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Chambres des représentants de Belgique
Séance du jeudi 11 mars 1852

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1851-1852)

(Présidence de M. Verhaegen.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 807) M. A. Vandenpeereboom procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.

La séance est ouverte.

M. T'Kint de Naeyer lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. A. Vandenpeereboom présente l'analyse des pièces adressées à la chambre.

« Le sieur Brunin-Labiniau, pharmacien à Bruxelles, demande que le gouvernement empêche l'introduction dans le pays du rob de Boyveau-Laffecteur, préparé par le sieur Giraudeau de Saint-Gervais, à Paris. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Augustin-Joseph Denly, préposé des douanes, à Brielen, né à Neuve-Eglise, demande la naturalisation. »

- Renvoi au ministre de la justice.


« Le sieur Mattheyssens fait hommage à la chambre de 110 exemplaires de la brochure qu'il vient de publier sous le titre de : Des chambres de commerce et du conseil d'Etat en Belgique et en France. »

- Distribution aux membres de la chambre, dépôt à la bibliothèque.

Compte-rendu de l’emploi des crédits accordés par les lois du 18 avril 1848 et 21 juin 1849

Motion d'ordre

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban) (pour une motion d’ordre). - Messieurs, je n'ai pas voulu prolonger la discussion qui s'est terminée hier, pour relever quelques assertions de l'honorable M. de Man...

M. Malou. - Vous avez fait voter la clôture hier à 5 1/2 heures, et vous voulez maintenant recommencer la discussion, lorsque M. de Man n'y est même pas !

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Si vous voulez m'écouter, vous verrez que votre observation n'a pas le moindre fondement.

L'honorable M. de Man a dit une chose entièrement étrangère à l'objet en discussion ; il a signalé deux arrêtés royaux, l'un de décembre 1847, l'autre de novembre 1849, qu'il a déclarés illégaux, inconstitutionnels, à l'aide desquels le cabinet se serait permis de suspendre une loi...

M. Dumortier. - La discussion est close. On nous a empêchés de parler hier.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - M. le président, je vous prie de vouloir bien me maintenir la parole, attendu que j'ai le droit d'être entendu quand je le demande. J'use de mon droit constitutionnel...

M. Dumortier. - Votre droit est circonscrit par le règlement.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Le règlement ne peut pas modifier la Constitution et n'a pas modifié la Constitution.

L'honorable M. de Man a dit ceci :

« Je tiens à indiquer la cause qui explique le désappointement qu'éprouve M. le ministre ; cette cause, la voici :

« L'honorable M. Rogier n'est pas encore accoutumé à rendre des comptes détaillés des actes de son administration, à les entendre discuter. Voilà ce qui cause sa contrariété.

« Il faudra bien s'y faire cependant : les articles 44 et 45 de la loi du 15 mai 1846 exigent que les ministres présentent à chaque session des comptes imprimés de leurs opérations pendant l'année précédente, et ces comptes doivent développer les opérations qui ne sont que sommairement exposées dans le compte général présenté par le ministre des finances.

« L'article 59 déclare ensuite que la loi de comptabilité sera obligatoire dans toutes ses parties au plus tard le 1er janvier 1848.

« Mais j'ai fait une découverte qui me cause un sentiment pénible, je l'ai faite en ouvrant le volumineux document qui nous a été distribué, et qui contient le dernier compte général rendu ; j'ai appris que le gouvernement avait pris la grave responsabilité de suspendre les effets des articles 44 et 45 de la loi du 15 mai par un arrêté royal du 15 novembre 1849, d'en ajourner l'application a l'exercice 1850.

« Mais je vous le demande, messieurs, où le gouvernement puise-t-il le droit de soustraire au contrôle législatif les comptes développés de ses opérations pour les exercices 1848 et 1849 ?

« Si vous permettez que les dispositions légales soient suspendues par des arrêtés, rien n'empêche qu'un nouvel arrêté ne soit rendu pour ajourner jusqu'en 1852 la publication des comptes détaillés de MM. les ministres, si cette publication est gênante pour eux ! J'envisage donc les effets de l'article 318 de l'arrêté royal du 15 novembre 1849, quant au mode de publier les comptes de l'Etat comme nuls : vous ne pouvez pas les envisager différemment. »

Voilà ce qu'a dit l'honorable M. de Man, à titre de hors-d'œuvre, qui n'a rien de commun avec l'objet qui était alors en discussion, mais pour en faire un grief nouveau contre le cabinet. Cela s'adresse à moi et mérite une explication.

L'honorable M. de Man avait aussi énoncé qu'à la rigueur il comprenait la mesure prise une première fois par un arrêté du mois de novembre 1847, parce qu'il s'agissiit à cette époque d'une transition et qu'il était difficile d'appliquer immédiatement les dispositions de la loi de 1846.

Quelque âme charitable aura probablement fait observer à l'honorable membre qu'il était tombé ici dans une erreur complète. Au moment où il parlait, j'ouvrais l'arrêté de 1847 auquel il faisait allusion, et je constatais que cet arrêté dit précisément tout le contraire de ce que supposait l'honorable membre. L'arrêté du 27 décembre 1847, qui a été rendu, au surplus, sur la proposition d'un membre de la cour des comptes, M. Rappaert, dont j'ai le rapport sous la main ; cet arrêté est ainsi conçu :

« Vu l'article 59 de la loi du 15 mai 1846 sur la comptabilité générale de l'Etat ;

« Voulant pourvoir à l'application des articles de cette loi qui ont pour objet la durée de l'exercice, les comptes de l'Etat, des Ministres et des comptables envers le trésor, et la comptabilité des provinces ;

« Considérant que la loi ne doit être appliquée qu'aux faits qui ont pris naissance et se sont accomplis postérieurement à sa mise à exécution ; qu'ainsi, le premier budget qui devra tomber sous son application est celui qui sera présenté à la législature dans toutes les conditions que la loi détermine, tant sous le rapport de la forme que sous celui de l'époque de présentation ;

« Considérant que toute rétroactivité jetterait la perturbation dans les services ;

« Considérant que le budget de l'exercice 1849 sera le premier qui se trouvera dans les conditions normales de la loi de comptabilité, les mesures étant prises pour qu'il soit présenté aux chambres avant le 1er mars prochain ;

« Considérant qu'il importe de préciser clairement le point de départ et l'époque de transition de l'ancien système à celui consacré par la loi du 15 mai 1846. »

Puis viennent les articles qui déterminent les règles dont les principes ont été tracés dans les considérants. On lit à l'article 6 :

« Art. 6. Les dispositions actuellement en vigueur continueront à régir les exercices antérieurs à celui de 1849.

« Toutefois, dès l'expiration de l'exercice 1848, il sera présenté aux chambres, pour le budget dudit exercice, par les chefs des administrations générales, des comptes administratifs, tels que le prescrivent les articles 44 et 45 de la loi.

« Ces comptes, établis sous une forme transitoire, seront rendus dans leur forme définitive pour le budget de l'exercice 1849. »

Tel était l'arrêté pris par mon honorable prédécesseur, à la date du 27 décembre 1847. Comme vous le remarquerez, contrairement à l'affirmation de l'honorable M. de Man, bien loin d'avoir pour effet de suspendre l'exéculiou des articles 44 et 45 de la loi de comptabilité, il a été pris pour faire exécuter ces articles.

L'honorable membre s'en est probablement aperçu, après avoir prononcé son discours, et il a cru prudent de retrancher au Moniteur la mention de l'arrêté du 27 décembre 1847 ; mais il y a maintenu la découverte qu'il avait faite dans un gros volume que personne ne lit, vous a-t-il dit, ce qui lui donnait l'air d'un savant ; il a découvert dans un gros volume un arrêté qui aurait suspendu les articles 44 et 45 de la loi du 15 mai 1846.

Eh bien, l'honorable membre a eu tort de se donner la peine d'ouvrir un gros volume, pour y faire la découverte qu'il a signalée à l'attention de la chambre ; l'arrêté du 15 novembre 1849 qu'il cite a été publié par le Moniteur du 22 du même mois. Il paraît que si l'honorable membre lit de gros volumes, il ne lit guère le Moniteur. Or que porte l'article 318 de l'arrêté du 15 novembre 1849, signalé par l'honorable membre lui-même, comme ayant suspendu les effets de certaines dispositions de la loi de comptabilité ? L'article 318 est ainsi conçu :

« Le présent arrêté recevra son exécution à partir du 1er janvier 1850. »

Vous voyez s'il y a là un mot des articles 44 et 45 de la loi de comptabilité, et si l'article 318 de l'arrêté du 15 novembre 1849 a eu pour objet de suspendre les effets de cette loi. L'arrêté du 15 novembre 1849 est celui qui règle définitivement l'exécution de toutes les dispositions de la loi sur la comptabilité ; c'est précisément la mesure qui aurait dû recevoir les éloges de l'honorable M. de Man, s'il s'était occupé d'autre chose que de critiques. Ainsi que vous l'avez vu tout à l'heure, par l'arrêté du 27 décembre 1847, mon honorable prédécesseur avait prescrit l'exécution des articles 44 et 45 de la loi de comptabilité ; il s'était borné à prendre des mesures transitoires quant à la forme des comptes à rendre par les ministres ; mais il rappelait expressément l'obligation de rendre ces comptes ; et de même, l'arrêté du 15 novembre 1849, contenant des prescriptions analogues, les déclarait exécutoires à partir du 1er janvier 1850.

Les comptes des ministres ont été déposés ainsi que l'exige la loi de comptabilité et conformément aux arrêtés pris en exécution de cette loi.

L'honorable M. de Man, qui fait un grief au cabinet de n'avoir pas déposé ses comptes, d'avoir voulu se soustraire à la loi de complabililé, l'honorable M. de Man ignore donc que ces comptes sont déposés ; ces comptes ont été adressés à l'honorable président de la chambre et ils reposent dans vos archives.

M. Osy. - Les comptes de l'Etat....

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Nullement ; je parle des comptes des exercices 1848 et 1849 ; ces comptes sont rendus pour la première (page 808) fois ; ce sont ces comptes spéciaux imposés aux ministres en vertu des articles 44 et 45 et non pas les comptes généraux du ministre des finances. Ainsi les comptes que, d'après l'honorable M. de Man, le cabinet s'efforceratt de ne pas rendre, ces comptes ont été transmis à la chambre, une partie le 13 janvier 1851, les autres, le 20 décembre 1851. Indépendamment de cela, les comptes généraux des finances, ce qui est tout, autre chose, ont été également adressés à la chambre.

Les comptes définitifs de 1847 et les comptes provisoires de 1848 et de 1849 sont rendus dans les formes usitées jusqu'à présent ; ils figurent sous le n°4 des pièces de la chambre de la session actuelle. Les observations de la cour des comptes, que l'honorable M. de Man cite toujours, les observations, dis-je, sur ces mêmes comptes des exercices 1847, 1848 et 1849, sont imprimées sous le numéro 10 des documents de la session actuelle.

Il reste à déposer le compte définitif de l'exercice 1849 ; ce compte doit être rendu cette fois dans la forme nouvelle ; il exige des travaux considérables, on s'en occupe sans interruption et il sera transmis aussi promptement que possible.

Mais quant aux comptes spéciaux dont a parlé l'honorable M. de Man, il est tombé dans une erreur complète. Non seulement ou n'a pas suspendu les dispositions de la loi, mais on a rendu les comptes conformément à la loi ; ils reposent dans les archives de la chambre. Il appartient à la chambre de les faire imprimer ; nous désirons qu'on leur donne la plus grande publicité

M. Dumortier. - Messieurs, je ne puis laisser passer sous silence la singulière doctrine émise tout à l'heure par M. le ministre des finances, et je dois vous en montrer les conséquences si jamais elle pouvait être admise par la chambre. Il a fallu la politique de l'honorable M. Frère pour se permettre cette doctrine.

Nous savons tous fort bien qu'il est écrit dans la Constitution que les ministres ont la parole quand ils la demandent, mais nous savons tous que cet article doit être entendu d'une manière saine, raisonnable, de telle manière qu'il ne puisse être permis aux ministres de parler en dehors des discussions, d'éterniser les discussions.

C'est ainsi que l'article 26 du règlement dit : « Avant de fermer la discussion, le président consulte la chambre pour savoir si elle est suffisamment instruite, elc. »

C'est ce qu'a fait le président. Avant de fermer la discussion, il a consulté la chambre pour savoir si elle était suffisamment instruite, et si M. le ministre des finances avait des observations à présenter sur un discours qui avait été prononcé, c'était son droit, il devait présenter ces observations ; mais point du tout ; il laisse clore la discussion, on demande la clôture, pourquoi ? Pour empêcher les orateurs qui veulent combattre le système ministériel de parler, et le lendemain, quand la clôture est prononcée, quand la discussion n'existe plus, que le vote est devenu un fait accompli, un ministre viendrait rouvrir la discussion pour répondre à un discours en l'absence du membre qui l'a prononcé.

Qu'est-ce que c'est que ce système ? C'est un système de désordre. Il appartiendrait aux ministres jouant sur l'expression très respectable, très juste de la Constitution, mais qu'on doit interpréter avec justesse, de faire renaître des discussions terminées et de parler en l'absence des membres auxquels ils veulent répondre.

M. de Man est absent, vous ne prétendez pas lui interdire le droit de vous répondre ; vous l'avez accusé d'avoir dit des choses absurdes en dehors de toute vérité ; il doit pouvoir répondre. Si cela se renouvelle souvent, les discussions deviendront interminables, il n'y aura pas de règlement pour les ministres. Si vous l'interprétez comme le fait M. le minisire des finances, vous déclarez qu'il n'y a pas de règlement pour les ministres, c'est-à-dire pas de moyen d'ordre à leur égard entre les mains du président.

Voilà où l'on arrive ; la disposition de la Constitution doit être interprétée en ce sens que, quand une discussion esi ouverte, un ministre peut toujours prendre la parole, qu'il soit inscrit ou qu'il ne le soit pas. Mais une fois que la discussion est close, elle doit rester close pour tout le monde, pour les minislres comme pour les membres de la chambre ; les ministres doivent respecter la décision de la chambre à laquelle ils pouvaient faire obstacle avant qu'elle ne fût prise ; une fois prise, il n'appartient pas plus aux ministres qu'à nous de la violer, le président lui ayant demandé comme à nous tous s'il avait des observations à faire contre la clôture.

Si la doctrine contraire était admise, il dépendrait d'un ministre, entre deux épreuves, de recommencer une discussion. Que deviendrait alors le règlement, l'ordre de nos débats ? Jusqu'ici tous les ministres avaient été plus sages, plus raisonnables parce qu'ils n'étaient pas animés d'un esprit d'omnipotence ; ils avaient compris que la latitude que leur donnait la Constitution devait être exercée dans les limites du règlement qui est la charte d'ordre de l'assemblée. Il faut protester contre la doctrine soutenue par M. le ministre dis finances qui n'aurait d'autre résultat que de vous faire déclarer qu'il n'y a pas de règlement pour les ministres.

M. le président. - Je n'ai pas arrêté M. le ministre des finances quand il a pris la parole parce qu'il était dans son droit. J'ajouterai que si tout autre membre de l'assemblée avait demandé la parole, par forme de motion d'ordre, pour une rectification, je la lui aurais aecordée comme je l'ai accordée à M. le ministre des finances, qui était d'autant plus dans son droit, qu'en rectifiant l'allégation qu'il a trouvée erronée il a fait remarquer que M. de Mam avait retranché de son discors certaine partie qui ne se retrouvait pas dans le compte rendu du Moniteur.

Quant à l'article 88, il est évident qu'il donne aux ministres le droit en tout temps de faire les communications et les observations qu'ils croient utile de faire. C'est dans ce sens que j'entends l'article 88, et c'est pour cette raison que j'ai maintenu la parole à M. le ministre.

M. Osy. - Quand l'honorable M. de Man a parlé de la loi de comptabilité, il m'a semblé qu'il était dans l'erreur. J'espérais que M. le ministre, dans la séance d'hier ou d'avant-hier, aurait rectifié l'erreur commise par l'honorable M. de Man. Aujourd'hui M. le ministre vient faire cette rectification en l'absence de M. de Man, je demande qu'on décide que M. de Man, quand il sera présent, aura le droit de répondre à M. le ministre.

Je pense que M. le ministre aurait mieux fait de présenter sa rectification à la séance d'hier.

M. le président. - M. de Man aura toujours le temps de répondre, puisqu'il a le droit de le faire sous forme de motion d'ordre.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - L'honorable M. de Man pourra profiter de l'occasion pour compléter certaines révélations qu'il a tenues en réserve, d'après ce que j'ai vu dans un journal avec lequel il semble avoir des relations.

Je tiendrais beaucoup à ce que ces révélations fussent faites à la chambre. Il s'agirait, paraît-il, de faits connus surtout de MM. les députés des Flandres.

M. Dumortier. - Il paraît que le gouvernement veut rouvrir la discussion qui a été close hier ; pour mon compte, je ne demande pas mieux ; la preuve, c'est que j'avais demandé hier à être inscrit, mais le parti du libre examen ne m'a pas permis de parler.

Puisque le ministère demande aujourd'hui que l'on rouvre la discussion, je m'en félicite et je demande à être inscrit pour le moment où cette nouvelle discussion aura lieu.

Maintenant, je dirai deux mots relalivement à l'interprétation de l'article 88 de la Constitution. Je ne pense pas qu'il entre dans la pensée de personne d'interdire aux ministres la parole quand ils la demandent dans l'ordre du règlement ou par motion d'ordre ; mais je maintiens fortement, comme je viens de le dire, que l'article 88 de la Constitution ne peut être interprété que conformément au règlement lui-même, c'est-à-dire comme il l'a été depuis 22 ans.

Je demande si, par exemple, un ministre, qui a le droit d'enlever à un orateur son tour de parole, peut également avoir le droit de l'interrompre au milieu de son discours ; je demande encore si un ministre aurait le droit d'interrompre par un discours un appel nominal.

Voilà cependant, messieurs, où nous conduirait la doctrine de M. le ministre des finances, si elle pouvait prévaloir dans cette assemblée, contrairement au règlement qui y est en vigueur depuis 22 ans.

M. Delfosse. - Il est cerlain que le règlement ne peut pas être interprété dans le sens que vient d'indiquer l'honorable M. Dumorlier ; sans cela, le règlement serait contraire à Constitution. La disposition de la Constitution est formelle ; le droit des ministres est incontestable, et n'admet pas d'exception ; les ministres sont entendus quand ils le demandent. Sans doute, ils doivent faire de ce droit un usage raisonnable ; s'ils en abusaient, ils seraient généralement blâmés, ils se mettraient en hostilité avec la chambre.

Eh bien, messieurs, je vous demande si M. le ministre des finances a fait un usage déraisonnable du droit consacré par la Constitution ? M. le ministre des finances a demandé la parole pour rectifier un fait et pour faire connaître certains actes dont l'honorable M. de Man avait parlé, paraît-il, d'une manière inexacte. M. le ministre était d'autant plus dans son droit que le fait dont l'honorable M. de Man a entretenu la chambre n'avait pas directement trait à la discussion qui a été close hier.

Je n'admets pas que l'on puisse contester le droit des ministres ; mais il faut qu'ils en fassent un usage raisonnable ; il ne faut pas, par exemple, qu'ils en usent pour interrompre un appel nominal. L'honorable M. Dumortier peut être sûr qu'un ministre ne sera jamais assez insensé pour agir de cette façon.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Les observations qu'a présentées M. le président sont très justes. Un fait absolument étranger à la discussion à laquelle on se livrait, est signalé par l'honorable M. de Man. J'attendais la fin de la discussion'pour le rectifier, et, en effet, chacun de vous, messieurs, a pu remarquer que pendant que l'honorable M. de Man parlait, je compulsais les textes qu'il citait, et que j'y mettais des indications qui devaient servir à ma réponse. Pourquoi n'ai-je pas parlé hier ? Mais par la raison que vous savez : la discussion s'est prolongée très tard ; elle n'a été terminée qu'à 5 heures et demie ; il n'y avait, d'ailleurs, pour moi aucun inconvénient à attendre un autre jour, pour faire une rectification que tout homme de bonne foi doit accueillir avec empressement.

L'honorable M. de Man avait signalé, sans rapport direct avec l'objet en en dehors de la discussion, un fait absolument faux. Il avait signalé le cabinet comme avant pris des arrêtés illégaux, comme ayant suspendu l'exécution de la loi de comptabilité ; il avait signalé le cabinet comme reculant devant la nécessité de rendre les comptes prescrits par la loi de comptibilité. Les fins de non recevoir de M. Dumortier ne pourraient m'empêcher de prouver que l'honorable M. de Man s'est grossièrement trompé, qu'il n'a pas lu l'arrêté de 1847 qui porte (page 809) absolument le contraire de ce qu'il lui a fait dire ; qu'il n*a pas lu davantage l'arrêté de 1849 et qu'il ignore enfin que les comptes dont il parle ont été déposés.

Je pouvais dire cela toujours, en tout temps, par forme de motion d'ordre. Je pouvais attendre la publication du discours de l'honorable M. de Man, car, de même qu'il a jugé nécessaire de retrancher une partie de ses allégations parce qu'il avait reconnu qu'elles n'étaient pas fondées, il pouvait juger bon de supprimer toute cette partie de son discours. Il m'aurait dispensé de prendre la parole. C'est ce matin que j'ai trouvé le discours de l'honorable M. de Man aux Annales parlementaires et j'avais le droit de rectifier un fait erroné qui y est consigné.

Rapports sur des pétitions

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke) (pour une motion d’ordre). - Messieurs, la chambre, dans une dernière séance, a ordonné le renvoi au ministère des travaux publics, avec demande d'explications, d'une pétition du conseil communal de Wavre. Je demande que la chambre veuille bien ordonner la mise à l'ordre du jour de demain de la discussion sur cette pétition.

M. de Perceval. - Il faudrait d'abord connaître les explications de M. le ministre.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Je pourrais donner dès à présent les explications que provoque cette pétition. Mais je pense que je serai demain plus en mesure de les fournir, que les membres qui voudraient me répondre seront aussi plus en mesure, puisque je les préviens.

M. Mercier. - Je n'ai pas d'objection à faire à la proposition de M. le ministre des travaux publics, pour autant qu'elle tend à donner demain des explications. Mais je demande que ce ne soit qu'après avoir entendu ces explications que la chambre fixe le jour de la discussion ; il est possible que les explications qui seront données soient de nature à exiger un examen particulier avant de faire l'objet d'une délibération de la chambre.

M. le président. - Je crois qu'il serait plus convenable et plus régulier que M. le ministre voulût bien transmettre ses explications par écrit. Alors on pourrait mettre la discussion sur ces explications à l'ordre du jour d'une prochaine séance ; c'est ainsi que les choses se pratiquent ordinairement.

M. Orban. - La chambre discute des projets de loi, ou des propositions qui lui sont faites par ses membres.

Le droit de pétition ne peut aller jusqu'à investir ceux qui en usent, de la faculté de saisir la chambre de propositions que celle-ci serait appelée à discuter et à mettre à son ordre du jour. (Réclamations.) Dans tous les cas, avant.de rien décider, il faudrait entendre les explications de M. le ministre.

M. Delfosse. - L'honorable M. Orban est dans l'erreur. Il arrive très souvent que lorsqu'un ministre donne des explications sur une pétition, ces explications provoquent une discussion. Si ces explications sont de nature à satisfaire la chambre, il n'y a pas de discussion ; mais si un membre a des observations à présenter sur les explications du ministre, on ne peut l'empêcher de prendre la parole.

M. le président. - La parole est à M. Ad. Roussel.

M. Roussel. - Je voulais présenter les mêmes observations que l'honorable M. Delfosse.

M. le président. - Ainsi il est entendu que M. le ministre donnera par écrit les explications qui lui ont été demandées, et que, ces explications données, la chambre examinera s'il y a lieu de mettre cette question à l'ordre du jour.


M. Jacques, rapporteur. - « Par pétition datée de Gand, le 8 février 1852, le sieur Vander Cruysse demande une indemnité pour couvrir les frais d'une publication qu'il a faite. »

Le pétitionnaire, qui déclare avoir obtenu cinq brevets, réclame un subside pour faire imprimer sa méthode et pour l'enseigner dans les écoles.

Vous avez renvoyé, le 22 décembre dernier, à M. le ministre de l'intérieur, une première demande du même pétitionnaire.

Votre commission des pétitions ne pense pas qu'il y ait des motifs suffisants pour engager la chambre à insister près du gouvernement : il ne faut pas que la chambre se transforme en agent solliciteur pour appuyer des demandes de subsides.

La commission propose donc l'ordre du jour.

- Adopté.


M. Jacques, rapporteur. - « Par pétition datée de Chanxhe, le 2 février 1832, quelques habitants de Chanxhe, hameau dépendant de Sprimont, réclament contre la mise en vente de biens communaux situés au centre de Chanxhe. »

Les pétitionnaires, qui sont au nombre de dix, prétendent que les intérêts du hameau de Chanxhe sont sacrifiés à ceux de la commune, sans aucune compensation.

Chanxhe n'a aucun édifice, aucun établissement érigé ou entretenu aux frais de la caisse communale ; on vend néanmoins, au profit de cette caisse, les petites parcelles de terrain communal qui se trouvent dans l'intérieur du hameau de Chanxhe, et dont la jouissance était si nécessaire aux habitations contiguës.

Si les pétititonnaires ont à se plaindre des actes posés par le conseil communal de Sprimont, c'est à la députation permanente du conseil provincial ou au commissaire d'arrondissement qu'ils doivent d'abord s'adresser.

La commission des pétitions propose en conséquence l'ordre du jour.

- Adopté.


M. Jacques, rapporteur. - « Par pétition datée du 20 février 1832, le sieur Toussaint soumet à la chambre des réflexions sur les moyens de restreindre la mendicité et de moraliser les classes ouvrières. »

La pétition contient trop peu de chose pour qu'il y ait utilité à la renvoyer aux ministres de la justice et de l'intérieur. Le but qu'elle indique est trop relevé pour qu'il convienne de prononcer l'ordre du jour.

La commission vous propose donc le dépôt au bureau des renseignements.

- Adopté.


M. Jacques, rapporteur. - « Par pétition datée de Bruxelles, le 24 janvier 1852, plusieurs membres de sociétés littéraires flamandes, à Bruxelles, demandent une loi qui rende l'enseignement primaire obligatoire. »

Parmi les cinq sociétés qui ont souscrit la pétition, l'on remarque la société royale de Wyngaerd.

Cette pétition est la reproduction textuelle de celle qui avait été adressée à la chambre par une société de Gand à l'ouverture de la présente session et sur laquelle vous avez prononcé l'ordre du jour dans la séance du 22 décembre dernier.

Cette pétition, rédigée en flamand, développe en termes dignes et convenables, à l'appui de l'opinion qu'elle exprime, des motifs sérieux et graves qui méritent l'attention bienveillante de la chambre.

Nous ne pouvons donc pas vous proposer de prononcer de nouveau l'ordre du jour. L'on conçoit que pour ne pas donner une espèce de passe-port à une opinion très contestable, la chambre fait bien de ne pas renvoyer à M. le ministre de l'intérieur une pétition qui demande que l'enseignement primaire soit déclaré obligatoire par la loi. Nous pensons que ce qui convient le mieux, c'est de déposer la pétition au bureau des renseignements ; telle est la proposition que je suis chargé de soumettre à la chambre.

- Adopté.


M. Jacques, rapporteur. - « Par pétition datée d'Ittre, le 31 janvier 1852, le sieur Franeois-Joseph Saigne, éclusier au canal de Charleroy, prie la chambre de le relever de la déchéance de la naturalisation, qu'il a encourue en laissant expirer le terme fixé par la loi pour faire sa déclaration. »

Une première demande du sieur Saigne avait été rejetée le 24 novembre 1848.

La demande de naturalisation a été accueillie ensuite à la chambre et au sénat sous les dates des 21 février 1850, 3 avril, 1er mai et 31 mai 1851.

Votre commission des pétitions pense qu'il y a lieu de renvoyer la nouvelle demande du sieur Saigne à la commission des naturalisations.

- Adopté.


M. Joureu, rapporteur. - « Par pétition sans date, plusieurs propriétaires et cultivateurs à Roulers demandent qu'on enlève, a l'époque de leur maturité, les peupliers qui croissent le long des routes de l'Etat et de la province et qu'on les remplace par une autre essence d'arbres plantés à des distances plus éloignées. »

Conclusions : Renvoi à M. le ministre des travaux publics.

M. Rodenbach. - Messieurs, cette requête nous est adressée par les cultivateurs et habitants notables de la ville de Roulers ; ils pétitionnent vivement pour que les peupliers que le gouvernement fait planter le long des grandes routes soient remplacés à leur maturité par une autre essence d'arbres et à une distance plus éloignée les uns des autres. Un fait incontestable, c'est que les peupliers du Canada font un tort immense à l'agriculture. Les riverains en éprouvent un préjudice considérable. Je prie M. le ministre de vouloir bien prendre cette requête en sérieuse considération, et je pense que, malgré tout le désir qu'il a d'obtenir des produits pour le trésor, il doit cependant veiller avec le plus grand soin à ne pas froisser l'intérêt des agriculteurs qui ont de grandes charges et de gros impôts à payer tant à l'Etat qu'à la province et à la commune.

J'appuie le renvoi à M. le ministre des travaux publics.

- Le renvoi est adopté.


M. Joureu, rapporteur. - « Le sieur Louis-Joseph Petersen prie la chambre de lui faire obtenir un subside de 200 francs, qui est accordé aux blessés de septembre. »

Conclusion : Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

M. Rodenbach. - Messieurs, si je dois en croire les pièces déposées, le pétitionnaire est un père de famille qui était à l'armée lorsqu'on a accordé des pensions aux blessés de septembre. S'il en est ainsi, si réellement cet homme a été blessé, si ses pièces sont en règle, on devrait examiner sa requête avec la plus grande attention.

Dans aucune circonstance, M. le ministre de l'intérieur n'a oublié les blessés de septembre, et je suis persuadé que si la réclamation du pétitionnaire est fondée, il s'empressera d'y faire droit ; il a toujours rendu justice aux hommes à qui nous devons notre nationalité. Si des pièces manquaient au pétitionnaire pour obtenir une pension annuelle, j'engagerais le ministre d'accorder une gratification à un ancien sous-officier qui paraît être dans le besoin et accablé de famille. J'appuie fortement le renvoi de cette pétition à M. le ministre de l'intérieur. »

- Le renvoi à M. le ministre de l'intérieur est mis aux voix et adopté.


(page 810) M. Joureu, rapporteur. - « Le comice du 2ème district agricole du Hainaut demande une loi qui garantisse au fermier sortant une indemnité du chef de fumures et améliorations du sol. »

Conclusion : renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

M. T'Kint de Naeyer. - Messieurs, les anciens règlements encore en vigueur dans les Flandres garantissent les droits des fermiers sortants.

Ces règlements n'étant plus en harmonie avec les progrès que l'agriculture a réalisés depuis un siècle, il devient urgent d'y introduire des modifications.

Le conseil provincial de la Flandre orientale a déjà été saisi de cette importante question, et il a chargé sa députation permanente de lui présenter un rapport à ce sujet dans la prochaine session.

Il me semble évident que la révision des règlements dont je viens de parler ne pourra avoir lieu sans l'intervention de la législature.

J'engagerai donc M. le ministre de l'intérieur à faire soumettre la question à l'étude et à nous soumettre, s'il y a lieu, un projet de loi sur la matière.

M.Delescluse. - Messieurs, la question que soulève la requête dont il s'agit en ce moment, mérite la plus sérieuse attention. Dans quelques-unes de nos localités, le mauvais gré existe encore et donne lieu fréquemment à des accidents et à des crimes qu'un peu plus de justice envers les fermiers ferait probablement cesser. Lorsqu'un propriétaire retire son bien à un locataire, il est injuste de faire perdre à ce malheureux les améliorations qu'il a apportées au sol. D'un autre côté, l'agriculture ne pourrait que gagner à des mesures plus équitables ; car chaque fois qu'un bail approche de sa fin, et trois années à l'avance, le fermier est obligé de ne plus mettre de fumier, et s'il y a un nouveau fermier, il faut trois autres années pour remettre la terre en bon état.

Je demande que la pétition soit prise en sérieuse considération.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - J'accepte bien volontiers le renvoi, et je dois dire à la chambre que cette question, très importante en elle-même, a déjà fait l'objet d'un examen et d'un commencement d'instruction au département de l'intérieur.

- Le renvoi à M. le ministre de l'iotérieur est mis aux voix et adopté.


M. Joureu, rapporteur. - « Par pétition datée de Bruxelles, le 2 février 1852, le sieur Dufraene, ancien combattant de septembre, prie la chambre de lui accorder une pension. »

Conclusions : Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. H. de Baillet, rapporteur. - « Par pétition datée de Coronmeuse, le 25 janvier 1852, des restaurateurs, cafetiers et cabarctiers, à Coronmeuse, demandent qu'il soit interdit à l'éclusier de garde près la fonderie de canons d'établir un café ou cabaret dans le local que le gouvernement a mis à sa disposition pour les besoins du service. »

Ils se plaignent de ce que, dans les conditions favorables où se trouve placé l'éclusier susdit, qui n'a pas de loyer de local à payer, mais qui jouit au contraire d'un traitement à charge de l'Etat, leur fait une concurrence nécessairement ruineuse pour eux.

L'existence du café ou cabaret dans le local de l'éclusier ne serait d'ailleurs pas utile aux bateliers, ce local se trouvant placé dans un centre de population.

La commission propose le renvoi à M. le ministre des travaux publics.

- Adopté.


M. H. de Baillet, rapporteur. - « Par pétition datée de Saint-Josse-ten-Noode, le 2 février 1852, le sieur Van Aughem prie la chambre de décider si un milicien, qui s'est fait remplacer en vertu de l'article 17 de l'arrêté royal du 3 septembre 1848, peut être autorisé, avant les dix-huit mois de service de son remplaçant, à faire le versement de la somme fixée par la loi, à l'effet d'être déchargé de toute responsabilité ultérieure à l’égard de son remplaçant. »

Afin d'obtenir une solution affirmative de la question soulevée, le pétitionnaire, qui est le directeur de l'agence centrale pour favoriser le l remplacement militaire, invoque les termes de l'article 17l de l'arrêté royal du 3 septembre 1348, tandis que M. le ministre de l'intérieur a pris une décision d'après laquelle le bénéfice dont il s'agit, aux termes de l'article 10 de la loi du 1er mai 1847, ne peut être rendu applicable qu'aux seuls miliciens, qui se font remplacer par l'intermédiaire du département de la guerre.

Le pétitionnaire prétend que la décision prise par M. le ministre de l'intérieur établit une contradiction évidente entre la loi et l'arrêté royal précités, c'est pourquoi il a recours à l'intervention de la législature pour faire décider s'il y a lieu ou non de maintenir la solution donnée par M. le ministre. Ainsi il demande une loi interprétative.

La commission propose le dépôt de la pétition au bureau des renseignements.

- Adopté.


M. H. de Baillet, rapporteur. - « Par pétition datée d'Arlon, le 2 février 1852, le sieur Lacroix demande que le gouvernement fasse exécuter la route sur Guirsch et le nivellement de la route de Habay. »

Conclusions : Renvoi à M. le minisire des travaux publics.

- Adopté.


M. H. de Baillet, rapporteur. - « Par pétition sans date, plusieurs habitants d'Ocquier demandent que cette commune fasse partie du canton de Nandrin. »

Les pétitionnaires font cette demande surtout à cause de la grande distance de leur commune de la ville d'Huy, chef-lieu de leur canton actuel, qui est de 20 kilomètres, tandis qu'ils ne sont qu'à 10 kilomètres de Nandrin.

La commission prépose le renvoi à M. le ministre de la justice.

- Adopté.


M. H. de Baillet, rapporteur. - « Par pétition datée de Liège, le 24 février 1852,1e sieur Falisse, industriel à Liège, prie la chambre d'examiner si les formalités relatives au timbre pourraient être remplacées par un timbre proportionnel dans le genre des timbres-poste, et demande le rétablissement du timbre pour les journaux et pour les écrits périodiques. »

Par la première partie de sa pétition, il a en vue de faciliter les affaires commerciales sans compromettre les intérêts du trésor, et il indique des moyens qu'il lui paraît convenables d'employer à cet effet. Par la deuxième partie il veut assurer la liberté de la presse en enlevant aux journaux un privilège que d'autres industries doivent leur envier. Il indique en même temps des moyens d'éviter les inconvénients qui résultaient de l'ancienne manière de timbrer les feuilles des journaux.

La commission propose le renvoi à M. le ministre des finances.

- Adopté.


M. H. de Baillet, rapporteur. - « Par pétition datée de Namur, le 26 février 1852, plusieurs propriétaires et cafetiers à Namur réclament contre l'établissement d'un café-restaurant dans la station du chemin de fer de cette ville. »

Les pétitionnaires prétendent que l'établissement dont il est question, dans la condition privilégiée où il serait placé, leur ferait une concurrence ruineuse, sans utilité pour le public, qui trouve des cafés confortables à proximité de la station. Ils prétendent, en outre, que la construction du nouvel établissement s'élève sur un terrain de l'Etat sans qu'il ait été fait de concession à cet effet et, par conséquent, sans aucun droit.

La commission propose le renvoi de la pétition à M. le ministre des travaux publics.

- Adopté.

Prise en considération de demandes en naturalisation

Le rapport de la commission des naturalisations est ainsi conçu :

« Messieurs,

« Le sieur Pierre-Joseph Bourrez, par requête adressée à la chambre des représentants le 2 août 1851, demande la naturalisation ordinaire, avec dispense du droit établi par la loi du 15 février 1844.

« L'impétrant expose qu'il est né à Dour, canton du même nom, arrondissement de Mons, le 29 décembre 1822 ; il exerce la profession de cabaretier à Elouges, même arrondissement. Son père, Célestin-Joseph Bourrez, est né à Beltrechien, royaume de France, de parents qui y étaient domiciliés dans l'année 1779. En 1782, il est venu avec sa famille s'établir à Dour, où il a exercé la profession de meunier. Il s'est marié avec la dame Caroline Harmignies et de ce mariage sont issus six enfants, dont l'exposant fait partie.

« Célestin-Joseph Bourrez, père de l'exposant, a constamment habité Dour jusqu'à son décès arrivé en juin 1829, et n'a cessé jusqu'alors d'y exercer la profession de meunier.

« L'impétrant, de son côté, a continué sa résidence au même lieu ; il a pris part au tirage de la milice, classe de 1841, et le sort lui a donné le n°36.

« Il a épousé en premières noces Mlle Rosine Wautrez, et en secondes noces, Mlle Rosine Richez, de la commune de Dour.

« En 1847, il a fait construire, à Elouges, une habitation où il se livre à un débit de boissons.

« Tous ces faits sont dûment attestés, ainsi que sa bonne conduite.

« M. l'avocat général, au nom de M. le procureur général près la cour d'appel de Bruxelles, dans cette conviction, estime qu'il y a lieu d'accueillir favorablement la demande de l'impétrant ; son opinion est formulée daus sa missive du 21 août 1851, adressée à M. le ministre de la justice ; mais celui-ci, dans sa missive adressée le 26 août 1851 à M. le président de la chauibre, estime que le pétitionnaire étant né à Dour en 1822 d'un père français domicilié sur le sol belge est, d'après la jurisprudence constamment suivie, Belge au terme de l'article 8 de la loi fondamentale du 24 août 1815, et que sa demande paraît être sans objet.

« Votre commission n'hésite pas à se ranger à cet avis, et a l'honneur de vous proposer l'ordre du jour motivé sur ce que le sieur Pierre-Joseph Bourrez ayant la qualité de Belge, la naturalisation serait superflue. »

M. de Theux. - Messieurs, si je ne me trompe, la chambre a déjà posé des précédents de ce genre : mais la seule conséquence qui puisse résulter de cet ordre du jour, c'est que la chambre est d'avis que le pétitionnaire a déjà la qualité de Belge et qu'il est dès lors inutile de la lui conférer ; cela n'empêchera qu'une personne, qui lui contestera cette qualité, ne puisse porter la question devant les tribunaux.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, ainsi que le suppose l'honorable M. de Theux, il y a déjà des précédents ; à différentes reprises, la question a été portée devant la chambre, et chaque fois la chambre a passé à l'ordre du jour. D'après la jurisprudence actuelle, doivent être considères comme Belges les individus nés sur le sol belge, sous l'empire de la loi fondamentale, d'étrangers domiciliés en Belgique. Il est incontestable aussi, comme le suppose encore l’honorable M. de Theux, que si un intéressé voulait contester cette qualité aux individus (page 811) qui prétendent la posséder, les tribunaux auraient à décider la question ; il pourrait se faire alors que la jurisprudence vînt à changer et que la cour de cassation déclarât ultérieurement que ces individus n'ont pas la qualité de Belge. Dans ce cas, ces mêmes individus auraient à se pourvoir devant la chambre.

- L'ordre du jour motivé, proposé par la commission des naturalisations, est mis aux voix et adopté.


Le rapport de la commission des naturalisations est ainsi conçu :

« Le sieur Bernard-Antoine -Louis-Marc-Aurèle Clément, adjoint-commis de première classe au bureau des postes à Anvers, sollicite, par requête en date du 25 septembre 1849, la naturalisation ordinaire.

« Il est né à Mons, le 4 juillet 1822, d'un père étranger, employé au génie militaire, demeurant dans cette ville, qui a obtenu la naturalisation du roi Guillaume, le 16 avril 1825 ».

« Dans cette occurrence, votre commission des naturalisations, considérant que l'article 8 de la loi fondamentale de 1815 est applicable au pétitionnaire et qu'en vertu de cette disposition et de l'interprétation constante de la jurisprudence admise par la législature et la cour de cassation, le sieur Clément a acquis la qualité de Belge, comme réunissant les trois conditions exigées par l'article 8 précité ;

« Vu l'avis conforme de M. le procureur général près la cour d'appel de Bruxelles ;

« Vu l'avis également conforme de M. le ministre de la justice, en date du 15 novembre 1850 ;

« A l'honneur de vous proposer l'ordre du jour motivé sur ce que le sieur Clément ayant la qualité et les droits de citoyen belge par droit de naissance, sa demande reste sans objet, et d'en informer M. le ministre de la justice. »

- Ces conclusions sont adoptées.


« Par requête adressée à la chambre, le sieur Régnier Rynders, sous-officier de gendarmerie pensionné, à Avelghem (Flandre occidentale), demande la naturalisation ordinaire pour ses deux fils Albert et Joseph, nés à Alost en 1824 et 1828.

« Votre commission, messieurs, considérant que les sieurs Albert et Joseph Rynders se trouvent dans le cas de l'article 8 de la loi fondamentale du 24 août 1815, et doivent, par conséquent, être considérés comme Belges, a l'honneur de vous proposer l'ordre du jour. »

- Ces conclusions sont adoptées.

Projet de loi accordant un crédit supplémentaire au budget du ministère de la justice

Discussion générale

M. Osy. - Messieurs, j'accorderai le crédit demandé par M. le ministre de la justice, tout en déclarant qu'il eût été plus convenable de faire cette demande dans le budget même de la justice.

L'observation que j'ai à faire porte sur l'appropriation des bâtiments que nous avons achetés il y a quatre ou cinq ans ; je me suis opposé dès lors à l'achat de ces hôtels, parce que je prévoyais qu'il résulterait de là de grandes dépenses, et parce que, dans son opiniou, les bureaux du département de la justice et de celui des travaux publics pouvaient très bien rester dans les locaux où ils se trouvaient.

D'après les explications fournies par M. le ministre de la justice à la section centrale, on ne peut pas beaucoup espérer que les bureaux du département de la justice pourront être transférés dans l'hôtel de la rue de la Loi ; les mêmes difficultés existent probablement aussi pour le département des travaux publics ; et cependant on se rappellera que la section centrale qui, dans le temps, a proposé à la chambre de faire l'acquisition des hôtels de la rue de la Loi, y mettait pour condition formelle, que les bureaux des deux départements en question y seraient transférés.

Ce que je prévoyais alors, est arrivée. Les deux hôtels dont il s'agit sont aujourd'hui entièrement occupés par quelques bureaux spéciaux du département des finances et de celui des travaux publics ; et les anciens hôtels du ministère des travaux publics et de celui de la justice n'ont pas cessé d'avoir cette destination.

J'avoue que je regrette de n'avoir pas eu la majorité en 1847, lorsque j'ai fortement combattu l'achat de ces hôtels ; nous n'aurions pas à notre charge ces quatre ou cinq hôtels différents ; et si aujourd'hui on voulait transférer définitivement dans les hôtels de la rue de la Loi les bureaux du département de la justice et de celui des travaux publics, vous auriez encore à faire une dépense de près d'un million. Il faudrait acheter des maisons rue de l'Orangerie, et faire des travaux d'appropriation considérables aux bâtiments.

Je demanderai à M. le ministre des finances quelles sont maintenant les raisons qui empêcheraient d'utiliser ces hôtels. Je prierai aussi le gouvernement de me dire s'il sait à combien s'élèveront les dépenses d'appropriation.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs la lettre que j'ai eu l'honneur d'écrire à la section centrale qui a examiné le crédit supplémentaire qui est en ce moment soumis a votre délibération, contient les renseignements que demande l'honorable M. Osy.

Les raisons qui s'opposeront encore pendant un certain temps à ce que le département de la justice ne puisse être transféré dans la rue de la Loi, c'est d'une part, le temps qu'il faudra pour approprier l'hôtel, et d'autre part, les sommes que coûtera l'appropriation elle-même.

Ces sommes ont été évaluées pour le département de la justice à 450 mille fr„ et pour l'appropriation des deux hôtels à environ douze cent mille francs.

L'honorable M. Osy demande si le devis a été fait. Le devis n'a pas été fait dans tous ses détails, mais les chiffres en ont été fournis par un architecte avec une partie des plans.

L'architecte Dumont, chargé de ce travail par un de nos honorables prédécesseurs, a déclaré que pour l'appropriation de l'hôtel de la justice et la construction des bureaux, la dépense serait environ de 450 mille francs.

Pour transférer à la fois l'hôtel du département de la justice et celui du département des travaux publics, avec la construction des bureaux, la dépense serait de 1,200,000 francs.

C'est en présence de ces faits, et en présence du délabrement de l'hôtel du département de la justice que je suis venu vous demander le crédit soumis à vos délibérations.

M. Lebeau, rapporteur. - La section centrale s'est aisément mise d'accord sur la convenance d'accorder au ministre de la justice le crédit supplémentaire qu'il est venu demander à la chambre.

Les explications données par M. le ministre ont paru satisfaisantes ; elles ont fait ressortir l'impossibilité où il était de prévoir ces dépenses lors de la présentation du budget de l'avant-dernier exercice.

La section centrale ne se serait pas arrêtée longtemps non plus sur la destination à donner aux hôtels de la ruede la Loi, dans des circonstances plus favorables, si elle n'avait cru voir dans les explications du ministre une intention arrêtée d'abandonner le projet de translation. Or, cette translation était bien formellement dans la pensée de la section centrale qui avait appuyé la demande d'acquisition des hôtels de la rue de la Loi. C'est parce que la chambre avait aussi approuvé cette pensée, qu'elle a adopté le projet de loi sanctionnant l'acquisition des hôtels de la rue de la Loi.

En nous reportant à ces antécédents, nous avons été naturellement, amenés à faire des réserves et à demander des explications au ministre de la justice.

Quoi qu'on puisse penser des dépenses d'appropriation des hôtels de la rue de la Loi et de la construction des bureaux qui devait être la conséquence de cette translation, il est cependant un fait sur lequel tout le monde doit être d'accord, c'est qu'on n'aurait pas acheté à grands frais des hôtels rue de la Loi pour y établir de simples bureaux ; c'eût été là une dépense très abusive, tandis que l'on pouvait se procurer dans une position moins centrale des locaux pour des prix bien inférieurs à ce que coûtent les hôtels de la rue de la Loi.

L'acquisition des hôtels de la rue de la Loi a été la continuation de la pensée qui a porté le gouvernement à acquérir les hôtels de Galles, Torrington et Jacquelard, pour y loger les ministères. On l'a fait pour des convenances réciproques qu'il est facile à tout le monde de comprendre. A cette époque, les engagements ont été formels ; à cet égard, je puis en parler avec connaissance de cause, car j'étais rapporteur de la section centrale, et ces engagements ont été la cause déterminante du vote de la chambre, vote qui semblait devoir être tout autre, j'en appelle aux souvenirs de mes honorables collègues.

La section centrale a fait remarquer à M. le ministre que ses observations étaient incomplètes en ce sens que, si elles présentaient un aperçu plus ou moins exact des dépenses qu'entraînerait la translation, elles n'en présentaient aucun sur les compensations qui étaient dans la pensée de la chambre quand elle a homologué le contrat d'acquisition. Noua n'avons pas la moindre idée de ce qu'on pourrait obtenir de la vente des hôtels occupés par les ministères de la justice et des travaux publics.

Il était dans la pensée de la chambre comme de la section centrale et de tout le monde, de les faire servir de compensation aux sacrifices, qu'on venait demander à la chambre ; il y avait, à cet égard, un travail à faire que la section centrale a demandé à M. le ministre. Nous devons insister sur ce point, car s'il peut y avoir convenance à ajourner, on ne doit pas renoncer à l'exécution d'engagements formels qui ont évidemment amené la chambre à sanctionner le contrat d'acquisition de ces hôtels.

Je ne voudrais pas donner à cette discussion des proportions qu'elle ne comporte pas ; je me borne à proposer l'adoption du crédit en engageant le gouvernement à prendre en sérieuse considération le vœu de la section centrale pour un travail complet, c'est-à-dire non seulement l'expertise détaillée des dépenses de translation, mais une estimation exacte des compensations qui en seraient la conséquence, c'est-à-dire du produit à retirer des hôtels qui deviendraient disponibles.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Nous sommes complètement d'accord avec l'honorable M. Lebeau. Le gouvernement a très bien fait d'acquérir les hôtels Engler et Daubremé pour compléter les propriétés de l'Etat dans la rue de la Loi.

La destination est parfaitement indiquée ; il est très convenable que tous les bureaux des ministères se trouvent à côté des hôtels des ministres.

Une considération qui a arrêté la réalisation de ce projet, c'est la question de la dépense, elle est évaluée à 1,200,000 fr.

Je ne pense pas que l'on ait exagère en indiquant ce chiffre, car il faut acquérir encore un certain nombre de propriétés dans la rue de (page 812) l'Orangerie ; il faudra ensuite élever de notables constructions. On aura, il est vrai, en compensation les hôtels actuels de deux ministres dont on aura la libre disposition ; mais je ne pense pas qu'on puisse les faire entrer en ligne de compte comme recettes effectives pouvant servir à couvrir une partie des dépenses à faire. L'Etat conservera ces deux hôtels, il est obligé aujourd'hui de louer certains locaux ; il pourra utiliser l'hôtel de la justice qui vient se joindre à une propriété de l'Etat, au Musée qui est susceptible d'extension.

C'est une véritable compensation, mais non comme recette en écus : il y aura une dépense à faire de douze ou de quinze mille francs environ. Quand les circonstances nous paraîtront opportunes, nous n'hésiterons pas à faire des propositions à la chambre.

M. Malou. - Je n'ai que peu de mots à ajouter a ce qui vient d'être dit. La pensée de la chambre en complétant les acquisitions des propriétés de la rue de la Loi a été de réunir les ministères. Restaient les moyens d'exécution ; d'après mes souvenenirs, les devis ne s'élevaient pas à 1,200 mille fr., je n'affirme pas cependant, car je n'ai pas les documents sous les yeux. Voici quelle était la pensée du gouvernement. Je crois qu'il eût été imprudent de disposer de tout le terrain occupé par l'hôtel du ministère de la justice, la majeure partie devait être conservée dans la prévision qu'on voudrait dans l'avenir donner front à rue, comme on dit, au musée repris de la ville de Bruxelles.

Dans la pensée du gouvernement il y avait une opération beaucoup plus large qui aurait donné une compensation aux dépenses de construction à faire rue de la Loi, c'était, si on pouvait y parvenir, de transférer le gouvernement provincial à l'hôtel occupé par le ministère de la justice ; on y trouvait une compensation parce que l'hôtel du gouvernement provincial et les jardins qui en dépendent pouvaient être vendus comme terrain à bâtir et produire des sommes à peu près suffisantes pour couvrir les dépenses à faire pour les constructions nouvelles.

Je rappelle cette pensée pour que MM. les ministres puissent la méditer et la suivre si cette combinaison leur paraît bonne.

- La discussion est close.

Vote de l’article unique

« Article unique. L'allocation pour matériel de l'administration centrale du ministère de la justice, formant l'article 3 du chapitre premier du budget des dépenses pour 1851, fixé par la loi du 29 décembre 1850, est augmentée de vingt mille francs (fr. 20,000).

« Ce supplément sera couvert au moyen d'une émission de bons du trésor. »

Il est procédé à l'appel nominal sur l'article unique ; il est adopté à l'unanimité des 61 membres présents.

Ce sont : MM. Anspach, Bruneau, Cans, Clep, Cools, Coomans, Dautrebande, David, de Baillet (Hyacinthe), de Breyne, de Brouwer de Hogendorp, de Haerne, de La Coste, Delehaye, Delescluse, Delfosse, Deliége, de Meester, de Merode (Félix), de Merode-Westerloo, de Perceval, Dequesne, de Renesse, de Royer, Desoer, Destriveaux, de Theux, Devaux, de Wouters, Dumont (Guillaume), Frère-Orban, Jouret, Landeloos, Lange, Lebeau, Lesoinne, Liefmans, Malou, Mascart, Mercier, Moreau, Moxhon, Orban, Osy, Pierre, Pirmez, Rodenbach, Rogier, Roussel (Adolphe), Rousselle (Charles), Tesch, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Tremouroux, Vandenpeereboom (Alphonse), Vandenpeereboom (Ernest), Van Grootven, Van Iseghem, Van Renynghe, Vermeire, Visart et Verhaegen.

Le projet de loi sera transmis au sénat.

La séance est levée à 4 heures.