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Note d’intention
Chambre des représentants de
Belgique
Séance
du mardi 13 décembre 1836
Sommaire
1) Pièces
adressées à la chambre, notamment pétition relative au remboursement d’une
somme due par l’administration des finances (Demonceau)
2)
Nomination des membres des jurys d’examen universitaires (de Brouckere)
3) Projet
de loi portant le budget des voies et moyens pour l’exercice 1837.
a) Motion
d’ordre relative à la comptabilité de l’Etat et à la cour des comptes (Jadot, d’Huart, Dumortier,
Jadot, d’Huart, Dumortier, Desmaisières, Donny, Lebeau, A.
Rodenbach, Dubus, Desmaisières,
Donny, Rogier, Jadot,
Pirson, Dubus, Desmaisières, Dumortier, Pirson, Lardinois, Donny)
b) Dépôt
d’amendements relatifs au timbre des journaux et à l’affermage de la pêche dans
l’Escaut (Gendebien)
c)
Discussion des articles. (A : Contribution foncière et péréquation
cadastrale ; B : meilleure répartition des impôts ; C :
droit de patente ; D : système des poids et mesures et droit de
poinçonnage ; E : impôt sur les distilleries, F : contribution
personnelle (impôt spécial sur les célibataires)) (A (Eloy de
Burdinne, d’Huart, Eloy de Burdinne,
Coghen, Eloy de Burdinne), B, C, E
et A (Pirson), D et C (Mast de Vries,
d’Huart, A. Rodenbach), B, E,
F et C (Gendebien, d’Huart), D
et C (Mast de Vries, d’Huart, Verdussen, d’Huart, Verdussen, de Theux), B, E, F et
C (Gendebien), D et C (Mast de Vries)
(Moniteur belge n°350, du 14
décembre 1836)
(Présidence de M. Raikem.)
M. de Renesse procède à l’appel
nominal à midi 3/4.
M. Lejeune lit le procès-verbal de la
séance précédente ; la rédaction en est adoptée.
M. de Renesse présente l’analyse des
pièces adressées à la chambre.
PIECES
ADRESSEES A
« Le sieur Ch. Duvael, contrôleur de
comptabilité à Malines, demande à être nommé à la place de conseiller vacante à
la cour des comptes. »
« Les syndics définitifs de la faillite de Jean-Mathieu Dejoye, en son vivant banquier à Verviers, réclament
l’intervention de la chambre pour obtenir de l’administration de
l’enregistrement et des domaines la restitution d’une somme de 14,452 fr.,
confisquée illégalement au préjudice du sieur Dejoye. »
________________
« L’administration communale
de Chapelieu demande une nouvelle délimitation de
cette commune. »
________________
« Le sieur N. Duplat, marchand boucher à Mons, demande que la livraison de
la viande pour la garnison de cette ville soit mise au concours. »
________________
« Des constructeurs de
bâtiments et marchands de bois de la province de Liége réclament contre le
projet d’augmenter de 10 p. c. sur les bois étrangers »
________________
« Le sieur J.-A. Borrekens à Sailles adresse de
nouvelles observations à l’appui de la pétition du 7 janvier dernier relative
aux intérêts des obligations créées pour l’établissement de l’entrepôt
d’Anvers. »
________________
M. le ministre de l'intérieur (M.
de Theux) adresse à la chambre des explications sur la pétition du
sieur Nyssen, cultivateur à Lontzen
(Prusse), tendant à obtenir l’introduction libre en Belgique des chevaux et
bestiaux destinés à l’exploitation d’une ferme qu’il se proposait de venir
occuper dans la province de Liége.
- Pris pour notification.
M. Demonceau. - Une des pétitions
dont il vient d’être fait l’analyse dénonce à la chambre un fait grave. Si le
fait consigné par les pétitionnaires est vrai, l’administration de
l’enregistrement refuse le paiement d’une somme que les tribunaux ont déclaré
leur être due. Je demande donc le renvoi de la pétition à la commission des
finances. Il me semble que c’est par cette commission spéciale que doit être
examinée la question soulevée par cette pétition.
- La proposition de M. Demonceau est adoptée ; en conséquence la
pétition des syndics définitifs de la faillite de Jean-Mathieu Dejoye est renvoyée à la commission des finances. Les
autres pétitions sont renvoyées à la commission des pétitions.
COMPOSITION
DES BUREAUX DES SECTIONS
Première section :
Président : M. Duvivier
Vice-président : M. de Roo
Secrétaire : M. Andries
Rapporteur de pétitions : M. Raymaeckers
Deuxième section :
Président : M. Demonceau
Vice-président : M. Pollénus
Secrétaire : M. de Jaegher
Rapporteur de pétitions : M. Vandenhove
Troisième section :
Président : M. Coppieters
Vice-président : M. Simons
Secrétaire : M. Lejeune
Rapporteur de pétitions : M. Heptia
Quatrième section :
Président : M. Dubus aîné
Vice-président : M. Vanderbelen
Secrétaire : M. B. Dubus
Rapporteur de pétitions : M. Morel-Danheel
Cinquième section :
Président : M. Pirson
Vice-président : M. Pirmez
Secrétaire : M. Dumortier
Rapporteur de pétitions : M. Zoude
Sixième section :
Président : M. Desmaisières
Vice-président : M. Mast de Vries
Secrétaire : M. Van Hoobrouck
Rapporteur de pétitions : M. C. Vuylsteke
NOMINATION DES MEMBRES DES JURYS D’EXAMEN
UNIVERSITAIRES
Sur la proposition de M. de Brouckere.,
la chambre, à l’occasion de la nomination des jurys d’examen, à laquelle elle
doit procéder dans sa séance du 15 de ce mois, ordonne l’impression et la
distribution de la liste des membres titulaires et suppléants composant
actuellement les jurys d’examen, portant par qui ils ont été nommés, et de la
liste des professeurs de l’académie et des universités.
PROJET
DE LOI PORTANT LE BUDGET DES VOIES ET MOYENS POUR L’EXERCICE 1837
Motion
d’ordre relative à la comptabilité de l’Etat
M. le président. - La discussion est
ouverte sur le premier paragraphe du tableau joint au budget, qui est ainsi
conçu :
« Foncier.
« Principal : fr. 15,879,327.
« 5 centimes additionnels ordinaires, dont 2 pour non-valeurs : fr.
793,967.
« 10 centimes additionnels extraordinaires : fr. 1,587,932.
« Total : fr. 18,261,226. »
M. Jadot, rapporteur de
la section centrale. - Dans la séance d’hier, M. le ministre des
finances nous a dit en parlant d’une nouvelle convention conclue avec le
caissier général de l’Etat :
« Nous pensons, messieurs, que par cette convention mise à côté
d’un règlement général de comptabilité qui est actuellement soumis à
l’approbation du chef de l’Etat, tout se trouvera réglé d’une manière
satisfaisante.
Je crois devoir faire remarquer que des dispositions qui prescrivent les
formalités requises pour la régularité des dépenses d’un compte qui doit être
débattu et arrêté par les chambres doivent être formulées en loi et non
consignées dans une convention ou un règlement auquel elles n’auraient pris
aucune part.
En France et en Hollande le pouvoir exécutif
règle la distribution et l’emploi des fonds alloués, sans qu’il reste d’autres
vérifications à faire que la concordance des paiements effectués avec les
arrêtés qui les ont autorisés. Mais ici c’est tout autre chose : les ministres
ont la libre disposition des sommes allouées à leur budget, mais à la charge de
justifier aux chambres de l’emploi qu’ils en ont fait, et c’est aux chambres à
régler le mode d’après lequel cette justification devra lui être faite.
Je demanderai donc à M. le ministre des finances s’il entre dans ses
intentions de soumettre ce règlement à l’approbation de la chambre.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- Le règlement de comptabilité qui nous a régis jusqu’à présent est celui de
1824, fait par le roi Guillaume.
Ainsi, c’est un acte du pouvoir exécutif, un acte de l’administration ;
il appartient donc au pouvoir exécutif à l’administration, d’introduire des
modifications dans un acte de la même nature. Du reste, le règlement que j’ai
fait préparer, n’est encore qu’un projet, car il n’a pas jusqu’à présent reçu
l’approbation dont il a besoin. Il sera, s’il obtient cette approbation, publié
au recueil des lois au Bulletin officiel,
vous verrez alors s’il entraîne avec lui quelque chose d’illégal s’il n’est pas
rendu dans les limites attribuées au gouvernement par la constitution. Vous
jugerez en connaissance de cause cette question que je trouve d’ailleurs
complètement étrangère au tableau maintenant soumis à la discussion de la
chambre.
M. Dumortier. - Je ne trouve pas la
proposition de l’honorable M. Jadot déplacée. Elle me paraît au contraire
mériter toute l’attention de l’assemblée. M. le ministre des finances paraît
croire qu’il appartient au pouvoir exécutif de régler la comptabilité de
l’Etat. Je reconnais que sous le gouvernement précédent le roi Guillaume a, par
arrêté, réglé la comptabilité de l’Etat. Mais il a pu le faire, parce qu’on
lisait dans la loi fondamentale que le roi avait la direction suprême des
finances. Cette disposition n’a pas été maintenue dans la constitution. Il y a
une différence sensible. Vous avez voulu que la cour des comptes fût en quelque
sorte une section de la chambre des représentants. Si vous n’avez pas voulu que
le gouvernement intervînt dans les nominations des membres de la cour des comptes,
sans doute vous avez encore bien moins qu’il pût régler les mesures de
comptabilité qui servent de loi à cette cour.
Pour moi, je ne crois pas que le gouvernement
ait ce droit ; et cela est si vrai, qu’une proposition relative à cet objet a
été faite à la chambre par un de ses membres, l’honorable M. Donny. C’est au pouvoir législatif
qu’il appartient de régler la comptabilité de l’Etat.
Puisqu’il est question de la manière dont le
gouvernement entend la constitution, je ferai remarquer qu’il n’arrive que trop
souvent que le ministère met le régime des arrêtés à la place de celui des
lois.
Le congrès n’a pas voulu que ce régime pût prévaloir. Il a voulu que le
Roi n’eût d’autres pouvoirs que ceux qui lui sont attribués par la constitution
et par les lois rendues en vertu de la constitution.
Nous voyons à chaque instant que le gouvernement porte des arrêtés qui
remplacent des lois, arrêtés pour lesquels le pouvoir exécutif n’a aucune
mission d’après la constitution ; il faut faire cesser ces abus.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- Où sont-ils ces arrêtés ?
M. Dumortier. - S’il était nécessaire
d’en citer, il ne faudrait pas beaucoup d’efforts pour cela ; mais, sans sortir
de la question, je dirai que l’arrêté que vous prendriez pour régler la
comptabilité de l’Etat serait inconstitutionnel, et le serait d’autant plus que
le pouvoir législatif est saisi d’un projet de loi pour régler cette
comptabilité.
M. Jadot. - Il
est certain que le congrès a voulu, en cette matière, autre chose que ce qui
existait et que ce qui existe encore. Les ministres sont libres de dépenser
leurs budgets ; mais il faut qu’ils nous disent comment ils les ont dépensés.
Je demande que le projet de règlement de la comptabilité générale soit soumis à
la chambre.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- Le règlement en question n’a, pour ainsi dire, pas encore vu le jour, et vous
voulez l’avoir ; attendez au moins qu’il soit inséré au Bulletin des lois, et si alors il vous paraît contraire aux lois,
attaquez-le, faites-le tomber. Hier, dans la discussion générale, je n’en ai
parlé incidemment que pour indiquer qu’il y avait des moyens de régulariser la
comptabilité ; et, en vérité, je ne conçois pas la discussion à laquelle on se
livre en ce moment.
M. le président. - Voici la proposition
de M. Jadot :
« Je demande que le règlement de comptabilité générale dont le
ministre des finances s’occupe soit formulé en loi. »
M.
le ministre des finances (M. d'Huart). - Si le projet de règlement
réclamé est admis, il n’y aura pas d’inconvénient à le soumettre ultérieurement
à la chambre, ni à le mettre en vigueur en vertu de l’article 67 de la
constitution, qui donne au gouvernement le pouvoir de faire les règlements et
de prendre les arrêtés nécessaires à l’exécution des lois, sans pouvoir jamais
ni suspendre les lois elles-mêmes, ni dispenser de leur exécution.
M.
Dumortier. - Je demande la parole pour répondre au ministre des
finances ; j’ai absolument besoin de lui répondre.
Il se croit en droit de faire des règlements pour
la comptabilité en s’appuyant sur l’article 67 de la constitution ; mais je
ferai remarquer que l’arrêté de 1814, qui a réglé la comptabilité, a été pris
en vertu de l’article 64 de la loi fondamentale, lequel porte : « Le roi a
la direction suprême des finances. » Ainsi, les arrêtés que le roi Guillaume a
pris en vertu de la constitution sont de véritables décrets ; et le pouvoir
exécutif ne peut y déroger sans loi. C’est dont un droit du pouvoir législatif
de modifier la comptabilité, de la régler ; et jamais la chambre ne se
dessaisira d’une prérogative aussi importante. Nous qui examinons les comptes
de l’Etat, nous n’aurions pas le droit de déterminer comment cette comptabilité
sera réglée ? Mais ce serait absurde, Il faut nécessairement que ce qui est
relatif à la comptabilité soit le résultat de mesures législatives ; l’article
61 de la loi fondamentale a cessé d’exister.
M.
Desmaisières. - Il est certain, comme l’a dit l’honorable membre, que
la cour des comptes est une émanation de la chambre des représentants ; la constitution l’a voulu ainsi. La cour des comptes est
chargée du contrôle des dépenses de l’Etat, et elle tient ses pouvoirs de cette
chambre ; il est donc nécessaire que le règlement fixant la manière dont la
cour des comptes exercera son contrôle soit le résultat de dispositions
législatives. Il y a plus ; nous sommes déjà saisis d’un projet de loi sur
cette matière, projet qui a été présenté par M. Donny, pris en considération
par la chambre, et renvoyé aux sections qui, je crois, ont nommé leurs rapporteurs.
La section centrale chargée de l’examen de ce projet doit donc être formée.
D’après ces faits, je modifierai la proposition présentée par M. Jadot ; je
voudrais que la chambre demandât le dépôt sur le bureau, par le ministre des
Finances, de son projet de règlement, afin que ce même projet soit renvoyé, si
on le juge convenable à la section centrale qui doit examiner le projet de M. Donny.
M. Donny. -
L’honorable préopinant est dans l’erreur lorsqu’il pense que ma proposée a déjà
été examinée dans les sections, et que les rapporteurs auraient été nommés pour
former une section centrale ; l’examen de cette proposition n’est pas aussi
avancé. J’ai moi-même demandé dans le temps que le bureau ne pressât pas
l’examen de mon projet, parce que j’avais senti qu’il était insuffisant pour
assurer une bonne comptabilité ; qu’ainsi il était utile de le compléter sous
certains rapports, et que plusieurs dispositions de détail pouvaient être
susceptibles de modification. Je désirais méditer à loisir sur tous ces points.
Par suite de cette demande, le projet n’a pas été remis aux sections. Si la
chambre pense que le moment est venu de s’occuper de la comptabilité, je prends
l’engagement de revoir mon projet et de présenter prochainement, soit en
sections, soit à la chambre, les modifications dont je pourrais le juger
susceptible.
M.
Lebeau. - Le ministre des finances parle d’un projet, et d’un projet
qui n’est pas même achevé ; comment peut-on vouloir qu’il le soumette à la
chambre ?
L’erreur des préopinants vient de ce qu’en matière
de comptabilité ils ont des principes trop absolus. Il y a des points dans la
comptabilité qui ne peuvent être résolus que par le pouvoir législatif, cela
est incontestable ; par exemple, tout ce qui peut engager les intérêts des
particuliers doit être jugé législativement ; mais il y a des points de
comptabilité qui sont du ressort de l’administration ; ainsi le ministre des
finances peut changer le caissier de l’Etat, nommer des receveurs, etc.
Ceux qui ont provoqué le ministre à faire ces
modifications ont reconnu que le ministre avait le droit d’établir de cette
manière cette partie de la comptabilité par des arrêtés. Il suit de cette
distinction que si, dans le projet dont parle le ministre des finances, il y a
des dispositions qui attaquent l’autorité législative, elles seraient nulles de
plein droit ; mais comment le savoir avant d’avoir ce projet sous les yeux,
comment prendre des mesures contre un règlement que l’on ne connaît pas ? Attendons
les communications ministérielles ou la publication du règlement.
Je demande que l’on rejette la proposition.
M. le président. -
Il n’y a pas de proposition déposée.
M.
A. Rodenbach. - M. Desmaisières en va présenter une. Je ne vois pas
d’inconvénient à ce que le ministre des finances dépose actuellement son projet
sur le bureau de la chambre : c’est lui-même qui nous a parlé hier de ce projet
; c’est lui qui nous en a donné l’idée ; nous ne nous en serions pas occupés
s’il ne nous avait pas annoncé des modifications dans la comptabilité. Si dans
ce règlement il ne s’agit que d’actes administratifs, les sections le verront
bien, et n’auront rien à dire ; mais s’il y est question de points qui
concernent la législature, les sections prendront les mesures qu’elles jugeront
convenables : dans tous le cas il faut que le projet de règlement soit connu.
Messieurs, je vais vous citer un fait qui vous
prouvera, je pense, qu’il est nécessaire que les affaires gouvernementales
soient réglées par la loi : vous savez tous qu’en 1835 les frais de
représentation accordés précédemment aux généraux ont été refusés par la
chambre à la presque unanimité ;je crois que cette allocation était de 30,000
fr. Eh bien, messieurs, ce qui vous étonnera peut-être, c’est que la cour des
comptes a admis pour frais de représentation une somme de 20,000 fr. prise sur
les dépenses imprévues. Il faut donc une loi, messieurs, afin que la cour des
comptes sache ce qu’elle peut faire. Nous sommes à la veille de nommer les
membres de cette cour ; nous devons aussi régler leurs devoirs.
M. le président
donne lecture de la proposition de M. Desmaisières, qui est ainsi conçue :
« J’ai l’honneur de proposer à la chambre que
la proposition de M. Donny soit mise à l’ordre du jour dans les
sections. »
- Appuyé.
M. Dubus. - J’avais demandé la parole pour
engager l’honorable M. Desmaisières à retirer sa proposition telle qu’elle
était d’abord annoncée, parce qu’elle me paraissait prématurée et entachée du
même vice que celle de l’honorable M. Jadot, que la chambre n’a pas accueillie.
Mais, pour la nouvelle proposition que l’honorable membre vient de nous présenter,
je l’appuierai de toutes mes forces ; je suis de l’opinion de ceux qui pensent
que le changement opéré par la constitution dans la direction des finances
modifie les droits du gouvernement et ceux de la législature ; mais lorsqu’on
parle d’une manière vague d’un règlement de comptabilité qui renferme une foule
de dispositions, il est impossible que nous puissions nous prononcer de suite
sur la question de savoir quelles de ces dispositions peuvent être prises par
le gouvernement et quelles autres entrent dans les attributions du pouvoir
législatif. Je crois que la chambre pourrait prendre d’autres mesures pour
atteindre le but qu’elle se propose : le règlement de 1824 n’est presque pas
connu ; il n’y a peut-être pas dix membres dans cette assemblée qui le
possèdent ; je pense que nous devrions le faire imprimer et nous le faire
distribuer ; lorsque nous aurons examiner ce document, nous pourrons apprécier
l’importante question de savoir quelles mesures, relatives à la comptabilité,
sont aujourd’hui du ressort de la législature, et quelles de ces mesures
peuvent être abandonnées au gouvernement. Si cela ne devait pas rencontrer
d’opposition, je vous proposerais de faire imprimer le règlement de 1824, et de
le faire distribuer aux membres de la chambre.
M.
Desmaisières. - J’ai demandé la parole pour donner à la chambre
quelques explications sur les modifications que j’ai apportées à ma
proposition.
Si j’ai modifié ma proposition, c’est que j’ai cru
qu’en la rédigeant telle qu’elle l’est maintenant, elle atteindrait mieux le
but que je me propose. En effet, il est certain que lorsque les sections
examineront le projet de M. Donny, elles s’entoureront de tous les
renseignements nécessaires pour pouvoir l’examiner avec fruit, et que, par
conséquent, elles demanderont elles-mêmes à M. le ministre des finances qu’il
leur donne communication du projet de règlement dont il s’agit. Je vois que M.
le ministre des finances fait un signe négatif ; je ne sais s’il veut dire
qu’il refusera cette communication ; je le prie de s’expliquer à cet égard.
M.
Donny. - Je crois, messieurs, que si la motion de l’honorable M.
Desmaisières était adoptée, il faudrait, tout en examinant ma proposition,
avoir en même temps égard à la proposition qui vous a été faite par l’honorable
M. Dumortier, relativement à l’organisation de la cour des comptes ; cette
proposition contient aussi des principes de comptabilité, mais ils sont posés
dans un sens tout différent de ceux qui sont contenus dans la mienne.
Ce que l’on veut est, à ce qu’il paraît, d’avoir
promptement une loi réglant la comptabilité de l’Etat. S’il en est ainsi, je
pense qu’en renvoyant purement et simplement ma proposition aux sections, nous
n’avancerons peut-être pas beaucoup vers ce but. Ce que j’ai proposé est un
système entièrement nouveau, qui n’a pour ainsi dire rien de commun avec ce qui
existe maintenant, et je doute que l’examen d’un pareil système puisse amener
un prompt résultat. Vous arriverez bien plus tôt au but, si vous invitez la
section centrale qui est déjà saisie de la proposition de M. Dumortier à vous
présenter un prompt rapport sur cette proposition, surtout si vous voulez un
système de comptabilité fondé sur les bases qui sont déjà établies et simplement
modifiées d’après les renseignements qu’on pourrait obtenir soit du ministre,
soit d’ailleurs. Je crois que de cette manière on parviendrait à faire quelques
chose qui satisferait peut être pour le moment au besoin le plus pressant.
M.
Rogier. - J’appuie la proposition de l’honorable M. Dubus, mais je
demande en outre qu’on imprime également toutes les dispositions relatives à la
comptabilité qui ont modifié le règlement de 1824. La chambre française reçoit
tous les ans, par les soins de son bureau, une espèce de code de comptabilité ;
c’est là un petit recueil très intéressant, et je pense que si nous avions la
même chose, nous pourrions y puiser d’utiles lumières. Je demande donc que la
proposition de M. Dubus soit modifiée de manière que nous ayons sous les yeux
l’ensemble des dispositions relatives à la comptabilité.
M. Jadot. - Je
crois, messieurs, qu’il serait inutile de faire des dépenses pour l’impression
du règlement dont il s’agit : ce règlement est très volumineux et il ne nous
apprendra rien ; car les neuf dixièmes de ses dispositions ne sont pas
applicables sous le régime constitutionnel.
M. Pirson. -
Messieurs, il résulte de la discussion qui vient d’avoir lieu que nous
reconnaissons tous la nécessité d’avoir une loi qui organise définitivement la
cour des comptes ; eh bien, messieurs, la proposition de M. Donny n’est pas,
comme il le dit lui-même, suffisante pour atteindre ce but ; de son côté M. le
ministre des finances nous annonce un règlement de comptabilité dont nous ne
saurions nous occuper, puisqu’il n’est pas achevé ; je pense donc que, pour que
la discussion actuelle ait le résultat dont vous sentez tous la nécessité, il
conviendrait de nommer une commission composée des membres de la chambre que
vous jugeriez posséder le plus de connaissances financières, et de la charger
de vous présenter au plus tôt un projet de loi organisant la cour des comptes.
M.
Dumortier. - La commission des finances.
M. Pirson. - Soit !
Je demande donc que la chambre charge la commission des finances de lui
proposer un projet de loi réglant la comptabilité.
M. le président. -
Nous avons d’abord à statuer sur les propositions de MM. Dubus et Rogier.
M.
le ministre des finances (M. d'Huart). - Je remettrai à la chambre une
expédition du règlement de 1824 et de tous ceux qui règlent actuellement la
comptabilité de l’Etat.
M. Dubus
déclare se rallier à la proposition de M. Rogier.
M.
Pirson. - Messieurs, si vous adoptez ma proposition, il est inutile de
faire pour le moment aucune impression : la commission des finances prendra
tous les renseignements qui lui seront nécessaires pour pouvoir élaborer un
projet de loi : elle s’adressera à cet effet au ministre des finances, à la
cour des comptes, partout enfin où elle pourra recueillir des lumières. Je
crois donc que nous n’avons pas à nous occuper d’ordonner telle ou telle
impression ; ce sera l’affaire de la commission des finances, et sans doute
elle fera son devoir.
M. Desmaisières
déclare se rallier à la proposition de M.
Pirson.
- La proposition de M. Pirson est appuyée.
M.
Dumortier. - Il faut, dans tous les cas, que le règlement de 1824 soit
imprimé, et voici pourquoi : si vous admettez la proposition de M. Pirson, il
faut que la commission des finances ait des bases sur lesquelles elle puisse
établir le projet de loi que vous lui aurez demandé, et pour cela il est de
toute nécessité que les règlements qui ont jusqu’ici réglé la comptabilité
soient mis sous ses yeux ; si, au contraire, vous écartez la proposition, nous
devons toujours posséder ces documents, si nous voulons examiner les comptes de
l’Etat.
Je demande donc que l’impression demandée par MM.
Dubus et Rogier soit d’abord mise aux voix, et ensuite je voterai pour la
proposition de M. Pirson.
Si M. Donny trouve que sa proposition est
insuffisante, qu’il la retire, soit ; la commission des finances nous
présentera à cet égard un projet de loi que nous discuterons.
M. Pirson. - Messieurs,
ma proposition est très simple. Il s’agit de savoir si la chambre croit
nécessaire de faire imprimer dès à présent l’ancien règlement. Il me semble que
cette impression est inutile, ou au moins prématurée. En vous présentant un
rapport sur l’objet qui nous occupe, la commission des finances aura soin
d’entourer son travail de toutes les lumières, et si vous jugez alors que
l’impression de l’ancien règlement soit encore nécessaire, la chambre pourra
l’ordonner.
M. le président. -
Je vais consulter la chambre sur les propositions réunies de MM. Dubus et
Rogier.
- Ces propositions sont mises aux voix et adoptées.
M. le président. - Nous
allons statuer sur la proposition de M. Pirson, tendant à ce que la commission
des finances soit invitée à présenter un projet de loi sur la comptabilité.
- Après une triple épreuve par assis et levé, cette
proposition n’est pas adoptée.
M.
le président. - M. Desmaisières s’était rallié à la proposition de M.
Pirson ; comme cette proposition vient d’être rejetée, je vais mettre aux voix
la proposition de M. Desmaisières, tendant à ce que le projet de loi présenté
par M. Donny soit mis à l’ordre du jour dans les sections.
- Après une double épreuve par assis et levé, cette
proposition est adoptée.
M. le président. -
Je ferai observer à la chambre que les sections ont commencé l’examen du projet
de loi concernant le sel, et que des rapporteurs ont déjà été nommés à la
section centrale. Je ne pense pas que l’intention de la chambre soit qu’on
interrompe l’examen de cette loi, pour s’occuper de la proposition de M. Donny. (Non ! non !)
Ainsi, s’il n’y a pas opposition, l’examen de la
proposition de M. Donny ne sera mis à l’ordre du jour dans les sections que
lorsque celui du projet de loi sur le sel sera terminé.
M.
Lardinois. - Je voudrais savoir si l’on enverra aux sections le projet
primitif présenté par M. Donny.
Cet honorable membre a dit tout à l’heure que sa première proposition
renfermait plusieurs articles sur lesquels il avait changé d’opinion, et qu’il
avait besoin de méditer les autres. Est-ce donc un projet rectifié, ou bien le
projet primitif, qui sera renvoyé aux sections ?
M. le président. -
je ferai remarquer que le bureau ne peut renvoyer aux sections que le projet de
loi tel qu’il a été pris en considération par la chambre. Au reste, si M. Donny
a à proposer quelques modifications, elles seront imprimées et également
renvoyées aux sections.
M. Donny. - Je
désire dire un mot pour repousser ce que vient d’avancer un honorable
préopinant. A l’entendre, j’aurais condamné moi-même mon projet ; j’aurais dit
que plusieurs articles devaient en être modifiés. Il n’en est rien, messieurs.
Ma proposition, en tant que système nouveau, est complète ; depuis que je l’ai
formulée, j’ai reconnu que, dans l’intérêt de la chose publique, il convenait
d’y faire quelques additions, pour assurer une comptabilité d’autant plus
régulière.
Je considère le renvoi de ma proposition dans les
sections comme utile, puisqu’il en provoquera la discussion. Les sections
admettront mon projet tel qu’il est, ou bien elles le repousseront et en
admettront un autre. Mais, dans tous les cas, la question sera examinée et
recevra une solution.
Dépôt d’amendements
M. Gendebien. -
Messieurs, j’anticipe sur la discussion des articles du budget des voies et
moyens, pour déposer sur le bureau trois amendements à l’article premier de la
loi ; la discussion du tableau analytique des voies et moyens pouvant se
prolonger jusqu’à la fin de la séance, je serais obligé de remettre à demain la
présentation de mes amendements. Je ne veux pas qu’on m’accuse de jeter au
milieu de la discussion des articles improvisés ; je désire que la chambre les
médite avant d’en aborder la discussion ; j’ai donc cru devoir les déposer
maintenant, pour que l’impression en ait lieu pour demain.
Je n’ai pas besoin de dire que je me réserve de
développer mes amendements lorsque nous en seront à la discussion de l’article
premier. Je crois ces développements inutiles aujourd’hui.
Je propose trois articles additionnels. Le premier
est ainsi conçu :
« L’article 8 de la loi du 31 mai 1834 est
abrogé. »
Cet article concerne les journaux étrangers qui
sont imposés d’un droit de timbre double de celui qu’on faire subir aux
journaux indigènes.
Le second amendement formera le paragraphe 5 de la
loi. Il est ainsi conçu :
« Les 26 centimes additionnels ordinaires sur
le timbre des journaux, gazettes, ouvrages périodiques, prix courants,
imprimés, annonces et avis qui se publient dans le royaume, sont supprimés ; et
la perception continuera à deux centimes pour un cents. »
Voici maintenant le troisième paragraphe qui m’a
été suggéré par la discussion d’hier, relative à la pêche :
« Le domaine ne pourra affermer le droit de
pêche, ni exiger aucune restriction pour son exerce dans les fleuves et
rivières qui sont soumis au flux et au reflux de la mer, jusqu’au point où le
flux se fait sentir dans les marées ordinaires. »
C’est particulièrement pour ce dernier amendement
que je fais un appel aux lumières des membres de cette chambre. Je ne sais en
effet, à raison de l’ignorance des localités, jusqu’à quel point le flux de la
mer se fait sentir.
Les députés appartenant aux localités dans
lesquelles se trouvent les fleuves et rivières soumis au flux et au reflux de
la mer, pourront examiner la portée de mon troisième amendement et indiquer les
bornes où il doit s’arrêter, s’il va trop loin.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Et par quoi l’honorable M. Gendebien
remplacera-t-il toutes les charges dont il propose la réduction ?
M. Gendebien. -
Je l’indiquerai plus tard, s’il est nécessaire.
Discussion des articles
Contributions directes, douanes, accises, poids et mesures, garantie
Contributions
directes. Foncier
M. le président. -
La discussion est ouverte sur l’article premier (paragraphe du tableau
« foncier. »)
M. Eloy de
Burdinne. - j’ai l’honneur de proposer de fixer le montant de l’impôt
foncier à 14,385,017 fr., au lieu de 15,879,327 fr., somme pétitionnée par le
ministre des finances ; de manière qu’il y aura une réduction de 1,494,310 fr.,
somme égale à l’augmentation qu’a subie le contingent des provinces du Brabant,
du Hainaut, de Liége et de Namur, par suite de la loi relative à la péréquation
cadastrale.
Messieurs, je désire donner quelques développements
à ma proposition, et j’espère que la chambre me le permettra. Je dois faire
observer que mon but n’est pas de demander une décharge en faveur des habitants
qui m’ont fait l’honneur de m’envoyer ici. Il ne s’agit donc pas ici d’un
intérêt de localité. Il s’agit d’éviter l’inconvénient de voir augmenter
l’impôt dans certaines localités et diminuer dans d’autres. Je voudrais qu’on
dégrevât les Flandres et la province d’Anvers sans faire supporter par d’autres
provinces le montant de ce dégrèvement.
Je prie la chambre de me permettre d’entrer dans
quelques développements.
M.
le ministre des finances (M. d'Huart). - Messieurs, vous remarquerez
que d’après le rapport de la section centrale, aucune observation n’est
présentée ni par les sections, ni par la section centrale contre ce chiffre de
l’impôt foncier. C’est sans doute parce que tout le monde a compris que pour
parer aux dépenses, il faut des moyens, et qui si nous réduisons l’impôt
foncier qui est une des ressources les plus productives, nous ne serons plus en
position de faire face aux besoins.
Du reste, s’il est un impôt dont on ait
particulièrement, à tort ou à raison, demandé l’augmentation, c’est l’impôt
foncier. On a plusieurs fois prétendu dans cette enceinte et en dehors, qu’il
était trop bas comparativement aux autres contributions, et l’on a même exprimé
l’avis que si des ressources nouvelles devenaient nécessaires, ce serait à cet
impôt qu’on devrait les demander. Sans partager absolument cette manière de
voir, nous ferons toutefois remarquer qu’ayant déjà grande peine à pourvoir à
la balance des budgets avec les subsides que nous réclamons, il n’y a certes
pas lieu de réduire l’impôt foncier. Aussi je ne pense pas que la proposition
de M. Eloy de Burdinne obtienne faveur dans cette chambre.
Je dois faire observer que la réduction de 1,500
mille fr. que propose l’honorable membre, amènerait sur les centimes
additionnels une réduction de 200 mille francs, ce qui porterait la réduction
totale à 1,700 mille fr.
Le motif sur lequel l’honorable membre appuie
particulièrement sa proposition est de faire supporter plus facilement la
nouvelle répartition établie par la péréquation cadastrale. Or, cette
répartition qui a été réglée par tiers se fera d’une manière insensible et sans
aucune perturbation. L’expérience d’une année est déjà là pour le démontrer.
Je crois inutile d’entrer dans de plus longs
développements pour vous déterminer à repousser la proposition de M. Eloy de
Burdinne.
M. Eloy de
Burdinne. - On ne peut pas me condamner sans m’entendre. J’aime à croire
que M. le ministre des finances ne persistera pas à repousser ma proposition
quand il connaîtra les motifs qui m’ont porté à la faire. Je demande donc la
permission de développer ma proposition. (Oui
! oui ! Parlez !)
- L’honorable membre donne lecture de ses
développements.
M. le président. -
Je vais mettre aux voix la proposition de M. Eloy de Burdinne.
M. Eloy de
Burdinne. - Je demande à ajouter un mot.
Vous savez, messieurs, que le ministre des finances
vous a dit qu’on pouvait compter sur une économie de 2 à 3 millions sur le
dernier exercice. Dès lors il me semble qu’il serait très possible d’effectuer
la réduction d’un million et quelques
cent mille fr. que je propose.
M.
le ministre des finances (M. d'Huart). - Répondant à la dernière
observation de l’honorable préopinant, je dirai qu’effectivement il restera
disponible, soit sur la dette flottante que je propose de fixer à 12 millions
dans les voies et moyens, une somme d’environ 2 millions et demi. Mais faites
attention qu’il s’agit d’une dette à maintenir plus ou moins élevée, et non
d’un excédant sur les ressources actives et réelles du trésor.
J’ajouterai que l’honorable membre n’atteindrait
pas son but avec l’amendement qu’il a présenté. Il demande de réduire purement
et simplement le principal de la contribution foncière à 1,494,310
fr..
Or, que résulterait-il de là ? C’est que les bases
de la répartition actuelle s’appliqueraient uniformément à un contingent moins
fort ; chaque contribuable paierait moins qu’aujourd’hui. Les provinces qui
doivent être dégrevées font aussi bien que celles dont la quote-part doit être
augmentée, obtiendraient une réduction uniforme.
Du reste, en tout cas, il me semble que la
proposition que je combats ne serait pas de nature à réunir l’assentiment de la
chambre par la seule raison décisive des besoins inévitables du trésor.
J’ajouterai surabondamment que les conseils
provinciaux, récemment réunis, n’ont fait aucune réclamation contre la
répartition de l’impôt foncier. Dans beaucoup de provinces on a même applaudi
franchement à l’acte de justice consacré par la loi du 31 décembre dernier.
M.
Coghen - Je ne puis appuyer la proposition de l’honorable M. Eloy de Burdinne. Il me paraît
impossible de diminuer les ressources de l’Etat. Loin d’avoir un excédant sur
les exercices précédents, il y a un déficit couvert en bons du trésor et qui
s’élève à 12 millions environ. La contribution foncière n’est pas trop imposée
dans notre pays et peut facilement supporter ses charges. Sans doute, il est
plus agréable de tenir le langage du préopinant, de demander une diminution
dans les impôts au lieu du maintien à la hauteur où ils sont. Mais nous avons,
messieurs, un mandat impérieux à remplir. Nous avons à nous prémunir contre la
possibilité d’un déficit, nous avons à éviter une crise inévitable si nous
suivons un semblable système de réductions.
Dans mon opinion, la réduction proposée par le
préopinant dans la contribution foncière ne ferait que créer un nouveau déficit
de 1,750,000 fr. dans le trésor. Si à côté de cette
diminution M. Eloy de Burdinne proposait un moyen quelconque tendant à la
compenser et ce en imposant ceux qui possèdent, sans toutefois augmenter les
charges de la classe malheureuse, je serais alors le premier à appuyer sa
proposition.
M. Eloy de
Burdinne. - Le ministre dit que je n’atteins pas le but par ma
proposition. Non, sans doute, je ne l’atteins pas, si toutefois on suivait ce
que dit le ministre des finances, c’est-à-dire que si la somme diminuée sur le
budget serait diminuées sur tous. Ce n’est pas ainsi que j’ai entendu la chose.
Je voudrais que la somme servît à indemniser les Flandres, qu’elle fût le
contingent de la réduction que les Flandres doivent obtenir.
Le ministre a dit que les conseils provinciaux ne
s’étaient pas du tout occupés du cadastre. Non, sans doute : un corps qui se
constitue, et après une lacune aussi grande que celle des états provinciaux, a
bien autre chose à faire que de s’occuper du cadastre.
On vous a dit aussi qu’il était plus facile de
demander des réductions que des augmentations d’impôt. Sans doute. Mais je
réponds à cet argument qu’il est plus facile de demander de l’argent que
d’indiquer les moyens de le faire payer.
Quant au moyen de remplacer le montant de la
réduction que je propose, ce n’est pas très difficile. Etablissez un impôt sur
le café, sur le tabac. Bornez-vous à percevoir intégralement votre impôt sur
les sucres, et vous comblerez la lacune et au-delà. Alors vous pourrez diminuer
l’impôt sur le seul qui depuis trop longtemps pèse sur le malheureux.
- La proposition de M. Eloy de Burdinne est mise
aux voix ; elle n’est pas adoptée.
Le premier paragraphe du tableau est mis aux voix
et adopté.
Contributions
directes. Personnel
« Personnel.
« Principal : fr. 7,472,204.
« 10 c. additionnels et extraordinaires : fr.
747,220.
« Total : fr. 8,219,424. »
M. Pirson. - Dépenser
à propos et toujours utile pour le pays, n’établir que des contributions justes
et basées sur l’égalité proportionnelle, telle est la tâche d’un gouvernement
né du suffrage populaire.
Nous avons six années d’existence politique, et
toujours en fait de contributions et de dépenses nous nous traînons sur la voie
battue des monarchies absolues ou semi-absolues.
Dans celles-ci on cherche à déguiser par formes
indirectes et les recettes et les dépenses. C’est ainsi que l’on fait supporter
à ce que l’on appelle le peuple des contributions dont il ne se doute pas et
qui tournent au profit des classes élevées.
C’est l’inverse de toute justice, de toute raison ;
si l’on pouvait s’écarter du principe d’égalité proportionnelle, c’est le
superflu qu’il faudrait frapper et non le strict nécessaire.
Je ne répète pas ici ce que j’ai dit à la seconde
chambre des états généraux en 1821, et à cette chambre en 1834.
J’ai, à ces deux époques, ajouté à mon opinion un
aperçu de mon système financier, que je n’ai point longuement développé, et que
je ne développerai point encore aujourd’hui, parce que l’esprit de routine et
de hautes préventions tant soit peu intéressées s’obstinent en faveur des
droits indirects ou accises, et que ces obstacles ne peuvent être détruits que
par la force de l’opinion, qui sur ce point ne manquera pas de se fortifier
avec nos institutions constitutionnelles.
En résumé, je veux de nouvelles bases de
répartition de la contribution personnelle et mobilière ; je supprime les
patentes, sauf celles à établir sur les débitants de genièvre et de bière ;
j’expliquerai plus loin ce qui me détermine à établir des patentes sur les
débitants de cette boisson.
Je supprime les droits d’accises sur le sel et sur
les eaux-de-vie, bières et vinaigres indigènes, sur le sucre.
Voici mes motifs :
En ce qui concerne les bases actuelles de la
contribution personnelle et mobilière, je pense que de toutes celles qui ont
été imaginées il n’en est pas de plus fautives.
Il en est de même des patentes : encore si elles
atteignaient dans une juste proportion les fabricants et le haut commerce ;
mais non : voyez donc sur les rôles des patentes cette nomenclature d’ouvriers
dont la journée ne suffit point pour nourrir une famille. Souvent à la vérité,
la taxe est peu élevée ; mais alors pourquoi tant d’écritures et d’employés qui
absorbent le produit ? Pourquoi soutirer la valeur de deux ou trois journées de
travail à celui que plutôt on devrait secourir ?
Parlons de la patente à établir sur les débitants
de bière et de genièvre.
La bière est une boisson tout à fait indigène,
saine et en usage dans toute
Cette différence engagerait l’ouvrier, père de
famille, à se procurer une tonne ou une demi-tonne de
bière qu’il boirait avec sa femme et ses enfants. Ces patentes seraient
graduées d’après la population des localités. On en accorderait à tous ceux qui
en demanderaient.
Quant au genièvre, je voudrais que les débitants
fussent assujettis à une patente très élevé et que le nombre en fût déterminé
d’après la population. Je tiens beaucoup à cette fixation du nombre de
débitants, parce que c’est l’occasion prochaine qui favorise tous ces excès
d’ivrognerie si journaliers, si immoraux et si nuisibles à la santé des
misérables qui se laissent entraîner à la vue d’une enseigne qu’ils rencontrent
à chaque pas.
La liberté de fabrication de la bière et du
genièvre profitera à l’agriculture et à notre exportation.
Je veux liberté entière d’entrée et de sortie du
sel ; c’est une denrée de première nécessité pour tous, pour le pauvre comme
pour le riche. C’est une matière première pour plus d’un genre de commerce.
Point de taxes sur le café, ni sur le sucre.
L’accise sur la bière a fait naître ce grand usage du café parmi les classes
pauvres et moyennes ; c’est aujourd’hui presque un objet de première nécessité.
Il n’en est pas de même du sucre dont la classe ouvrière fait peu d’usage. Je
voudrais bien amener dans nos campagnes un revirement de consommation vers la
bière ; pour cela il faudrait établir des droits plus élevés sur le sucre et le
café ; mais une grande considération me retient, c’est que le bas prix en
Belgique du café, du sucre, du sel, du genièvre, du tabac, ajoutera aux 4
millions de Belges consommateurs, au moins 3 millions de nos voisins qui paient
chez eux des droits très élevés sur ces objets ; nos bénéfices sur la
consommation de ceux-ci seront considérables. Vous voyez bien qu’en fait
d’impôt comme en fait de commerce, ce n’est pas toujours la voie battue qui est
la plus profitable.
En ce qui concerne les produits de notre sol, de
notre industrie et de os fabriques, je veux un tarif protecteur qui balance le
tarif de la fraude. Après avoir supprimé, il faut remplacer.
J’observe que si mon système était adopté, il y
aurait grande réforme de dépenses à l’intérieur du pays et dans les bureaux du
ministère.
Toutefois, messieurs, en balance le produit d’un impôt
nouveau avec celui des impôts à supprimer.
Dans le budget des voies et moyens je retranche :
1° Personnel (principal) : fr. 7,472,204
Idem (10 centimes) : fr. 747,220.
2° Patentes (principal) : fr. 2,480,000
Idem (10 centimes) : fr. 248,000
3° Sel (20 centimes additionnels) : fr. 3,700,000
4° Eaux-de-vie indigènes : fr. 2,200,000
5° Bières indigènes, vinaigres : fr. 7,000,000
6° Sucre : fr. 120,000
Ensemble : fr. 23,967,424.
Soit 24 millions à remplacer par une somme
équivalente.
Patente sur les débitants d’eau-de-vie indigènes :
fr. 1,500,000
Patente sur les débitants de bière : fr. 2,500,000
Contribution mobilière : fr. 20,000,000.
Cette contribution mobilière devra atteindre toutes
les fortunes sans exception, celle du rentier, celle du financier, celle du
fabricant, celle du commerçant, celle du marchand, celle de l’homme d’affaires,
celle du fermier et de l’ouvrier aisé.
Je dis du fermier et de l’ouvrier aisé, parce que
je voudrais que tout cultivateur, tout ouvrier, tout petit débiteur qui ne gagne
que le plus strict nécessaire fût exempt de cette contribution sans que cette
exemption puisse outrepasser le cinquième de la population de chaque localité.
Je conçois deux moyens de répartition.
Le premier serait de prendre pour bases de la
première répartition, la population, la contribution foncière, le dernier rôle
des patentes, le dernier rôle de la contribution personnelle ; chacune de ces
bases entrerait pour un quart dans le contingent de la province et ensuite de
la commune. La sous-répartition entre les contribuables serait faite par un
jury d’équité.
Second moyen : la loi pourrait établir, d’après la
population des villes et des districts ruraux, un nombre suffisant de
catégories pour atteindre toutes les nuances de fortune, et fixer le nombre des
contribuables qui doivent entrer dans chaque catégorie ; le jury d’équité alors
n’aurait plus qu’à désigner les personnes qui doivent entrer dans chaque
catégorie.
J’ai donné dans le temps une répartition simulée
dans ce sens, je la reproduirai avec tous les développements que comporte mon
système. La grande difficulté, c’est de composer un jury d’équité en effet
aussi bien que de nom.
Dans mes précédents discours, j’ai indiqué le moyen
d’y parvenir ; c’est d’y faire entrer tout à tout tous les contribuables.
Alors de cette manière tous les contribuables se
contrôleraient réciproquement. Les membres du jury actuel opéreraient le plus
loyalement possible, sachant que l’année suivante il pourrait y avoir un
revirement défavorable pour eux s’ils s’écartaient des principes de justice
distributive. Il y aurait bien encore quelques erreurs les deux ou trois
premières années, mais je soutiens qu’il ne faudrait pas longtemps pour obtenir
un rôle à peu près exact des fortunes présumées, sauf les variations annuelles
sur lesquelles il serait fait droit.
Je n’abuserai point des moments de la chambre qui,
aux derniers jours de l’année financière, ne peut s’occuper de nouveaux
systèmes. Toutefois, j’espère que les opinions que je viens d’énoncer
trouveront de l’écho, si point dans leur ensemble, au moins dans quelques
parties, si toutefois l’on ne m’accuse pas de radotage.
- Le deuxième paragraphe du tableau est mis aux
voix et adopté.
Contributions
directes. Patentes
« Patentes. Principal : fr. 2,480,000.
« 10 centimes additionnels extraordinaires :
fr. 248,000.
« Ensemble : fr. 2,728,000. »
M. le président. -
M. Mast de Vries propose de réduire le chiffre de ce paragraphe de 2,728,000 fr. à 2,570,000 fr. Il a la parole pour développer
son amendement.
M.
Mast de Vries. - J’applaudis à la proposition de M. le ministre des
finances tendant à ce que le droit sur les poids et mesures soit adopté. Il en
résultera que le système décimal prendra mieux en Belgique. Mais je ne suis
plus de l’avis ni du ministre ni de la section centrale, lorsqu’ils veulent
faire porter le produit des poids et mesures sur les patentes.
Pour qu’une loi soit bonne, il faut qu’elle soit
juste. Or, je demande s’il est juste qu’on fasse payer aux patentables les
120,000 fr. des poids et mesures.
M. le ministre des finances demande que le droit
des patentes soit établi tel qu’il était sous l’ancien gouvernement. Mais
veuillez-vous rappeler avec quel plaisir fut accueillie, à la révolution, la
réduction de moitié sur le droit des patentes. Rappelez-vous toutes les
plaintes auxquelles cet impôt avait donné naissance parmi le peuple, parmi les
petits boutiquiers, et vous aurez une idée des plaintes auxquelles donneraient
lieu cette augmentation.
Rien n’est aussi fiscal que le droit de patente. Si
quelques contrôleurs se succèdent dans une localité, vous êtes assurés que les
patentes sont toujours augmentées. Il n’y a pas de boutique, si petite qu’elle
soit, qui ne doive prendre trois ou quatre patentes. Il y a quarante années que
l’impôt des patentes existe, cependant les agents du fisc ont assez de génie
pour l’explorer encore et le faire produire davantage. Que, dans nos petites
localités, un maréchal-ferrant, par exemple, prenne une patente une première
année, on vient lui dire l’année suivante qu’il lui en fait une seconde, parce
qu’il aura raccommodé une charrue ; la troisième année on lui fera prendre une
patente de taillandier ; et, malgré tant d’augmentations successives, vous voulez
encore augmenter la patente de 7 p. c. ? Tous les
jours le commerce se divise, se subdivise ; comment peut-on augmenter le droit
de patente ? Il est dans les intentions de la chambre de réviser la loi sur cet
impôt ; c’est une contribution que l’on doit diminuer et non augmenter. Le
poinçonnage produisait 120,000 fr. ; la mesure que l’on veut prendre lui fera
produire 150,000 fr. ; ainsi il y aura majoration de 30,000 fr.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - C’est une erreur de prétendre que l’on réclame
une augmentation de l’impôt des patentes, puisque la suppression proposée du
droit de poinçonnage qui se paie par les patentables équivaut, très
approximativement, à la majoration demandée sur ce droit de patente. On dit que
quelques marchands n’ont besoin que d’un mètre, et que d’autres n’ont même
besoin d’aucune espèce de poids ni de mesure ; mais ces patentables-là sont
précisément dans la classe élevée et peuvent bien supporter une très légère
augmentation qui décharge d’autant les petits patentables qui, dit-on, font
entendre des plaintes. Il n’y a donc pour le trésor aucune augmentation de
perception ; il n’y a qu’un simple déplacement d’impôt qui aura l’avantage de
simplifier la comptabilité, et d’éviter de nombreux procès-verbaux pour défaut
de poinçonnage des poids et mesures.
En s’occupant de patentes, il n’est pas inutile de
se rappeler l’état de choses existant en
Ainsi, quand nous demande de frapper ce principe de
10 centimes, nous restons en dessous de 25 centimes, à la charge existant en
1830, ce qui maintient encore une très forte réduction.
En 1831, le droit de patente a été réduit en principal
à la moitié ; mais les motifs de cette diminution étaient palpables ; alors le
commerce était pour ainsi dire annihilé ; les événements de la révolution
avaient fait stater toutes les transactions commerciale ; il était juste de
venir au secours des patentables, et le législateur a bien fait de réduire,
temporairement, le droit à la moitié.
En 1832, ayant reconnu que déjà il y avait
amélioration sensible dans la position des patentables, au lieu de laisser
l’impôt à la moitié, on l’a porté aux trois quarts du principal, avec 26
centimes additionnels.
Aujourd’hui il faut bien reconnaître que le
commerce et l’industrie prospèrent dans notre pays, bien plus que
l’agriculture. Or, pour la contribution foncière, sur laquelle M. Eloy de
Burdinne demandait tout à l’heure un allégement qui n’a pas été accueilli,
savez-vous comment les choses étaient en 1830 ? Le principal était alors
augmenté seulement des deux et trois centimes additionnels que nous maintenons
actuellement, outre les dix autres centimes additionnels ; ainsi, en comparant
la position des contribuables de l’impôt foncier à la position des patentables,
on trouve que les premiers paient davantage aujourd’hui, tandis que leur
situation n’est pas beaucoup meilleure qu’en 1830, et que les seconds, les
patentables, paient moins dans une condition meilleure.
Il y a donc des motifs d’équité pour admettre la
proposition du gouvernement qui n’apporte d’ailleurs aucune augmentation dans
le chiffre du budget, et qui n’est qu’une simple transposition qui a un côté
tout à fait utile et important.
On a réclamé souvent des
modifications dans le régime actuel des patentes, et le motif principal sur
lequel on se fonde, c’est que les employés du fisc sont, dit-on, en quelque
sorte juges dans leur propre cause : on suppose qu’il leur est loisible de
classer les patentables comme ils l’entendent ; cependant il n’en est pas
ainsi. La voie du recours est ouverte, et c’est à la députation des états à
statuer sur ces réclamations ; le contribuable est donc jugé par ses mandataires
immédiats.
Messieurs, sans repousser toute demande de
modification dans l’application du droit de patentes, on peut cependant dire
que cet impôt est très supportable tel qu’il est. Toutefois, pour modifier la
législation qui concerne les patentes, il faut avoir du temps. Depuis 1830 nous
avons été surchargés de lois organiques qui ont absorbé les moments précieux
des chambres ; alors même que nous aurions présenté un projet de loi sur cette
matière, nous eussions été obligés de le laisser dans les cartons. Cependant il
n’est pas désirable de présenter longtemps à l’avance des lois qui doivent
modifier le régime financier, parce que ces projets sont sans cesse invoqués
par ceux des contribuables qui prévoient une répartition moins lourde de l’impôt,
et les agents du fisc trouvent ainsi des obstacles presque insurmontables pour
la rentrée des contributions. Vous partagerez, je n’en doute pas, mon opinion à
cet égard ; il ne faut présenter les lois de cette espèce que dans le courant
de la session où elles peuvent être votées.
M. le président. -
D’après la proposition de M. Mast de Vries, l’impôt des patentes serait réduit
à 2,568,000 fr.
M. A. Rodenbach.
- Depuis 1831 la chambre a réclamé de nouvelles lois sur les patentes. Moi-même
j’ai eu l’occasion de signaler les nombreux abus de la fiscalité, de cette
législation étrangère, de cette législation qui n’a été faite en grande partie
que pour favoriser
Je ne répéterai pas tout ce que j’ai dit contre
l’impôt des patentes ; plusieurs pétitions nous ont été adressées sur les vices
de cette perception. Je ferai seulement observer qu’en Hollande on faisait
payer les boutiques couvertes en bois établies dans les places publiques et
qu’aujourd’hui on fait payer les petites boutiques qui sont à peine couvertes
d’une toile ; tout cela est contraire à l’intérêt de nos boutiquiers, et il
devrait se rappeler que la loi avait été faite pour atteindre les Hollandais
qui élevaient des baraques en bois au milieu de nos places. Il ne faut pas
oublier l’esprit et le but des lois.
Quoi que le ministre en ait dit, il est vrai que
les contrôleurs changent la patente, selon leurs caprices ; ils vous placent
une année dans une classe et l’année suivante, dans une autre classe. Si vous
réclamez, vous n’êtes pas écouté. Il y a des preuves de ce fait. Le contrôleur
est omnipotent ; car les réclamations passent par tant de filières, qu’il faut
une année entière avant d’obtenir une solution.
Il est certain que cette loi doit être révisée le
plus promptement possible. Je sais bien qu’il y a beaucoup d’autres lois à
réviser, mais il n’en est pas moins vrai, et M. le ministre doit savoir
lui-même, que le droit de patente excite les réclamations de tout le pays.
Les industriels, à peu
d’exceptions près, paieront maintenant le droit de poinçonnage sur la patente
et c’est là un bien ; car l’année dernière le droit de poinçonnage a occasionné
un grand nombre de procès, et les procès ruinent aussi.
La modification qui vous est présentée, messieurs,
est peut-être un moyen de propager le système des poids et mesures, mais ce
moyen n’est pas efficace ; car, comme je l’ai dit dans les six sessions
précédentes, aussi longtemps que le gouvernement ne prendra pas la
détermination d’établir le système binaire, c’est-à-dire de diviser le kilogramme
en quarts, en huitièmes, etc., le système des poids et mesures ne sera pas
suivi en Belgique, malgré les 600 ou 1,000 procès qu’on intente tous les ans
pour cet objet à Bruxelles, messieurs, qui est la capitale, et où les
boutiquiers sont censés être le plus éclairés, sont censés le mieux connaître
les lois, à Bruxelles, lorsqu’un acheteur se rend dans une boutique, on lui
demande encore s’il veut la vieille once ou la nouvelle.
Je vous le demande, messieurs, si le système des
poids et mesures n’est pas même suivi dans la capitale, le sera-t-il dans les
campagnes ? Non, messieurs, il n’est suivi nulle part, et il ne le sera jamais
si vous n’admettez pas un système
binaire, que Napoléon lui-même a été forcé de permettre par une ordonnance. Je
ne veux pas non plus détruire le système décimal, je demande seulement que pour
le détail, on y introduise une modification qui est très exécutable et qui ne
jetterait aucunement la perturbation dans le système métrique.
M. Gendebien. -
Convaincu, messieurs, que le budget des voies et moyens passera tel qu’il a été
présenté, j’éprouve un certain découragement à venir de nouveau vous exposer
les plaintes et les doléances que j’ai déjà fait entendre les années
précédentes ; j’aurais pris la parole dans la discussion de l’article des
contributions personnelles, mais je vous avoue que je n’en ai pas eu le
courage, persuadé que mes paroles n’auraient produit aucun effet ; je me
réserve toutefois d’en dire quelque chose lorsque nous discuterons le projet de
loi spéciale sur cette matière.
Quant au droit de patente, je crois, messieurs,
avoir établi l’année dernière que ce droit est non seulement un impôt
arbitraire, mais même absurde : faire payer les citoyens qui travaillent tandis
que vous ne faites pas payer ceux qui ne font rien, qui ne produisent rien, ni
au profit de la généralité, ni au profit de personne, c’est là, vous disais-je,
une véritable absurdité ; vous faites payer patente, disais-je, aux industriels
qui exposent leurs capitaux et qui souvent les perdent, qui travaillent
beaucoup et qui ne sont presque jamais payés en raison de leur travail ; vous
les imposez parce que vous présumez qu’ils retirent de bénéfices de leur
commerce, parce que vous supposez qu’il en résulte une fortune imposable : et
de ceux qui possèdent une fortune réelle, et, qui ne font rien d’utile à la
société, vous n’en exigez pas de patentes !
Je vous ai dit que je concevais la patente pour
autant que vous la fassiez payer par les hommes qui ne font rien, et à titre
d’indemnité envers la société, pour leur défaut d’utiliser leur capital
intellectuel, leur fonds individuel ; en un mot, que je concevais la patente
comme un impôt sur la paresse, sur l’oisiveté, sur le défaut de production.
Le négociant, l’industriel est utile à son pays,
alors même qu’il se ruine ou qu’il travaille en pure perte pour lui ; par cela
même vous le forcez à payer un impôt que vous n’exigez pas de celui qui ne fait
rien, qui ne travaille ni dans l’intérêt général, ni dans un intérêt personnel
!
Je disais encore que je concevais la patente comme
un surcroît d’impôt à établir sur des objets susceptibles d’impôt très élevé,
mais qu’il est impossible de frapper suffisamment, dans la crainte de fournir
un appât à la fraude. C’est ainsi que je vous disais : la loi sur les
distilleries a admis un impôt très faible, parce que la majorité de la chambre
était convaincue que si on élevait l’impôt il ne produirait rien ou du moins
très peu de chose, car en matière d’impôt 2 et 2 ne font pas toujours 4, et si
vous doublez un impôt de 2, loin d’avoir 4, vous courez souvent risque de ne
plus avoir même 2.
Eh bien, messieurs, ajoutai-je, s’il vous a été
impossible d’établir un impôt suffisant sur un objet aussi pernicieux pour la
morale publique que le genièvre, par exemple, établissez un droit de patente à
charge des distillateurs et à charge des détaillants ; si de cette manière vous
n’arrêtez pas les excès de boissons, au moins vous en écarterez les neuf
dixièmes de ceux qui s’y livrent maintenant, parce qu’au lieu de boire chez les
détaillants une grande quantité de boissons spiritueuses, ils s’adresseront
alors aux brasseurs pour se procurer de la bière qu’ils consommeront chez eux
avec leur famille de manière que la dépense qu’ils font maintenant, au grand
préjudice de leurs facultés physiques et morales, tournera alors au bien de
toute leur maison, une boisson saine, consommée par un certain nombre
d’individus, remplaçant alors une boisson pernicieuse consommé aujourd’hui par
le chef de la famille à lui seul dans un cabaret. Remarquez, messieurs, le
funeste entraînement occasionné par le
débit à trop bon marché des boissons spiritueuses dans les cabarets : un
malheureux ouvrier, père de famille, entre dans un cabaret dans l’intention d’y
prendre une pitance raisonnable, mais quand il se trouve à côté de la
distribution, si commode, si facile, il se laisse entraîner bien au-delà de ce
qu’il s’était proposé, parce qu’il lui suffit de demander pour recevoir.
Lorsqu’au contraire il aura pris chez le distillateur ou chez le brasseur une
certaine quantité de genièvre ou de bière, il n’en fera pas reprendre, parce
qu’il ne sera pas à côté de la distribution, parce qu’il se trouvera au milieu
de sa femme et de ses enfants qui l’en détourneront et l’empêcheront ainsi de
commettre des excès.
Vous voyez donc, messieurs, que le droit de patente
bien entendu offre un double avantage ; d’abord celui de faire produire
suffisamment des impôts qui par crainte de la fraude sont forcément restreints
à un taux inférieur à celui réclamé par la morale publique bien plus encore que
par les besoins du trésor ; ensuite celui de renfermer une haute leçon de
morale. On parle si souvent de morale dans cette enceinte, mais on ne fait rien
pour la mettre en action ; nous devrions donc bien saisir l’occasion que nous
offre le droit de patente de faire quelque chose pour elle.
Je voudrais également qu’on mît un droit de patente
sur les marchands de vin indépendamment de l’impôt qui se perçoit sur cette
boisson, car c’est là un objet de luxe qui peut supporter un impôt plus fort
que celui dont il est maintenant frappé et que vous ne pouvez pas élever d’une
manière directe dans la crainte de fournir un appât à la fraude, de ne plus
rien recevoir, et de charger ainsi l’honnête contribuable au profit des
fraudeurs.
Raisonnant toujours d’après la même idée, de
l’égalité proportionnelle de l’impôt, je disais que si vous établissiez un
droit de patente à charge des célibataires des veufs sans enfants, je le
concevrais, parce que ceux-là n’ont pas de charge ou du moins n’ont pas les
mêmes charges qui pèsent sur les pères de famille ; parce que chez les
célibataires et veufs sans enfants, il y a plus de facilité de vivre, il y a
plus de chances d’un excédant de fortune que chez les pères de famille ; parce
que de plus les premiers se livrent plus souvent à l’oisiveté que les autres,
et que de ce chef, ils doivent une indemnité à la société. Voilà, messieurs,
comme je concevrais le droit de patente.
L’honorable ministre des finances m’avait dit, il y
a sept ou huit mois, qu’il considérait comme une chose de très difficile
exécution l’établissement du droit de patente sur les célibataires, que
cependant il n’envisageait pas mon idée comme dénuée de tout fondement, ni
comme ne pouvant pas recevoir d’application, qu’il y pensait au contraire très
sérieusement. Je ne veux pas reprocher au ministre de n’avoir pas présenté dès
la présente session un projet de loi ; mais j’aurais voulu au moins qu’il nous
eût dit quelque chose de ses méditations et des recherches qu’il a faites
relativement aux bases de la contribution, et qu’il nous eût donné l’espoir de
les voir changer ; car veuillez remarquer que dans l’art. 139 de la
constitution le congrès national a fait aux ministres comme aux chambres un
devoir impérieux de la prompte révision de notre système financier. C’est là un
devoir constitutionnel, un devoir d’humanité et de morale à la fois auquel nous
ne pouvons nous soustraire.
Quel grand mal y aurait-il à établir un droit de
patente sur les célibataires et les veufs sans enfants ? On dira que ce serait
un impôt arbitraire ; mais le droit de patente, tel qu’il existe
maintenant, n’est-il pas arbitraire ? Il l’est cent fois plus que celui que je
propose. On pourrait prendre pour base de l’impôt que je demande, depuis une,
deux ou trois journées de travail, jusqu’au maximum de 150 fr, par exemple, et
il est beaucoup de célibataires qui préféreraient payer 150 fr. que de
s’attirer les charges du ménage. Etablissez une moyenne, et vous serez tout
étonnés de recevoir un impôt considérable sans frais ou au moins sans
augmentation de personnel. On pourra, j’en conviens, l’accuser d’être plus ou
moins arbitraire ; mais il le sera moins que celui des patentes, car il aura au
moins une base certaine. Le célibataire en effet a moins de charges que l’homme
marié, personne n’oserait le contester, cependant il paie moins. Il en est de
même du veuf sans enfants. Il est donc certain qu’il peut supporter un impôt
plus fort que le père de famille ; voilà un point de départ certain. Tandis que
pour l’industriel, le négociant, vous n’avez aucune base fixe, vous n’avez que
des conjectures, des bénéfices présumés pour base. (Des conversations particulières dans une partie de la chambre
interrompent l’orateur.) … J’invite ceux qui font du bruit à me répondre ;
si je suis dans l’erreur, j’espère qu’ils prendront la peine de me le démontrer
; si, au contraire, j’ai raison, les membres qui se livrent à des causeries
devraient au moins écouter les arguments que je développe pour faire prévaloir
la raison sur la routine. Et ici, je ferai remarquer qu’en général ce sont ceux
qui se donnent le moins de peine et qui jamais ne prennent la parole dans la
discussion des matières les plus ardues, qui se permettent de déranger
l’orateur consciencieux, quand il vient exprimer son opinion.
Je disais donc, messieurs, que si l’on pouvait
reprocher de l’arbitraire à la base de l’impôt sur les célibataires et les
veufs sans enfants, il y en avait bien plus dans l’impôt des patentes. J’ai
démontré en même temps que cette base était au moins fixe, incontestable en un
point, et que, sous ce rapport, elle présentait moins d’arbitraire que pour les
patentes où il n’y a pas de base fixe ni même de point de départ.
Ainsi donc, dés l’instant que vous admettez l’impôt
de patente, vous n’êtes plus recevables à repousser ma proposition comme fondée
sur l’arbitraire, parce qu’il y en a bien moins dans la patente contre le
célibat. Je puis dire contre le célibat, car toutes nos lois de finances
tendent à favoriser le célibat.
Et, à cette occasion, permettez-moi de vous
rappeler ce que disait aux états généraux l’honorable M. Trentesaux, au sujet
de l’impôt personnel.
Après un discours chaleureux, plein de logique, et
d’arguments auxquels on n’a pas plus répondu qu’on ne répondra probablement
aujourd’hui aux miens, l’honorable membre ajoutait :
« En un mot, messieurs, votre loi est une
invitation au célibat ; par conséquent c’est la loi la plus immorale qu’on
puisse faire dans une société bien constituée. »
Eh bien, si vous avez des
lois qui portent avec elles ce caractère d’immoralité et que vous ne puissiez
les abolir entièrement, faites-en au moins une qui rétablisse l’équilibre, et
si d’un côté vous imposez le père de famille sur qui déjà pèse des charges
accablantes, de l’autre assimilez au moins le célibataire à ce père de famille,
pour les charges envers l’Etat.
Messieurs, je sais bien que toute innovation doit
nécessairement rencontrer sinon beaucoup d’opposition au moins beaucoup
d’inertie. Il est si commode de se laisser toujours entraîner avec le courant.
C’est une chose si facile que l’habitude ; c’est si aisé de dire oui, et de
n’avoir à s’occuper d’autre chose à la fin de la discussion d’un budget de
voies et moyens que de dire oui à l’appel nominal.
Je n’espère donc pas faire adopter mes idées
maintenant, pas plus que je n’ai réussi précédemment.
Mais je crois m’être acquitté de mes devoirs en
vous mettant en demeure d’y réfléchir, en protestant contre notre absurde
système d’impôt, système qui a été l’objet de tant de réclamations, je puis
dire de tant de clameurs avant la révolution : système qu’on paraît vouloir
maintenir intact, alors que le congrès a fait un devoir impérieux aux chambrés
et au gouvernement d’y apporter des modifications dans un bref délai. Prenez-y
bien garde, messieurs, refuser à entendre en temps calme, c’est s’exposer à de
fâcheux événements, quand le peuple est fatigué d’attendre.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart).
Messieurs, d’après l’honorable M. Gendebien, l’impôt de patente est un
impôt absurde, qui ne repose sur aucune base, qui n’est motivé par rien.
D’abord je ferai remarquer que cet impôt qualifié
d’absurde existe dans presque tous les autres pays, et sous ce rapport, nous
partageons en bonne société l’absurdité que l’on a attribue à cette partie de
notre régime financier.
Je dirai ensuite qu’il ne me paraît pas difficile
de démontrer les justes motifs qui militent en faveur du maintien de l’impôt
dont il s’agit.
Et en effet, messieurs, les frais considérables que
la nation s’impose pour entretenir une armée douanière, les frais qui retombent
à charge du consommateur, du chef des droits qui frappent les marchandises
étrangères, au profit de qui ces dépenses sont-elles établies ? au profit, de l’industrie et du commerce, et par conséquent
au profit des patentables.
Cette seule considération vous fait voir,
messieurs, que l’impôt sur les patentes n’est pas absurde et sans motifs, comme
on l’a prétendu ; mais qu’il repose au contraire sur une base très équitable.
Ensuite, messieurs, si nous réfléchissons combien
L’honorable M. Gendebien se montre disposé à voter
un impôt élevé, bien moral sans doute, mais qui n’en est pas mieux fondé pour
cela : une patente extraordinaire prélevée sur les débitants de genièvre.
Messieurs, ce moyen est excellent en théorie ; mais je doute qu’en pratique il
puisse coïncider avec les institutions libérales de
Je dis donc, messieurs, que le projet d’imposer
d’une haute patente, qui ne pourrait avoir d’autre base que la consommation,
est excellent en théorie, mais qu’il serait détestable en pratique. J’entends
dire près de moi qu’il ne faut pas pour la mise à exécution du moyen que je
combats, c’est-à-dire que la patente ne serait pas basée sur la consommation.
Ainsi, donc, on imposerait arbitrairement ceux qui
vendent le genièvre ; on établirait un maximum, un minimum, ou un droit
uniforme pour ces débitants. Mais pense-t-on, dans cette hypothèse, que l’on
percevrait beaucoup de la sorte ? Non, certes, on ne recouvrirait presque rien,
car évidemment les vendeurs emploieraient d’autres moyens, pour placer le
genièvre, que le débit ordinaire, et il leur serait très facile d’éluder tous
les droits.
Messieurs, l’honorable M. Gendebien, à l’occasion
du budget de l’année dernière, a déjà mis en avant l’idée d’une nouvelle base
d’impôt, celle qui pèserait sur le célibat. Vraiment, messieurs, au premier
bord, cette idée m’a souri, lorsque l’honorable membre en a parlé pour la
première fois dans cette enceinte ; je croyais qu’il serait convenablement
possible d’atteindre cette classe de citoyens, qui, en réalité, ne doivent pas
pourvoir à d’aussi grands besoins que les chefs de famille.
Mais, messieurs, je n’ai pas tardé, en examinant la
chose de plus près, à me convaincre qu’un impôt sur le célibat serait à peu
près impraticable, à peu près nul dans les résultats : impraticable, parce
qu’il serait inadmissible d’imposer un droit uniforme sur les célibataires, car
il y aurait injustice à faire subir à l’ouvrier la même charge qu’au riche. Il
faudrait donc prendre pour base la fortune des individus ; où trouveriez-vous
cette base ? où pourriez-vous la rencontrer d’une
manière certaine ? La plupart des célibataires ne possèdent rien en nom privé.
L’enfant de famille n’a rien dont il puisse disposer ; les propriétés
appartiennent à ses parents. Ainsi déjà vous auriez une partie nombreuse de la
classe des célibataires qui ne paieraient rien.
N’est-il pas évident dès
lors que la base que l’on prendrait sur la fortune des individus ne pourrait
être appliquée que dans des cas fort rares ? Voyons d’ailleurs ces cas. Quand
un célibataire n’est plus dans le sein de sa famille ; quand il jouit de sa
fortune, il est obligé de se loger ; s’il a les moyens de tenir des domestiques
et des chevaux, l’impôt personnel l’atteint de ces chefs comme les autres
citoyens. Ainsi, vous le frapperiez d’un double impôt ; vous commettriez par
conséquent une injustice.
On vous a dit que l’habitude était une chose
facile. Je répondrai à ce reproche d’inertie que l’habitude, en matière
d’impôts, est une chose précieuse. Apportons, comme nous l’avons fait
jusqu’ici, des modifications partielles, successives à notre système actuel et
par là nous éviterons les secousses qui gâteraient l’esprit public ; car les
changements fondamentaux en matière de contributions ne manquent jamais
d’amener des perturbations, des récriminations et de la mauvaise humeur chez
les contribuables.
Gardons-nous donc de changer brusquement nos
habitudes financières ; procédons, je le répète, avec prudence et partiellement
aux modifications reconnues utiles et urgentes dans nos lois.
Depuis trois ans des changements successifs y ont
été introduits de la sorte et nous avons lieu de nous en applaudir. En ce
moment encore la chambre est saisie de nouveaux projets importants concernant
les distilleries, le sel, les douanes et la contribution sur les chevaux ;
l’inertie qu’on nous a reprochée n’est donc ni aussi réelle ni surtout aussi
pernicieuse qu’on l’a avancé.
M. Mast de Vries.-
Véritablement on veut nier l’évidence. Il y a ici deux choses à examiner : la
première si l’impôt des patentes tel qu’il est établi est juste, et la seconde
si on lui fait subir ou non une augmentation de 6 à 7 p. c. Pour se convaincre
qu’il y a augmentation de 5 à 6 p. c., il suffit
d’ouvrir le budget. On trouve au budget des voies et moyens de cette année pour
les patentes le chiffre de 2,728,000 fr., tandis que l’année dernière il n’était
que de 2,570,000 fr. ; mais à cette somme il faut joindre le montant de ce
qu’on payait pour droit de poinçonnage. Or, le produit de ce droit figurait au
dernier budget pour 120,000 fr. Ces 120,000 fr. joints au chiffre de 2,570,000 fr. ne donnent que 2,690,000 fr. Or on demande
2,728,000, c’est donc bien 30 mille fr. qu’on veut faire payer cette année en
plus aux patentables, indépendamment du produit du droit de poinçonnage qu’on
leur fait payer.
M. le ministre des finances
vous a dit que l’augmentation du droit de patente se ferait sentir davantage
dans les classes qui doivent payer davantage, parce qu’elles font des affaires
plus importantes. Je lui répondrai d’abord qu’il faut que tout le monde paie,
ensuite que beaucoup de patentables qui ne font pas de grandes affaires, tels
que les cordonniers, les maréchaux, etc., qui doivent donner du pain à leurs
enfants avec le produit de leurs bras, verront augmenter leur patente de 6 à 7
p. c. par suite du changement de perception du droit de poinçonnage, quoiqu’ils
ne fassent pas usage de poids.
J’ai dit que les employés du fisc appliquaient la
loi sur les patentes de telle manière, et que cette loi était tellement
élastique qu’il n’était pas de patentable qui ne pût voir sa patente augmentée.
Un maréchal de village, par exemple, ne peut pas vivre en se bornant à ferrer
des chevaux ; il raccommode au besoin les voitures, les charrues ; eh bien, dès
que cela lui arrive, on lui fait payer une patente de charron. Qu’il soumette
la question à la députation des états, on lui demande s’il est vrai, oui on
non, qu’il raccommode des charrues ; si le fait est constant, il faut qu’il
paie.
Je bornerai là mes observations. Il me paraît que
puisqu’on n’a pas besoin d’augmenter les impôts en général, il serait injuste
d’augmenter celui des patentes.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Toute l’argumentation de l’honorable
préopinant serait fondée sur la différence de 38 mille fr. que présenterait
l’augmentation proposée aux patentes avec le produit du poinçonnage lequel
serait de 120,000 francs. Si M. Mast de Vries veut compulser la situation du
trésor que j’ai déposée sur le bureau de la chambre au commencement de la
session, il verra que le produit du poinçonnage en 1836 s’élèvera à 150 mille
fr., attendu que pour les 8 premiers mois de cette année il s’est élevé à
environ 120,000 fr. Par conséquent l’augmentation dont parle l’honorable
préopinant n’existe pas. Il n’y a qu’une simple transposition de chiffres.
En définitive, ne nous dissimulons pas que l’impôt
des patentes est payé par le consommateur et que c’est
lui qui dans la livrance qu’on lui fait de la
marchandise paie par un déguisement le droit de patente. Ne perdons pas de vue
ensuite que les patentables ne sont imposés qu’à un faible droit dont la
moyenne individuelle en Belgique reste au-dessous de 10 francs. Ne nous
récrions donc pas contre un impôt dont la perception est modérée et facile et
qui en réalité n’excite aucune plainte. Car les difficultés dont on parle
n’existent pas en réalité. Ma position me met à même de reconnaître toutes les
plaintes que peut faire naître la perception des impôts ; et celles en
particulier, qui résulterait de l’impôt des patentes sont si rares qu’on peut
les considérer comme nulles.
Je dois répondre maintenant
à une observation présentée par l’honorable M. Gendebien, et qui m’avait
échappée tantôt. Nous supportons encore, a-t-il dit, les impôts qui existaient
sous le gouvernement précédent et contre lesquels on s’est tant récrié. J’ai
déjà eu l’honneur de rappeler que des modifications importantes ont été
apportées à notre système d’impôt.
Il est une autre considération qui mérite votre
attention : c’est que la perception des impôts se fait aujourd’hui d’une
manière toute différente d’autrefois ; elle n’est nullement fiscale, les
employés des finances poursuivent la rentrée des impôts avec toute la
modération et la douceur possible ; on ne pourrait même la pousser plus loin
sans compromettre toutes les ressources de l’Etat. Et nous avons besoin de ces
ressources.
Heureusement les employés du gouvernement qui
comprennent cette nécessité, remplissent consciencieusement et courageusement
leur devoir ; il leur serait sans doute plus facile et plus commode de laisser
chacun payer ce qu’il voudrait quand il voudrait et comme il voudrait. Mais je
le répète, les agents chargés de la perception des impôts savent allier, dans
l’exercice de leurs fonctions, la fermeté, aux ménagements envers les
contribuables, qui sont compatibles avec l’accomplissement de leurs devoirs.
M. Verdussen. -
Il n’est personne qui ne convienne que l’assiette de l’impôt des patentes ne
soit vicieuse. S’il en est ainsi, il découle cette vérité qu’il ne faut pas
aggraver cet état de choses, sous peine de voir surgir de justes et nombreux
murmures.
M. le ministre des finances nous dit qu’en
définitive les revenus de l’Etat ne seront pas augmentés, qu’il retranche le
droit de poinçonnage pour l’ajouter aux patentes. Mais il se place à côté de la
question. Il ne s’agit pas de savoir si le revenu de l’Etat sera augmenté, mais
si la position des patentables ne sera pas aggravée ; et effectivement il en
sera ainsi.
M. Mast de Vries vous l’a
dit ; il y a une multitude de personnes qui, aujourd’hui, paient le droit de poinçonnage
et ne paient pas de patente, tandis que d’autres qui paient patente ne paient
pas de droit de poinçonnage. Dès lors ces derniers vont être frappés d’un impôt
beaucoup plus fort et dont l’assiette est reconnue vicieuse, qui vexe presque
tout le monde. Pour obvier aux inconvénients de cette augmentation, on devrait,
dût-on abandonner le produit du poinçonnage, ne pas augmenter les patentes. Je
crois qu’à cet effet on pourrait laisser subsister le principal de l’impôt tel
que le propose le ministre, mais réduire les centimes additionnels.
On a dit que le poinçonnage produisait à l’Etat
environ 120 mille fr. Si on réduisait les centimes additionnels de 5. p. c.,
comme les 10 p. c. produisent 249 mille fr., la réduction de 5 p. c.
équivaudrait à 124 mille fr., ce qui balancerait le produit du poinçonnage
auquel on renoncerait.
Je me bornerai donc à demander une réduction de 5
p. c. sur les centimes additionnels.
J’ai un dernier mot à
ajouter. Le ministre des finances a dit qu’il pensait que les désagréments des
procès-verbaux devaient entrer pour quelque chose dans les considérations
d’après lesquelles la chambre se déterminerait. Je lui répondrai qu’aussi
longtemps que le poinçonnage existera, il y aura des procès-verbaux, et que la
suppression du droit, loin de les faire diminuer, devra avoir pour conséquence
de les faire augmenter, parce que le plus souvent ces procès-verbaux sont le
résultat de l’oubli, et que le marchand qui n’aura rien à payer oubliera plus
facilement qu’il doit faire poinçonner ses poids, que s’il s’agissait pour lui
d’acquitter un impôt.
M.
le ministre des finances (M. d'Huart). - Je demanderai une explication
à l’honorable préopinant. Il me semble résulter de ce qu’il vient de dire qu’il
demande le maintien du droit de poinçonnage, à moins toutefois qu’il ne veuille
abandonner le système métrique, ce qui, j’en suis sûr, est contre son
intention. Il faut, en effet, selon M. Verdussen maintenir un moyen pécuniaire
de rappeler à ceux qui font usage de poids et mesures qu’ils doivent les
présenter périodiquement au poinçonnage. Si c’est ainsi que l’entend
l’honorable préopinant, c’est-à-dire s’il veut conserver le droit de
poinçonnage, je n’aurai plus à combattre une réduction, mais simplement la
disposition qu’il désire conserver dans la nomenclature du budget des voies et
moyens.
M. Verdussen. -
J’ai déjà dit que je voulais diviser la question et que dût-on abandonner le produit
du poinçonnage qu’on évalue à 120 mille fr., ce qui ne serait pas un grand mal,
sur un budget de 89 millions, il ne fallait pas augmenter l’impôt des patentes.
Ce sera une question à examiner.
Pour le moment je persiste à croire que les
procès-verbaux seront aussi nombreux lorsque le droit le poinçonnage sera
supprimé, parce que le poinçonnage ne sera pas aboli.
Il ne peut pas l’être, il doit être maintenu.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Je pense qu’on ne peut en aucune manière diviser ces questions ; car si on
veut réduire le chiffre de l’impôt des patentes, il faudra maintenir le droit
des poids et mesures dont on n’a consenti l’abolition qu’à la condition qu’on
augmenterait d’autant le droit sur les patentes.
L’honorable préopinant s’est appesanti sur la
charge que la proposition du gouvernement tend à imposer aux patentables. Mais
je ferai remarquer qu’il s’agit de les ramener à l’égalité proportionnelle
existant pour tous les autres contribuables. Si, à l’époque de la révolution,
en raison de l’état de stagnation du commerce, on crut devoir adopter une
réduction sur le droit des patentes, cette réduction n’était que temporaire ;
elle était motivée sur des circonstances impérieuses. Mais, je le demande,
peut-on alléguer aujourd’hui de semblables circonstances en faveur des
patentables ? Y a-t-il une époque où il y ait eu plus de prospérité et
d’aisance pour les industriels et les commerçants de toutes les classes presque
sans exception ? Si l’on ne peut maintenant rétablir les droits à leur taux
primitif, dans quelle circonstance pourra-t-on jamais le faire ? Je pense donc
qu’il faut adopter la proposition du gouvernement.
On semble perdre de vue que récemment l’on a voté
une augmentation de dépenses considérable, en mettant les traitements des
ministres des cultes (les vicaires et les chapelains) à la charge du trésor. Ce
n’est pas lorsqu’on vient de voter de nouvelles charges qu’il faut chercher à
introduire dans le budget des réductions d’impôt. Il faudrait plutôt aviser à
augmenter les ressources du trésor que chercher à les diminuer.
M. Gendebien. -
M. le ministre des finances a cru répondre à l’observation que j’avais eu
l’honneur de vous faire, il s’est grandement trompé ; vous allez en juger.
J’avais dit que l’impôt des patentes était absurde,
surtout de la manière dont il est établir en Belgique. Il a répondu que si cet
impôt est absurde, nous ne sommes pas les seuls à être absurdes, car partout le
droit de patentes existe. Il faut avouer que ce n’est pas là répondre. Car, il
y a plus d’une absurdité ancienne et acceptée partout. Si c’était une loi pont
nous de nous en tenir en Belgique à ce que font les autres gouvernements, il
résulterait de là que nous serions condamnables et damnables pour avoir méconnu
le grand principe que les souverains sont propriétaires des peuples, le grand
principe de la légitimité devant lequel se prosternent encore la plupart des
peuples de l’Europe. Cependant, c’est la une incontestable absurdité. Mais
c’est aussi la plus respectable de toutes les absurdités ; car je n’en connais
pas de plus générale ni de plus ancienne. (On
rit.)
Ainsi, une conséquence des principes du ministre
des finances serait que nous ne devions pas chasser le roi Guillaume ; que par
respect pour la légitimité, nous ne devions pas faire la révolution.
Je ne me permettrai pas de prononcer le mot
d’absurdité, mais vous voyez que vos arguments vont trop loin. Ils prouvent
trop et par suite ne prouvent rien. Ce n’est pas par des généralités qu’on
répond à des arguments déterminés sur une matière spéciale. On me permettra
d’attendre d’autres raisonnements avant de renoncer à mes observations.
On a dit (et cet argument est aussi fort que le
premier) : « Les douanes sont établies au profit de qui ? » C’est le ministre
qui s’adresse à lui-même cette question, et il répond : « Elles sont
établies au profit de l’industrie et du commerce. Donc, ajoute le ministre,
l’industrie et le commerce doivent supporter le droit de patentes. » Je ne
dirai pas encore que c’est là une absurdité ; mais je dirai à mon tour : les
droits de douanes sont établis … au profit de qui ? Des producteurs. Or, les
producteurs supportent-ils seuls la contribution des patentes ? Non. Cependant
les droits de patente ne profitent qu’aux producteurs. Personne n’oserait nier
cette assertion. Eh bien, pourquoi ne faites-vous pas payer les patentes à tous
les producteurs ? Le propriétaire d’un champ, le cultivateur, celui qui possède
des bois, ne paient pas de patentes.
D’un autre côté, il y a une infinité de classes de
patentables qui n’ont rien de commun avec la douane et pour lesquels la douane
est plus nuisible qu’utile, les détaillants, par exemple. Qu’importent les
droits de douanes à celui qui vend en détail du sucre et du café, du sel, du
drap, tout ce qui se vend ; en un mot tous les débitants enfin, quel intérêt
ont-ils à la douane, ne les gêne-t-elle pas, ne restreint-elle pas leur
industrie au lieu de la protéger. En un mot il faut reconnaître que les droits
de douanes ne profitent qu’à ceux qui produisent ; or ceux-là sont à ceux qui
paient la patente comme un est à cent. Ainsi vous voyez que votre argument ne
prouve rien et qu’il renforce au contraire ce que j’ai essayé de démontrer.
Ou vous a dit que les patentes dont j’ai parlé pour
les distillateurs, les brasseurs, les débitants de genièvre, les marchands de
vins, pourraient entraîner à l’exercice, et on a tiré de là la conséquence que
je voulais le rétablissement des droits réunis : à Dieu ne plaise ! Mais s’il
est un système qui rende nécessaire l’exercice, c’est assurément celui qui
existe maintenant pour les distilleries et les brasseries ; car là il faut une
vérification de tous les jours, de tous les instants, tandis que pour la patente,
il suffit de constater qu’on a débité des boissons, pour être soumis à la
patente. Il résultera de là, à la vérité, qu’il y aura moins de débits de
genièvre, cela est possible. On débitera, dit-on, le genièvre clandestinement,
soit : il y aura fraude à la loi quelquefois, souvent même, soit encore ; eh
bien, n’est-ce pas ce qui arrive pour tous les impôts ! Mais cette gêne
procurera au moins un résultat moral. Dès qu’on ne pourra débiter de genièvre
ostensiblement dans un cabaret sans payer patente, on en débitera moins. Il y
aura donc moins d’ivrognerie et d’immoralité, et par cette mesure vous
arriverez donc à un but moral tout au moins, ce qui n’est pas à dédaigner, vous
aurez une nouvelle ressource pour le trésor, ce qu’il n’est pas d’usage de repousser.
Mais serait-il bien difficile d’établir un
renforcement de droit, par la patente, à l’égard des distillateurs et des
débitants de genièvre ? Serait-il si difficile de constater ceux qui ne se
soumettraient pas à la patente à raison de leur débit. Je ne le pense pas. La
difficulté est d’établir la hauteur du droit à raison de la fabrication ; mais
la difficulté, à raison de la fixation de la patente, est moindre que sur le
premier point.
On vous a dit, venant aux célibataires, que ce
serait un impôt arbitraire ; mais j’ai répondu d’avance à cette observation.
J’ai dit que tous les impôts de cotisation étaient
arbitraires plus ou moins. J’ai démontré que l’impôt que je propose est moins
arbitraire que celui des patentes, car ce dernier impôt n’a aucune base
quelconque, tandis que celui sur les célibataires en aurait au moins une ; car
il est un point incontestable, c’est que le célibataire a bien moins de charges
que le père de famille. Dès lors il y a une base certaine d’augmentation ou au
moins de différence d’impôt entre les célibataires et les pères de famille.
Les célibataires paient, dit-on, l’impôt pour le
logement qu’ils occupent, pour leurs chevaux, pour leurs domestiques. Ils ne
font là ce que font tous les pères de famille. Mats si tel célibataire qui a
10,000 fr. de revenus peut payer l’impôt comme tout le monde, pourquoi
faites-vous peser la même contribution sur le père de famille, sur celui qui
ayant une femme et 4 enfants, terme moyen, a ainsi six personnes aux besoins
desquels il doit pourvoir. Le célibataire n’a à songer qu’à lui seul. L’homme
marié doit pourvoir à 5 personnes de plus. Cependant vous faites peser sur l’un
et l’autre un impôt égal dans sa base et quintuple dans ses résultats. Il en
est de même pour tous les impôts de consommation ; le père de famille les
supporte pour six personnes, tandis que le célibataire ne les supporte que pour
lui seul. Ainsi l’homme marié paie six fois ce que paie le célibataire, alors
qu’il devrait, en raison des charges qui diminuent ses ressources, payer cinq
fois moins. Est-ce cela de la justice ? est-ce cela de
l’égalité proportionnelle ? Qu’on veuille bien me répondre.
M. le ministre des finances s’est imaginé, je ne
sais dans quel but, que j’avais voulu lui adresser à lui personnellement un reproche
d’inertie…
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Non, vous avez parlé en général.
M.
Gendebien. - C’est différent. Vous avez raison pour cette fois au moins
; j’ai parlé en général de tous ceux qui sont appelés à voter ou à proposer des
lois de finances ; mes reproches ou plutôt mes observations s’adressent aux
chambres comme au ministère.
Il vous a dit : « L’inertie est souvent de la
prudence... On ne doit toucher aux impôts qu’avec une grande circonspection… Il
faut éviter les reproches de la part des contribuables. » Cela est très
juste, mais c’est pour éviter de tels reproches que j’ai fait ma proposition,
car, je le répète, c’est un devoir pour nous de réaliser les promesses faites par
la constitution depuis six ans. Et à coup sûr, si vous diminuez l’impôt des
patentes en raison de l’extension que vous donnerez à la matière imposable en
étendant le droit de patente à ceux qui ne font rien et aux célibataires et aux
veufs sans enfants, vous ferez une chose utile au commerce et au pays. Si
quelques célibataires étaient assez égoïstes pour se plaindre, vous auriez la
plus grande partie des patentables qui béniraient le gouvernement, et il y
aurait là ample compensation.
Messieurs, je n’en dirai pas davantage pour le
moment ; je sais bien qu’il est inutile d’insister actuellement sur ces
principes ; mais, je le répète, j’ai rempli mon devoir en protestant de nouveau
contre le système que l’on suit ; et j’espère que chacun de nous faisant son
devoir, méditera sur les moyens d’améliorer cette branche de notre
administration et qu’usant du droit d’initiative il sera proposé des projets
pour une meilleure assiette de l’impôt.
M. Mast de Vries.
- Comme l’a fait observer l’honorable M. Verdussen, il me semble que les
120,000 fr. ne font pas un grand effet sur un budget de 86 millions ; mais le
trésor ne se trouverait pas en déficit de cette somme, car d’après des mesures
prises dans un pays limitrophe, nous aurons le moyen d’en récupérer le double
ou le triple.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Je vois que les membres quittent leurs bancs ;
je répondrai demain.
- La séance est levée à cinq heures.