivent trancher.

Le notaire, on le sait, est dépositaire de la fortune de bien des familles et quand son incapacité peut la compromettre gravement, ne convient-il pas qu'elles trouvent dans l'officier public dont elles doivent se servir de plus fortes garanties, lorsqu'on peut certes les obtenir, sans inconvénients, sans nuire à aucun intérêt légitime ?

Chose assez étrange, dans notre législation, s'il s'agit d'un procès souvent de minime importance, dont le principal ne s'élèvera pas même au-delà de 800 fr., l'on exige impérieusement que le juge appelé à le décider soit docteur en droit, et vous ne voudriez pas offrir les mêmes garanties aux parties qui vont peut-être confier toute leur fortune à un homme qui, à défaut de notions suffisantes de droit, peut causer leur ruine !

En y réfléchissant bien, l'on doit, ce me semble, reconnaître qu'il y a des motifs très plausibles pour exiger dorénavant des candidats notaires, ce qu'on demande aux candidats juge de paix, c'est-à-dire des conditions que l'on pouvait regarder jadis trop rigoureuses pour les uns, comme pour les autres, mais qui ne le sont plus aujourd'hui.

La mesure que je viens d'indiquer aurait encore ce bon résultat qu'elle tendrait à augmenter la considération dont le notaire doit jouir et à relever le corps honorable auquel il appartient dans l'estime publique.

En donnant aux docteurs en droit seuls la faculté d'arriver au notariat, il faut bien le reconnaître, on aurait plus de chance d'avoir des hommes capables, dignes d'être revêtus de ces fonctions, el l'on en éloignerait des candidats qui laissent beaucoup à désirer et qu'on ne peut pas toujours repousser, Si donc je pouvais espérer que ma manière de voir serait partagée par la majorité de la chambre, je présenterais un amendement dans le sens que je viens d’indiquer à l’article 36. J’ai cru devoir faire connaître ma manière de voir, parce qu’à l’article 2 il est question de « candidat notaire », ces mots pourraient être rayés de cette disposition, si l'article 36 était modifié comme suit :

« Nul ne peut être nommé, notaire si, indépendamment des autres conditions requises, il n'a obtenu le grade de docteur en droit ou s'il n'a subi devant le jury l'examen de candidat notaire.

« Trois ou quatre ans, si l'on veut, après la publication de la présente loi, nul ne sera plus admis à subir l'examen mentionné dans l'article 17. Les articles 43 et 44 de la loi du 25 ventôse an XI sont abrogés, le n°4° de l'article 35 et les dispositions des articles 36 inclus 42 de la même loi ne sont pas applicables aux docteurs en droit. »

Ces articles ne concernent que le stage et les certificats de capacité, ainsi cet amendement, messieurs, a encore une autre portée que celle que je viens de vous indiquer,

Il donne, dès maintenant, au gouvernement la faculté de nommer notaires les docteurs en droit, sans les soumettre à de nouveaux examens, et il dispense ceux-ci de la justification du stage.

Ces dispositions ne sont en quelque sorte que le corollaire de la première.

Peut-on, en effet, concevoir que le docteur en droit puisse être nommé juge, conseiller, officier du parquet, ainsi être revêtu des plus hautes fonctions de la magistrature, sans subir de nouvel examen, sans avoir fait, de stage et qu'il ne puisse être nommé notaire, à moins d’être examiné de nouveau.

Ou prétendra peut-être qu'un docteur en droit peut très bien ne pas connaître les lois organiques du notariat, les lois financières qui s'y rattachent et la rédaction des actes ; sans doute, cela peut être souvent vrai, mais celui qui, après avoir régulièrement fait des études de droit complètes, aura obtenu le grade de docteur en droit, s'il se destine au notariat, n'acquerra-t-il pas avec la plus grande facilité des connaissances, soit par le travail, soit par la pratique dans une bonne étude de notaire, et le gouvernement ne pourra-t-il pas toujours s'assurer des (page 572) connaissances du postulant sur ces matières sans le soumettre à un examen devant un jury ?

Le juge, le magistrat, le professeur, pour bien remplir leurs fonctions respectives, ne doivent-ils pas connaître parfaitement bien des lois, bien des dispositions qu'ils n'ont pas apprises et qu'on ne leur a pas enseignées dans l'école ?

Et cependant, les soumet-on, avant de les nommer, à des examens spéciaux sur ces matières ? Interroge-t-on, par exemple, le juge sut le tarif des frais et dépens en matière civile et criminelle, sur les lois nombreuses de police non comprises dans le Code pénal, sur tous les décrets qui ont encore aujourd'hui force de loi, enfin sur toutes les lois fiscales dont il peut être appelé à faire l'application le lendemain de son installation ?

Pourquoi se montre-t-on plus exigeant pour le notariat ?

Ce serait faire chose en quelque sorte contradictoire que de l'être, car que fait-on actuellement ? D'un côté on exige moins du candidat au notariat que de celui qui aspire à un siège dans la magistrature, puisqu'on le dispense d'études complètes de droit, tandis que d'un autre côté, on se montrerait plus difficile, si l'on ne se contentait pas pour le notariat du diplôme de docteur en droit, si l'on demandait en outre des examens sur des matières spéciales.

S'il en était ainsi, le docteur en droit, qui aura fait partie de l'administration de l'enregistrement, le procureur du roi qui aura surveillé les notaires, le professeur même chargé de donner dans une université le cours du notariat devraient subir un examen devant le jury, s'ils voulaient devenir notaires.

Ce que je viens de dire de l'examen spécial dont je demande la suppression pour les docteurs en droit s'applique au stage.

Forcer ceux-ci à croupir six années dans une étude, c'est, ce me semble, éloigner de cette carrière les jeunes gens instruits qui certes ne sont guère désireux de s'astreindre à semblable obligation.

Le stage n'est guère avantageux qu'aux notaires, en ce qu'il les dispense de payer leurs clercs, mais fait comme il l'est actuellement, il est plutôt funeste qu'utile au notariat, parce qu'il en écarte des hommes capables et les plus dignes d'être revêtus de ces importantes fonctions.

Il faut que l'état de clerc de notaire soit une véritable profession, et que ce ne soient plus en général les candidats notaires qui soient chargés de leur besogne dans les études.

Sans doute, ceux qui se destineront à la carrière du notariat devront toujours fréquenter une bonne étude pour acquérir les connaissances pratiques qui leur manquent, mais ils ne doivent plus être astreints à remplir l'office d'expéditionnaires, de clercs pendant de nombreuses années et par là être empêchés de se livrer à des études régulières du droit.

Ce que je désire donc, c'est que le gouvernement puisse toujours choisir, parmi les docteurs en droit, les hommes les plus capables et les plus dignes de la mission qu'il veut leur confier, c'est qu'on ne limite pas son choix, en lui permettant de le faire parmi des hommes auxquels leur dignité même n'aurait pas permis de s'astreindre à la fréquentation prolongée d'une étude de notaire.

Le gouvernement pourra donc toujours demander des certificats de stage ; mais il s'enquerra, comme bon lui semblera, des connaissances pratiques des candidats, et il pourra nommer notaire celui qui les aura acquises sans avoir été ni expéditionnaire, ni clerc.

En résumé, messieurs, dans mon opinion, le titre de docteur en droit doit être une condition suffisante pour les fonctions de notaire, comme il l'est pour la magistrature et le professoral ; je veux laisser au gouvernement le soin d'apprécier comme il l'entend les autres titres des candidats, sans lui imposer d'autres limites que celle de faire son choix parmi des candidats qui ont obtenu le grade de docteur en droit, voilà ce que je demanderais à la Chambre de sanctionner dans l'intérêt du public et de la dignité du notariat si je savais qu'elle est disposée à adopter ma manière de voir.

Projet de loi accordant un crédit supplémentaire au budget du ministère de la guerre

Dépôt

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Messieurs, le Roi m'a chargé de présenter à la Chambre un projet de loi tendant à ouvrir au département de la guerre un crédit extraordinaire de 1,600,000 francs pour travaux d'achèvement et d'amélioration du matériel d'artillerie et du génie.

- Il est donné acte à M. le ministre de la présentation du projet de loi qu'il vient de déposer.

Ce projet et les motifs qui l'accompagnent seront imprimés, distribués et renvoyés à l'examen des sections.

Projet de loi sur les jurys d’examen universitaire

Discussion des articles

Article 2

M. Rodenbach. - J'appuierai l'amendement de M. Lelièvre tendant à exempter les docteurs en droit des examens préparatoires ainsi que de l'examen sur le Code civil, puisqu'ils ont déjà fait preuve de connaissances en ces matières. Mais je ne puis partager l'opinion de l'honorable préopinant que, pour devenir notaire, il faudrait être docteur en droit ; il me semble que c'est aller beaucoup trop loin. Ce n'est pas le même principe que celui qui a dicté l'amendement de M. Lelièvre ; c'est au contraire augmenter les exigences, car ce serait exiger des candidats notaires ce qu'on n'exige pas des avoués.

En effet, quand des jeunes gens ont travaillé pendant quelques années chez un avoué, ils sont autorisés à plaider au chef-lieu d'arrondissement, ils remplissent les fonctions d'avocat ; il y en a même qui plaident avec une grande distinction et ont une nombreuse clientèle. On n'exige pas, pour être avoué, le diplôme de docteur en droit, et vous l’exigeriez pour être notaire !

Une foule de jeunes gens qui ne sont pas doués de la fortune, qui ne peuvent pas aller étudier aux sièges des universités, sont forcés de se borner à étudier dans l'étude du notaire qui est à leur portée.

L'amendement serait donc dirigé contre les personnes qui ont peu ou point de fortune. Je sais qu'il y a une foule d'avocats saris cause dans le pays ; à Bruxelles seulement on en compte 200 inscrits ; si on y joignait ceux qui ne le sont pas, on arriverait au moins à 400 ou 500, peut-être, même à mille ; on peut dire que dans tout le pays il y a infiniment plus d'avocats que de causes.

Je ne pense pas qu'on puisse vouloir en faire des notaires ; ce serait créer en leur faveur un privilège que de leur dire -.Vous êtes docteurs en droit, vous pourrez être notaires tandis que ceux qui n'ont pas de fortune, qui n'ont pas pu venir dépenser au siège de l'université une partie de la fortune de leurs parents et se sont bornés à travailler sérieusement dans une étude, vous voulez les empêcher de devenir notaires ! Cette proposition est illibérale, et cette idée ne me paraît pas acceptable. Je combattrai donc de toutes mes forces cet amendement, si l'honorable membre se décide à le proposer.

Mais je crois qu'il y a une autre modification à apporter à l'article 53. Des jeunes gens ont étudié pendant nombre d'années le notariat chez les notaires, ils n'ont pu subir encore des examens.

Eh bien, par la loi actuelle on exige encore de ces jeunes gens, qui ont quelquefois atteint l'âge de 30, 31, 32 ans, qu'ils connaissent le latin, les mathématiques, la langue française, la langue flamande, la géométrie, enfin une foule de connaissances sur lesquelles, à leur âge, il leur est impossible de passer un examen. Je crois qu'il serait rationnel d'apporter à cet égard une modification à l'article 53.

Messieurs, je le répète, j'appuie l'amendement de l'honorable M. Lelièvre, par les motifs que j'ai donnés et je combats de toutes mes forces l'amendement annoncé par l'honorable M. Moreau.

M. Julliot. - Messieurs, je pense que l'honorable M. Moreau n'est pas bien renseigné sur le nombre de victimes qu'il ferait si le système qu'il préconise était adopté.

L'honorable député de Verviers veut que, dès à présent, tout docteur en droit puisse être nommé notaire sans subir ni examen spécial ni stage. Le préopinant veut encore que, dans deux ou trois ans, nul candidat notaire actuel ne puisse plus être appelé aux fonctions de notaire sans qu'il soit avocat ou qu'il passe un nouvel examen devant le jury. Eh bien, voyons où l'on aboutirait ; il y a pour le moment six cent vingt candidats qui aspirent à occuper un notariat, ce chiffre est annuellement renforcé par soixante-cinq candidats nouveaux en moyenne, et la moyenne des notariats qui s'ouvrent annuellement est de quarante-cinq. Or, les quatre cinquièmes de ces malheureux n'arriveront jamais à leur but ; ils seront renforcés chaque année par vingt nouveaux venus qui aussi seront de trop, et le conseil que je donne au grand nombre de ces candidats, c'est de se tourner vers d'autres directions en cherchant leur avenir dans d'autres occupations, car dans la carrière de leur choix il n'y a rien à faire pour eux.

Mais à côté des avocats il est une autre catégorie d'hommes qui aussi pourraient réclamer le bénéfice qu'on propose au profil des avocats, ce sont les avoués sans causes ; mais je me garderai de les produire, ce serait une contradiction en présence de la pléthore que je viens de signaler ; néanmoins, je tiens à démontrer qu'il serait difficile de s'arrêter quand on élargit la porte à d'autres qu'aux candidats notaires.

Sous l'empire de la loi de 1849, le greffier de la justice de paix peut être nommé notaire sans se soumettre à des examens. Cette faveur a été puisée, je pense, dans l'idée d'améliorer le sort de ces fonctionnaires, le cas échéant.

Je dis donc qu'à côté des avocats qu'on veut favoriser on trouve les avoués qui ont plus de dix ans d'exercice et qui n'ont plus de clientèle parce que la jurisprudence de la cour de cassation, d'une part, et le bon sens public qui ne plaide plus pour plaider, d'autre part, ont dépouillé ces hommes en fait de leurs moyens d'existence ; et ces avoués sont plus nombreux qu'on ne pense, mais je le répète, je ne propose rien, car après avoir signalé le mal, je me garderai de l'aggraver et je voterai contre les avocats de l'honorable M. Moreau, si la question nous est posée.

M. Coomans. - Supprimez les avoués ; cela vaut beaucoup mieux.

M. Moreau. - Messieurs, en terminant son discours, l'honorable M. Julliot, sans demander formellement d'augmenter le nombre des concurrents lorsqu'une place de notaire devient vacante, s'est cependant intéressé aux avoués et aux juges de paix qui, jadis, pouvaient être nommé notaires sans avoir justifié de leur capacité, au moyen d'un examen spécial. Il a appelé du moins l'attention du gouvernement sur cette mesure, en lui conseillant en quelque sorte de la prendre ; il ne craint donc pas autant qu'il le paraît de voir augmenter le nombre des postulants.

Du reste, si cela était même, où serait le mal ? Je le répète, je ne veux enlever à personne des droits acquis ni lut porter préjudice.

(page 573) Quel mal y aurait-il, en effet, si surtout par là je mets le gouvernement à même de faire de meilleurs choix, si même j'écarte du notariat des candidats peu dignes d'entrer dans ce corps respectable qui doit jouir de la considération publique ?

Je ne me le dissimule pas, messieurs, mon unique but est de relever la dignité du notariat, de le placer aussi haut que possible dans l'estime publique, de l'élever en quelque sorte au rang de la magistrature.

Le législateur commet-il une injustice à l'égard de qui que ce soit, lorsqu'il range sur la même ligne que les candidats notaires actuels des personnes qui réunissent même à un plus haut degré qu'eux les conditions d'idonéité pour être notaire ?

La même objection a-t-elle arrêté la Chambre lorsqu'elle a décidé que pour être juge de paix, il fallait être docteur en droit ? S'arrêter, messieurs, devant les considérations qu'on vient de vous présenter, ce serait se déclarer ennemi de tout progrès.

Je n'ai pas présenté pour le moment d'amendement à la Chambre, cependant j'appelle son attention sur la mesure que j'ai indiquée et dont l'adoption, selon moi, donnerait de bons résultats.

(page 579) M. Devaux. - Messieurs, l'examen d'élève universitaire a une double influence ; il agit à la fois sur l'enseignement moyen et sur l'enseignement supérieur.

Dans l'enseignement moyen, son action s'étend aux élèves et aux professeurs. Il a le privilège de stimuler les professeurs, ce que ne peuvent faire les moyens d'émulation employés dans l'intérieur de ces établissements. Que le professeur travaille, qu'il mette du zèle dans l'accomplissement de ses fonctions ou qu'il n'en mette pas, ses élèves, dans leurs concours entre eux, n'en auront pas moins des prix ; il y aura toujours des premiers et des derniers.

Au contraire, le grade d'élève universitaire a pour effet d'exciter le zèle du professeur, afin qu'aucun de ses élèves n'échoue à l'examen.

Sur les élèves, le caractère propre de l'influence de cet examen, c'est aussi d'avoir un effet tout différent de celui des autres moyens d'encouragement.

Les concours agissent sur les plus forts dans une classe ; ils ont peu d'effet sur les autres, sur ceux qui ne peuvent espérer des prix. Or, dans une classe d'enseignement moyen, il y a trois catégories d'élèves : les très forts, qui sont ordinairement cinq à dix sur cent ; d'autres plus médiocres qui forment la masse ; et puis, en troisième lieu, les élèves les plus faibles, dont il n'y a point de succès à espérer.

Les concours agissent principalement sur la première classe. Le grade d'élève universitaire a pour effet d'agir principalement sur la classe la plus nombreuse, sur celle des élèves de seconde force. C'est là une influence que rien ne peut remplacer. Il n'y a là rien dont un élève de force ordinaire doive désespérer. Les prix de sa classe peuvent être au-dessus de sa portée, mais en travaillant il peut toujours espérer son diplôme.

C'est cette action sur la masse des élèves qui fait le mérite de l'examen, en ce qui concerne l'instruction moyenne. Cet examen repose en quelque sorte sur le minimum de force qu'il faut avoir pour entrer à l'université et non pas sur le maximum.

Si vous consultez l'enquête, vous serez frappés, messieurs, de l'importance qu'un grand nombre de professeurs attachent, sous ce rapport, à l'examen d'élève universitaire. Ce ne sont pas seulement des professeurs laïques, ce sont aussi des professeurs d'établissements ecclésiastiques. Ainsi, par exemple, le professeur du petit séminaire de Bastogne regarde le principe de l'examen comme excellent et comme étant une garantie pour les bonnes études moyennes et supérieures.

Le supérieur du collège de la Sainte-Vierge de Termonde dit que « l'examen est devenu un stimulant irrésistible, que c'est un moyen puissant de relever les humanités, qu'il étend son influence sur les établissements. »

Le supérieur du collège ecclésiastique de Saint-Trond dit que « l'abolition de l'examen exerce une très mauvaise influence sur les fortes études. » Celui du collège de Dinant, également dirigé par des ecclésiastiques, atteste que « si depuis l'abolition le travail est plus libre et plus littéraire, l'ardeur est moindre, et il règne une négligence très grande dans plusieurs cours. » Le professeur du collège de Pusembourg, à Malines, soumis à la même autorité, convient que « profondément modifié, l'examen peut être utile comme stimulant. »

L'influence, messieurs, de ces examens sur l'enseignement supérieur a un autre caractère, et cette influence a également été reconnue non seulement par les professeurs laïques, mais aussi par des professeurs ecclésiastiques. On nous a cité le professeur de rhétorique de Courtrai, qui déclare qu'à son avis il y a une faute immense à laisser envahir les universités par les incapables, et que le pays s'en ressentira longtemps,. La même opinion est professée avec une grande énergie par le supérieur du petit séminaire de Bastogne.

Messieurs, permettez-moi d'attirer votre attention sur un genre de considérations et sur des faits qui ne vous ont pas encore été soumis.

Peu de temps après l'abolition de l'examen d'élève universitaire, un honorable professeur de Tournai, une notabilité de l'opinion catholique, M. Leschevin publia une brochure pour faire voir combien la société était intéressée à ce qu'on n'ouvrît pas les portes des universités à tous ceux qui veulent s'y précipiter sans être capables de suivre les hautes études.

Il insista principalement sur le danger social qu'il y a à voir échouer une masse d'élèves dans les universités, faute d'être suffisamment préparés aux études universitaires, ces élèves venant ensuite augmenter le nombre des mécontents, le nombre des gens qui se sont fourvoyés, en prenant une carrière pour laquelle ils ne sont pas faits.

Je désire que la Chambre connaisse jusqu'où peut aller le mal et quelle est, sous ce rapport, l'influence précise de l'examen d'élève universitaire.

Je désire que vous sachiez combien, sous le système antérieur à l'examen d'élève universitaire, il y a eu d'étudiants qui oui manqué leur carrière dans les universités. Je crois que quand vous connaîtrez le mal, il vous effrayera.

Je prends la période antérieure à l'établissement de l'examen d'élève universitaire. Que se passait-il sous cette période ? Combien d'élèves entraient chaque année dans les universités ? Nous n'avons pas le chiffre officiel, mais nous avons un autre chiffre officiel qui nous donner d'une manière assez approximative le nombre d'élèves qui entraient, chaque année dans les quatre facultés, avec l'intention d'arriver au doctorat.

Il y a, non pas au seuil de l'université, mais à la fin de la première année des études universitaires, deux examens par lesquels tous les élèves des quatre facultés doivent passer. C'est l'épreuve préparatoire à la candidature en sciences, épreuve qu'ont à subir tous les élèves qui se destinent à la médecine et tous ceux qui se destinent à un doctorat quelconque dans les sciences. C'est en second lieu l'examen de candidat en philosophie et lettres qui se trouve à la fin de la première ou de la deuxième année d'études de la faculté de philosophie et par lequel doivent passer tous les élèves qui se destinent au droit et tous ceux qui se destinent au doctorat en philosophie et lettres. Ainsi tous les élèves qui poursuivent un doctorat dans une des quatre facultés, doivent passer par un de ces deux examens.

Nous avons le chiffre exact des élèves qui se sont présentés annuellement à ces deux examens.

Je prends les chiffres des trois années qui ont précédé immédiatement l'établissement du grade d'élève universitaire, et je trouve que pour les trois années 1846, 1847 et 1848, le nombre des élèves qui se sont présentés à ces deux examens a été en moyenne de 321 par an. Or, de ce nombre (page 580) combien étaient annuellement admis à ces deux examens ? En moyenne pas plus de 200. Il y en avait donc 121 sur 321 qui n'étaient pas admis.

Voyons maintenant quelle a été l'influence du régime d'élève universitaire. Sous ce régime, dans les trois dernières années, il s'est présenté à l'examen, année moyenne, non pas 321 élèves, mais 236 ; ainsi voilà 85 jeunes gens que le grade d'élève universitaire a arrêtés au seuil de l'université, et empêchés d'y aller perdre leur temps et l'argent de leurs parents.

Maintenant combien de ces 236 récipiendaires ont passé les examens dont il s'agit ? 159 ! Ainsi, il y avait ici un déchet, non pas de 121, comme dans la première période, mais de 77 seulement.

M. de Theux. - Combien d'admis et combien d'inscrits ?

M. Devaux. - 236 se faisaient inscrire et 159 étaient admis. Différence entre le nombre des inscrits et le nombre des admis, 77. Dans le cas précédent la différence était de 121.

M. Malou. - C'est à peu près la même proportion.

M. Devaux. - Vous allez voir ; poursuivons. Nous voyons là d'un côté 121 élèves qui ont passé leur temps et donné leur argent aux universités et qui sont arrêtés dans leur carrière, c'est 44 de plus que dans l'autre cas.

Mais, ce n'est pas tout de passer un examen, il y en a d'autres à subir avant d'arriver au but, qui est le doctorat. Pour ne pas vous fatiguer par une série de chiffres, arrivons tout de suite au résultat.

Sur les 321 inscrits dans le premier cas, combien arrivaient au doctorat, c'est-à-dire au résultat de leurs études ? 96 annuellement dans les trois années qui ont précédé l'établissement de l'examen d'élève universitaire, 96 sur 321, c'est-à-dire que, dans l'absence du grade d'élève universitaire, plus des deux tiers des élèves qui entrent à l'université n'aboutissent a aucun résultat.

Maintenant voyons ce qui se passe à cet égard sous le second régime, celui qui arrête les incapables au seuil de l'université. Combien sous ce régime entre-t-il d'élèves aux universités ? Ce n'est plus 321, mais seulement 236. Combien, sous ce même régime du grade d'élève universitaire, les universités produisent-elles annuellement de docteurs dans les quatre facultés ? La moyenne des trois dernières années est de 135.

Ainsi d'un côté, 96 docteurs annuellement, sur une moyenne annuelle de 321 élèves ; dans le second cas 159 docteurs sur 236 élèves. C'est-à-dire que sous le premier régime il y a seulement 29 élèves sur 100 qui atteignent le but de leur études ; sous le second il y en a 59, c'est-à-dire plus du double.

Ainsi, messieurs, sans l'examen d'élève universitaire, 71 jeunes gens sur 100 manquent le but de leurs études en allant aux universités. Je vous demande si l'intérêt des familles, l'intérêt des jeunes gens, celui des universités, celui de la société, ne sont pas d'accord pour demander un examen préalable aux études universitaires.

Que voulez-vous que deviennent dans les universités ces deux tiers de leur population qui n'y viennent que pour échouer dans leur carrière, les uns une année plus tôt, les autres une année plus tard, dont une partie doit nécessairement se décourager du travail, finir par donner aux autres le mauvais exemple de la dissipation et de tous les écarts qui attendent la jeunesse inoccupée ? Voulez-vous une nouvelle preuve que c'est bien incontestablement à l'absence de cet examen que la plus grande partie de ce résultat a été due dans la première période ? Voyez ce qui arrive de nouveau depuis l'abolition du grade. Elle n'a pu produire encore que ses premiers fruits. Nous ne pouvons comparer encore le nombre des docteurs, car les docteurs qu'on a faits depuis l'abolition avaient tous passé par cet examen.

Voyons d'abord dans quelle proportion est augmenté le nombre des élèves qui se présentent à ces deux premiers examens par où doivent passer les docteurs des quatre facultés. J'ai dit que sous le régime du grade d'élève universitaire, ce nombre était annuellement de 236, le grade étant aboli, combien s'en est-il présenté en 1856 ? Pas moins de 436 ; c'est-à-dire qu'il y a une augmentation de près du double.

Or la plupart de ces 200 élèves dont le nombre total s'est accru se sont dirigés vers la médecine par la faculté des sciences.

Voyons ce qu'ils y sont devenus. Remarquez bien que c'est précisément vers la médecine, c'est à dire là où la société réclame le plus de garanties, que se dirigent les trois quarts de ces élèves incapables qui l'examen arrêtait.

Ces élèves se présentent à l'épreuve préparatoire à la candidature en sciences ; il y en avait sous le régime du grade d'élève universitaire, année moyenne pendant les trois dernières années, 79. En 1856, il s'en est fait inscrire 220. Précédemment tous étaient ordinairement admis à l'exception d'une quinzaine. En 1856 dans cette seule faculté, pour ce seul examen, il y a une différence de 85 entre les inscrits et les admis. L'université de Louvain à elle seule compte dans ce chiffre pour 49.

Voilà les victimes de l'abolition du grade d'élève universitaire, et ce n'est là que le commencement. On peut prédire que des 436 élèves entrés aux universités en 1855, il y en a près de 300 qui manqueront le but de leurs études ; et c'est là un chiffre annuel !

Voyez, messieurs, en quel nombre les jeunes gens désappointés dans leur carrière doivent se trouver au bout d'une quinzaine d'années, et dites si perpétuer un tel état de choses, ce ne serait pas propager de gaieté de cœur les maladies sociales.

J'entendais dire hier à un honorable orateur : « Qu'importe qu'il y ait, dans les universités, des élèves au-dessous de l’enseignement universitaire, qui ne le comprennent pas ? Que le professeur reste à sa hauteur, ils ne le suivront pas. Voilà tout ! » Mais n'est-ce rien que d'avoir autour de la chaire du professeur des hommes au-dessous de soir enseignement, qui ne le comprennent pas ? Ils ne travailleront pas, et s'ils ne travaillent pas, que feront-ils ? Ils nuiront aux autres de toutes les manières, même sous le rapport de l'instruction. Car c'est presque une plaisanterie de dire à un professeur : Maintenez votre enseignement à sa hauteur, en présence d'élèves qui ne le comprennent pas.

Ce serait un véritable supplice pour un professeur de parler pendant une année sans être compris des deux tiers de ceux qui l'entendent. C'est là précisément le grand mérite de l'enseignement oral, que le professeur sent constamment l'effet qu'il produit sur l'esprit des élèves, et que, par cette communication instinctive et incessante qui s'établit entre lui et son auditoire, son enseignement s'adapte sans cesse et presqu'à son insu à l'intelligence de ses auditeurs.

Les élèves incapables, lorsqu'ils sont en grand nombre, n'y sont donc pas seulement inutiles, mais, par l'effet de leur présence, il faut que l’enseignement s'abaisse.

Le remède proposé par la section centrale est-il suffisant pour obvier au mal qu'a entraîné l'abolition de l'examen préalable ?

Je suis grand partisan des certificats en matière d'enseignement supérieur. Quand nous en serons là, je les soutiendrai et je démontrerai ce que vaut le dilemme qu'on y a opposé, dilemme qui consiste à dire : « Ou l'enseignement est sérieux ou il ne l'est pas ; s'il est sérieux, exigez l'examen ; s'il ne l'est pas, supprimez-le. » Je ferai voir ce que vaut ce dilemme. Les certificats, en matière d'enseignement moyen, sont tout autre chose qu'en matière d'enseignement universitaire. Les certificats, comme les propose la section centrale, isolés de tout examen, ne donnent pas la garantie que l'élève a fait des études sérieuses.

Quand vous avez à examiner sur certaines matières un élève qui présente des certificats, vous pouvez, en l'interrogeant sur les matières importantes, vous assurer si c'est un élève sérieux. Mais ici il s'agit de certificats produits par des élèves qui ne subissent aucun examen. Les élèves produisent des certificats au sortir du collège. Le juge du certificat n'a pas le droit de les interroger. On ne peut pas faire les études universitaires dans sa chambre. Mais l'enseignement moyen se donne dans la famille.

Un jeune homme qui a fait ses humanités a tout ce qu'il faut pour donner l’enseignement moyen. Comment apprécier des certificats délivrés par des centaines de jeunes gens qui ont le droit de donner cet enseignement, qui soit peut être capables de le donner, mais qui sont parfaitement inconnus ? Il n'en est pas de même dans l'enseignement supérieur ; les hommes capables de donner l’enseignement supérieur sont connus dans leur localité.

Mais si les certificats de la section centrale pouvaient se vérifier, quel serait le résultat de ce système ? Les certificats, même sérieux, arrêteraient-ils les incapables au seuil de l'université ? Stimuleraient-ils les incapables dans le collège ? Les certificats constateraient que les élèves ont fait leurs humanités. Ils empêcheraient un certain nombre d'élèves de sortir du collège trop tôt. Cela est vrai. Cependant les élèves qui voudraient abréger le pourraient en produisant des certificats en dehors du collège. Mais ces certificats stimuleraient-ils les incapables dans le collège ? Non ; les incapables arriveraient jusqu'en rhétorique tant bien que mal et obtiendraient un certificat.

Ces certificats ne leur imposeraient aucune obligation de travail ; ils n'éloigneraient pas les incapables de l'université ; ils n'en éloigneraient que ceux qui, dans le collège, n'auraient pas achevé leurs études.

Je désire résoudre toutes les questions de la loi actuelle avec une grande modération. Je désire avoir beaucoup d'égard pour les répugnances et les convictions de ceux qui ne partagent pas mes opinions. Les certificats ont obtenu dans leurs rangs une certaine faveur. Je ne veux pas plus les exclure que ne les exclut M. le ministre de l'intérieur. Ils sont insuffisants ; mais je reconnais qu'ils ne peuvent pas nuire. Je reconnais que si l'on ne se borne pas à cela, ils peuvent être de quelque utilité, je viens de dire laquelle, c'est de retenir dans les collèges un certain nombre de jeunes gens qui n'ont pas terminé leurs humanités. Mais pour contrôler les certificats, il faut absolument qu'ils soient accompagnés de quelque chose qui permette aux jurys de reconnaître que l'élève qui se présente est un élève sérieux.

Je suis toujours disposé, dans les questions de ce genre, à apprécier toutes les objections et à en tenir compte.

J'ai lu avec une grande attention l'enquête, et je suis bien éloigné de vous dire : Ne tenez compte que des avis exprimés d'un côté. Je voudrais tenir compte de ce qu'il y a de raisonnable des deux parts. Mais dans les objections qui sont faites contre toute espèce d'examen, il faut distinguer les motifs. Distinguons les motifs raisonnables de ceux qui ne le sont pas.

L'enquête atteste qu'il y a en Belgique 66 établissements d'enseignement moyen. Si la Belgique avait le tiers de ces établissements, 22 établissements d'enseignement moyen dans de bonnes conditions d'enseignement, où l'on ferait de bonnes études, je crois qu'elle pourrait se féliciter. Elle serait, sous ce rapport, à la tête de toutes les nations de l'Europe.

(page 581) Il est impossible d'espérer d'avoir en Belgique soixante-six établissements d'instruction moyenne au niveau d'un bon enseignement ; le personnel enseignant ne suffit pas. Si l'on en avait le tiers, ce serait un fait très heureux. Je suppose qu'on l'ait. Eh bien, dans les quarante-quatre autres établissements, il y a encore divers degrés, et évidemment au dernier degré de l'échelle, il doit s'en trouver qui n'aiment pas le jury d'examen ; il doit se trouver des établissements dont les élèves y échouent quelquefois. Cela doit faire naître dans ces régions des répugnances contre l'examen, mais de pareils motifs sont de ceux que nous ne pouvons pas écouler, ce serait sacrifier les fortes études aux établissements les plus faibles.

A ces répugnances, nous ne devons pas avoir plus d'égards qu'à celles de quelques professeurs d'université qui trouveraient bon de grossir le nombre des élèves faibles, à raison des minervals qu'ils payent. Ces objections, nous ne devons les tenir pour rien. Mais quant à celles qui ont des motifs légitimes, qui sont inspirées par quelques craintes raisonnables, nous devons y avoir plus d'égards. La première crainte qu'il faille apaiser, c'est celle qui concerne la liberté de l’enseignement. Il y a des établissements qui se plaignent que cet examen n'offre pas assez de garanties pour la liberté. Evidemment, messieurs, nous pouvons exiger de cet examen absolument les mêmes garanties que des autres. Je ne sache pas que la liberté d'enseignement ait à se plaindre (et tout le monde a été d'accord là-dessus dans cette Chambre) des autres examens. Il n'y a donc pas de raison pour qu'elle n'ait pas la même garantie de l'examen d'élève universitaire.

Nous pouvons, si nous le voulons, arriver au même résultat et, sous ce rapport, je suis d'avis de donner satisfaction complète aux craintes qui se sont exprimées dans l'enquête.

Vient une seconde catégorie d'objections : ce sont celles qui se rapportent à la liberté des méthodes.

Je pense qu'il n'est nullement désirable qu'il y ail unité de méthodes dans les divers établissements d'instruction publique en Belgique. Je crois qu'il est surtout dans la mission de l'enseignement privé d'être varié dans les méthodes. C'est là que je voudrais voir prendre les initiatives quelquefois un peu hardies, que je voudrais voir les essais. Je ne me plains que d'une chose ; c'est que cet enseignement n'ait pas assez d'initiative, ne fasse pas assez d'essais et je ne voudrais certainement pas le décourager par un examen qui jetterait tous les établissements dans le même moule.

Il faut donc que l'examen respecte la liberté des méthodes ; que l'enseignement public reste libre de ses moyens et qu'il puisse y avoir diversité dans ses voies.

Enfin, messieurs, il y a un troisième ordre d'objections faites à cet examen, et desquelles je tiens aussi grand compte.

On s'est plaint généralement que l'ancien examen nuisît à la partie littéraire de l'enseignement par le trop d'exercices auxquels il assujettissait la mémoire des élèves. Eh bien, je suis encore complètement d'avis qu'il faut décharger l'examen de tout ce qui a cette tendance. Et cet avis n'est pas nouveau ; car c'est parce que je le voulais que j'ai demandé, au mois de février 1855, qu'on introduisît dans la loi provisoire un article qui permît au gouvernement de réduire les matières d'examen pour le grade d'élève universitaire. C'est à l'occasion de cet amendement, que j’avais présenté, que fut produit un autre amendement qui demandait l'abolition du grade d'élève universitaire et que cette abolition fut prononcée.

Tout ce qui s'est dit sous ce rapport dans l'enquête est en quelque sorte la répétition des observations qui avaient été présentées dans cette Chambre et en grande partie de ce qui avait été dit par moi contre le programme trop chargé de l'examen.

Je suis donc encore disposé à avoir égard aux plaintes élevées à ce sujet.

Messieurs, qu'avait-on fait dans le premier examen d'élève universitaire ? Il y avait, je pense, dix-neuf branches sur lesquelles l'élève était interrogé ou devait faire des exercices. Il y avait l'explication d'auteurs latins, l'explication d'auteurs grecs, une composition française, une composition latine, une version grecque, une traduction dans une langue moderne, l'histoire des empires orientaux, l'histoire de la Grèce, l'histoire romaine, l'histoire du moyen âge, l'histoire moderne, l'histoire de la Belgique, la géographie ancienne, la géographie moderne, l'algèbre, la géométrie, la trigonométrie et les notions de physique. Ce qui exigeait surtout des efforts de mémoire, c'étaient les branches d'histoire. Il y avait cinq ou six cours d'histoire sur une partie de chacun desquels il fallait répondre.

Eh bien, le gouvernement propose de retrancher treize de ces dix-neuf matières et de retrancher principalement tout ce qui avait pour effet de charger la mémoire. C'est là le programme qui a été adopté par le gouvernement, qui avait été indiqué par la majorité de la section centrale pour le cas où les certificats marqueraient, et par la minorité pour le cas où l'on mettrait l'examen à la place des certificats.

Il reste donc seulement six branches.

On a dans l'enquête adressé deux questions aux préfets des études et aux professeurs de rhétorique. On a demandé leur avis sur l'effet de l'abolition du grade d'élève universitaire, et sur la rédaction du programme qu'ils voudraient voir adopter si ce grade était rétabli. Eh bien, dans la réponse que font les adversaires de l'institution sur le programme qu'il faudrait assigner à l'examen d'élève universitaire dans le cas où il serait rétabli, je crois qu'aucun ne va aussi loin dans les retranchements que le gouvernement en ce moment.

En effet, que demande-t-on en général ? On dit qu'il faudrait renfermer le programme dans les matières enseignées en rhétorique, et ne pas le compliquer des matières enseignées les années précédentes. Le gouvernement va beaucoup plus loin. L'examen ne comprendrait plus toutes les matières enseignées en rhétorique ; il n'en comprendrait que les principales. C'est là une grande différence.

Maintenant l'examen proposé par le gouvernement à quoi se réduit-il ? Une composition française, une traduction du latin en français et du français en latin, une version grecque, voilà toute la partie littéraire. Je demande aux honorables membres qui redoutent cet examen en quoi il peut nuire ? Une composition française, une traduction latine, une traduction grecque ne surchargeront pas la mémoire ; l'élève ne fera aucun effort de mémoire dans l'année, pour pouvoir faire une bonne composition française, une bonne traduction latine, une bonne version grecque, car il ne saura pas sur quoi portera la composition, il ne saura pas ce qu'il devra traduire. Que fera l'élève ? II apprendra à bien composer en français, il s'attachera à bien apprendre le latin, à bien apprendre le grec ; or c'est précisément là l'essentiel. L'examen viendra donc en aide au professeur, et je ne conçois pas quel obstacle le professeur pourra rencontrer dans l'examen.

L'examen peut-il nuire à la liberté des méthodes ? Nullement. Dans tous les collèges on enseigne la rhétorique, et par conséquent la composition française ; dans tous les collèges on enseigne le latin et le grec ; eh bien, on ne demande aux élèves que de prouver qu'ils savent composer en français, qu'ils connaissent le latin et le grec. Servez-vous de telle méthode que vous voulez, ayez cinq classes, quatre classes ; employez la grammaire, suivez la méthode Jacotot, suivez telle méthode que vous jugez convenable, peu importe, on ne vous demande que des résultats ; on vous demande une composition française, une traduction latine et une version grecque. L'enseignement privé peut s'arranger comme il l'entend, on ne lui demande qu'une seule chose, c'est le résultat.

Maintenant pense-t-on qu'il y ait quelque chose de plus à retrancher ? Qu'on le dise. Par exemple, serait-on gêné du grec ? Je pense qu'on peut se rassurer à cet égard, car dans les établissements de l'Etat le grec occupe très peu de place.

M. de Theux. - Il est enseigné partout.

M. Devaux. - Ainsi l'objection ne porte pas sur le grec. Le grec, tel qu'il est enseigné dans les établissements de l'Etat, ne doit pas effrayer, car ce grec est très élémentaire. On le commence seulement à la fin de la cinquième et on y consacre au plus trois ou quatre heures de clause par semaine, de sorte que les élèves sont faibles en grec, dans les établissements de l'Etat comme dans les autres ; c'est un malheur, mais il n'a pas été possible d'exiger davantage faute de temps.

J'arrive, messieurs, aux mathématiques. Il y a, sous ce rapport, des craintes exprimées dans l'enquête. J'ai entendu dire à l'honorable M. de Haerne, l'autre jour, que dans les établissements de l'Etat les mathématiques prédominent, tandis que dans les établissements ecclésiastiques c'est la partie littéraire.

M. de Haerne. - Dans quelques-uns.

M. Devaux. - L'honorable M. de Haerne est très bien renseigné sans doute sur l'état des établissements dirigés par des ecclésiastiques, car il est, je pense, inspecteur de l'enseignement moyen dans le diocèse de Bruges ; mais l'honorable membre est mal renseigné sur ce qui concerne les établissements de l'Etat. Dans les établissements de l'Etat comme dans les autres les mathématiques occupent une place secondaire et je vais en donner une preuve péremptoire. Combien de temps consacre-t-on aux langues ? (Je ne parle que de la section des humanités, les élèves de la section professionnelle n'ont pas à passer l'examen universitaire.) Combien de temps consacre-t-on dans les athénées à l'étude des langues ? En général dans chacune des sept classes, en moyenne 20 heures en tout 134 heures par semaine pour les sept classes. Et combien de temps consacre-t-on aux mathémathiques ? En moyenne un peu plus de 2 heures de classe, par semaine et par classe, pour toutes les classes réunies 20 heures.

Ainsi, d'un côté 134 heures pour les langues et, d'autre part, 20 heures pour les mathématiques, voilà la proportion, c'est-à-dire que les mathématiques, dans les établissements de l'Etat, ne prennent pas la sixième partie du temps qui est consacré aux matières littéraires. Vous voyez donc, messieurs, que sous ce rapport on s'est trompé, et que les établissements de l'Etat ne sont pas ce qu'on pense. L'enquête révèle une chose, c'est que, dans les établissements de l'Etat, on conduit les mathématiques non pas aussi loin qu'on le faisait il y a vingt et quarante ans, lorsqu'on y étudiait la géométrie analytique jusqu’aux sections coniques, mais qu'on les conduit plus loin dans les établissements de l'Etat que dans les établissements privés.

Dans les établissements de l'Etat on fait toute la géométrie élémentaire, tandis que dans les établissements ecclésiastiques on ne va, je pense, que jusqu'à la fin de la géométrie plane, c'est-à-dire la première moitié.

Je ne voudrais pas, messieurs, que l'on condamnât les établissements de l'Etat à ne plus voir toute la géométrie élémentaire, mais je ne veux pas non plus forcer les établissements privés à en voir la dernière partie s’ils attachent du prix à s'en tenir à la géométrie plane.

(page 582) M. de Haerne. - Il y a encore le programme du concours, qui est plus chargé que le programme de l'examen d'élève universitaire.

M. Devaux. - Nous parlons du programme que M. le ministre de l'intérieur propose pour l'épreuve préparatoire. Ce programme consiste en deux problèmes d'algèbre, appartenant aux équations du second degré et deux théorèmes de géométrie, appartenant à la géométrie à trois dimensions, c'est-à-dire à la deuxième moitié de la géométrie élémentaire. Ce programme n'a pas été connu des établissements qui ont pris part à l'enquête, le rapport de la section centrale n'était pas distribué à l'époque où l'enquête a eu lieu.

Ils ont eu connaissance, paraît-il, de la proposition, tendant à substituer le certificat à l'examen ; mais ils n'ont pas eu connaissance du programme proposé par la minorité de la section centrale ; s'ils en avaient en connaissance, bien des craintes se seraient effacées.

Je ne veux nullement forcer les établissements privés à enseigner la géométrie à trois dimensions et je crois que, sous ce rapport, le programme proposé par la section centrale et adopté par M. le ministre de l'intérieur pourrait encore être réduit.

Ainsi, au lieu de deux théorèmes appartenant à la géométrie à trois dimensions, on pourrait dire : deux théorèmes appartenant à la géométrie plane ou, au choix du récipiendaire, à la géométrie à trois dimensions. Il faut l'alternative ; sans cela, si vous mettiez seulement la géométrie plane, vous condamneriez les établissements du gouvernement à abandonner la seconde partie de la géométrie ; les élèves de la dernière année voient cette partie de la géométrie ; il ne faut donc pas les forcer à être interrogés à la fin de cette année sur la première partie qu'ils ont vue l'année précédente.

Maintenant que reste-t-il dans le programme des mathématiques qui soit gênant pour les établissements libres ? Je demande qu'on le dise franchement.

Dans les établissements privés comme dans les autres, on enseigne l'algèbre ; eh bien, le programme n'exige, en fait d'algèbre, que deux problèmes appartenant aux équations du second degré. Par cette rédaction, on écarte de la partie élémentaire de l'algèbre plusieurs théories qui peuvent présenter des difficultés. Ainsi on ne demandera plus la théorie du plus grand commun diviseur, celle de la division des polynômes, etc., on se bornera à la solution de deux problèmes. Ce qu'on exige là peut s'apprendre par un homme fait en une vingtaine de leçons. Il n'y a pas d'établissement privé qui puisse être effrayé d'un tel enseignement.

En ce qui concerne la géométrie, deux théorèmes de géométrie plane ou de géométrie à trois dimensions ne présentent certes rien d'effrayant, soit pour l'enseignement libre, soit pour l'enseignement de l'Etat.

Maintenant, s'il reste dans le programme quelque chose qui gêne les méthodes de l'enseignement privé, qu'on veuille bien nous le dire. Pour ma part, je suis persuadé que dans du programme ainsi rédigé et pour la partie littéraire et pour la partie mathématique, il n'y a rien qui puisse gêner un établissement quelconque, à moins que ce ne soit un établissement indigne de porter le nom d'établissement d'instruction publique. (Interruption.)

Remarquez que la géométrie se trouve réduite à la géométrie plane ; peut-on retrancher certains théorèmes de la géométrie plane ? (Nouvelle interruption.)

Du reste, l'élève qui démontre les deux théorèmes n'est pas tenu de faire cette démonstration d'après Legendre, comme on me l'objecte, il peut la faire d'après un autre auteur.

Remarquez bien que la section centrale a simplifié beaucoup l'examen de candidat en philosophie et lettres ; il y a plus, l'épreuve préparatoire à la candidature en sciences, dont je parlais tout à l'heure, et qui arrête un si grand nombre d'élèves après la première année d'université, alors surtout que le grade d'élève universitaire n'existe pas ; cette épreuve préparatoire est abolie par la section centrale ; ainsi, le premier examen en sciences sera désormais l'examen de candidat en sciences ; raison de plus pour conserver les barrières de l'examen d'élève universitaire, si vous ne voulez pas laisser envahir les facultés par les élèves incapables.

On a parlé d'introduire dans cette épreuve quelques matières de philosophie. J'avoue que cela me paraît une confusion d'idées dont je ne comprends pas les motifs.

Pourquoi faudrait-il introduire dans cette matière quelques éléments de philosophie ? Pour forcer les élèves à aller étudier aux universités avant de subir un examen. Qu'on laisse les élèves libres d'aller à l'université avant de subir l'examen, je ne m'y oppose pas ; mais je ne puis concevoir qu'on force ceux des élèves qui sont assez forts pour subir immédiatement l'examen, d'aller apprendre la philosophie et de subir ensuite un examen et sur la philosophie et sur les matières de l'enseignement moyen, un an après qu'ils auront abandonné le collège, c'est évidemment augmenter la difficulté.

- Un membre. - Cela avait lieu pour la candidature en sciences.

M. Devaux. - Oui, avant 1849 ; mais on a voulu modifier cet état de choses par la loi du 15 juillet 1849, et depuis lors l'épreuve préparatoire à la candidature en sciences ne porte plus que sur la philosophie.

Mais pourquoi voulez-vous forcer les élèves qui viennent d'achever leurs études moyennes, qui en sont pleins et qui peuvent dans ce moment-là faire le mieux les travaux qu'ils faisaient dans les classes du collège pourquoi voulez-vous les forcer d'aller oublier tout cela à l'université ? Je ne le comprends pas.

Vous voulez mettre la philosophie dans l'examen d'élève universitaire, et la section centrale, au contraire, écarte presque toute la philosophie de l'examen de la candidature ; elle trouve que cette matière ne doit figurer que pour une de ces trois branches dans l'examen de candidat en philosophie et lettres, et vous voulez l'introduire dans l'examen d'élève universitaire !

Vous voulez fortifier les élèves à l'université ; je ne m'y oppose pas ; mais je dois vous avertir que vouloir faire de l'enseignement moyen à l'université, c'est de l'utopie ; l'enseignement moyen à l'université doit avoir des résultats beaucoup plus faibles qu'au collège ; pourquoi ? Vous allez le comprendre tout de suite.

Que fait-on à l'université ? Un professeur donne par semaine deux ou trois heures de leçon ; mais les élèves ne font ni devoirs, ni exercices. Comment apprend-on le latin, comment apprend-on à écrire en français ? Par des exercices et par des devoirs qu'on fait tous les jours ; à l'université on n'en fait pas.

Le professeur n'a pas le temps de corriger les devoirs d'un si grand nombre d'élèves, en si peu de temps.

L'enseignement moyen sans devoirs écrits est une utopie. Après de bonnes études dans un établissement d'enseignement moyen vous pouvez recevoir à l'université certains suppléments d'instruction classique, notamment des notions de philologie plus savantes que celles que vous pouvez trouver dans le collège ; mais on ne vous y apprend ni à écrire en français ni à écrire en latin ; les exercices nécessaires à cet effet ne peuvent se transporter à l'université.

Placer l'enseignement moyen à l'université, c'est d'ailleurs aller à rencontre des vœux des pères de famille, car cela aboutit à amener le jeune homme une année plus tôt dans les villes universitaires. Or, ne sait-on pas que les pères de famille redoutent ce moment où les jeunes gens sont complètement abandonnés à eux-mêmes, et que bien loin de l'avancer ils préféreraient qu'il pût être retardé ?

Messieurs, il se passe dans cette discussion quelque chose qui mérite réellement d'être remarqué. La Chambre, il y a deux ans, dans un moment de précipitation, prit une mesure dont, depuis lors, on aperçut les inconvénients.

Qu'arrive-t-il ? Que tout le monde reconnaît qu'on a été trop loin ; il n'est personne qui s'obstine à soutenir ce qui a été fait. Le gouvernement a été le premier à revenir sur ses pas, la majorité le suit et celui même qui avait originairement proposé la mesure contre laquelle on revient, reconnaît ouvertement qu'il y a lieu de ne pas s'en tenir à ce qui avait été fait.

Messieurs, c'est un beau spectacle que cette abnégation d'amour-propre dans une assemblée législative ; c'est une marche toute belge. Nous pouvons commettre des erreurs, mais nous ne nous obstinons pas lorsque le bon sens nous commande de les réparer. Décidons, messieurs, la question tout entière dans un pareil esprit ; il est facile d'éviter que cette disposition de la loi contienne un grief pour aucun parti ; ayons égard de part et d'autre à toutes les objections raisonnables, à toutes les craintes légitimes.

Il y a moyen de nous contenter tous ; en réalité, il ne s'agit que d'une question de programme. Le programme peut très bien suffire aux exigences des uns, sans exciter les craintes des autres, et c'est là tout le problème. Entendons-nous.

Nous désirons tous le progrès des études et la liberté d'enseignement ; le gouvernement a fait une proposition, si vous la trouvez trop étroite, élargissez-la, si vous le croyez nécessaire, faites une autre proposition. Mais, de grâce, n'embarrassez pas les universités d'élèves incapables, n'embarrassez pas la société de jeunes gens qui ont rêvé une position qu'ils n'ont pu saisir et qui s'aigrissent de leur humiliation et de leurs déceptions.

N'empêchez pas l'enseignement supérieur de se relever, faisons un effort en commun et nous pouvons atteindre à an même but sans que personne ait à se plaindre.

(page 573) M. de Theux, rapporteur. - Messieurs, tous les projets de loi sur l'enseignement supérieur ont donné lieu dans cette enceinte à de profondes discussions et tous ont subi de profondes modifications. En effet, la loi qu'il s'agit de remanier aujourd'hui, présenté en 1849, quant à l'organisation du jury, laissait au gouvernement la liberté absolue quant à la forme du jury, quant à la nomination des membres du jury et cela à perpétuité. D'autre part, ce projet...

M. de Naeyer. - Permettez, M. de Theux, un amendement vient d'être déposé par M. de Brouckere.

Il reprend l'article 2 de la rédaction primitive du projet du gouvernement à laquelle M. le ministre a substitué une rédaction nouvelle.

M. Lelièvre propose d'ajouter à cet article un paragraphe ainsi conçu :

« Cette épreuve confère à celui qui l'a subie le titre d'élève universitaire. »

La parole est continuée à M. de Theux.

M. de Theux. - Je disais donc que tous les projets de loi sur l’enseignement ont subi dans cette enceinte des discussions approfondies et aussi des modifications profondes.

Ainsi le projet de loi de 1849 attribuait au gouvernement à perpétuité la formation du jury, c'est-à-dire d'un jury central ou d'un jury combiné ou toute autre forme qu'il jugerait bon d'imaginer, la nomination illimitée des membres du jury et, quant au président, le pouvoir de casser les décisions du jury, soit sur l'admission, soit sur le rejet. Ce projet rencontra une grande opposition dans les sections et au sein de la section centrale qui y introduisit les modifications suivantes :

Le projet fut limité à trois ans ; le pouvoir du gouvernement fut limité en ce qui concerne le choix des professeurs, il devait comprendre le même nombre de professeurs des enseignements libres que de l'enseignement de l'Etat ; le pouvoir exorbitant attribué au président fut rayé.

Vous voyez donc qu'alors que le gouvernement disposait d'une majorité de quatre voix contre une, la Chambre n'a pas abdiqué ses prérogatives d'examen et le gouvernement s'est rallié au vote de la Chambre.

L'honorable M. Rogier, auteur du projet de 1849, a cru que la Chambre avait en vue de le féliciter, par son dernier vote, de l'organisation faite en 1849. Il y a à cet égard une erreur d'appréciation.

Au milieu des difficultés qui se présentaient pour une autre combinaison, et reconnaissant que les jurys combinés offrent des garanties certaines d'égalité, la Chambre s'est trouvée en majorité pour maintenir ces jurys. En même temps elle a inséré une formule en termes plus ou moins couverts, mais stipulant virtuellement que la composition des jurys ne pourrait être réglée au gré de l'administration. En ce point la Chambre a été d'accord avec M. le ministre de l'intérieur.

Nous sommes d'accord sur le but que nous voulons atteindre, le gouvernement et les deux partis de la Chambre. Mais nous différons sur les moyens. Dans la section centrale, cinq membres contre deux ont cru que ces certificats constatant les études d'enseignement moyen rempliraient mieux le but que les examens et ne présenteraient aucun de leurs inconvénients. Voilà la question vraiment à discuter.

Si cette opinion n'est pas partagée par la Chambre, nous aurons à examiner les garanties du jury et les matières d'examen obligatoires. Sous ce rapport, je reconnais avec plaisir que l'honorable M. Devaux s'est montré très conciliant.

Dans mon opinion, le rétablissement du grade d'élève universitaire proposé par l'honorable M. Lelièvre présenterait des inconvénients très graves, je crois pouvoir en énumérer quatre.

D'abord, l'examen du grade d'élève universitaire n'a pas profité à l'enseignement moyen. Au contraire, il y a nui. C'est ce que je démontrerai tout à l'heure par des chiffres. En second lieu, il a donné naissance à des craintes pour les établissements libres, et ces craintes se sont révélées dans la discussion de 1855.

Des griefs avaient même été souvent articulés auparavant. L'honorable M. de Haerne en a indiqué la source. Elle était dans la composition des jurys pour l'examen du grade d'élève universitaire qui était loin d'offrir pour les établissements libres les mêmes garanties que les jurys universitaires. A ce point de vue, si les examens sont prescrits, je donnerai la préférence au jury proposé par M. le ministre de l'intérieur, c'est le jury universitaire et pour ce jury nous avons trouvé une formule garantissante.

L'examen d'élève universitaire a exercé une influence fâcheuse sur les élèves qui ayant terminé leur rhétorique ont perdu la meilleure partie de leurs vacances et une influence défavorable sur les professeurs de l'enseignement moyen qui au lieu de jouir d'un repos nécessaire dans une carrière aussi pénible devaient consacrer une partie de leurs vacances à l'examen des élèves.

Je disais que l'examen du grade d'élève universitaire avait été nuisible aux études moyennes. On pourrait alléguer comme première preuve de cette assertion les résultats du concours institué par le gouvernement. Vous savez que d'après la loi sur l'enseignement moyen, tous les établissements des communes subsidiés ou patronnés doivent prendre part au concours. Or, il résulte d'un tableau que j'ai sous les yeux, que les résultats du concours ont été beaucoup plus défavorables après 1850 et qu'ils ne se sont relevés qu'en 1856, c'est-à-dire la seconde année qui a suivi la suppression du grade d'élève universitaire.

Ainsi, en 1850, sur les épreuves réunies à l'exclusion des mathématiques, il a été décerné deux prix. En 1851 sur les épreuves réunies, il a été décerné un prix, mais à mesure que l'examen du grade d'élève universitaire se prolonge le résultat devient moins favorable. Ainsi, en 1852 il n'y a pas de prix. En 1855 il y a deux prix pour le discours français et pour le discours latin. En 1854 il n'y a pas de prix, si ce n'est un pour le discours français. En 1855, première année de l'abolition du grade d'élève universitaire, il y a deux prix : l'un pour le thème latin, l'autre pour la version latine. En 1856 il y a quatre prix: un thème latin, une version latine, deux discours français ; le grade d'élève universitaire était aboli.

Je ne veux pas tirer de ceci un argument très important, attendu que dans le concours ce sont les élèves les plus distingués dont le nombre n'est jamais considérable qui apparaissent, c'est seulement une indication.

Le concours se montre plus fort à mesure que la suppression du grade universitaire se prolonge.

Mais voici une autre statistique qui est plus importante. De 1849 à 1854, il y a eu pour le grade d'élève universitaire 1,916 récipiendaires. Il n'y en a eu d'admis que 1,325. Donc des élèves formant à peu près le tiers, se sont retirés, ont été ajournés ou refusés.

Certainement quand on voit le tiers des élèves ne point passer un examen qui cependant n'est point exorbitant, cela n'indique pas une grande prospérité dans cette institution. Mais cette preuve se confirme par l'examen de candidat en philosophie et lettres. Ainsi, devant les jurys combinés et devant le jury central il y a eu, pour la candidature en philosophie et lettres de 1849 à 1855, 1,178 récipiendaires, 726 admis, donc il y en a eu 452, c'est-à-dire le tiers qui n'ont pas été admis, soit qu'ils se soient retirés, soit qu'ils aient été ajournés ou refusés.

Ceci, messieurs, est un résultat véritablement étonnant ; j'ai puisé ces renseignements dans les statistiques publiées par le gouvernement.

L'honorable M. Devaux nous a dit qu'avant l'institution du grade d'élève universitaire et la réorganisation de l'enseignement moyen, il y avait eu seulement pour la candidature en philosophie et lettres, 200 admissions sur 300 récipiendaires.

M. Devaux. - Ce n'est pas cela.

M. de Theux. - Mes voisins l'ont compris ainsi.

M. Devaux. - Voici ce que vos voisins auraient dû comprendre. J'ai pris les deux premiers examens, celui de l'épreuve préparatoire et celui de la candidature en philosophie et lettres, par lequel doivent passer tous ceux qui veulent arriver au grade de docteur dans l'une des quatre facultés, et j'ai dit qu'en prenant les chiffres de ces deux examens, il y avait eu, sur 321 élèves inscrits, 200 admis.

M. de Theux. - Eh bien c'est la même proportion. C'est un tiers qui n'est pas admis, et 7 pour cent.

L'honorable M. Devaux a établi une proportion plus forte de rejet quant aux examens ultérieurs, c'est-à-dire quant aux examens en droit et en médecine.

Je n'ai pas vérifié ce point, parce que j'ai cru qu'il était inutile pour la cause. Il est évident, messieurs, que celui qui a passé la candidature si difficile en philosophie et lettres sous l'ancienne loi de 1835, qui comprenait 15 matières, devait être un élève assez distingué et que s'il a échoué dans les examens ultérieurs, ce ne peut être que par une de ces deux causes : ou parce qu'il s'est négligé, parce qu'il s'était donné trop de peine pour passer la candidature en philosophie, ou parce que les jurys pour le droit et pour la médecine se sont montrés beaucoup plus sévères que le jury de candidature en philosophie. Et cela se comprend: on peut être plus sévère quant aux examens qui conduisent directement à la pratique d'une profession ; on peut être plus sévère pour le droit et pour la médecine que pour la philosophie qui ne préjuge encore rien.

Messieurs, quel est le résultat des examens universitaires depuis 1849 jusqu'en 1856 sur l'ensemble des grades : c'est encore l'admission des deux tiers des élèves qui se présentent, et un tiers plus 2 p. c. qui ne sont pas admis, soit que les élèves qui le composent se soient retirés, ou qu'ils aient été refusés ou ajournés.

(page 574) La même proportion reste donc que pour la faculté de philosophie. Il n'y a pas de différence entre la faculté de philosophie et les autres facultés réunies.

D'après les calculs de l'honorable M. Devaux, il y aurait eu plus d'admissions dans les facultés de droit et de médecine que dans la faculté des sciences, sous la loi de 1849 que sous la loi antérieure et ces admissions plus nombreuses seraient le résultat du grade d'élève universitaire. Il y a eu, dit-il, plus d'admissions et cela prouve donc que les études étaient meilleures, que les étudiants étaient plus capables.

Messieurs, ce n'est pas là une preuve, c'est un chiffre. Nous avons dit, quand on a institué les jurys combinés et nous croyons encore que les jurys combinés se montrent plus favorables aux admissions que l'ancien jury central.

M. Devaux. - Pourquoi n'est-ce pas la même chose en 1856 ?

M. de Theux. - Il y a une très légère différence en 1856, une différence de 3 p. c. sur l'ensemble des examens, de 1849 à 1855. Cette différence est très petite.

Veuillez noter aussi que pour la candidature de philosophie et lettres il y a eu en 1856 le même nombre d'admissions qu'il y en avait eu en moyenne pendant les années 1849 à 1855. Et cependant il y avait eu des faits qui auraient dû amener un résultat défavorable aux examens passés en 1856. Et pourquoi ? C'est que le projet de M. le ministre de l'intérieur était connu ; beaucoup d'élèves ont dû se hâter de passer l'examen en philosophie, de crainte d'être assujetti encore à quelque épreuve préparatoire. Ces époques de transition amènent ce résultat, et cependant le nombre d'admissions a été le même.

Ainsi, l'argument le plus fort qu'on ait fait valoir contre cet examen, c'est qu'il n'a rien produit. Mais, j'ai été plus loin ; j'ai dit qu'il avait été nuisible puisque ces faits se sont produits après l'épuration de ce grand nombre d'étudiants, alors que le jury d'élève universitaire en avait écarté beaucoup.

J'ai dit, en second lieu, qu'il y avait eu des craintes sous l'empire de la loi de 1849 de la part des établissements libres, quant au grade d'élève universitaire. Ces craintes se manifesteraient-elles encore aujourd'hui, d'après les nouvelles combinaisons proposées par le gouvernement, c'est ce que je n'ai pas à décider.

Mais il est toujours certain que si d'une part l'enseignement de l'Etat accepte volontiers les examens de l'Etat, c'est que probablement il croit y trouver quelque protection, et que si les établissements libres le repoussent, c'est qu'ils craignent d'y trouver quelque défaveur.

J'ai dit en troisième lieu que c'était une charge considérable pour les familles.

En effet, 329 récipiendaires se présentent ordinairement en moyenne pour arriver aux universités. Eh bien, ce sont 329 familles qui sont jetées dans l'inquiétude sur le résultat de cette épreuve. Il faut pour subir cet examen, le déplacement de la plupart des jeunes gens, soit qu'ils se rendent au chef-lieu des universités, d'après le jury combiné, soit qu'ils se rendent au chef-lieu de province d'après l'ancien système. Ce sont des frais d'examen, des frais de déplacement.

Et puis, ce déplacement de jeunes gens sortant du collège constitue pour les parents une charge morale qui n'est pas à dédaigner.

Aussi je ne crains pas de dire que le vote de la Chambre en 1855 avait été applaudi par la plupart des familles. Et qu'on ne dise pas que c'était par les familles incapables de bien apprécier l'intérêt de leurs enfants ; car le même sentiment a été partagé par des hommes le plus haut placés dans les fonctions publiques qui étaient à même de voir, si une telle épreuve était utile à leur fils.

En Hollande, on a aussi, sous l'administration de M. Thorebeke qui était un ministère libéral, supprimé le grade d'élève universitaire.

J'ai dit en quatrième lieu que cet examen exerçait une influence nuisible sur les jeunes gens et sur les professeurs. En effet, messieurs, un jeune homme qui a terminé ses études de rhétorique au collège, est heureux de jouir de quelques semaines de vacance avant de se présenter aux universités et c'est un repos mérité. Au lieu de cela qu'arrive-t-il ? Il doit se tenir prêt à subir une épreuve. Il doit continuer à travailler ; il est préoccupé ; il n'a pas de repos. Il passe son examen et puis que fait-il ? Il prend des vacances posthumes et il arrive tardivement à l'université et il manque le cours complet de philosophie. Il s'empare de quelques cahiers d'autres élèves et ainsi il tâche de récupérer le temps perdu.

Quant au professeur, messieurs, le même inconvénient existe, soit qu'il s'agisse de l'enseignement moyen, soit qu'il s'agisse de l'enseignement supérieur. Le professeur est fatigué de tous ces examens et il ouvre son cours avec moins de zèle qu'il ne l'eût fait sans les examens.

Eh bien, messieurs, la plupart de ces résultats doivent se produire quelle que soit la forme des examens que vous introduisiez.

Mais, messieurs, l'enseignement supérieur n'a pas été relevé ; nous l'avons vu par le résultat des examens ; il ne le sera pas davantage par le moyen que propose M. le ministre de l'intérieur. L'épreuve préparatoire ne devra pas être subie avant l'entrée à l'université ; l’accès de l'université restera libre. L'honorable M. Rogier a parlé des universités libres, et spécialement de l'Alma Mater, qui serait heureuse de recevoir des élèves de quelque part qu'ils viennent ; les universités libres n'out pas mérité cette satire: leurs élèves n'ont pas moins de succès devant le jury d'examen que les élèves des universités de l'Etat. D'ailleurs, je ne sache pas que les universités de l'Etat répudient les élèves sortis des établissements libres ; que les élèves sortent d'un établissement ecclésiastique ou d'un établissement laïque, je pense que les universités de l'Etat les reçoivent avec plaisir tout comme les autres universités.

On dit, messieurs, que les élèves sortant des collèges n'auront pas à s'inquiéter, parce que, dans les premiers temps qu'ils passeront à l'université, ils pourront se familiariser avec les professeurs chargés des examens préparatoires et se perfectionner dans les branches sur lesquelles ils devront être interrogés. Mais, messieurs, si cela arrive, il est clair que l'enseignement universitaire en philosophie sera nécessairement abaissé comme il l’a été autrefois. Cela est inévitable. Si, au contraire ; les jeunes gens passent l'examen avant d'entrer à l'université, ce sera une grande cause d'intimidation ; ils paraîtront devant un personnel extrêmement haut placé et qui n'aura plus l'habitude de l'enseignement moyen ; évidemment cela découragera les jeunes gens de 16 à 17 ans qui sont très timides, et il n’est pas étonnant que la suppression de l'examen d'élève universitaire a été accueillie avec tant de faveur.

On dit, messieurs, et en cela je suis d'accord avec l'honorable membre, que l'épreuve, telle qu'elle a été proposée par la section centrale et à laquelle se rallie M. le ministre de l'intérieur, que cette épreuve est rendue facile et qu'elle peut encore être améliorée ; que ce sera une facilité d'admission qui tempérera la crainte qui a tant entravé les jeunes gens dans leurs études. Mais cela n'empêche pas cette autre considération que l'élève est avant tout préoccupé du résultat de son examen. Eh bien, l'examen étant rendu plus facile, les élèves diront : Nous ne devons pas trop savoir, nous passerons bien ; attachons-nous seulement à tout ce qui est matière d'examen.

Vous ne relèverez donc pas les études moyennes par le moyen que vous proposez, et si vous rendez l'examen difficile, vous retombez dans tous les inconvénients qui ont été signalés comme résultant de l'examen d'élève universitaire.

On veut généralement, messieurs, soulager les études car c'est une conviction unanime que ce qui nuit le plus aux études c'est cette diversité de matières soit dans l'enseignement moyen soit dans l'enseignement supérieur. Sans doute cela n'arrête point un certain nombre de jeunes gens d'élite, mais il ne faut pas écarter d'emblée des carrières libérales tous ceux qui ne sont pas doués de facultés extraordinaires. Combien n'en a-t-on pas vu qui, après avoir eu beaucoup de peine à faire leurs études moyennes, ont fait des progrès étonnants à l'université et sont devenus des hommes très considérables.

Encore, messieurs, si nous ne mettions rien à la place de cette épreuve préparatoire, je concevrais la persistance avec laquelle on la soutient, mais nous la remplaçons par quelque chose de très sérieux, ce sont les certificats d'études ou bien un examen à défaut de certificats. Qu'on ne s'imagine pas que les jeunes gens délaisseront la fréquentation du collège parce qu'ils auront la faculté de subir un examen ; je pense que, généralement, on aimera mieux achever ses études au collège jusqu'à la rhétorique inclusivement, que d'avoir un examen à passer. Ce sera un puissant stimulant à achever ses études moyennes et il y aura un résultat très heureux.

M. le ministre de l'intérieur veut cumuler les certificats de fréquentation et les examens, et imposer un examen plus sévère à ceux qui ne produisent pas de certificats, c'est encore là établir une espèce de privilège pour les établissements d'enseignement moyen, tandis que la Chambre a voulu le même examen pour tous les récipiendaires.

Si vous établissez un examen plus sévère pour ceux qui n'ont pas de certificat il y évidemment privilège pour ceux qui fréquentent les collèges.

M. Devaux. - Vous établissez aussi un examen pour ceux qui n'ont pas de certificats.

M. de Theux. - On croit que l'examen est nécessaire pour fortifier les études moyennes. J'ai fourni la preuve puisée dans les statistiques, que les examens ne produisent pas ce résultat. Ce qu'il faut aux collèges c'est une bonne discipline, ce sont des moyens d'émulation pour les jeunes gens et cela appartient au collège lui-même, quant à nous, il doit nous suffire d'exiger fa fréquentation réelle des leçons.

Si maintenant un élevé n'a pas fait de grands progrès, laissez-le aller à l'université à ses risques et périls ; si son intelligence est insuffisante ou s'il ne travaille pas, il devra se retirer lorsqu'il subira son examen en philosophie et lettres. Et ici, messieurs, j'insisterai pour que le jury de philosophie et lettres ne soit pas trop complaisant et pour que les professeurs à l'université n'abaissent pas leur enseignement. Si, d'une part, les professeurs maintiennent leur enseignement à une hauteur convenable, et si, d'autre part, le jury de philosophie et lettres n'est pas trop indulgent, il est évident que d'ici à quelques années il ne se présentera plus beaucoup d'élèves incapables ni aux universités, ni à l'examen pour la candidature en philosophie et lettres.

On s'est beaucoup prévalu de l'enquête qui a été faite sur l'examen d'élève universitaire et sur les modifications qu'il conviendrait d'y apporter. Mais, ainsi que l'a fait observer l'honorable M. Devaux, l'enquête n'a pas porté sur le projet de la section centrale, de.manière que nous ne savons pas quel eût été l'avis des établissements communaux et de l'Etat, si le projet de la section centrale leur avait été communiqué ; ils se sont prononcés sur l'utilité d'un examen et sur l'avantage qu'il y a à empêcher que les classes de rhétorique ne soient désertées ; mais les (page 575) propositions de la section centrale exigent la fréquentation des collèges jusqu'à la rhétorique inclusivement ou bien une épreuve Je crois qu'il y a là de quoi donner satisfaction à l'opinion des autorités qui ont été consultées.

D'ailleurs, il n'y a guère que la moitié des collèges qui se sont prononcés pour le rétablissement du grade d'élève universitaire ; les autres établissements se sont prononcés contre, et parmi ces derniers ne se trouvent pas seulement des collèges qui ne sont pas sous la direction de l'Etat ; le collège communal de Herve, par exemple, se prononce fortement contre le rétablissement du grade d'élève universitaire, et remarquons que ce collège est soumis au régime de la loi du 1er juin 1850.

D'autres orateurs qui ont parlé dans des séances antérieures, ont voulu établir des catégories, quant au mérite des réponses.

L'honorable M. Rogier a accordé une grande importance à la réponse du supérieur du collège de Notre-Dame à Termonde, parce que ce supérieur regrettait l'abolition du grade d'élève universitaire ; mais si l'honorable M. Rogier avait lu un peu plus loin, il aurait vu que ce principal exprimait le regret de voir l'enseignement privé contrôlé par le gouvernement qui, lui aussi, a un enseignement à lui, enseignement qu'il est obligé de soutenir par position. Ce n'est donc pas une approbation pure et simple que l'honorable supérieur du collège de Termonde a donnée.

L'athénée de Mons, le collège de Malines, et le petit séminaire de Floreffe laissent entrevoir les difficultés de constituer un jury parfait. Et ici je dirai un mot sur le petit séminaire de Floreffe.

Le principal de cet établissement n'a pas dit que, sous l'empire de l'institution de l'examen d'élève universitaire, les élèves des établissements libres allaient dans les athénées pour se mettre en état de subir l'examen d'élève universitaire ; mais il a dit que, sous l'empire de cette disposition, ces élèves se croyaient plus sûrs de réussir dans les établissements de l'Etat, parce qu'ils espéraient trouver plus de faveur au jury dans lequel l'Etat avait une si grande influence.

On a encore voulu diviser les établissements en deux catégories, en ce sens que les établissements dirigés d'après les principes de la loi du 1er juin 1850, veulent le rétablissement du grade d'élève universitaire parce que leur enseignement serait fort, et que les autres se prononcent contre ce rétablissement, parce que leur enseignement est faible ; ils aiment, dit-on, que leurs élèves soient admis à l'université de Louvain, par exemple, sans difficulté.

Eh bien, c'est là une injure gratuite ; j'ai pris des renseignements sur les résultats des examens d'élèves universitaires, et j'ai appris que les collèges des jésuites notamment ont eu, proportion gardée, des succès doubles, comparativement à la moyenne de tous les établissements. Si donc ces institutions-là se montrent hostiles au rétablissement de l'examen d'élèves universitaires, ce n'est pas qu'elles craindraient de montrer la prétendue insuffisance de leur enseignement, mais c'est uniquement parce qu'elles craignent des entraves à la liberté de l'enseignement, à la liberté des méthodes.

Messieurs, on a parlé des petits séminaires, à propos de celui de Floreffe. Je crois que l’enseignement dans les petits séminaires peut défier toute critique. Et ici je pourrais citer une petite anecdote ; le roi Guillaume, ayant reçu de Mgr Van Bommel le plan d'organisation d'un petit séminaire, le trouva tellement admirable qu'il retira à l'instant la prohibition qu'il avait décrétée contre l'existence des petits séminaires et il ordonna à ses ministres de laisser aux évoques toute liberté de reconstituer ces établissements ; depuis cette époque, les petits séminaires n'ont fait que se perfectionner ; comme les collèges des jésuites eux-mêmes, ces établissements sont obliges du progresser sous peine de décadence, car avant tout les pères de famille veulent que leurs enfants reçoivent une instruction solide.

Et d'ailleurs, ces collèges sont dans une excellente position pour prospérer ; les professeurs n'ont aucun intérêt de famille qui les préoccupe ; ils n'ont qu'à se livrer à la science. Les supérieurs peuvent constamment perfectionner le personnel. Si l'un ou l'autre professeur laisse à désirer, le supérieur peut le remplacer avec avantage et en toute liberté ; il n'a à craindre ni discussion parlementaire, ni opposition quelconque ; d'autre part, la discipline dans ces établissements est extrêmement sévère.

Vous comprenez, par l'ensemble de ces considérations et vu la grande concurrence que les établissements publics font à ces collèges, qu'il est impossible que ceux-ci se trouvent dans un état d'infériorité.

Ce n'est donc pas la crainte d'un contrôle qui a engagé ces derniers établissements à se prononcer contre le rétablissement du grade d'élève universitaire ; j’ai entendu moi-même plusieurs personnages éminents de l’enseignement moyen libre dire que, s'il ne s'agissait que du contrôle de leurs élèves, ils verraient avec plaisir le rétablissement de l'examen ; mais que le gouvernement pèse, d'une part, sur la liberté par le jury et, d'un autre côté, sur les méthodes d'enseignement par le programme.

Messieurs, je termine par une considération qui m'a été suggérée par un professeur d'un des athénées de l'Etat ; ce professeur disait : « Dans l'enseignement public nous n'avons pas assez de liberté, et nous réglementons trop ; nos élèves n'ont que le temps de faire un travail matériel ; nous ne pouvons pas former leur cœur, en leur expliquant ce qu'il y a de beau dans la littérature ancienne et moderne, leur intelligence et leur imagination sont comprimées par un travail trop contenu et trop matériel ; nous professeurs, nous sommes absorbés par une foule de détails ; nous sommes soumis, assujettis à mille et une formalités administratives qui nuisent beaucoup à l'enseignement. Voilà ce que je tiens de la bouche d'un professeur d'un des athénées de l'Etat.

Je dis donc que si l'utilité en était bien constatée, je serais le premier à voter pour le rétablissement d'une épreuve, réglée dans le sens du projet du gouvernement, avec une réduction des matières qui sont trop étendues et trop compliquées ; mais je n'y vois absolument aucune nécessité. Pourquoi irions-nous, dès lors, jeter de nouveau l'inquiétude dans les établissements libres ? Pourquoi alarmer de nouveau les familles et les jeunes gens ?

La section centrale est entrée dans ces vues à la majorité de cinq voix ; elle a adopté le même système pour les études universitaires proprement dites.

C'est pour cela qu'on a proposé les certificats. Ici je suis heureux des paroles prononcées par l'honorable préopinant, j'espère que nous aurons gain de cause sur ce point, car je ne doute pas qu'il vienne appuyer de sa parole le projet de la section centrale.

C'est pour diminuer cette charge qui arrête l'élan de la jeunesse que nous l'avons proposé ; c'est en effet de là que sont nés le système de M. Frère et celui de M. Orts. Si la Chambre veut modifier ce qu'elle a fait en 1855 à une grande majorité, qu'elle maintienne la suppression de l'épreuve préparatoire, qu'elle établisse des certificats ; si l'épreuve à subir à défaut de certificats, n'est pas satisfaisante, qu'on fortifie cette épreuve pour ceux qui n'apporteront pas de certificats ; ce sont des jeunes gens en petit nombre appartenant à des familles riches qui font leur éducation avec des précepteurs ; s'ils ont une intelligence quelque peu ouverte, ils pourront facilement subir une épreuve un peu plus forte, sans admettre que cette épreuve doive aller jusqu'à l'examen d'élève universitaire, car je ne veux pas aller jusque-là.

Prenant acte des considérations par lesquelles a terminé l'honorable M. Devaux, qui a fait un appel à la conciliation, je demande qu'il nous laisse faire l'épreuve que nous proposons pendant trois ans ; si elle est fatale aux études, je ne crains pas de lui promettre qu'à l'expiration de ce terme je me joindrai à lui pour introduire, en remplacement des certificats, un examen obligatoire.

M. de Naeyer. - Aux termes du règlement, l'article du projet primitif du gouvernement, repris par M. de Brouckere, n'a pas besoin d'être développé et appuyé pour faire partie de la discussion.

M. Lelièvre. - Messieurs, mon amendement a pour objet de conférer le titre d'élève universitaire à celui qui a subi l'épreuve préparatoire.

Cela est rationnel. Il me semble d'abord convenable de conférer un titre honorifique à celui qui aura subi avec succès l'examen dont nous nous occupons. Les jeunes gens qui ne jugeraient pas convenable de continuer leurs études acquerraient ainsi un titre d'honneur dont ils pourraient, avec raison, se prévaloir.

En second lieu, le titre d'élève universitaire se trouve énoncé dans la loi du 1er juin 1850. Ainsi, l'article 10 de cette disposition législative exige que les maîtres d'études et les surveillants soient porteurs d'un certificat d'élève universitaire.

Cette disposition devrait être révisée si l'on faisait disparaître définitivement le titre dont il s'agit.

Il en est de même de quelques autres prescriptions existant en exécution de la loi de 1849.

La disposition que je propose a donc une utilité incontestable, celle d'établir dans diverses parties de notre législation une harmonie que la suppression du grade d'élève universitaire a fait disparaître.

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Messieurs, du moment que l'on n'est plus d’accord sur l'utilité d'une mesure quelconque à prendre pour s'assurer qu'un élève, à l'entrée de l'université, possède l'aptitude nécessaire pour en suivre les cours avec fruit, il est naturel que nous ne soyons plus d'accord sur les moyens propres à constater cette aptitude.

Mais, il me semble impossible de ne pas reconnaître cette utilité, j'allais dire cette nécessité.

Tous les documents qui ont été publiés depuis vingt ans ont constaté cette nécessité.

Il me semble que tout le monde la reconnaîtrait si on ne se trouvait pas sous l'empire des préoccupations qu'ont fait naître et l'organisation défectueuse du jury du grade d'élève universitaire et la composition du programme, il est évident que, sans cette double préoccupation, tout le monde serait encore unanime pour reconnaître la nécessité de prendre une mesure quelconque à l'entrée des études universitaires.

Admettant donc cette nécessité, je crois avoir le droit de demander que la mesure à prendre soit sérieuse et efficace.

La section centrale a proposé des certificats. Franchement je ne puis voir là quelque chose de sérieux.

Je ne puis reconnaître un caractère sérieux à la simple présentation d'un certificat qui ne doit et ne peut constater qu'une fréquentation matérielle ; or, c'est une aptitude qu'il faut constater. Ces certificats ne prouvent rien, à moins de prétendre que tous les élèves, jusqu'au dernier, qui ont achevé leur rhétorique, sont aptes à suivre l'enseignement supérieur. A moins d'admettre cela, il faut bien faire un triage. Ce triage est dans l'intérêt des études, dans l'intérêt des jeunes gens et dans l'intérêt des familles.

(page 576) Le gouvernement, dans son projet, primitif, a proposé une épreuve pour remplacer l'examen, l'obtention du grade d'élève universitaire.

Se bornant à demander une épreuve préparatoire, le gouvernement avait rédigé le programme de manière à obtenir quelque garantie que l’élève a achevé ses études moyennes.

C'est pour cela qu'il avait compris dans ce programme les principes de rhétorique et les principaux faits de l'histoire romaine et grecque, etc.

Quand le gouvernement a vu la réduction opérée dans le programme par la section centrale, il a été heureux de pouvoir consentir à cette réduction. Mais, pour pouvoir y consentir sans danger, il fallait ajouter à l'épreuve préparatoire une autre garantie, une garantie contre la précipitation des élèves à abandonner l’enseignement moyen pour se lancer dans les universités.

Un des reproches qu'on a adressés à l'examen d'élève universitaire, c'est que, bien que le programme en fût si chargé (il comprenait 17 matières), il avait provoqué la désertion des classes supérieures de l'enseignement et que des élèves de troisième s'étaient fait admettre aux universités. Il y avait là un abus à prévenir. Or, cet abus, le gouvernement a cru pouvoir le prévenir par le certificat, justifiant que l'élève a achevé ses études moyennes.

Voilà comment le gouvernement a été amené à combiner l'épreuve préparatoire avec le certificat.

Messieurs, l'honorable comte de Theux a présenté quelques observations tendantes à démontrer à la Chambre les vices et les inconvénients de l'ancien examen pour l'obtention du grade d'élève universitaire, vices et inconvénients qu'il semble retrouver dans le système proposé par le gouvernement.

Je le sais, messieurs, pour quelques membres, le système du gouvernement n'est que la substitution d'une dénomination à une autre sans changement au fond des choses. Quelques orateurs ont été jusqu'à soutenir que l'examen d'élève universitaire valait mieux, était moins rigoureux que ce que le gouvernement propose d'y substituer.

Messieurs, je ne crois pas devoir m'arrêter à faire ressortir l'exagération d'une pareille assertion.

Je veux seulement prouver, en quelques mots, que les objections qu’on fait contre l'ancien examen du grade d'élève universitaire ne s'appliquent pas au projet du gouvernement, à l'épreuve préparatoire actuelle.

D'après l’honorable M. de Theux, l'ancien examen d'élève universitaire a fait du tort à l’enseignement moyen.

Cet examen n'était pas assez littéraire, il préoccupait trop les jeunes gens, et exerçait trop leur mémoire aux dépens de leur intelligence. Ces objections ne peuvent s'appliquer à l’épreuve préparatoire telle qu'elle est organisée par le projet nouveau.

Ainsi, l’on veut que l'examen soit littéraire avant tout, et on a raison de le vouloir. Eh bien, d'après le programme nouveau, à l'exception des deux matières d'examen relatives aux sciences exactes, l'examen sera exclusivement littéraire. Il n'y a plus rien pour la mémoire: il n'y a ni géographie, ni histoire. On n'exige plus que la connaissance du latin et du grec et une composition propre à faire, apprécier le degré de développement de l'intelligence.

Toutes les objections viennent donc à disparaître. Je ne conçois pas comment, en présence du projet nouveau, l'on puisse encore les reproduire.

Une autre objection contre l'examen du grade d’élève universitaire, c'est qu'il tend à contrarier les libres allures de l'enseignement moyen. Pour moi, cette objection était très grave contre l'examen du grade d'élève universitaire, tel qu'il était précédemment organisé.

En effet, il y avait dans le programme d’examen une tendante à diriger cet enseignement, à exercer une influence indirecte sur les méthodes, à créer une uniformité fâcheuse pour les études.

A cet égard, nous devons tous être d'accord. On doit, dans l'enseignement, respecter la liberté du professeur ; il ne faut pas que l'enseignement soit tout entier jeté dans le même moule.

D'après le programme, tel qu’il est rédigé nous n'avons plus aucun de ces inconvénients.

On ne prescrit plus indirectement aucuns livres. On ne demande plus d'explications d’auteurs grecs et latins, quoique cela offrît peu d'inconvénients, puisque ce sont, en définitive, les mêmes auteurs qu'on explique partout. Tout ce que l’on demande à l'élève ; c'est s'il prouve qu'il connaît les langues classiques et, certes, c'est bien le moins qu'on puisse lui demander. Mais, cela est indépendant des livres dont on se sert et des méthodes que préfèrent les professeurs.

On ne gêne en rien la liberté d'enseignement ; elle reste tout entière.

Les deux autres objections qu'a faites l'honorable M. de Theux contre l'examen du grade d'élève universitaire sont des objections que l'on pourrait faire contre tous les examens. L'épreuve préparatoire, dit-il, est une charge pour les familles ; elle enlèvera aux élèves comme aux professeurs le repos qui leur est nécessaire pendant les vacances. Cela est incontestable. Mais il faut mettre ces inconvénients en regard des avantages que ces examens peuvent offrir pour les élèves, pour les parents et pour les professeurs.

Mais, encore une fois, ces objections peuvent se faire contre tous les examens.

C'est ce qu'ont dit plusieurs orateurs : Pourquoi ces examens ? Pourquoi les multiplier ?

Je conçois que si l'on proscrivait tous les examens pour les grades universitaires, s'il n'y avait plus d'examens intermédiaires, s'il n'y avait plus qu'un seul examen professionnel à la fin des études, je comprendrais qu'on n'exigeât pas d'examen d'admission à l'université.

Mais personne n'a proposé formellement ce système de liberté absolue pour l'enseignement supérieur. La Chambre a décidé, au contraire, que les examens seraient maintenus pour les grades académiques. Le gouvernement demande à son tour qu'on reste conséquent avec cette décision. Si plus tard on veut s'en rapporter à la liberté, si l'on veut qu'il y ait seulement un jury professionnel pour l'admission aux professions libérales, la Chambre pourra décider que l'on sera admis sans examen dans les universités ; mais jusque-là restons conséquents.

Les objections qu'on fait contre l'épreuve préparatoire du chef du programme, sont donc sans objet.

Une autre, préoccupation qui existe dans les esprits et contre laquelle nous luttons également, est celle qui résulte de l'ancienne composition des jurys pour l'examen d'élève universitaire.

En effet, je crois pouvoir dire, sans blesser mes honorables prédécesseurs qui ont organisé ou maintenu ce système, que, dans l'organisation de ces jurys, on ne s'était pas suffisamment attaché à assurer un complet équilibre entre les établissements de l’Etat et les établissements libres.

Aussi, quelle était l'organisation de ces jurys ? Ils étaient composés d'un président, d'un vice-président et d'un secrétaire, qui avait voix délibérative.

On pouvait les considérer comme fonctionnaires et par conséquent comme plus ou moins disposés à prendre la défense de l'enseignement de l'Etat.

A ces trois membres on adjoignait quatre membres, deux représentant l'enseignement officiel, deux représentant l'enseignement libre.

Dans ce jury composé de sept membres, l'enseignement libre n'était, à proprement parler, représenté que par deux membres ; l'enseignement officiel par cinq membres. On pourrait donc soutenir que l'enseignement officiel et l'enseignement libre ne se trouvaient pas, au sein des jurys pour le grade d'élève universitaire, dans une position de parfaite égalité.

L'organisation que le gouvernement compte donner par voie administrative aux jurys pour l'épreuve préparatoire et que je vais avoir l'honneur d'exposer en quelques mots, prévient encore toute espèce d'objection.

L'épreuve préparatoire ferait donc désormais partie des examens académiques. Elle serait par conséquent soumise à l'application de l'article 40 de la loi de 1849 que la Chambre vient de proroger, c'est-à-dire qu'il y aurait lieu, pour cette épreuve comme pour les examens académiques, d'adopter le système des jurys combinés.

Ces jurys pour l'épreuve préparatoire commenceraient à fonctionner du 20 au 30 du mois d'août. C'est seulement à cette époque que cette épreuve pourrait être subie, parce que cette épreuve suppose qu'on a achevé les études moyennes, lesquelles se terminent d'ordinaire du 15 au 20 du mois d'août.

Le gouvernement aurait, pour composer ces jurys pour l'épreuve préparatoire, les facilités nécessaires, parce que, d'après les documents qui ont été présentés à la Chambre et qui sont annexés au rapport de la section centrale, les opérations des jurys combinés pour la candidature en philosophie et lettres sont terminées vers le 20 du mois d'août. Ainsi, à cette époque, tous les professeurs des facultés de philosophie et lettres sont disponibles pour le gouvernement.

Voici comment on procéderait. On établirait, par chaque couple d'universités combinées, trois jurys qui fonctionneraient simultanément et qui seraient chargés d'examiner respectivement les récipiendaires classés en trois catégories, à savoir : 1° les aspirants au grade de candidat en philosophie et lettres ; 2° les aspirants au grade de candidat en sciences ; 3° les aspirants au grade de candidat notaire et de candidat en pharmacie. Un jury central unique procéderait, en même temps que les jurys combinés, à l'examen des récipiendaires des trois catégories qui se seraient fait inscrire pour subir devant lui cet examen. Car il y aurait des élèves qui voudraient passer leur examen au sortir du collège et avant d'être inscrits à une université. Il y aurait d'autres jeunes gens qui, bien que se présentant une année plus tard, n'appartiendraient à aucune université, parce qu'ils feraient des études extra-universitaires. Pour ces jeunes gens il y aurait un jury central.

Chacun des jurys près des universités serait composé de cinq membres : un président étranger à l'enseignement et quatre professeurs appartenant par moitié à l’enseignement officiel et par moitié à l'enseignement libre. Mais j'ai voulu faire ici une concession aux scrupules qui ont été manifestés par quelques membres. Il y a des personnes qui ont cru qu'il n'était pas naturel que les jeunes gens qui passent cette épreuve préparatoire soient examinés par des professeurs appartenant à l'enseignement universitaire.

En raison, je maintiens que cela est parfaitement naturel. Il est naturel que les professeurs des universités soient chargés d'examiner si les jeunes gens qui se présentent sont aptes à suivre l'enseignement qu'ils vont leur donner. C'est, d'ailleurs, comme j'ai eu l'honneur de le dire, ce qui se fait dans toutes les écoles spéciales, ce sont les professeurs des écoles spéciales qui examinent les élèves à leur entrée dans ces établissements.

(page 577) On a dit aussi que les jeunes gens allaient se trouver devant des figures qu'ils ne connaissaient pas, devant des professeurs qu'ils n'avaient jamais vus. Mais il en est ainsi dans la plupart des examens, l'élève n'y rencontre qu'un ou deux professeurs qu'il connaît.

Dans l'organisation du jury pour l'obtention du grade d'élève universitaire, c'était la même chose. Les élèves avaient tout au plus la chance d'y rencontrer un de leurs professeurs.

On a prétendu encore que ces professeurs ne seraient pas compétents, qu'ils devraient examiner sur des matières qu'ils n'enseignent pas. Mais aujourd'hui que l'épreuve devient purement littéraire, ces professeurs sont complètement compétents.

C'est une grave erreur de croire que les études littéraires cessent avec la rhétorique.

Les études littéraires qui se donnent à l'université sont le couronnement des études moyennes.

Cependant, messieurs, quoique naturellement ce soit aux professeurs d'université à examiner, j'ai voulu, pour entrer dans les idées exprimées par quelques honorables membres, associer l'enseignement moyen au jury.

Je suppose la combinaison des universités de Bruxelles et de Gand. Il y aura, dans chacun de trois jurys pour l'épreuve préparatoire, un professeur de l'université de Gand et un professeur de l'université de Bruxelles ; plus, deux professeurs de l’enseignement moyen, l'un représentant les établissements d'enseignement du gouvernement, l'autre les établissements d'enseignement libre. Il y aurait donc deux représentants de l’enseignement supérieur et deux représentants de l'enseignement moyen, représentant par moitié l’enseignement officiel et par moitié l’enseignement libre.

Le jury central serait composé de 9 membres, 4 membres pris dans les quatre universités et quatre membres pris dans l'enseignement moyen, dont deux dans l'enseignement de l'Etat et deux dans l'enseignement libre ; puis, un président pris en dehors de l'enseignement.

Il me paraît que dans ce système toute garantie est accordée à tout le monde.

Je crois donc, messieurs, être en droit de dire que ceux qui ne sont pas déterminés à rester sous les préoccupations qu'a causées l'ancienne organisation du jury pour le grade d'élève universitaire, l'épreuve préparatoire, telle que le gouvernement vous propose de l'organiser, et quant au programme et quant à la composition des divers jurys, ne doit plus provoquer la monture opposition, ni effaroucher personne. Messieurs, permutez-moi de dire encore quelques mots des amendements qui viennent d'être présentés par l’honorable M. de Brouckere et par l'honorable M. Lelièvre.

L'honorable M. de Brouckere propose d'en revenir purement et simplement au projet primitif du gouvernement. J'ai eu l'honneur de vous dire pourquoi le gouvernement tient à cumuler l'épreuve préparatoire avec les certificats. C'est que le gouvernement est heureux de se rallier au programme proposé par la section centrale. Mais ce programme est tellement facile, que si vous ne prenez pas de précautions contre la désertion des études moyennes, vous verrez se renouveler les inconvénients qui oui été signalés sous l'empire de l'examen d'élève universitaire. Evidemment pour les élèves un peu intelligents, dès la troisième ils peuvent passer sur le programme de la section centrale et se dispenser ainsi de faire la seconde et la rhétorique.

Messieurs, le gouvernement a été heureux de se rallier à ce programme, parce qu'il est plus simple et plus facile. Or, si, d'une part, il faut une mesure qui soit, à certains égards, une garantie que des études sérieuses ont été faites, il ne faut pas, d'autre part, que cette mesure puisse trop préoccuper les élèves.

Il n'y a dans ce programme que la partie des sciences exactes qui effarouche encore les jeunes gens. Nous savons, par expérience, que ce sont les mathématiques qui effrayent le plus la jeunesse. Eh bien, j'avais déjà songé, comme allégement pour l'élève, à diminuer un peu la cote d'importance à accorder à ces matières.

J'ai cependant encore une autre observation à faire sur ce programme.

On y parle seulement d'une composition française. De même que les diverses traductions servent à constater la connaissance des langues de l'antiquité classique, de même la composition permettra d'apprécier le développement naturel et original de l'intelligence des élèves.

Pour rendre cette appréciation complète, il faut laisser à chaque élève le choix de celle d'entre les langues vivantes et employées dans le pays, dans laquelle il veut composer.

Je proposerai donc une composition française ou flamande, ou allemande, au choix du récipiendaire. La langue n'est qu'un moyen d'exprimer ses pensées et il faut laisser à chacun la liberté d'employer, dans cette composition, l’instrument qui va le mieux à son intelligence.

L'amendement de l'honorable M. Lelièvre ne me semble pas pouvoir être admis, puisque l'épreuve préparatoire n'est plus nécessairement subie au début des études universitaires ; je crois même que la plupart des élèves ne subiront cette épreuve que lorsqu'ils seront depuis une année à l'université, c'est-à-dire lorsque, depuis une année, ils auront déjà été des élèves universitaires.

Messieurs, l'autre jour l'honorable M. Orts a présenté, à propos des certificats, une objection pour les jeunes gens qui font des études isolées ou qui ont fait leurs études à l'étranger ; il a demandé comment ces jeunes gens pourraient présenter des certificats. J'ai répondu immédiatement que, pour ces cas exceptionnels, il y aurait lieu de prendre une précaution, d'augmenter d'une ou de deux matières le programme ordinaire de l'épreuve préparatoire. L'honorable M. de Theux a dit tout à l'heure que ce serait une espèce de défaveur pour les études privées ; mais j'aurai l'honneur de faire observer que le même inconvénient se présente dans le système de la section centrale, puisque dans ce système on soumet aussi à un examen les jeunes gens qui ne peuvent pas produire de certificats.

Voici, messieurs, un deuxième paragraphe que je proposerai d'ajouter à l'article 2, et qui lève la difficulté indiquée par M. Orts :

« Pour les élèves qui ne produisent pas de certificat, l'épreuve préparatoire comprendra, indépendamment des matières mentionnées à l'article 8, les principes de rhétorique et les principaux faits de l'histoire romaine ou de l'histoire grecque. »

Je pense, messieurs, que ce sera là un moyen de prouver que l'on a fait des études un peu régulières ; car il n'y a pas d'études moyennes complètes sans la connaissance des principes de la rhétorique et des principaux faits de l'histoire romaine ou de l'histoire grecque.

-La discussion sur l'article 2 est close.

M. de Naeyer. - Nous sommes en présence de trois propositions principales: la première, c'est l'article 2 proposé par le gouvernement et qui exige une épreuve préparatoire ; la deuxième, c'est la proposition du gouvernement qui exige cette épreuve et, en outre, des certificats ; enfin, la troisième c'est la proposition de la section centrale qui n'exige que des certificats et une épreuve pour le cas où il n'y aurait pas de certificats.

Il y a de plus des propositions accessoires qui ne pourront être mises aux voix, que lorsque la Chambre aura statué sur les propositions principales.

Par quelle proposition la Chambre veut-elle commencer ?

- Plusieurs membres. - La proposition de la section centrale.

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Il me semble, M. le président, qu'il est impossible de commencer par la proposition de la section centrale. Pour ma part, je n'en voudrais pas ; je veux des certificats, mais pas des certificats seuls. Il me semble qu'il faut commencer par un système complet.

M. Tesch. - Je pense, messieurs, qu'on pourrait voter de cette manière-ci : d'abord, système de la section centrale : N'y aura-t-il que des certificats ? Deuxième système : Y aura-t-il une épreuve préparatoire ? Troisième système : Ajoutera-t-on à l'épreuve préparatoire les certificats ?

Voilà évidemment l'ordre logique.

M. de Brouckere. -Il me semble, messieurs, qu'il y a à choisir entre deux manières de voter que je vais indiquer. C'est d'abord celle qui est proposée par l'honorable M. Tesch et alors il faudrait mettre la question aux voix de la manière suivante : « Admettra-t-on le système de la section centrale, c'est-à-dire les certificats seuls, et supplémentairement l'épreuve préparatoire, quand on ne produit pas le certificat ? »

En cas d'adoption, tout est fini ; en cas de rejet, on mettrait aux voix le système primitif du gouvernement, reproduit par moi, c'est à dire, l'épreuve préparatoire seule.

Si l'épreuve préparatoire était admise, on mettrait aux voix cette question: ajoutera-t-on des certificats ? (Interruption.)

Veut-on suivre une autre méthode: ce serait celle-ci ; première question : Admettra-t -on le système compliqué du gouvernement, c'est à-dire l'épreuve préparatoire et le certificat ? (Interruption.)

J’entends toujours des non, des non ! Si quelqu'un veut prendre la parole et formuler une autre proposition, je consentirai volontiers à me rasseoir ; mais si on ne demande pas la parole et qu'on ne propose rien, je désire ne pas être interrompu...

- Un membre. - Chaque membre de la Chambre peut demander la division.

M. de Brouckere. - Si l'honorable membre qui m'interrompt et dont je ne sais pas le nom, veut prendre la parole, je la lui céderai.

Je disais donc qu'on pouvait procéder de cette manière-ci : mettre aux voix le système complet du gouvernement, savoir: Y aura-t-il une épreuve préparatoire et un certificat ? Si cette question est résolue affirmativement, tout est fini ; si elle l'est négativement, on mettrait successivement aux voix le système de la section centrale et le mien.

Je crois que ces deux manières de procéder sont également satisfaisantes.

M. Dumortier. - Messieurs, nous devons suivre l'ordre de voter indiqué par M. le président. C'est l'exécution du règlement. Le règlement porte que la question principale doit être mise aux voix après les amendements, et tous les amendements sont mis aux voix d'après leur éloignement de la question principale. Vous avez donc d'abord l'amendement de la section centrale ; puis celui de l'honorable M. de Brouckere ; enfin vient la question principale, c'est-à-dire la proposition du gouvernement. Exécutons le règlement et tout sera bientôt fini.

M. Malou. - Messieurs, il me semble qu'il faudrait d'abord voter sur cette question : Y aura-t-il une épreuve préparatoire ? Si cette question est résolue affirmativement, on votera sur le certificat ; si cette seconde question est résolue affirmativement, ii y aura alors une épreuve préparatoire avec un certificat.

(page 578) M. Devaux. - Messieurs, dans le système de l’honorable M. Malou, il y a des membres qui ne pourraient pas voter ; comment voulez-vous que votent sur la première question ceux qui sont favorables à l'épreuve préparatoire combinée avec le certificat ?

Si vous voulez que tous les membres soient libres dans leur vote, il faut mettre aux voix les trois systèmes ; d'abord, le certificat seul ; tout le monde peut voter là-dessus ; si les certificats seuls sont admis, tout est dit. S'ils ne sont pas admis, alors on mettra aux voix l'épreuve préparatoire seule ; si cette épreuve est adoptée, tout est dit encore ; sinon, on mettrait enfin aux voix l'épreuve préparatoire combinée avec les certificats. De cette manière, tous les votes seront libres.

M. de Theux, rapporteur. - Voici comment la question me paraît se présenter de la manière la plus conforme au règlement.

M. le ministre de l'intérieur admet, comme la section centrale, un certificat ; mais outre le certificat, il demande qu'il y ait une épreuve préparatoire, réglée, plus ou moins, telle qu'elle l'est dans le projet de la section centrale, pour ceux qui ne produisent pas de certificat. Ainsi, il y a entre la proposition de la section centrale et celle de M. le ministre un point de contact. Maintenant il faut mettre avant tout aux voix cette question-ci : « Y aura-t-il une épreuve préparatoire seule ou exclusive du certificat ? »

M. de Naeyer. - La question ne pourrait-elle pas être posée en ces termes : « Admettra t-on une épreuve préparatoire en réservant la question des certificats ? » En posant la question de cette façon, on n'exclut ni le système de la section centrale ni celui du gouvernement.

M. Devaux. - Je demande à M. le président comment il veut que vote celui qui n'admet l'épreuve préparatoire qu'avec des certificats.

M. de Naeyer. - J'ai déjà dit que les certificats seraient réservés.

Du reste, je consulterai la Chambre sur l'ordre de vote que je propose.

M. Dumortier. - Si nous voulons sortir de cette difficulté, il n'y a pas d'autre moyen que de mettre successivement aux voix les divers systèmes dans l'ordre que j'ai indiqué ; sinon, vous allez placer des membres dans l'impossibilité de voter.

Si, au contraire, on met successivement aux voix les divers systèmes, chacun saura le système qu'il veut adopter, et n'éprouvera dès lors pas de difficultés pour voter.

M. Tesch. - Je pense que l'honorable M. Malou entend par sa proposition que si la Chambre décide qu'il y aura une épreuve préparatoire, cette décision sera la condamnation de la proposition de la section centrale qui se borne à exiger des certificats. Ainsi l'objection de M. Dumortier tombe. (Interruption.)

L'épreuve préparatoire entre dans le système de la section centrale, mais seulement quand le récipiendaire ne présente pas de certificat.

Je me suis rallié à la proposition de M. Malou ; cependant il m'est indifférent qu'on mette cette proposition aux voix ou qu'on mette aux voix les systèmes. Je crois cependant qu'il serait plus conforme au règlement de procéder comme je l'ai indiqué tantôt, car il n'y a pas, à proprement parler, des amendements comme l'a dit M. Dumortier, mais il y a trois systèmes différents. Il faut, pour suivre le règlement, commencer par celui qui s'écarte le plus du projet primitif ; celui qui s'écarte le plus, c'est le projet de la section centrale ; en second lieu viendrait la proposition de M. de Brouckere, et en troisième lieu, la proposition du ministre de l'intérieur.

M. Malou. - Si l'on met aux voix le système de la section centrale, je demande comment nous voterons. Nous voulons les certificats, si l'épreuve préparatoire est rejetée. Il faut procéder comme je l'ai proposé. Maintiendra-t-on l'épreuve préparatoire, obligatoire en tout cas ? Cette proposition est admise ou rejetée. Si elle est adoptée il reste à voir si on ajoutera les certificats ; si elle est rejetée, nous verrons si nous voulons les certificats combinés avec l'épreuve préparatoire.

M. Devaux. - Je ne comprends pas la difficulté qu'on fait, il y a trois opinions ; mettez ces opinions aux voix. Pourquoi les scinder ? Ceux qui veulent les certificats de la section centrale voteront pour ce système ; s'ils veulent un autre régime, ils voteront pour l'examen préparatoire.

M. de La Coste. - Et ceux qui ne veulent rien ?

M. Devaux. - Ils repousseront tout.

M. Delfosse. - Nous sommes en présente de trois propositions : celle du gouvernement, celle de M. de Brouckere et celle de la section centrale.

La proposition du gouvernement est celle qui exige le plus des élèves ; la proposition de la section centrale est celle qui exige le moins ; la proposition de l'honorable M. de Brouckere tient le milieu.

Si l'on veut que chacun puisse voter librement, il faut commencer par la proposition qui exige le plus des élèves ; si elle est rejetée, on devra ensuite mettre aux voix la proposition de l'honorable M. de Brouckere, cl en dernier lieu celle de la section centrale.

En procédant ainsi, vous donnez à chacun la possibilité d'émettre un vote entièrement libre.

Je dois faire remarquer qu'il y a dans la proposition du gouvernement une disposition qui peut s'appliquer aussi à la proposition de M. de Brouckere, c'est la disposition du prescrit d’une année d'intervalle entre la production des certificats ou l'épreuve préparatoire et l'examen de candidature.

Cette partie de la proposition doit être réservée pour faire l’objet d'un vote spécial dans le cas où la Chambre se prononcerait, soit pour la proposition du gouvernement, soit pour celle de M. de Brouckere.

- La Chambre, consultée, décide qu'on suivra l'ordre proposé par M. Delfosse.

M. de Naeyer. - Je mets aux voix la proposition du gouvernement, moins le deuxième paragraphe qui est réservé.

- Plusieurs voix. - L'appel nominal !

Il est procédé à cette opération. En voici le résultat :

83 membres répondent à l'appel nominal.

56 répondent non.

15 répondent oui.

12 s'abstiennent.

En conséquence, la proposition n'est pas adoptée.

Ont répondu oui : MM. de Muelenaere, de Steenhault, Devaux, Loos, Magherman, Mascart, Mercier, Moreau, Sinave, T'Kint de Naeyer, Vilain XIIII, Anspach, Calmeyn, Dautrebande et Dedecker.

Ont répondu non : MM. de Moor, de Paul, de Perceval, de Pitteurs-Hiegaerts, de Portemont, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren, de Sécus, Desmaisières, Desmet, de T'Serclaes, Dumortier, Grosfils, Jacques, Janssens, Jouret, Lambin, Landeloos, Lange, le Bailly de Tilleghem, Lelièvre, Maertens, Malou, Moncheur, Orts, Osy, Pierre, Rousselle, Tack, Thibaut, Thiéfry, Thienpont, Vanden Branden de Reeth, Van Goethem, Van Iseghem, Van Overloop, Van Tieghem, Verhaegen, Wasseige, Brixhe, Coomans, Crombez, David, de Baillet-Latour, de Bronckart, de Brouckere, de Brouwer de Hogendorp, de Haerne, de Kerchove, de Lexhy, Delfosse, Della Faille, de Man d'Attenrode, F. de Mérode et de Naeyer.

Se sont abstenus : MM. de Theux, Lebeau, Lesoinne, Prévinaire, Rogier, Tesch, Vandenpeereboom, Vander Donckt, Coppieters 't Wallant, Dechamps, de La Coste et de Liedekerke.

M. de Naeyer invite les membres qui se sont abstenus à motiver leur abstention.

M. de Theux. - Je me suis abstenu, parce que je donnais la préférence au projet de la section centrale. Mais en définitive, après le projet de la section centrale, je préférais la proposition du gouvernement à celle de l'honorable M. de Brouckere. Dans cette position, je me suis abstenu.

M. Lebeau. - Je me suis abstenu parce que je n'ai pu obtenir la division.

M. Lesoinne. - Je me suis abstenu parce que je suis partisan d'une épreuve préparatoire, qui constate l'aptitude de l'élève à suivre l'enseignement supérieur. Mais je ne puis admettre les certificats qui mettent les élèves de l'enseignement privé sur un pied plus avantageux que les élèves de l'enseignement moyen.

M. Prévinaire. - Je me suis abstenu parce que, partisan de l'épreuve préparatoire, je ne le suis pas des certificats.»

M. Rogier. - Je suis partisan du projet primitif du gouvernement, j'aime mieux son second système que celui de la section centrale ; mais me réservant de voter pour le système primitif, c'est-à-dire sur l'épreuve préparatoire, je n'ai pas voulu m'engager sur la première question.

M. Tesch. - Je suis partisan du projet primitif du gouvernement ; je n'ai donc pu voter ce système amendé par l'adjonction de certificats. Je n'ai pas voté contre, parce qu'à défaut du système primitif je préfère le système amendé à la proposition de la section centrale.

M. Vandenpeereboom et >M. Vander Donckt déclarent s'être abstenus par les mêmes motifs que M. Lebeau.

M. Coppieters déclare s'être abstenu par les mêmes motifs que M. Tesch.

M. Dechamps, M. de La Coste et M. de Liedekerke déclarent s'être abstenus pour les mêmes motifs que M. de Theux.

M. de Naeyer. - La Chambre a maintenant à statuer sur la proposition de M. de Brouckere (projet primitif du gouvernement).

M. Devaux. - Mais sans doute avec le nouveau programme !

M. de Naeyer. - La question du programme est évidemment réservée.

- La proposition de M. de Brouckere (projet primitif du gouvernement) est mise aux voix par appel nominal et est rejetée par 40 voix contre 35, 4 membres s'étant abstenus.

Ont voté pour : MM. de Moor, Anspach, Calmeyn, Coppieters 't Wallant, Dautrebande, David, de Baillet-Latour, de Bronckart, de Brouckere, de Lexhy, Delfosse, de Paul, de Perceval, de Steenhault, Devaux, Grosfils, Jouret, Lange, Lebeau, Lelièvre, Lesoinne, Loos, Mascart, Moreau, Orts, Pierre, Prévinaire, Rogier, Sinave, Tesch, Thiéfry, Vandenpeereboom et Verhaegen.

Ont voté contre : MM. de Muelenaere, Brixhe, Coomans, Crombez, (page 579) de Brouwer de Hogendorp, Dechamps, de Haerne, de Kerchove, de La Coste, de Liedekerke, Della Faille, de Man d'Attenrode, de Pitteurs-Hiegaerts, de Portemont, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren, de Sécus, Desmaisières, Desmet, de Theux, de T'Serclaes, Dumortier, Jacques, Janssens, Lambin, Landeloos, le Bailly de Tilleghem, Maertens, Magherman, Malou, Moncheur, Osy, Rousselle, Tack, Thibaut, Thienpont, Vanden Branden de Reeth, Vander Donckt, Van Goethem, Van Iseghem, Van Overloop, Van Tieghem, Wasseige, Wautelet, de Mérode (Félix) et de Naeyer.

Se sont abstenus : MM. Mercier, Vilain XIIII, Deecker et T'Kint de Naeyer.

M. de Naeyer invite les membres qui se sont abstenus à motiver leur abstention.

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Je me suis abstenu sur ce système parce que je le trouve insuffisant par suite des changements apportés aux matières d'examen.

M. Vilain XIIII et M. Dedecker déclarent s'être abstenus par les mêmes motifs.

M. T'Kint de Naeyer. - Je ne suis pas opposé à l'épreuve préparatoire, mais je trouve qu'elle comprend trop de matières.

- L'article 2 du projet de la section centrale est mis aux voix par appel nominal et adopté par 40 voix contre 36 ; 6 s'étant abstenus.

Ont voté pour : MM. de Muelenaere, de Pitteurs-Hiegaerts, de Portemont, de Renesse» de Ruddere de Te Lokeren, de Sécus, Desmaisières, de Smet, de Theux, de T'Serclaes, Dumortier, Jacques, Lambin, Landeloos, le Bailly de Tilleghem, Maertens, Magherman, Malou, Moncheur, Osy, Rousselle, Tack, Thibaut, Vanden Branden de Reeth, Vander Donckt, Van Goethem, Van Tieghem, Wasseige, Brixhe, Coomans, Crombez, de Brouwer de Hogendorp, Dechamps, de Haerne, de Kerchove, de La Coste, de Liedekerke, Della Faille, de Man d'Attenrode et F. de Mérode.

Ont voté contre : MM. de Moor, de Paul, de Perceval, de Steenhault, Grosfils, Janssens, Jouret, Lesoinne, Loos, Mascart, Moreau, Orts, Pierre, Prévinaire, Rogier, Sinave, Tesch, Thiéfry, Thienpont, Vandenpeereboom. Van Iseghem, Van Overloop, Verhaegen, Vilain XIIII, Wautelet, Anspach, Coppieters 't Wallant, Dautrebande, David, de Baillet-Latour, de Bronckart, de Brouckere, Dedecker, de Lexhy, Delfosse et de Naeyer.

Se sont abstenus : MM. Devaux, Lebeau, Lelièvre, Mercier, T'Kint de Naeyer et Calmeyn.

Les membres qui se sont abstenus sont invités à faire connaître les motifs de leur abstention.

M. Devaux. - J'ai fait connaître ces motifs. Je regarde la proposition de la section centrale comme insuffisante ; je ne m'y serais pas cependant opposé si elle avait été complétée.

M. Lebeau. - Je suis pour les certificats. Mais les trouvant insuffisants, j'ai dû m'abstenir.

M. Lelièvre. - Je me suis abstenu parce que, voulant l'épreuve préparatoire, je ne pouvais pas rejeter les certificats ; d'un autre côté, je considère les certificats comme insuffisants ; en cette occurrence, j'ai dû m'abstenir.

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Je n'ai pas voté pour cette disposition parce que, étant isolée, elle me paraît insuffisante ; je ne me suis pas prononcé contre cet amendement, parce qu'il n'existe plus d'autre proposition.

M. T' Kint de Naeyer et M. Calmeyn se sont abstenus par les mêmes motifs.

- L'amendement de M. Lelièvre, tendant à dispenser les docteurs en droit de l'épreuve prescrite par l'article 2, est adopté.

Le second amendement de M. Lelièvre concernant le grade d'élève universitaire devient sans objet.

La séance est levée à cinq heures et un quart.